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23/05/2023 | FRANCE | N°22-86233

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 mai 2023, 22-86233


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° M 22-86.233 F-D

N° 00600

RB5
23 MAI 2023

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 23 MAI 2023

M. [L] [C] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 19 octobre 2022, qui, dans l'information suivie

contre lui des chefs d'importation de stupéfiants, infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° M 22-86.233 F-D

N° 00600

RB5
23 MAI 2023

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 23 MAI 2023

M. [L] [C] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 19 octobre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'importation de stupéfiants, infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance du 21 décembre 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [L] [C], et les conclusions de M. Courtial, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 12 avril 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Mis en examen des chefs susvisés le 8 octobre 2021, M. [L] [C] a présenté le 7 avril 2022 une requête en nullité d'actes et de pièces de la procédure.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen de nullité tiré de l'irrégularité des deux opérations de géolocalisation mises en place en urgence sur les véhicules Renault Captur immatriculé [Immatriculation 1] et Seat Ibiza immatriculé 3419 JSH, alors « que le procureur de la République, qui a été avisé de l'installation en urgence d'un dispositif de géolocalisation par les enquêteurs, dispose d'un délai de vingt-quatre heures pour prescrire, le cas échéant, la poursuite des opérations, par une décision écrite, qui comporte l'énoncé des circonstances de fait établissant l'existence d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens ; qu'en se bornant, pour rejeter le moyen de nullité tiré de l'irrégularité de la géolocalisation des véhicules RENAULT CAPTUR immatriculé [Immatriculation 1] et SEAT IBIZA immatriculé 3419 JSH, à déduire des circonstances de fait de l'espèce que « la géolocalisation [?] était nécessaire [?] et proportionnée aux enjeux pénaux du dossier », pour conclure à l'existence d'un « risque imminent de dépérissement des preuves justifiant le recours à cette géolocalisation en urgence » (arrêt, p. 14), lorsqu'elle n'avait pourtant pas le pouvoir de pallier l'absence de motivation de l'autorisation écrite du magistrat instructeur qui ne comportait pas l'énoncé des circonstances de fait établissant l'existence d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, lequel n'était pas même mentionné dans l'autorisation - au demeurant intitulé autorisation de « mise en oeuvre d'un dispositif de géolocalisation en temps réel », établissant un peu plus l'absence totale de justification du recours à la procédure d'urgence -, pas plus que dans le procès-verbal d'investigation au visa duquel l'autorisation a été délivrée, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 230-33 et 230-35 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 230-35, alinéas premier et dernier, du code de procédure pénale :

4. Selon ce texte, l'officier de police judiciaire agissant en enquête préliminaire qui, en cas d'urgence, procède à l'installation d'un moyen technique destiné à la localisation en temps réel d'une personne, d'un véhicule ou de tout autre objet, doit en informer immédiatement le procureur de la République qui dispose alors d'un délai de vingt-quatre heures pour prescrire, le cas échéant, la poursuite des opérations, par une décision écrite qui comporte l'énoncé des circonstances de fait établissant l'existence d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens.

5. Pour rejeter le moyen de nullité de la géolocalisation en urgence de deux véhicules pris de la motivation insuffisante, par le procureur de la République, du risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, l'arrêt attaqué commence par énoncer qu'il n'importe que la décision s'intitule improprement « Mise en oeuvre d'un dispositif de géolocalisation en temps réel ».

6. Les juges constatent ensuite que les motifs de cette décision ne visent pas expressément la pose préalable par les services enquêteurs d'un dispositif de géolocalisation sur les deux véhicules en cause, ni le risque de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, mais qu'ils se réfèrent cependant aux surveillances physiques réalisées ce même jour concernant ces véhicules.

7. Ils retiennent encore que les divers procès-verbaux relatant la pose des deux dispositifs, l'avis immédiat donné par l'enquêtrice à son supérieur, les comptes rendus subséquents de ce dernier au procureur de la République et le procès-verbal récapitulatif des opérations de surveillances de la journée impliquent nécessairement que ce magistrat a été informé des modalités et du contexte des actes critiqués et a donné, en connaissance de cause, un assentiment verbal à la pose en urgence des deux dispositifs.

8. Ils ajoutent que l'autorisation écrite délivrée par le procureur de la République le lendemain vise expressément ce dernier procès-verbal détaillé, même si elle mentionne qu'il porte la date du 25 septembre 2021 alors qu'il est en réalité daté de la veille.

9. Ils concluent de l'ensemble de ces éléments que l'opération de pose des dispositifs a bien été effectuée dans l'urgence, alors que l'équipe de malfaiteurs surveillée, mobile, précautionneuse et aguerrie, n'a laissé que quelques instants les véhicules sans surveillance, et que l'autorisation du procureur de la République, implicite et verbale dans un premier temps, explicite et écrite dans un second temps, se rapporte nécessairement à la poursuite de la géolocalisation.

10. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé, pour les motifs qui suivent.

11. D'une part, constatant exactement que la décision du procureur de la République ne comporte, au soutien de la poursuite de la mesure de géolocalisation des deux véhicules équipés en urgence de dispositifs, aucun énoncé des circonstances de fait de nature à établir l'existence d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, elle ne pouvait pallier cette carence par sa propre appréciation sur ce point.

12. D'autre part, le procès-verbal de l'officier de police judiciaire comportant seulement un exposé chronologique des faits observés durant les surveillances et filatures, il n'identifie ni n'analyse explicitement le risque imminent qu'il s'agissait pour les enquêteurs d'écarter en agissant de leur propre initiative.

13. Le visa de cette pièce dans la décision du procureur de la République ne saurait dès lors amener à conclure que le magistrat aurait repris à son compte l'analyse de l'officier de police judiciaire sur ce risque.

14. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 19 octobre 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 22-86233
Date de la décision : 23/05/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, 19 octobre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 mai. 2023, pourvoi n°22-86233


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.86233
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