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07/12/2022 | FRANCE | N°21-17388;21-17390;21-17396;21-17398

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2022, 21-17388 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1316 F-D

Pourvois n°
J 21-17.388
M 21-17.390
T 21-17.396
V 21-17.398 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE

SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6], a formé les p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1316 F-D

Pourvois n°
J 21-17.388
M 21-17.390
T 21-17.396
V 21-17.398 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6], a formé les pourvois n° J 21-17.388, M 21-17.390, T 21-17.396 et V 21-17.398 contre quatre arrêts rendus le 31 mars 2021 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à Mme [A] [L], domiciliée [Adresse 5],

2°/ à Mme [O] [Z], domiciliée [Adresse 3],

3°/ à Mme [H] [K], domiciliée [Adresse 1],

4°/ à Mme [I] [J], domiciliée [Adresse 4],

5°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation communs annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [Z], après débats en l'audience publique du 18 octobre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n°J 21-17.388, M 21-17.390, T 21-17.396 et V 21-17.398 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Montpellier, 31 mars 2021), Mmes [L], [Z] et deux autres salariées de la société Elior services propreté et santé (la société ESPS), affectées en qualité d'agents de services sur le site de nettoyage du centre de [Localité 8] à [Localité 9], ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment le paiement d'une prime de treizième mois versée aux salariés de la même entreprise travaillant sur le site de nettoyage de la polyclinique de [Localité 13], d'un complément de salaire pour dimanches travaillés versé aux salariés de la même entreprise transférés du site de nettoyage de [Localité 14] à [Localité 12] et d'une prime d'assiduité versée aux salariés de la même entreprise travaillant sur le site de nettoyage de [Localité 11] à [Localité 7], en application du principe d'égalité de traitement.

3. Le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône (le syndicat) est intervenu à l'instance.

4. Mme [L] est sortie des effectifs de la société ESPS le 10 mars 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief aux arrêts de lui ordonner de procéder à la régularisation de la prime de treizième mois et de le condamner à verser aux salariées un rappel de prime de treizième mois, alors « que constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et non équivoque de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; que pour juger que "le versement d'une prime de treizième mois effectué une première fois en 2012 puis de façon continue au profit de quelques salariés de l'entreprise doit être analysé comme un avantage unilatéralement et discrétionnairement accordé à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 13]" et condamner, en conséquence, la société exposante à verser aux salariées [L] et autres un rappel de prime de treizième mois, la cour d'appel a affirmé que "l'exécution provisoire ordonnée par ces jugements [rendus le 5 janvier 2015] ne concernait que le paiement de primes pour les années antérieures à 2013 et ne valait donc pas pour l'avenir", de sorte qu' "aucune condamnation d'une juridiction n'a été prononcée concernant le versement de la prime postérieurement à l'année 2012" ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la remise en cause par la société ESPS de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser une prime de treizième mois à certains salariés du site de nettoyage de la polyclinique de [Localité 13] ne suffisait pas à exclure tout engagement unilatéral de l'employeur de la leur attribuer, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

6. Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

7. Pour faire droit aux demandes des salariées en régularisation et en paiement d'un rappel de prime de treizième mois, les arrêts retiennent que l'exécution provisoire ordonnée par les jugements rendus le 5 janvier 2015 au profit des salariés [E] et autres du site de la polyclinique de [Localité 13] ne concernait que le paiement de primes pour les années antérieures à 2013 et ne valait donc pas pour l'avenir. Ils ajoutent qu'aucune condamnation d'une juridiction n'a été prononcée concernant le versement de la prime postérieurement à l'année 2012.

8. Ils concluent qu'il en résulte que le versement d'une prime de treizième mois effectué une première fois en 2012 puis de façon continue au profit de quelques salariés de l'entreprise doit être analysé comme un avantage unilatéralement et discrétionnairement accordé à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 13].

9. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement de la prime litigieuse à compter de novembre 2012 aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique du Languedoc à [Localité 13] ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à verser aux salariées un complément de salaire pour dimanches travaillés à hauteur de 60 % pour atteindre la majoration de 80 % à compter de l'année 2012 et un rappel de salaires de ce chef, alors « que l'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser aux salariées [L] et autres la prime de majoration pour les dimanches travaillés réservée aux salariés transférés du site de [Localité 14], que "la société Elior service propreté et santé ne produit aucune pièce et ne fait valoir aucun argument justifiant que lorsque le 1er mai 2006, la maison de retraite médicalisée de [Localité 14] a décidé d'externaliser ses services de bio-nettoyage, il y a eu transfert d'une entité économique autonome conservant son identité au sens d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre", sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les salariés du site de [Localité 14] n'avaient pas été transférés à la société exposante à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de sorte que cette dernière était fondée à maintenir la prime de majoration pour les dimanches travaillés au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement et de l'article L. 1224-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

11. L'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

12. Pour condamner l'employeur à payer aux salariées un complément de salaire à hauteur de 60 % pour atteindre la majoration de 80 % à compter de l'année 2012 et un rappel de salaires pour les dimanches travaillés, les arrêts retiennent que la société ESPS ne produit aucune pièce et ne fait valoir aucun argument justifiant que lorsque le 1er mai 2006, la maison de retraite médicalisée de [Localité 14] a décidé d'externaliser ses services de bio-nettoyage, il y a eu transfert d'une entité économique autonome conservant son identité au sens d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre. Ils ajoutent qu'il n'est donc pas justifié du transfert d'une entité économique autonome lors de la reprise du marché du site de [Localité 14] à [Localité 12].

13. En se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les salariés du site de [Localité 14] n'avaient pas été transférés à la société ESPS à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de sorte que cette dernière était fondée à maintenir la prime de majoration pour les dimanches travaillés au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe et du texte susvisés.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

14. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à verser aux salariées un rappel de prime d'assiduité, alors « que repose sur une raison objective et pertinente la différence de traitement entre les salariés d'établissements différents d'une même entreprise lorsqu'elle a pour objet de réduire les disparités constatées, sur un même site de travail, entre les salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique ; qu'en affirmant, pour condamner la société exposante à verser aux salariées [L] et autres la prime d'assiduité de 200 euros versée aux salariés affectés sur le site de [Localité 11], que "le versement de cette prime à Mmes [B] et [P] résulte d'un engagement unilatéral de la société ESPS et celle-ci ne fait valoir aucun argument justifiant que le non versement de cette prime repose sur des raisons objectives, celles-ci effectuant le même travail que les agents d'entretien de la Clinique [Localité 11] et se trouvant dans une situation identique", quand il n'était pas contesté par les parties que la société ESPS avait accordé une prime d'assiduité de 200 euros aux salariés affectés sur le site de [Localité 11] aux fins de réduire les disparités constatées avec les salariés affectés sur ce même site dans le cadre d'un transfert conventionnel et qui percevaient une prime d'assiduité plus élevée en tant qu'avantage acquis, de sorte que la différence de traitement avec les salariées [L] et autres, qui étaient affectées sur un autre site, était justifiée objectivement, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

15. Mme [Z] conteste la recevabilité du moyen comme nouveau, mélangé de fait et de droit. Elle soutient que la société ESPS n'a jamais prétendu qu'elle aurait versé la prime d'assiduité aux salariés qu'Hôpital service avait directement recrutés sur le site de [10], en raison de ce qu'elle ou Hôpital service aurait eu la volonté de réduire des disparités, sur ce site, entre des salariés transférés conventionnellement et des salariés directement recrutés par Hôpital service, devenu ensuite la société ESPS, ni que sa volonté aurait constitué une raison objective et pertinente.

16. Cependant, dans leurs écritures d'appel, les salariées elles-mêmes faisaient valoir que « dans les années 2000 à 2006, la société Hôpital service recrutait du personnel sur la clinique de [Localité 11] à [Localité 7] et accordait une prime d'assiduité de 200 euros par an pour réduire l'inégalité de traitement avec les salariés travaillant sur le même site et qui bénéficiaient d'une prime d'assiduité de 974,40 euros résultant d'un avantage acquis. »

17. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

18. Une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés de la même entreprise et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

19. Pour condamner l'employeur à payer aux salariées un rappel de prime d'assiduité, les arrêts retiennent que le versement de cette prime à Mmes [B] et [P] résulte d'un engagement unilatéral de la société ESPS et celle-ci ne fait valoir aucun argument justifiant que le non versement de cette prime à Mme [L] et autres repose sur des raisons objectives, celles-ci effectuant le même travail que les agents d'entretien de la clinique [Localité 11] et se trouvant dans une situation identique.

20. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté par les parties que l'employeur avait accordé la prime d'assiduité aux deux intéressées par sa volonté de réduire les disparités entre des salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis sur le site de nettoyage de la clinique de [10] en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique, ce dont il résultait que cette différence de traitement avec des salariés d'un autre site de nettoyage reposait sur une justification objective et pertinente, la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés.

Et sur les quatrième et cinquième moyens, réunis

Enoncé du moyen

21. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à verser aux salariées et au syndicat des dommages-intérêts, alors « que la cassation à intervenir sur les premier, deuxième et troisième moyens entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur les quatrième et cinquième moyens, en application de l'article 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

22. La cassation prononcée sur les premier à troisième moyens entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif critiqués par les quatrième et cinquième moyens relatifs aux dommages-intérêts alloués aux salariées et au syndicat, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Portée et conséquences de la cassation

23. La cassation partielle n'emporte pas cassation des chefs de dispositif des arrêts condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ordonnent à la société Elior services propreté et santé de procéder à la régularisation de la prime de treizième mois et la condamnent à verser :
- à titre de rappel de prime de treizième mois les sommes de 5 160,17 euros à Mme [L], 5 855,23 euros à Mme [Z], 4 265,10 euros à Mme [K] et 3 643,92 euros à Mme [J],
- un complément de salaire pour dimanches travaillés à hauteur de 60 % pour atteindre la majoration de 80 % à compter de l'année 2012 à chaque salariée,
- à titre de rappel de salaire pour dimanches travaillés les sommes de 1 461,94 euros outre 145,19 euros de congés payés afférents à Mme [Z], 2 961,52 euros outre 296,15 euros de congés payés afférents à Mme [K] et 1 994,64 euros outre 199,46 euros de congés payés afférents à Mme [J],
- à titre de rappel de prime d'assiduité les sommes de 508,50 euros à Mme [L], 646,38 euros à Mme [Z], 423,58 euros à Mme [K] et 317,40 euros à Mme [J],
- à titre de dommages-intérêts les sommes de 500 euros à chaque salariée et de 20 euros par arrêt au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône,
les arrêts rendus le 31 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne Mmes [L], [Z], [K], [J] et le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens communs produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé, demanderesse aux pourvois n° J 21-17.388, M 21-17.390, T 21-17.396 et V 21-17.398

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société ESPS fait grief aux arrêts attaqués d'avoir confirmé les jugements entrepris en ce qu'ils lui avaient ordonné de procéder à la régularisation de la prime de 13ème mois et de l'avoir condamnée à verser aux salariées un rappel de prime de 13ème mois ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en affirmant, pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué une première fois en 2012 puis de façon continue au profit de quelques salariés de l'entreprise doit être analysé comme un avantage unilatéralement et discrétionnairement accordé à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 13] » et condamner, en conséquence, la société exposante à verser aux salariées [L] et autres un rappel de prime de 13ème mois, qu'« en ce qui concerne l'existence de procédures en cours qui serait à l'origine de l'erreur commise (?), il ne s'agissait donc pas d'une même demande en justice, et donc d'un même contentieux, qui aurait été de nature à justifier une confusion initiale » et que « la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE soutient que postérieurement à son erreur initiale, elle a continué à verser la prime de 13ème mois aux salariés [E] et autres, après décembre 2012, toujours en raison des contentieux en cours et du contexte social » mais que « toutefois, il a déjà été indiqué que la procédure pendante devant le Conseil de prud'hommes de [Localité 13] n'était pas similaire à celle intentée en décembre 2012 », sans cependant examiner le jugement avant dire droit rendu par le Conseil de prud'hommes de [Localité 13] le 29 avril 2013 qui, saisi en 2012 par le collectif des salariés [E] et autres du site de [Localité 13] d'une demande en paiement d'une prime de 13ème mois, avait décidé de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la Cour d'appel de Montpellier chargée d'examiner la demande en paiement d'une prime de 13ème mois formée par un autre collectif de salariés du même site de [Localité 13] et qui avaient obtenu gain de cause par jugements du 2 avril 2012, ce dont il résultait nécessairement que les deux procédures litigieuses étaient étroitement liées et portaient sur la même demande, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et non équivoque de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés; que pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué une première fois en 2012 puis de façon continue au profit de quelques salariés de l'entreprise doit être analysé comme un avantage unilatéralement et discrétionnairement accordé à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 13] » et condamner, en conséquence, la société exposante à verser aux salariées [L] et autres un rappel de prime de 13ème mois, la Cour d'appel a affirmé que « l'exécution provisoire ordonnée par ces jugements [rendus le 5 janvier 2015] ne concernait que le paiement de primes pour les années antérieures à 2013 et ne valait donc pas pour l'avenir », de sorte qu'« aucune condamnation d'une juridiction n'a été prononcée concernant le versement de la prime postérieurement à l'année 2012 » ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la remise en cause par la société ESPS de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser une prime de 13ème mois à certains salariés du site de nettoyage de la polyclinique de [Localité 13] ne suffisait pas à exclure tout engagement unilatéral de l'employeur de la leur attribuer, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

ALORS, ENFIN, QUE sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé et entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué une première fois en 2012 puis de façon continue au profit de quelques salariés de l'entreprise doit être analysé comme un avantage unilatéralement et discrétionnairement accordé à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 13] » et condamner, en conséquence, la société exposante à verser aux salariées [L] et autres un rappel de prime de 13ème mois, la Cour d'appel a affirmé que « la Cour de cassation, dans son arrêt du 13 décembre 2017, a cassé les arrêts de la Cour d'appel de Montpellier en date du 20 janvier 2016, et malgré cette décision, il est justifié, par la production aux débats du bulletin de Mme [F] de novembre 2018, que la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE a continué de verser à cette salariée la prime de 13ème mois » ; qu'en statuant ainsi, quand le versement, par l'employeur, de la prime de 13ème mois en novembre 2018 avait été effectué postérieurement à l'arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017 qui avait replacé les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la décision cassée, en exécution des jugements du 5 janvier 2015 assortis de plein droit de l'exécution provisoire et alors même que le recours exercé par l'employeur n'avait pas encore donné lieu à une décision irrévocable, de sorte qu'un tel versement ne pouvait valoir engagement unilatéral de l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 625, alinéas 1 et 2, du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La société ESPS fait grief aux arrêts attaqués d'avoir confirmé les jugements entrepris en ce qu'ils l'avaient condamnée à verser aux salariées [L] et autres un complément de salaire pour dimanches travaillés à hauteur de 60 % pour atteindre la majoration de 80 % à compter de l'année 2012 et de l'avoir condamnée à verser un rappel de salaires sur ce chef ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les juges sont tenus de respecter les termes du litige ; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser aux salariées [L] et autres le complément de salaire pour les dimanches travaillés qui était alloué aux salariés transférés du site de [Localité 14], que « la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE ne produit aucune pièce et ne fait valoir aucun argument justifiant que lorsque le 1er mai 2006, la maison de retraite médicalisée de [Localité 14] a décidé d'externaliser ses services de bio-nettoyage, il y a eu transfert d'une entité économique autonome conservant son identité au sens d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre » et qu'« il n'est donc pas justifié du transfert d'une entité économique autonome lors de la reprise du marché du site de [Localité 14] à Marseille, les dispositions de l'article L 1224-1 du Code du travail n'ont pas reçu application », quand les parties en litige s'accordaient, dans leurs conclusions d'appel, sur le fait que les salariés du site de [Localité 14], qui bénéficiaient d'une prime de majoration pour les dimanches travaillés, avaient été transférés à la société exposante à la suite d'une application volontaire de l'article L 1224-1 du Code du travail, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART et en tout état de cause, QUE l'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L 1224-1 du Code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser aux salariées [L] et autres la prime de majoration pour les dimanches travaillés réservée aux salariés transférés du site de [Localité 14], que « la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE ne produit aucune pièce et ne fait valoir aucun argument justifiant que lorsque le 1er mai 2006, la maison de retraite médicalisée de [Localité 14] a décidé d'externaliser ses services de bio-nettoyage, il y a eu transfert d'une entité économique autonome conservant son identité au sens d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les salariés du site de [Localité 14] n'avaient pas été transférés à la société exposante à la suite d'une application volontaire de l'article L 1224-1 du Code du travail, de sorte que cette dernière était fondée à maintenir la prime de majoration pour les dimanches travaillés au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement et de l'article L 1224-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

La société ESPS fait grief aux arrêts attaqués de l'avoir condamnée à verser aux salariées un rappel de prime d'assiduité;

ALORS QUE repose sur une raison objective et pertinente la différence de traitement entre les salariés d'établissements différents d'une même entreprise lorsqu'elle a pour objet de réduire les disparités constatées, sur un même site de travail, entre les salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis en application de la garantie d'emploi instituée par la Convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique ; qu'en affirmant, pour condamner la société exposante à verser aux salariées [L] et autres la prime d'assiduité de 200 € versée aux salariés affectés sur le site de [Localité 11], que « le versement de cette prime à Mesdames [B] et [P] résulte d'un engagement unilatéral de la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE et celle-ci ne fait valoir aucun argument justifiant que le non versement de cette prime [aux salariées [L] et autres] repose sur des raisons objectives, celles-ci effectuant le même travail que les agents d'entretien de la Clinique [Localité 11] et se trouvant dans une situation identique », quand il n'était pas contesté par les parties que la société ESPS avait accordé une prime d'assiduité de 200 € aux salariés affectés sur le site de [Localité 11] aux fins de réduire les disparités constatées avec les salariés affectés sur ce même site dans le cadre d'un transfert conventionnel et qui percevaient une prime d'assiduité plus élevée en tant qu'avantage acquis, de sorte que la différence de traitement avec les salariées [L] et autres, qui étaient affectées sur une autre site, était justifiée objectivement, la Cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

La société ESPS fait grief aux arrêts attaqués d'avoir confirmé les jugements entrepris en ce qu'ils l'avaient condamnée à verser aux salariées des dommages et intérêts ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur les premier, deuxième, et troisième moyens entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le quatrième moyen, en application de l'article 625 du Code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

La société ESPS fait grief aux arrêts attaqués d'avoir confirmé les jugements entrepris en ce qu'ils l'avaient condamnée à verser au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône des dommages et intérêts ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur les premier, deuxième, et troisième moyens entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le cinquième moyen, en application de l'article 625 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-17388;21-17390;21-17396;21-17398
Date de la décision : 07/12/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 31 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2022, pourvoi n°21-17388;21-17390;21-17396;21-17398


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.17388
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