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08/02/2023 | FRANCE | N°21-21391

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 février 2023, 21-21391


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 février 2023

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 114 F-D

Pourvoi n° K 21-21.391

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 FÉVRIER 2023

Mme [G] [B], domiciliée [Adresse

1], a formé le pourvoi n° K 21-21.391 contre l'arrêt rendu le 1er avril 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le liti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 février 2023

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 114 F-D

Pourvoi n° K 21-21.391

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 FÉVRIER 2023

Mme [G] [B], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-21.391 contre l'arrêt rendu le 1er avril 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige l'opposant à la société Locam-location automobiles et matériels, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [B], de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Locam-location automobiles et matériels, après débats en l'audience publique du 13 décembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 1er avril 2021), le 23 octobre 2015, Mme [B], architecte, a conclu avec la société Locam-location automobiles et matériels (la société Locam) un contrat de location portant sur un photocopieur, moyennant vingt-et-un loyers trimestriels.

2. Le contrat prévoyait qu'en cas de résiliation contractuelle pour non-paiement du loyer, le locataire serait tenu notamment de verser une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation, majorée d'une clause pénale de 10 %, ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine, avec une majoration de 10 %.

3. Dans un procès-verbal de livraison et de conformité du 21 octobre 2015, Mme [B] a certifié la fourniture du bien auprès du bailleur.

4. Mme [B] n'ayant pas payé des loyers impayés dans les huit jours d'une mise en demeure, la résiliation du contrat est intervenue de plein droit et la société Locam l'a assignée en paiement des loyers impayés et de l'indemnité de résiliation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. Mme [B] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Locam la somme de 24 684 euros correspondant au montant des loyers à échoir, alors « que la stipulation contractuelle qui met à la charge d'une partie une indemnité en cas de résiliation anticipée du contrat dont le montant est équivalent au prix dû en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme constitue une clause pénale susceptible de modération en cas d'excès ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1152 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

7. Aux termes de ce texte, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

8. Pour condamner Mme [B] au paiement d'une somme de 24 684 euros, l'arrêt retient que l'indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine ne s'analyse pas en une clause pénale mais est la contrepartie de l'usage du photocopieur dont elle dispose toujours et a vocation à indemniser le bailleur du capital mobilisé dans l'acquisition du matériel.

9. En statuant ainsi, alors que la clause litigieuse stipulait, en cas de résiliation anticipée pour non-paiement du loyer, une indemnité dont le montant, équivalent au prix dû en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme, correspondait à l'évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par le bailleur du fait de la rupture fautive de celui-ci, et présentait dès lors un caractère comminatoire en ayant pour objet de contraindre le locataire à exécuter le contrat jusqu'à cette date, de sorte qu'elle constituait une clause pénale susceptible de modération en cas d'excès, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il condamne Mme [B] à payer à la société Locam-location automobiles et matériels la somme de 24 684 euros correspondant au montant des loyers à échoir, l'arrêt rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Locam-location automobiles et matériels aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Locam-location automobiles et matériels et la condamne à payer à Mme [B] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-trois et signé par lui et Mme Mamou, greffier présent lors du prononcé.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme [B].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme [G] [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR déboutée de sa demande tendant à l'annulation du contrat qu'elle avait conclu avec la société Locam et de ses demandes subséquentes, de l'AVOIR condamnée à payer à la société Locam la somme de 3 302, 64 euros correspondant à l'arriéré de loyers et de l'AVOIR condamnée à payer à la société Locam la somme de 24 684 euros correspondant au montant des loyers à échoir ;

1°) ALORS QU'une partie répond du dol commis par la personne qu'elle a chargé de procéder à un démarchage en vue de la conclusion d'un contrat avec elle ; qu'en affirmant, pour débouter Mme [B] de sa demande fondée sur le dol émanant de la société Tech Office, qu'il lui incombait de rapporter la preuve de manoeuvres frauduleuses de la société Locam dès lors qu'elle sollicitait la nullité du contrat conclu avec cette société (arrêt, p. 6, §§ 4 et antépénultième) et que, si elle soutenait avoir été trompée par la société Tech Office, il ne résultait pas des débats que la société Locam ait participé à ces agissements ou qu'elle en ait eu connaissance (jugement, p. 4, antépénultième §), cependant que la société Tech Office avait démarché Mme [B] afin de lui faire souscrire avec la société Locam un contrat de location d'un bien fourni par elle et dont elle assurerait la maintenance, la cour d'appel a violé l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°) ALORS QUE l'exécution volontaire d'un contrat par une partie ne fait obstacle à son droit d'en demander la nullité qu'à la condition que soient établies sa connaissance du vice l'affectant et son intention de le réparer ; qu'en se bornant à retenir « que Mme [B] a[vait] réglé volontairement les échéances des 30 décembre 2015 et 30 mars 2016 du contrat Locam » (arrêt, p. 6, antépénultième §) pour la débouter de son action en nullité pour dol, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1338 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Mme [G] [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer à la société Locam les sommes de 3 302, 64 euros correspondant à l'arriéré de loyers et de 24 684 euros correspondant au montant des loyers à échoir ;

1°) ALORS QUE lorsque la signature d'un acte opposé à une partie est contestée par celle-ci, il appartient au juge de procéder à sa vérification en enjoignant aux parties de produire tous documents utiles et, au besoin, en ordonnant une expertise ; qu'en l'espèce Mme [B] contestait avoir signé le procès-verbal de livraison que lui opposait la société Locam pour justifier le paiement des loyers (conclusions, p. 11, dernier §) ; qu'en retenant « qu'elle a[vait] bien réceptionné le photocopieur de marque Canon IRC 5235i n° JWF72577 » (arrêt, p. 6, antépénultième §), cependant qu'il lui appartenait d'enjoindre aux parties de produire tous documents utiles en vue de procéder à la vérification de la signature et au besoin d'ordonner une expertise, la cour d'appel a violé l'article 1324 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse le procès-verbal de livraison du photocopieur dont se prévalait la société Locam pour établir qu'elle avait mis le bien loué à la disposition de Mme [B] ne comportait aucun numéro de série ; qu'en déduisant néanmoins du « procès-verbal de livraison à l'entête de la société Locam » (arrêt, p. 5, in fine) « qu'elle a[vait] bien réceptionné le photocopieur de marque Canon IRC 5235i n° JWF72577 » (arrêt, p. 6, antépénultième §), la cour d'appel a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

3°) ALORS QU'en tout état de cause les juges du fond doivent préciser sur quels éléments de preuve ils se fondent pour retenir un fait contesté par une partie ; qu'en retenant que Mme [B] « a[vait] bien réceptionné le photocopieur de marque Canon IRC 5235i n° JWF72577 » (arrêt, p. 6, antépénultième §), sans préciser sur quels éléments elle se fondait pour établir ce fait que l'exposante contestait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Mme [G] [B] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer à la société Locam la somme de 24 684 euros correspondant au montant des loyers à échoir ;

1°) ALORS QUE les parties s'accordaient pour conclure que le photocopieur objet de la location avait été restitué à la société Locam consécutivement à la résiliation du contrat ; qu'en considérant néanmoins, pour condamner Mme [B] au paiement des loyers à échoir, que ceux-ci étaient la contrepartie de l'usage du photocopieur dont elle disposait toujours (arrêt, p. 7, in fine), la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la stipulation contractuelle qui met à la charge d'une partie une indemnité en cas de résiliation anticipée du contrat dont le montant est équivalent au prix dû en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme constitue une clause pénale susceptible de modération en cas d'excès ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1152 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-21391
Date de la décision : 08/02/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 01 avril 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 fév. 2023, pourvoi n°21-21391


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Claire Leduc et Solange Vigand

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.21391
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