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07/12/2022 | FRANCE | N°21-60176

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2022, 21-60176


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1321 F-D

Pourvoi n° T 21-60.176

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

M. [X] [B], domiciliÃ

© [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-60.176 contre le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le tribunal de première instance de Papeete (conte...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1321 F-D

Pourvoi n° T 21-60.176

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

M. [X] [B], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-60.176 contre le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le tribunal de première instance de Papeete (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société GL constructions, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la confédération syndicale Otahi, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à M. [K] [Y], domicilié à la confédération syndicale Otahi, [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de M. [B], après débats en l'audience publique du 19 octobre 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué n° 323 (tribunal de première instance de Papeete, 5 juillet 2021), par lettre du 25 février 2021, la confédération syndicale Otahi (le syndicat) a transmis à la société GL Constructions (la société) sa liste de candidats au bureau du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), M. [B] (le salarié) y figurant comme secrétaire.

2. Par lettre du 1er mars 2021, le salarié s'est porté candidat hors liste syndicale aux élections des représentants du personnel au CHSCT de la société.

3. Par requête enregistrée le 4 mars 2021, la société a saisi le tribunal de première instance d'une demande en annulation de la désignation du salarié au poste de secrétaire du CHSCT et de la candidature de ce dernier hors liste syndicale.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens,

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief au jugement de le condamner à payer à la société la somme de 100 000 FCP en réparation du préjudice causé par ses candidatures prétendument frauduleuses et la somme de 150 000 FCP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile, alors « qu'en condamnant M. [B] à payer à la société GL Constructions ''la somme de 100 000 FCP en application de l'article 407 du code de procédure civile'' au motif que ''par la multiplication des tentatives frauduleuses de bénéficier du statut de salarié protégé, M. [B] entretient un contentieux stérile obligeant son employeur à la plus grande vigilance et à l'engagement de procédures judiciaires'', le tribunal civil de première instance n'a pas caractérisé l'abus de droit prétendument imputable à M. [B] et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française et, le cas échéant, de l'article 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable en Polynésie française :

6. L'exercice d'un droit peut dégénérer en un abus qui suppose la démonstration d'une faute.

7. Pour condamner le salarié à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts du fait de ses candidatures frauduleuses, le jugement retient que, par la multiplication des tentatives frauduleuses de bénéficier du statut de salarié protégé, l'intéressé entretient un contentieux stérile obligeant son employeur à la plus grande vigilance et à l'engagement de procédures judiciaires.

8. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'abus d'un droit, le tribunal a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation sur le troisième moyen ne s'étend pas aux chefs de dispositif mettant à la charge du salarié les dépens ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, la critique formulée par le moyen n'étant pas susceptible d'atteindre ces chefs de dispositif.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du troisième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [B] à payer à la société GL Constructions la somme de 100 000 FCP à titre de dommages-intérêts pour candidatures frauduleuses, le jugement n° 323 rendu le 5 juillet 2021, entre les parties, par le tribunal de première instance de Papeete ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de première instance de Papeete autrement composé ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [B] ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. [B]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. [X] [B] reproche au jugement attaqué d'avoir dit la requête recevable ;

ALORS QUE la nullité d'un acte de procédure ne peut être couverte que par une régularisation qui ne laisse subsister aucun grief ; qu'en retenant en l'espèce, pour déclarer valable la requête de la société GL Constructions, que la procédure avait été régularisée par la production aux débats d'un extrait Kbis (jugement attaqué, p. 4, alinéa 1er), sans rechercher si cette production suffisait à dissiper l'incertitude relative à l'identité du responsable légal de la société requérante, le tribunal civil de première instance a privé sa décision de base légale au regard des articles 43 et 44 du code de procédure civile de Polynésie française.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

M. [X] [B] reproche au jugement attaqué d'avoir annulé comme frauduleuses ses candidatures syndicale et libre aux élections des membres du CHSCT de la société GL Constructions et de l'avoir condamné à payer à la société GL Constructions la somme de 100 000 FCP en réparation du préjudice causé par ces candidatures prétendument frauduleuses ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la fraude affectant la candidature à une élection professionnelle justifie l'annulation de celleci lorsqu'elle est inspirée non par l'intérêt de la collectivité des salariés mais par le seul désir de l'un d'eux de bénéficier de la protection accordée par la loi aux candidats et aux élus ; qu'en constatant en l'espèce que les candidatures de M. [B] n'avaient aucune conséquence sur la procédure de licenciement en cours, puisqu'elles étaient postérieures à l'engagement de cette procédure (jugement attaqué, p. 4, alinéa 12), mais en considérant toutefois que la fraude était avérée dès lors que M. [B] « peut cependant craindre un licenciement pour absence prolongée » et « qu'en outre, son conflit récurrent avec son employeur ne peut que l'inciter à rechercher les moyens de se protéger » (jugement attaqué, p. 4, alinéa 13), le tribunal civil de première instance, qui s'est ainsi borné à instruire à l'encontre du salarié un procès d'intention, n'a pas caractérisé la fraude prétendument imputable à celui-ci et a privé sa décision de base légale au regard des articles Lp. 2411-15 et Lp. 4612-3 du code du travail de Polynésie française ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la fraude affectant la candidature à une élection professionnelle justifie l'annulation de celleci lorsqu'elle est inspirée non par l'intérêt de la collectivité des salariés mais par le seul désir de l'un d'eux de bénéficier de la protection accordée par la loi aux candidats et aux élus ; qu'en affirmant que « les errements syndicaux de l'intéressé (?) démontrent à l'envi que loin d'une préoccupation de défense d'intérêts collectifs, M. [B] ne poursuit que des objectifs strictement personnels » (jugement attaqué, p. 4, alinéa 14), cependant que le fait pour un salarié de se présenter à plusieurs reprises à des élections professionnelles ne suffit pas à caractériser l'existence d'une fraude, le tribunal civil de première instance s'est déterminé par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles Lp. 2411-15 et Lp. 4612-3 du code du travail de Polynésie française.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

M. [X] [B] reproche au jugement attaqué de l'avoir condamné à payer à la société GL Constructions la somme de 100 000 FCP en réparation du préjudice causé par ces candidatures prétendument frauduleuses et la somme de 150 000 FCP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile ;

ALORS, D'UNE PART, QU' en condamnant M. [B] à payer à la société GL Constructions « la somme de 100.000 FCP en application de l'article 407 du code de procédure civile » (jugement attaqué, p. 5, alinéa 1er), puis la somme de « 150.000 FCP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile » (jugement attaqué, p. 5, alinéa 8), le tribunal civil de première instance a prononcé deux condamnations successives fondées sur le même texte au profit de la même partie ; qu'en procédant ainsi à un cumul d'indemnisations, le tribunal a violé l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU' en toute hypothèse, en condamnant M. [B] à payer à la société GL Constructions « la somme de 100.000 FCP en application de l'article 407 du code de procédure civile » (jugement attaqué, p. 5, alinéa 1er), au motif que « par la multiplication des tentatives frauduleuses de bénéficier du statut de salarié protégé, M. [B] entretient un contentieux stérile obligeant son employeur à la plus grande vigilance et à l'engagement de procédures judiciaires » (jugement attaqué, p. 4 in fine), le tribunal civil de première instance n'a pas caractérisé l'abus de droit prétendument imputable à M. [B] et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 407 du code de procédure civile de Polynésie française et, le cas échéant, de l'article 1240 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-60176
Date de la décision : 07/12/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete, 05 juillet 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2022, pourvoi n°21-60176


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.60176
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