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07/02/2023 | FRANCE | N°22-84148

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 février 2023, 22-84148


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 22-84.148 F-D

N° 00138

SL2
7 FÉVRIER 2023

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 FÉVRIER 2023

Le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date d

u 30 mai 2022, qui, dans l'information suivie notamment contre M. [B] [N], des chefs d'infractions à la législation sur les stup...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 22-84.148 F-D

N° 00138

SL2
7 FÉVRIER 2023

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 FÉVRIER 2023

Le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 30 mai 2022, qui, dans l'information suivie notamment contre M. [B] [N], des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance en date du 15 septembre 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Ménotti, conseiller, et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Ménotti, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 20 septembre 2020 à 22 heures 30, un équipage de la brigade anti-criminalité circulant à [Localité 2], a constaté la progression, de concert et à vive allure, de trois véhicules qui, quelques temps plus tard, ont été retrouvés sur le [Adresse 1] : l'une des personnes, identifiée comme étant M. [B] [N], faisait des allées et venues entre son véhicule et l'immeuble dont il est propriétaire, situé au numéro 39 de ce boulevard ; les enquêteurs ont constaté que différents véhicules s'arrêtaient en pleine voie de circulation devant cet immeuble et, qu'à chaque fois, une personne sortait de l'immeuble pour une prise de contact rapide avec les occupants des véhicules.

3. À 0 heure 25, M. [N] a quitté les lieux, tenant à bout de bras un sac en plastique dont deux fonctionnaires de police se trouvant à proximité diront qu'il s'en dégageait une forte odeur d'herbe de cannabis. C'est dans ces conditions qu'il a été interpellé, les policiers constatant alors que son sac contenait 2,484 kg de cannabis.

4. A 8 heures 30, une perquisition a eu lieu au domicile de M. [N], qui a permis de trouver notamment des balances de précision, des sacs pour congélation et 6,546 kg d'herbe et de résine de cannabis.

5. Le 24 septembre 2020, M. [N] a été mis en examen des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs.

6. Le 20 janvier 2021, il a présenté une requête en annulation d'actes de procédure, portant, d'une part, sur son interpellation et, d'autre part, sur la perquisition de son domicile.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit au moyen de nullité soulevé par le requérant en décidant qu'il n'existait aucun indice objectif de flagrance qui justifiait l'interpellation de M. [N], alors :

1°/ que s'agissant de l'interpellation, la cour ne pouvait tout à la fois et sans se contredire relever en page 5 de l'arrêt « que le sac dégageait une forte odeur de cannabis » avant de conclure en page 11 « l'odeur d'un produit est difficilement décelable, de surcroît à l'air libre dans la rue, s'il se trouve dans un sac thermosoudé, lui-même placé dans un sac poubelle thermosoudé » ;
2°/ que s'agissant de la perquisition, réalisée au domicile de M. [N], dans la continuité de son interpellation en flagrance, l'analyse des procès-verbaux établit que les officiers de police judiciaire ont respecté les prescriptions des articles 56 à 59 du code de procédure pénale.

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en sa première branche

Vu l'article 53 du code de procédure pénale :

8. Il résulte de ce texte que, pour pouvoir agir en enquête de flagrance, les officiers de police judiciaire doivent avoir eu connaissance, au préalable, d'indices apparents d'un comportement révélant l'existence d'une infraction en train de se commettre ou qui vient d'être commise.

9. Pour annuler l'interpellation de M. [N] et les actes subséquents, l'arrêt attaqué énonce, d'une part, qu'il n'existait aucun indice objectif de flagrance d'une quelconque commission d'infractions jusqu'à 0 heure 25, et que, d'autre part, il existe une divergence quant à la présentation des faits, deux des protagonistes sur trois invoquant une odeur prégnante d'herbe de cannabis, alors que le troisième n'en a pas parlé mais a indiqué avoir vu le contenu du sac.

10. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.

11. En effet, il résulte du procès-verbal d'interpellation du 20 septembre 2020 (D3) que, dès 22 heures 30, les enquêteurs ont constaté, en premier lieu, la progression de concert et à vive allure de trois véhicules qu'ils ont retrouvés quelques temps plus tard sur le [Adresse 1] à [Localité 2], en second lieu, les allées et venues de la personne identifiée comme étant M. [N] entre son véhicule et l'immeuble du numéro 39 de ce boulevard, tandis que les deux autres véhicules se positionnaient de façon à bloquer la circulation dans le boulevard, manoeuvre qui laissait présumer l'existence d'une livraison de produits stupéfiants.

12. Le procès-verbal ajoute que plusieurs véhicules se sont arrêtés en pleine voie devant le numéro 39 dudit boulevard et qu'à chaque fois, une personne est sortie de l'immeuble pour une prise de contact rapide avec les occupants des véhicules.

13. Enfin, M. [N] a quitté les lieux à 0 heure 25, muni d'un sac plastique qui a attiré l'attention des trois fonctionnaires de police se trouvant à proximité, dont deux ont relevé l'odeur de cannabis s'en dégageant, et dont le troisième en a aperçu le contenu du fait que le sac était ouvert.

14. Dès lors, et même si les procès-verbaux constatant les délits ne valent qu'à titre de simples renseignements en application de l'article 430 du code de procédure pénale, l'ensemble de ces constatations caractérisent des indices apparents laissant penser qu'une infraction était en train de se commettre ou sur le point de se commettre au sens de l'article 53 dudit code.

15. Dans ces conditions, l'interpellation de M. [N] était régulière.

16. En conséquence, la cassation est encourue sur ce point.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Vu l'article 57, alinéa 1, du code de procédure pénale :

17. Les perquisitions sont faites en présence de la personne au domicile de laquelle les opérations ont lieu.

18. Pour déclarer nulle la perquisition effectuée en flagrance au domicile de M. [N], l'arrêt attaqué énonce que les fonctionnaires de police ne pouvaient pénétrer dans les lieux dans les conditions décrites, d'autant que l'intrusion était également motivée par le fait qu'il s'agissait du domicile d'une personne ayant commis une infraction flagrante, alors qu'il a été précédemment jugé que les conditions de son interpellation étaient irrégulières.

19. En l'état de ces énonciations, et dès lors que M. [N], régulièrement interpellé, était présent pour assister à la perquisition de son domicile, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.

20. La cassation est par conséquent encourue à nouveau.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 30 mai 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 22-84148
Date de la décision : 07/02/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-En-Provence, 30 mai 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 fév. 2023, pourvoi n°22-84148


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.84148
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