LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 mars 2023
Cassation sans renvoi
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 194 F-D
Pourvoi n° A 21-22.693
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023
La Ville de [Localité 10], représentée par son maire en exercice, domiciliée en cette qualité [Adresse 9], a formé le pourvoi n° A 21-22.693 contre l'arrêt rendu le 4 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 12], représenté par son syndic la société Ztimmo, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société [Localité 10] Habitat, établissement public [Localité 10] Habitat-OPH, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
L'établissement public [Localité 10] Habitat-OPH a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Delbano, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Ville de [Localité 10], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société [Localité 10] Habitat-OPH, de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat du syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 12], après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Delbano, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 juin 2021) et les productions, le 16 décembre 1912, la Ville de [Localité 10] est devenue propriétaire d'anciennes enceintes fortifiées situées dans le seizième arrondissement de Paris, à proximité du bois de Boulogne, divisées en trois îlots n° 22, 23 et 24.
2. Souhaitant procéder à leur aménagement et réaliser un programme de construction, la Ville de [Localité 10] a fait établir un cahier des charges, approuvé par le préfet de la Seine le 18 mars 1929. Ce cahier des charges, annexé à la délibération du 21 décembre 1928 ayant décidé de la vente et de l'aménagement des terrains des îlots n° 23 et 24, prévoyait la création de zones de servitudes non aedificandi.
3. Par acte des 19 mars, 11 et 15 avril 1930, la Ville de [Localité 10] a vendu à la société Bugeaud la Pompe, aux droits de laquelle vient le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] (le syndicat des copropriétaires), le lot n° 12 de l'îlot n° 24, d'une superficie de 2 163,60 m².
4. Par délibération du 21 décembre 1973, le Conseil de [Localité 10] a approuvé la création d'une zone non aedificandi de 4 553 m² à aménager en espaces verts, située entre le terrain appartenant à la société Bugeaud la Pompe et l'[Adresse 8] et le long de l'[Adresse 7].
5. Par décision du 2 décembre 2008, la Ville de [Localité 10] a procédé à la division de la parcelle EG n° [Cadastre 6], sur laquelle était située la zone à aménager, en deux parcelles cadastrées EG n° [Cadastre 4], d'une superficie de 4 650 m², et EG n° [Cadastre 5], d'une superficie de 16 182 m².
6. Par acte notarié du 19 mai 2009, la Ville de [Localité 10] a consenti à l'établissement public [Localité 10] Habitat-OPH ([Localité 10] Habitat) un bail emphytéotique sur la parcelle EG n° [Cadastre 4] en vue de la construction de logements sociaux et de places de stationnement en sous-sol.
7. Après annulation, par la juridiction administrative, d'un précédent permis de construire en date du 20 novembre 2009, [Localité 10] Habitat a obtenu un permis de construire le 27 novembre 2014.
8. Les travaux de construction ont été réalisés et achevés le 20 février 2019.
9. Soutenant que ces travaux avaient été entrepris en violation de la servitude non aedificandi constituée par le cahier des charges et la délibération, le syndicat des copropriétaires a assigné la Ville de [Localité 10] afin qu'il lui fût enjoint de procéder à l'aménagement en espaces verts de la parcelle de 4 553 m² de l'îlot n° 24, qu'il fût jugé que tout acte de construction sur cette parcelle était illicite et qu'il en fût ordonné la suspension.
10. Le 25 novembre 2019, le syndicat des copropriétaires a appelé [Localité 10] Habitat à l'instance.
11. Celui-ci a soulevé l'incompétence de la juridiction judiciaire.
Examen des moyens
Sur le moyen, pris en ses première, troisième à cinquième branches, du pourvoi principal et le moyen, pris en ses première, troisième, cinquième et huitième branches, du pourvoi incident, ci-après annexés
12. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi principal et le moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident, rédigés en termes identiques, réunis
Enoncé du moyen
13. La Ville de [Localité 10] et [Localité 10]-Habitat font grief à l'arrêt de retenir la compétence du juge judiciaire pour statuer sur les demandes du syndicat des copropriétaires, alors « que, à supposer que les motifs de l'ordonnance puissent venir au soutien de l'arrêt, le juge judiciaire ne saurait, sans empiéter sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public ; qu'il est dès lors incompétent pour se prononcer sur des demandes visant à ce que soit ordonnée la démolition ou la suspension de la construction de logements sociaux édifiés par un établissement public, y compris lorsque la méconnaissance d'une servitude non aedificandi est en cause ; qu'en retenant la compétence des juridictions judiciaires, au motif impropre qu'une servitude de droit privé est en cause, quand il résulte de leurs constatations que [Localité 10]-Habitat a édifié des logements sociaux sur la parcelle litigieuse et que le syndicat des copropriétaires a sollicité qu'il soit, sur cette parcelle, enjoint à la Ville de [Localité 10] de procéder à l'aménagement d'espaces verts, jugé que toute construction est illégale et ordonné la suspension de toute construction, les juges du fond ont violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
14. Le syndicat des copropriétaires conteste la recevabilité du moyen en raison de sa nouveauté.
15. Cependant, le moyen est de pur droit dès lors qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.
16. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu la loi des 16-24 août 1790 sur l'organisation judiciaire et le décret du 16 fructidor an III :
17. Il résulte de ces textes que l'autorité judiciaire ne saurait, sans s'immiscer dans les opérations administratives et empiéter ainsi sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public.
18. Pour se déclarer compétent pour statuer sur les demandes, l'arrêt retient que le syndicat des copropriétaires fonde celles-ci sur l'existence d'une servitude non aedificandi de droit privé instituée par le cahier des charges du lotissement du 18 mars 1929, opposable aux colotis, et par la délibération du 21 décembre 1973 portant sur le terrain déjà régi par ce cahier des charges et que, portant sur l'existence d'une servitude de droit privé, le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire.
19. En statuant ainsi, alors qu'un immeuble de logements sociaux construit par un office public de l'habitat présente le caractère d'un ouvrage public et que, dès lors, le juge judiciaire n'est pas compétent pour ordonner la démolition d'un tel ouvrage, qu'impliquaient les demandes du syndicat des copropriétaires dès lors que la construction était achevée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
20. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
21. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DÉCLARE la juridiction judiciaire incompétente pour connaître de la demande formée par le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] tendant à ce qu'il soit ordonné à la Ville de [Localité 10] d'aménager en espaces verts la parcelle de 4 553 m² de l'îlot n° [Adresse 3], jugé que tout acte de construction sur cette parcelle est illicite et ordonné la suspension de tout acte de construction sur cette parcelle ;
Dit n'y avoir lieu de modifier les indemnités de procédure allouées par les
juges du fond et les condamnations aux dépens prononcées par eux ;
Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] aux dépens exposés devant la Cour de cassation ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées devant la Cour de cassation ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la Ville de [Localité 10]
L'arrêt attaqué, critiqué par la VILLE de [Localité 11], encourt la censure ;
EN CE QU'il a retenu la compétence du juge judiciaire pour statuer sur les demandes du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES du [Adresse 7] à [Localité 12] ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, lorsque la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit statuer sur la question de fond avant de prendre parti sur la compétence ; qu'aux termes de motifs distincts de ceux du premier juge, et substitués à ces derniers, les juges du second degré ont constaté, pour retenir la compétence du juge judiciaire, que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES se prévalait, comme fondement de sa demande, de l'existence d'une servitude de droit privé ; qu'en se déterminant ainsi quand elle devait statuer, au fond, sur l'existence de la servitude invoquée, la cour d'appel a violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, à supposer que les motifs de l'ordonnance puissent venir au soutien de l'arrêt, de toute façon, le juge judiciaire ne saurait, sans empiéter sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public ; qu'il est dès lors incompétent pour se prononcer sur des demandes visant à ce que soit ordonnée la démolition ou la suspension de la construction de logements sociaux édifiés par un établissement public, y compris lorsque la méconnaissance d'une servitude non aedificandi est en cause ; qu'en retenant la compétence des juridictions judiciaires, au motif impropre qu'une servitude de droit privé est en cause, quand il résulte de leurs constatations que l'établissement public [Localité 11] HABITAT OPH a édifié des logements sociaux sur la parcelle litigieuse et que le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES a sollicité qu'il soit, sur cette parcelle, enjoint à la VILLE de [Localité 11] de procéder à l'aménagement d'espaces verts, jugé que toute construction est illégale et ordonné la suspension de toute construction, les juges du fond ont violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, TROISIEMEMENT, et en tout cas, dans ses conclusions, la VILLE de [Localité 11] rappelait que si le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES se fondait sur une servitude de droit privé, ses demandes avaient pour objet et à tout le moins pour effet, de remettre en cause la licéité ou l'effet utile du bail emphytéotique conclu avec [Localité 11] HABITAT et du permis de construire et visaient à la destruction ou à la suspension de la construction d'un ouvrage public ; qu'en s'abstenant de s'en expliquer, la cour appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, et en tout cas, le premier juge n'a pas statué sur la question de fond avant de prendre parti sur la compétence ; qu'en effet, il s'est abstenu de se prononcer sur la caducité du cahier des charges invoqué par le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être regardé comme rendu, en toute hypothèse, en violation de l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ALORS QUE, CINQUIEMEMENT, en s'abstenant de s'expliquer sur la solution retenue par le juge administratif, lequel avait constaté la caducité du cahier des charges, soit à raison de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du Tribunal administratif de PARIS du 9 mars 2017 et à l'arrêt du Conseil d'Etat du 5 décembre 2018, soit à tout le moins en tant que ces décisions constituaient des éléments d'appréciation, l'arrêt doit être regardé comme privé de base légale au regard de l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
ET ALORS QUE, SIXIEMEMENT, une servitude ne peut résulter que d'une convention entre deux parties, d'un usage débouchant sur une prescription acquisitive, ou encore de la disposition des lieux ; que dans ses conclusions, la VILLE de [Localité 11] rappelait que la délibération du 21 décembre 1973, qui constituait un acte unilatéral, se bornait à indiquer, sous condition, non réalisée, que la VILLE créerait une zone non aedificandi ; qu'en se fondant sur cette délibération sans dire lequel quel modes avait pu conduire à la constitution d'une servitude et sans s'expliquer sur l'absence de réalisation de la condition qu'elle contenait, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 79 du code de procédure civile et 639 du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société [Localité 10] Habitat-OPH
[Localité 10] Habitat OPH reproche à l'arrêt attaqué d'avoir retenu la compétence du juge judiciaire pour statuer sur les demandes du syndicat des copropriétaires du [Adresse 7] à [Localité 12],
1°) - ALORS QUE lorsque la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit statuer sur la question de fond avant de prendre parti sur la compétence ; qu'aux termes de motifs distincts de ceux du premier juge, et substitués à ces derniers, les juges du second degré ont constaté, pour retenir la compétence du juge judiciaire, que le syndicat des copropriétaires se prévalait, comme fondement de sa demande, de l'existence d'une servitude de droit privé ; qu'en statuant ainsi quand elle devait statuer, au fond, sur l'existence de la servitude invoquée, la Cour d'appel a violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
2°) - ALORS QU'à supposer que les motifs de l'ordonnance puissent venir au soutien de l'arrêt, le juge judiciaire ne saurait, en toute hypothèse, sans empiéter sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public ; qu'il est dès lors incompétent pour se prononcer sur des demandes visant à ce que soit ordonnée la démolition ou la suspension de la construction de logements sociaux édifiés par un établissement public, y compris lorsque la méconnaissance d'une servitude non aedificandi est en cause ; qu'en retenant la compétence des juridictions judiciaires, au motif impropre qu'une servitude de droit privé est en cause, quand il résulte de leurs constatations que l'établissement public [Localité 10] Habitat OPH a édifié des logements sociaux sur la parcelle litigieuse et que le syndicat des copropriétaires a sollicité qu'il soit, sur cette parcelle, enjoint à la ville de paris de procéder à l'aménagement d'espaces verts, jugé que toute construction est illégale et ordonné la suspension de toute construction, les juges du fond ont violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
3°) – ALORS QUE les articles L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales et L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoient que seul le juge administratif est compétent pour connaître de l'exécution des baux emphytéotiques administratifs, ce qui interdit au juge judiciaire de connaître des litiges relatifs à l'exécution de ces baux, de sorte qu'en retenant que le juge judiciaire était compétent pour connaître des effets du bail emphytéotique conclu le 19 mai 2009 entre la Ville de [Localité 10] et [Localité 10] Habitat OPH à l'égard des droits du syndicat des copropriétaires demandeurs, tiers à ce contrat, et plus particulièrement sur la compatibilité de ce bail avec la servitude non aedificandi dont se prévalait le syndicat et qu'il appartenait au juge statuant au fond d'apprécier la portée de cette servitude au regard de ce contrat administratif, notamment sur le fait que des constructions avaient été édifiées sur la parcelle en méconnaissance de ladite servitude, la cour d'appel a violé l'article 79 du code de procédure civile, la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble les articles L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales, L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques et R. 312-1 du code de justice administrative ;
4°) – ALORS QUE seul le juge administratif est compétent pour connaitre de l'application d'une délibération d'une collectivité territoriale et ce alors même qu'elle instituerait une servitude non aedificandi, de sorte qu'en jugeant que le syndicat des copropriétaires sollicitait, non une appréciation de la légalité de la délibération du 21 décembre 1973, mais son application en ce qu'elle instituait une servitude non aedificandi sur la base du cahier des charges de 1929, ce qui impliquait d'apprécier la portée de ladite servitude qui relevait de la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a violé l'article 79 du code de procédure civile, la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le 1° de l'article L. 2131-4 du code général des collectivités territoriales ;
5°) – ALORS QU'en tout état de cause, le premier juge n'a pas statué sur la question de fond avant de prendre parti sur la compétence ; qu'en effet, il s'est abstenu de se prononcer sur la caducité du cahier des charges invoqué par le syndicat des copropriétaires ; que, dès lors, en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
6°) – ALORS QU'en s'abstenant de s'expliquer sur la solution retenue par le juge administratif, lequel avait constaté la caducité du cahier des charges, soit à raison de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du Tribunal administratif de Paris du 9 mars 2017 et à l'arrêt du Conseil d'Etat du 5 décembre 2018, soit à tout le moins en tant que ces décisions constituaient des éléments d'appréciation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 79 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
7°) – ALORS QU'une servitude ne peut résulter que d'une convention entre deux parties, d'un usage débouchant sur une prescription acquisitive, ou encore de la disposition des lieux ; que dans ses conclusions, [Localité 10] Habitat OPH rappelait que la délibération du 21 décembre 1973, qui constituait un acte unilatéral, se bornait à indiquer, sous condition, non réalisée, que la ville créerait une zone non aedificandi ; qu'en se fondant sur cette délibération sans dire lequel quels modes avaient pu conduire à la constitution d'une servitude et sans s'expliquer sur l'absence de réalisation de la condition qu'elle contenait, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 79 du code de procédure civile et 639 du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
8°) - ALORS QU'en retenant que le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 25 octobre 1974, avait précédemment statué sur l'application du cahier des charges dans un litige opposant alors le préfet de Paris et la société Bugeau-La Pompe, qui contestait alors les projets de construction de l'ambassade d'URSS sur l'îlot n° 23 et d'installations sportives sur une partie de l'îlot 24, sans que la question de la compétence du juge judiciaire ait été soulevée, les juges du fond se sont prononcés par un motif impropre à écarter la compétence du juge administratif pour connaître du présent litige, de sorte qu'ils ont violé les articles 79 du code de procédure civile et 639 du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III.