LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 avril 2023
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 440 F-D
Pourvoi n° Y 21-24.301
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 AVRIL 2023
M. [H] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-24.301 contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-1), dans le litige l'opposant à la société SEA TPI, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de Me Ridoux, avocat de M. [S], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société SEA TPI, après débats en l'audience publique du 14 mars 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 novembre 2019), M. [S] a été engagé le 1er décembre 2003 en qualité de technicien d'exploitation Unix NT par la société SEA TPI.
2. Placé en arrêt de travail le 27 avril 2005 et en invalidité deuxième catégorie à compter du 27 avril 2008, il a transmis à son employeur des prolongations de son arrêt de travail sans discontinuité.
3. Le 1er juin 2016, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail pour défaut d'organisation d'une visite de reprise.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et condamner celui-ci à lui payer une indemnité de préavis avec congés payés afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, et de le débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour privation du droit individuel à la formation et pour perte de droit à la retraite, alors « que, dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise laquelle met fin à la suspension du contrat de travail ; que la seule transmission, par le salarié, d'arrêts de travail sans discontinuité ne permet pas de caractériser une manifestation de volonté de ne pas reprendre le travail ; que dès lors, en jugeant en l'espèce que M. [S] avait manifesté sa volonté de ne pas reprendre le travail, aux seuls motifs, inopérants, que « la SAS SEA TPI justifie [que M. [S]] lui a (?) adressé, depuis 2005, des arrêts de travail sans discontinuer », pour en déduire que l'employeur n'était pas tenu d'organiser une visite de reprise, la cour d'appel a violé les articles R. 4624-22 et R. 4624-23 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles R. 4624-22 et R. 4624-23 du code du travail, dans leur version issue du décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 :
5. Il résulte de ces textes que, dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise, laquelle met fin à la suspension du contrat de travail.
6. Pour dire que l'employeur n'était pas tenu d'organiser une visite de reprise, l'arrêt retient que le salarié a adressé à son employeur son classement en invalidité deuxième catégorie en avril 2008, et sans discontinuer, depuis 2005, des arrêts de travail, qu'il en résulte que le contrat de travail se trouve toujours suspendu et que le salarié a, par là-même, manifesté sa volonté de ne pas reprendre le travail.
7. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la volonté du salarié de ne pas reprendre le travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que les demandes de M. [S] ne se heurtent pas à l'unicité d'instance, l'arrêt rendu le 22 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne la société SEA TPI aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société SEA TPI et la condamne à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille vingt-trois.