LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 février 2023
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 122 F-D
Pourvoi n° F 21-24.837
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 15 FÉVRIER 2023
Mme [F] [D], domiciliée chez M. [Z] [T], [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-24.837 contre le jugement rendu le 28 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Grenoble (chambre 1-6, juge aux affaires familiales), dans le litige l'opposant à M. [G] [X], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de Mme [D], après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Grenoble, 28 juin 2021), M. [X] a souscrit une location avec option d'achat d'un véhicule dont le premier acompte, d'un montant de 1 500 euros, a été réglé par Mme [D], avec qui il vivait en concubinage.
2. Après leur séparation, celle-ci l'a assigné en remboursement de cette somme et en paiement de dommage-intérêts.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Mme [D] fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, Mme [D] sollicitait, dans ses conclusions d'appel, le remboursement du premier acompte qu'elle avait versé pour la location avec option d'achat d'un véhicule Kia souscrite au nom de M. [X] et ce dernier se bornait à prétendre qu'il avait déjà procédé au remboursement de cet acompte ; qu'en jugeant néanmoins, pour débouter Mme [D] de sa demande de remboursement, que le versement litigieux correspondait à sa participation aux dépenses de la vie courante, quand il n'était contesté par aucune des parties que le paiement de cet acompte était dû par M. [X], le juge aux affaires familiales a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
5. Pour rejeter les demandes de Mme [D] tendant à la condamnation de M. [X] à lui payer une somme de 1 500 euros en remboursement de l'acompte versé pour l'acquisition du véhicule de celui-ci et une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral, le jugement retient qu'il est constant que le couple de concubins vivait chez M. [X] sans que Mme [D] ne justifie d'une quelconque participation à la vie commune et que, à défaut de preuve contraire, il doit être considéré que le versement litigieux allégué correspond à sa participation au dépenses de la vie courante.
6. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions, M. [X] ne contestait pas le principe d'un remboursement à Mme [D] de l'acompte versé et se bornait à soutenir que celui-ci était déjà intervenu, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'intégralité des prétentions de Mme [D], le jugement rendu le 28 juin 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Grenoble ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette décision et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Grenoble autrement composé ;
Condamne M. [X] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [X] à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour Mme [D]
Mme [D] reproche au jugement attaqué de l'AVOIR déboutée de sa demande tendant à la condamnation de M. [X] à lui verser la somme de 1.500 € en remboursement de l'acompte qu'elle a versé pour l'acquisition du véhicule Kia Motors de M. [X] et, en conséquence, de sa demande tendant à la condamnation de M. [X] à lui verser la somme de 2.000 € en réparation du préjudice qu'elle a subi ;
1/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, Mme [D] sollicitait, dans ses conclusions d'appel, le remboursement du premier acompte qu'elle avait versé pour la location avec option d'achat d'un véhicule Kia souscrite au nom de M. [X] (conclusions p. 3 §4 et p.7§5) et ce dernier se bornait à prétendre qu'il avait déjà procédé au remboursement de cet acompte (conclusions de M. [X] p.3 §6); qu'en jugeant néanmoins, pour débouter Mme [D] de sa demande de remboursement, que le versement litigieux correspondait à sa participation aux dépenses de la vie courante, quand il n'était contesté par aucune des parties que le paiement de cet acompte était dû par M. [X], le juge aux affaires familiales a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, Mme [D] sollicitait, dans ses conclusions d'appel, le remboursement du premier acompte qu'elle avait versé pour la location avec option d'achat d'un véhicule Kia souscrite au nom de M. [X] (conclusions p. 3 § 4 et p.7 § 5) et ce dernier se bornait à prétendre qu'il avait déjà procédé au remboursement de cet acompte (conclusions de M. [X] p.3 § 6); qu'en soulevant néanmoins d'office, pour débouter Mme [D] de sa demande de remboursement, le moyen tiré de ce que le versement litigieux correspondrait à sa participation aux dépenses de la vie courante, sans inviter les parties à présenter leurs observations, le juge aux affaires familiales a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3/ ALORS QUE l'obligation de participer aux charges du ménage ne s'applique pas aux concubins ; qu'en jugeant néanmoins, pour débouter Mme [D] de sa demande de remboursement, que le couple vivait chez M. [X], et que Mme [D] ne justifiait pas d'une quelconque participation à la vie commune, le juge aux affaires familiales a violé l'article 515-8 du code civil, ensemble l'article 214 du même code par fausse application ;
4/ALORS QU'en toute hypothèse, l'insuffisance de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que Mme [D] se prévalait dans ses conclusions d'un échange de mails en date du mois de janvier 2018 (conclusions p.4 § 9, pièce n°28), par lequel M. [X] acceptait de rembourser l'acompte de 1.500 euros en échange de la restitution de la voiture, ce dont il résultait qu'il ne contestait pas en devoir encore le remboursement, ainsi que d'attestations (pièces n°36 et 39) dont il résultait qu'elle travaillait, s'était toujours assumée et avait soutenu financièrement M. [X] ; qu'en jugeant néanmoins que Mme [D] ne rapportant pas la preuve contraire, il devait être considéré que le versement litigieux allégué correspondait à sa participation aux dépenses de la vie courante, sans examiner même sommairement ces éléments de preuve versé aux débats, le juge aux affaires familiales a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5/ ALORS QUE le juge ne peut se prononcer par des motifs inopérants ou incompréhensibles ; qu'en l'espèce, pour s'opposer à la demande de remboursement de l'acompte de 1 500 euros, M. [X] prétendait avoir versé par chèque une somme de 2 000 euros en novembre 2015, Mme [D] expliquant quant à elle, pièces à l'appui, que cette somme de 2 000 euros ne constituait pas le remboursement de l'acompte de 1 500 euros mais l'acquittement du prix de cession de sa propre voiture à la mère de M. [X] ; qu'en constatant que le versement de cette somme de 2000 euros ne pouvait correspondre au paiement par la mère de Mme [D] (sic) d'un véhicule dès lors que cette dernière attestait avoir réglé en liquide, sans toutefois en tirer une quelconque conséquence juridique, le juge aux affaires familiales s'est prononcé par des motifs inopérants et incompréhensibles et violé l'article 455 du code de procédure civile