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05/07/2023 | FRANCE | N°21-16809

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juillet 2023, 21-16809


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 juillet 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 787 F-D

Pourvoi n° E 21-16.809

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 JUILLET 2023

M. [U] [O], domicilié [Adresse 3

] (Pays-Bas), a formé le pourvoi n° E 21-16.809 contre l'arrêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 juillet 2023

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 787 F-D

Pourvoi n° E 21-16.809

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 JUILLET 2023

M. [U] [O], domicilié [Adresse 3] (Pays-Bas), a formé le pourvoi n° E 21-16.809 contre l'arrêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [N] [E], domicilié [Adresse 2], pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Tramaco international transport routier,

2°/ à l'Unédic, délégation AGS CGEA de [Localité 4], dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [O], après débats en l'audience publique du 7 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 mars 2021), M. [O] a été engagé en qualité de chauffeur routier super poids-lourds par la société Tramaco international transport routier, en remplacement d'un salarié absent, par contrat de travail à durée déterminée soumis à la convention collective nationale des transports routiers et auxiliaires de transport du 21 décembre 1950, pour la période du 14 juin 2016 au 30 novembre 2016.

2. Il a saisi le 5 mai 2017 la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement par l'employeur de sommes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat.

3. La liquidation judiciaire de la société Tramaco international transport routier a été prononcée par décision du 12 novembre 2018, avec désignation de M. [E] en qualité de liquidateur, lequel a été appelé en la cause, de même que l'Unédic, délégation AGS CGEA de [Localité 4].

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié reproche à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'heures supplémentaires non rémunérées et d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, alors « qu'il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en énonçant que M. [O] se limitait à produire, au soutien de ses affirmations relatives à l'accomplissement d'heures supplémentaires de travail qui ne lui auraient pas été rémunérées, un rapport d'examen établi à sa demande par M. [G], expert judiciaire, récapitulant, pour chaque mois, à partir des données extraites de la carte de conducteur de l'intéressé, le nombre d'heures ''conduite - travail - dispo'', d'une part, et les heures de travail ''normales'' et majorées ainsi accomplies, d'autre part, pour les périodes du 8 juin au 31 août et du 1er septembre au 20 novembre 2016, pour en déduire que les éléments ainsi produits, qui ne détaillaient ni les jours ni les horaires prétendument travaillés, ne pouvaient constituer des éléments suffisamment précis, au sens des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail, pour permettre à l'employeur d'y répondre en justifiant des heures de travail réellement accomplies par son salarié au cours des périodes considérées, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations, d'une part, que le salarié avait présenté à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétendait avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre, et d'autre part, que celui-ci n'avait fourni aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé les articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

6. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition des membres compétents de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

7. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

8. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

9. Pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt énonce qu'au soutien de ses affirmations relatives à l'accomplissement d'heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été rémunérées, le salarié ne produit qu'un rapport d'examen établi à sa demande par M. [G] récapitulant, pour chaque mois, à partir des données extraites de sa carte de conducteur, le nombre d'heures « conduite- travail - dispo » et les heures de travail « normales » et majorées ainsi accomplies, pour les périodes du 8 juin au 31 août et du 1er septembre au 20 novembre 2016, et retient que les éléments ainsi produits, qui ne détaillent ni les jours ni les horaires prétendument travaillés, ne peuvent constituer des éléments suffisamment précis, au sens des dispositions précitées, pour permettre à l'employeur d'y répondre en justifiant des heures de travail réellement accomplies par son salarié au cours des périodes considérées.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt déboutant le salarié de ses demande en paiement des congés payés afférents aux heures supplémentaires impayées et de dommages-intérêts pour résistance abusive, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [O] de ses demandes d'inscription au passif de la société Tramaco international transport routier de ses créances au titre des heures supplémentaires lui restant dues, des congés payés afférents, de l'indemnité pour travail dissimulé et des dommages-intérêts pour résistance abusive de l'employeur, l'arrêt rendu le 18 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne M. [E], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Tramaco international transport routier, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [E], ès qualités, à payer à M. [O] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-16809
Date de la décision : 05/07/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 18 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2023, pourvoi n°21-16809


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.16809
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