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16/03/2023 | FRANCE | N°21-11323

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 mars 2023, 21-11323


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 mars 2023

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 285 F-D

Pourvoi n° S 21-11.323

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 octobre 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___

______________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023

La société [4], société à responsabilité limitée, d...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 mars 2023

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 285 F-D

Pourvoi n° S 21-11.323

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 octobre 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023

La société [4], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° S 21-11.323 contre l'arrêt rendu le 9 décembre 2020 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [W] [S], domicilié [Adresse 1],

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lapasset, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société [4], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [S], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lapasset, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 décembre 2020), la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident survenu le 4 septembre 2012 à M. [S] (la victime), salarié de la société [4] (l'employeur).

2. La victime a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande, alors :

« 1°/ que la société faisait valoir dans ses écritures que M. [B] n'avait pu être témoin de l'affectation de la victime sur le site de [Localité 3] ni des circonstances de son accident survenu le 4 septembre 2012 dans la mesure où ses plannings démontraient qu'il n'avait jamais été affecté ou présent sur ce site et qu'il avait démissionné dans le courant de l'été 2012, son départ définitif de l'entreprise datant du 5 août 2012 ; qu'en se fondant pourtant sur cette attestation pour dire que la victime justifiait qu'elle avait été régulièrement affectée à des tâches de remise en état sur l'exploitation de Beauvoisin, sans répondre au moyen péremptoire de la société établissant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'il ressortait des plannings produits aux débats qu'au titre de la période du 23 avril au 2 septembre 2012, la victime n'avait été affectée à des travaux dits « REE » (littéralement « travaux de remise en état », devenus par la suite des « travaux d'entretien nettoyage occasionnel ») sur le site de [Localité 3] qu'à deux reprises, le 12 mai et le 21 juillet 2012 ; qu'en énonçant qu'il ressortait des plannings qu'elle était régulièrement affectée à de la « remise en état » sur ce site, notamment les samedis et le 15 août mais d'autres jours de la semaine également, avec des horaires parfois extensifs comme la semaine du 9 au 15 juillet, la cour d'appel a dénaturé les plannings versés aux débats, en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause ;

3°/ que le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées par les parties ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir que la victime avait été affectée à des travaux dits « REE » auprès de diverses copropriétés et sur le site de [Localité 3] à trois reprises seulement, soit le 12 mai, le 21 juillet et le 4 septembre 2012, produisant à l'appui de son propos les plannings d'affectations de la victime signés de sa main ; qu'elle précisait en conséquence que, contrairement ce qu'elle avait indiqué par erreur dans ses écritures de première instance, il n'y avait aucune régularité à l'affectation de la victime sur le terrain de [Localité 3] ; qu'en jugeant que celle-ci justifiait qu'elle avait été régulièrement affectée à des tâches de remise en état sur le site de Beauvoisin et que cette situation était corroborée par les conclusions de première instance déposées par la société, la cour d'appel, qui n'a pas statué au visa des dernières conclusions de la société, a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

4°/ que la société affirmait dans ses écritures qu'« aucune tâche de maçonnerie, de quelque nature qu'elle soit, n'a jamais été confiée à la victime » et faisait valoir que « les tâches confiées à la victime consistaient, lorsqu'il intervenait sur [le site de [Localité 3]] à nettoyer et enlever les détritus présents sur le terrain agricole de la SCA, sur lequel vivent différents animaux » ; que, pour dire que la victime avait été amenée à accomplir des travaux de maçonnerie, la cour d'appel a retenu que l'employeur n'aurait « pas remis en cause qu'il y avait eu trois sacs de béton » et qu'il se serait référé aux déclarations d'un « collègue non identifié qui lui aurait indiqué que les trois sacs en question étaient vides à son départ à 17h00. » ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que la société produisait une attestation établie par M. [T], qui précisait avoir été présent sur le site de [Localité 3] toute la journée du 4 septembre 2015 et n'avoir aucunement vu la victime effectuer des travaux de maçonnerie ; qu'en affirmant que la société ne produisait aucune attestation permettant d'affirmer que celle-ci n'aurait pas accompli de travaux de maçonnerie, la cour d'appel a dénaturé par omission cette attestation, en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause ;

6°/ que la société indiquait dans ses écritures que la victime « était employée uniquement et exclusivement comme agent d'entretien, quel que soit son lieu d'affectation » et qu'elle n'avait jamais effectué des travaux de maçonnerie ; qu'en affirmant pourtant que les explications de la société confirmaient que deux de ses salariés, dont la victime, avaient fait de la maçonnerie ce 4 septembre 2012 sur le site de Beauvoisin, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

7°/ qu'en affirmant qu'il était établi que l'activité de remise en état était étrangère aux prévisions du contrat de travail de la victime sans préciser l'origine de cette constatation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

8°/ qu'en affirmant que l'accident de la victime était survenu alors qu'elle accomplissait une tâche ne relevant pas de sa qualification pour en tirer l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur sans expliciter précisément en quoi les tâches accomplies par la victime le jour de son accident n'étaient pas celles prévues à son contrat, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile ;

9°/ que, subsidiairement, le manquement de l'employeur a le caractère d'une faute inexcusable lorsqu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en se limitant à affirmer que l'accident de la victime était survenu alors qu'elle accomplissait une tâche ne relevant pas de sa qualification pour en tirer l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, sans faire ressortir l'exposition de la victime à un danger, ni la conscience dudit danger par l'employeur, ni l'absence de mesures nécessaires prises par l'employeur pour l'en préserver, la cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 4121-1 du code du travail ;

10°/ que la cassation qui sera prononcée sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur emportera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt ayant ordonné une expertise médicale, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Sous le couvert des griefs non fondés de violation des articles 4, 455 et 954 du code de procédure civile, de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 4121-1 du code du travail, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine par la cour d'appel de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve débattus devant elle.

5. Le moyen, qui est privé d'objet en sa dernière branche, n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [4] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du seize mars deux mille vingt-trois par Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société [4]

La société [4] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société [4] a commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident du travail de M. [W] [S],

1/ ALORS QUE la société faisait valoir dans ses écritures que M. [B] n'avait pu être témoin de l'affectation de M. [S] sur le site de [Localité 3] ni des circonstances de son accident survenu le 4 septembre 2012 dans la mesure où ses plannings démontraient qu'il n'avait jamais été affecté ou présent sur le site de [Localité 3] et qu'il avait démissionné dans le courant de l'été 2012, son départ définitif de l'entreprise datant du 5 août 2012 ; qu'en se fondant pourtant sur cette attestation pour dire que M. [S] justifiait qu'il avait été régulièrement affecté à des tâches de remise en état sur l'exploitation de Beauvoisin, sans répondre au moyen péremptoire de la société établissant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

2/ ALORS QU'il ressortait des plannings produits aux débats qu'au titre de la période du 23 avril au 2 septembre 2012, M. [S] n'avait été affecté à des travaux dits « REE » (littéralement « travaux de remise en état », devenus par la suite des « travaux d'entretien nettoyage occasionnel ») sur le site de [Localité 3] qu'à deux reprises, le 12 mai et le 21 juillet 2012 ; qu'en énonçant qu'il ressortait des plannings que M. [S] était régulièrement affecté à de la « remise en état » à Beauvoisin, notamment les samedis et le 15 août mais d'autres jours de la semaine également, avec des horaires parfois extensifs comme la semaine du 9 au 15 juillet, la cour d'appel a dénaturé les plannings versés aux débats, en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause,

3/ ALORS QUE le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées par les parties ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir que M. [S] avait été affecté à des travaux dits « REE » auprès de diverses copropriétés et sur le site de [Localité 3] à trois reprises seulement, soit le 12 mai, le 21 juillet et le 4 septembre 2012 (conclusions d'appel p.5 in fine), produisant à l'appui de son propos les plannings d'affectations de M. [S] signés de sa main (pièce d'appel 33 en production) ; qu'elle précisait en conséquence que, contrairement ce qu'elle avait indiqué par erreur dans ses écritures de première instance, il n'y avait aucune régularité à l'affectation de M. [S] sur le terrain de [Localité 3] ; qu'en jugeant que M. [S] justifiait qu'il avait été régulièrement affecté à des tâches de remise en état sur le site de Beauvoisin et que cette situation était corroborée par les conclusions de première instance déposées par la société, la cour d'appel, qui n'a pas statué au visa des dernières conclusions de la société, a violé les articles l'article 455 et 954 du code de procédure civile,

4/ ALORS QUE la société affirmait dans ses écritures qu' « aucune tâche de maçonnerie, de quelque nature qu'elle soit, n'a jamais été confiée à Monsieur [S] » (conclusions d'appel p.5) et faisait valoir que « les tâches confiées à Monsieur [S] consistaient, lorsqu'il intervenait sur [le site de [Localité 3]] à nettoyer et enlever les détritus présents sur le terrain agricole de la SCA, sur lequel vivent différents animaux » (conclusions d'appel p.6) ; que, pour dire que M. [S] avait été amené à accomplir des travaux de maçonnerie, la cour d'appel a retenu que l'employeur n'aurait « pas remis en cause qu'il y avait eu trois sacs de béton » et qu'il se serait référé aux déclarations d'un « collègue non identifié qui lui aurait indiqué que les trois sacs en question étaient vides à son départ à 17h00. » ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société, en violation de l'article 4 du code de procédure civile,

5/ ALORS QUE la société produisait une attestation établie par M. [X] [T], qui précisait avoir été présent sur le site de [Localité 3] toute la journée du 4 septembre 2015 et n'avoir aucunement vu M. [S] effectuer des travaux de maçonnerie ; qu'en affirmant que la société ne produisait aucune attestation permettant d'affirmer que M. [S] n'aurait pas accompli de travaux de maçonnerie, la cour d'appel a dénaturé par omission cette attestation, en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause,

6/ ALORS QUE la société indiquait dans ses écritures que M. [S] « était employé uniquement et exclusivement comme agent d'entretien, quel que soit son lieu d'affectation » et qu'il n'avait jamais effectué des travaux de maçonnerie (voir conclusions d'appel de la société p.5 et 8) ; qu'en affirmant pourtant que les explications de la société confirmaient que deux de ses salariés, dont M. [S], avaient fait de la maçonnerie ce 4 septembre 2012 sur le site de Beauvoisin, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société, en violation de l'article 4 du code de procédure civile,

7/ ALORS QU'en affirmant qu'il était établi que l'activité de remise en état était étrangère aux prévisions du contrat de travail de M. [S] sans préciser l'origine de cette constatation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

8/ ALORS QU'en affirmant que l'accident de M. [S] était survenu alors qu'il accomplissait une tâche ne relevant pas de sa qualification pour en tirer l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur sans expliciter précisément en quoi les tâches accomplies par M. [S] le jour de son accident n'étaient pas celles prévues à son contrat, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile,

9/ ALORS QUE, subsidiairement, le manquement de l'employeur a le caractère d'une faute inexcusable lorsqu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en se limitant à affirmer que l'accident de M. [S] était survenu alors qu'il accomplissait une tâche ne relevant pas de sa qualification pour en tirer l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, sans faire ressortir l'exposition de M. [S] à un danger, ni la conscience dudit danger par l'employeur, ni l'absence de mesures nécessaires prises par l'employeur pour l'en préserver, la cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 4121-1 du code du travail,

10/ ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur emportera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt ayant ordonné une expertise médicale, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 21-11323
Date de la décision : 16/03/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 09 décembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 mar. 2023, pourvoi n°21-11323


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.11323
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