LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 mai 2023
Rejet
Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 489 F-B
Pourvoi n° Q 21-17.853
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 MAI 2023
La société caisse de Crédit mutuel [Adresse 2], dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 21-17.853 contre l'arrêt rendu le 8 mars 2021 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [L] [N], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société caisse de Crédit mutuel [Adresse 2], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [N], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 8 mars 2021) et les productions, par acte notarié du 20 décembre 2017, la caisse de Crédit mutuel [Adresse 2] (la banque) a consenti à M. [N] des prêts immobiliers.
2. Sur des poursuites engagées par la banque aux fins de saisie immobilière, la vente forcée de l'immeuble appartenant à M. [N] a été ordonnée par jugement du 14 mars 2013, qui a retenu que le montant de la créance de la banque s'élevait à une certaine somme.
3. L'appel formé par M. [N] à l'encontre de ce jugement d'orientation a été déclaré irrecevable par ordonnance d'un conseiller de la mise en état.
4. Le 28 mai 2019, M. [N] a fait délivrer à la banque un commandement aux fins de saisie-vente sur le fondement d'un arrêt du 19 septembre 2016 lui ayant octroyé des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement à l'obligation d'information de la banque dans le cadre de ces prêts.
5. La banque a contesté ce commandement devant un juge de l'exécution en se prévalant de la compensation avec la créance détenue à l'encontre de M. [N] au titre du solde des prêts immobiliers demeurés impayés.
6. Par jugement du 2 mars 2020, le juge de l'exécution, a, en application de l'article L. 137-2 du code de la consommation, déclaré prescrite l'action en paiement de la banque, rejeté la demande de compensation formée par la banque et validé le commandement aux fins de saisie-vente.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action en paiement, de rejeter sa demande de compensation et de valider le commandement aux fins de saisie-vente du 28 mai 2019, alors « que le jugement d'orientation du juge de l'exécution, qui a autorité de chose jugée au principal en ce qu'il fixe la créance du poursuivant, constitue un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible dont l'exécution peut être poursuivie pendant dix ans ; qu'en retenant que le jugement d'orientation du 14 mars 2013, aux termes duquel le juge de l'exécution a fixé la créance de la Caisse de Crédit Mutuel [Adresse 2] aux sommes de 71 199,50 euros et 174 303,75 euros au titre des deux prêts consentis à M. [N], n'était pas un titre exécutoire que la banque pouvait invoquer pour obtenir le paiement du solde de la créance qu'il mentionne, la cour d'appel a violé les articles L. 111-2, L. 111-3, 1°, L. 111-4, R. 121-14, R. 322-15, R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution et L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, dans sa rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
8. Il résulte des articles L. 111-2, L. 111-3, 1°, L. 311-2, R. 121-1, R. 322-15, alinéa 1er, et R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution que le jugement d'orientation rendu par le juge de l'exécution statuant, à l'occasion de la procédure de saisie immobilière, n'a pas pour objet de constater une créance liquide et exigible, mais de vérifier que le créancier est muni d'un titre exécutoire présentant ces caractéristiques, de statuer sur les éventuelles contestations et demandes incidentes, et de mentionner le montant retenu pour la créance du poursuivant. Par conséquent, il ne constitue pas un titre exécutoire au sens de l'article L. 111-4 du même code.
9. Ayant relevé que, contrairement à ce que soutient la banque, le jugement d'orientation, qui ne peut être rendu que lorsque le créancier justifie d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, ne peut se substituer au titre exécutoire initial afin de servir de fondement au recouvrement d'une créance ou constituer lui-même un titre exécutoire, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le créancier ne pouvait se prévaloir du délai d'exécution de dix ans prévu par l'article L. 111-4 du code précité à compter du jugement d'orientation et que par conséquent, la créance était prescrite.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Condamne la caisse de Crédit mutuel [Adresse 2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse de Crédit mutuel [Adresse 2] et la condamne à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille vingt-trois.