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05/07/2023 | FRANCE | N°21-25747

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juillet 2023, 21-25747


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HP

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 juillet 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 789 F-D

Pourvoi n° V 21-25.747

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 JUILLET 2023

M. [E] [M], domicilié [Adresse 1],

a formé le pourvoi n° V 21-25.747 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opp...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HP

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 juillet 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 789 F-D

Pourvoi n° V 21-25.747

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 JUILLET 2023

M. [E] [M], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 21-25.747 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Genessence, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. [M], de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la société Genessence, après débats en l'audience publique du 7 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 octobre 2021), M. [M] a été engagé en 1975 sans contrat écrit par la société Genessence. Un contrat de travail a été formalisé le 3 janvier 1994 et le salarié occupait, depuis le mois de mars 2011, les fonctions de directeur des ventes.

2. Après avoir fait valoir ses droits à la retraite le 31 juillet 2016, le salarié a saisi, le 27 avril 2017, la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce que la convention de forfait en jours lui soit déclarée inopposable et l'employeur condamné à lui verser diverses sommes.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que la cour d'appel a constaté que le salarié versait aux débats un décompte du nombre d'heures effectuées jour par jour pour le compte de son employeur de février 2013 à mai 2016 ainsi qu'un décompte des heures supplémentaires effectuées semaine après semaine ; qu'en considérant qu'eu égard aux anomalies, incohérences et erreurs affectant ces pièces, le salarié ne présentait pas, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées pour permettre à l'employeur d'y répondre en produisant ses propres éléments, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

4. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

5. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

6. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

7. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l'arrêt retient, d'une part, que si le salarié verse aux débats un décompte du nombre d'heures effectuées jour par jour pour le compte de son employeur de février 2013 à mai 2016 ainsi que ses états de frais, il n'apporte toutefois aucun élément de nature à expliquer le mode de calcul effectué.

8. Il relève, d'autre part, que la pièce produite par le salarié, censé indiquer les heures supplémentaires effectuées semaine par semaine ainsi que leur rémunération subséquente, présente de nombreuses anomalies et que sa présentation sans indication de lecture des tableaux qu'elle contient en rend la compréhension malaisée.

9. L'arrêt conclut qu'en l'état de ces pièces imprécises et incohérentes, contenant pour partie des éléments erronés, que le salarié ne présente pas à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, privant ainsi son employeur de toute possibilité d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Il ajoute qu'ainsi il n'y a pas lieu de statuer sur la demande au titre du travail dissimulé.

10. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt qui déboutent le salarié de ses demandes en paiement des congés payés afférents aux heures supplémentaires, et tendant à ordonner la remise d'un bulletin de paye rectificatif et qui condamnent le salarié aux dépens et au paiement d'une certaine somme en application de l'article 700 du code susvisé, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [M] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, outre congés payés afférents, de remise d'un bulletin de paye rectificatif et en paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé, ainsi qu'en ce qu'il le condamne aux dépens et au paiement de la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Genessence aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Genessence et la condamne à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-25747
Date de la décision : 05/07/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2023, pourvoi n°21-25747


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SARL Cabinet François Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.25747
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