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13/04/2023 | FRANCE | N°21-20669

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 avril 2023, 21-20669


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 avril 2023

Cassation

Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 394 F-D

Pourvoi n° A 21-20.669

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2023

M. [D] [L], domicilié [

Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 21-20.669 contre l'arrêt rendu le 4 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litig...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 avril 2023

Cassation

Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 394 F-D

Pourvoi n° A 21-20.669

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2023

M. [D] [L], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 21-20.669 contre l'arrêt rendu le 4 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant :

1°/ au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié au ministère des solidarités et de la santé, [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Caillard, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [L], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Caillard, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 juin 2021) et les productions, après avoir obtenu en justice qu'une période d'interruption de ses activités professionnelles soit qualifiée d'arrêt de travail, M. [L] a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale pour obtenir que soit déclarée inexcusable la faute de son employeur, le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou.

2. Il a été débouté de cette demande et a interjeté appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [L] fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu de statuer sur ses demandes en l'absence d'effet dévolutif de l'appel, de rejeter toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de laisser les dépens d'appel à sa charge, alors « qu'en application de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le droit à l'accès au juge implique que les parties soient mises en mesure effective d'accomplir les charges procédurales leur incombant. L'effectivité de ce droit impose, en particulier, d'avoir égard à l'obligation faite ou non aux parties de constituer un avocat pour les représenter. Aux termes de l'article 933 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel : « La déclaration comporte les mentions prescrites par l'article 58. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision. » À la différence de l'article 901 du même code, qui régit la procédure avec représentation obligatoire par avocat, l'article 933, de même que l'ensemble des autres dispositions régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, instaurent un formalisme allégé, destiné à mettre de façon effective les parties en mesure d'accomplir les actes de la procédure d'appel. Il se déduit de l'article 562, alinéa 1er, figurant dans les dispositions communes de ce code et disposant que l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas (2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18 22.528, publié). De telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit (2e Civ., 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.954, publié). Toutefois, dans la procédure sans représentation obligatoire, un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier. Il en résulte qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués, doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement » (Civ.2 9 septembre 2021 n° 20-13.701 FS-B+R Civ.2 9 septembre 2021 n° 20-13.705 Civ.2 9 septembre 2021 n° 20-13.702 Civ.2 9 septembre 2021 n° 20-13.679 ; que pour dire n'y avoir lieu de statuer sur les demandes de M. [L] en l'absence d'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel a retenu que « par courrier de son conseil portant pour objet : « déclaration d'appel » daté du 13 octobre 2017, déposé au greffe le même jour, M. [D] [L] a mentionné effectuer une « déclaration d'appel total à l'encontre d'un jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 27/07/2017 (n° de recours : 15-05907 ; cf copie jointe du jugement), lequel a rejeté à tort sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ». L'appel ne tend pas à l'annulation du jugement. La déclaration d'appel ne mentionne aucun chef de jugement critiqué. En effet, en faisant état d'un « appel total » à l'encontre du jugement et en mentionnant uniquement « lequel a rejeté à tort sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur », la déclaration d'appel ne porte pas mention d'un chef du jugement critique mais fait état d'un moyen invoqué par l'appelant qui se prévaut de ce que le tribunal a « à tort » rejeté sa demande. En ne mentionnant pas les chefs du jugement critiqués, l'appel n'opère pas l'effet dévolutif. L'appel ne permet pas d'avantage de retenir que l a dévolution s'opère pour le tout au regard d'un objet du litige indivisible, et ce notamment en l'absence de mention de tout chef du jugement critiqué. Par suite aucun chef de jugement n'est déféré à la cour par l'appel formé par M. [L] dans sa déclaration du 13 octobre 2017 qui n'a pas été régularisée par la suite. L'appel de M. [L] n'a donc saisi d'aucune demande la cour qui n'est investie de la connaissance d'aucun litige, ainsi que le soulève le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes formées par M. [L] dans ses conclusions, dès lors que seul l'acte d'appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement » (arrêt p. 4) qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 562 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 562 et 933 du code de procédure civile :

4. Selon le premier de ces textes, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Selon le second, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, la déclaration désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour.

5. Si, pour les procédures avec représentation obligatoire, il a été déduit de l'article 562, alinéa 1er, du code de procédure civile, que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas (2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528, publié) et que de telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit (2e Civ., 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.954, publié), un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant en matière de procédure sans représentation obligatoire constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier (2e Civ., 9 septembre 2021, pourvoi n° 20-13.673, publié).

6. Il en résulte qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, y compris lorsque les parties ont choisi d'être assistées ou représentées par un avocat, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués, doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement.

7. Il doit en être de même lorsque la déclaration d'appel, qui omet de mentionner les chefs de dispositif critiqués, ne précise pas si l'appel tend à l'annulation ou à la réformation du jugement (2e Civ., 29 septembre 2022, pourvoi n° 21-23.456).

8. Pour dire que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande, l'arrêt retient que la déclaration d'appel faite par l'avocat de M. [L], qui ne précise pas les chefs du jugement qu'elle entend critiquer et se borne à mentionner « appel total » en faisant état d'un moyen, sans tendre à l'annulation de la décision, n'a pas eu d'effet dévolutif.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et la caisse primaire d'assurance maladie de Paris aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et la caisse primaire d'assurance maladie de Paris et les condamne à payer à M. [L] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 21-20669
Date de la décision : 13/04/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 avr. 2023, pourvoi n°21-20669


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.20669
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