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07/12/2022 | FRANCE | N°21-14498

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 décembre 2022, 21-14498


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 865 F-D

Pourvoi n° T 21-14.498

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société Compagnie foncière Alpha, société civile i

mmobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-14.498 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Montpell...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 865 F-D

Pourvoi n° T 21-14.498

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société Compagnie foncière Alpha, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-14.498 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Montpellier (5e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [W] [O],

2°/ à Mme [U] [J], épouse [O],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

3°/ à la société France pierre patrimoine, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

M. et Mme [O] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société Compagnie foncière Alpha, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [O], de la SCP Gaschignard, avocat de la société France pierre patrimoine, après débats en l'audience publique du 25 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 novembre 2020), la société Compagnie foncière Alpha, aux droits de laquelle est venue la société France pierre patrimoine (la bailleresse), a donné à bail à M. et Mme [O] (les locataires) un local à usage d'habitation.

2. Invoquant un manquement à son obligation d'entretien des lieux, les locataires ont assigné la bailleresse en condamnation à réaliser des travaux de réfection ainsi qu'en indemnisation de leur préjudice de jouissance.

3. Une expertise a été ordonnée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

4. La bailleresse fait grief à l'arrêt de la condamner à faire exécuter les travaux préconisés par le rapport d'expertise ainsi qu'à payer aux locataires une certaine somme en réparation de leur préjudice de jouissance, alors « que manque à son devoir d'impartialité l'expert judiciaire qui fait état de ses convictions personnelles dans son rapport ; qu'en l'espèce, la société Compagnie foncière Alpha faisait valoir que M. [D] avait manqué à son devoir d'impartialité pour avoir, d'une part, tenu des propos clairement hostiles ou désobligeants à son encontre, et, d'autre part, assuré la défense des locataires afin de prendre en compte la situation des parties au regard de l'égalité des armes en formulant à leur profit des demandes non comprises dans sa mission au titre, par exemple, d'un préjudice d'anxiété décrit en ces termes "comment ne pas en tenir compte, depuis maintenant quarante-et-une années les époux [O] sont dans les spectatives [sic] et s'inquiètent de l'évolution du sinistre jour après jour !" ; qu'en affirmant que le rapport [D] était exempt de toute critique sans rechercher comme il lui était demandé, si l'expert n'avait pas tenu ainsi des propos inappropriés de nature à faire naître un double légitime sur son impartialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 237 du code de procédure civile et 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 237 du code de procédure civile :

5. Aux termes de ce texte, le technicien commis doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité.

6. Pour condamner la bailleresse à faire exécuter les travaux préconisés par le rapport d'expertise, l'arrêt retient que le technicien commis, après avoir recueilli les observations des parties, décrit ses constatations des désordres affectant l'immeuble, en analyse l'origine, détermine les travaux propres à y remédier et apporte des réponses précises et circonstanciées aux dires des parties, sans constat d'un manquement de l'expert dans ses investigations et ses réponses à la mission du juge, ni au respect du contradictoire dans la conduite de ses opérations.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la teneur des écrits de l'expert ne révélait pas une hostilité à l'égard de la bailleresse et un parti pris en faveur des locataires, entachant le rapport d'un manque d'objectivité ou d'impartialité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi principal entraîne la cassation des dispositions, critiquées par le moyen du pourvoi incident, fixant le montant des préjudices de jouissance retenus concernant les locataires, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal et sur le pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne M. et Mme [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie foncière Alpha (demanderesse au pourvoi principal)

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La SCI Compagnie Foncière Alpha fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à faire exécuter dans un délai de quatre mois suivant la signification de l'arrêt, sous une astreinte de 2.000 € par mois de retard, sous le contrôle de la société France Pierre Patrimoine, les travaux de réparation des désordres préconisés par le rapport d'expertise dans son point 5, pages 27 à 33, pour le montant total évalué au moment de l'expertise à la somme de 65.436,61 € TTC, conformément aux normes NF C15-100 publiées par l'UTE, reprises sur le Guide des travaux de mise en sécurité de l'habitat existant édité par Promotelec (version 2008) et de l'avoir condamnée, solidairement avec la société France Pierre Patrimoine, à payer à M. et Mme [O] une somme de 10.000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance des lieux,

1°) Alors qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, il incombe à la juridiction du second degré de vider sa saisine en statuant sur tous les points de fait et de droit qui lui sont déférés par les parties ; qu'en l'espèce, la société Compagnie Foncière Alpha sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il avait annulé le rapport d'expertise du 23 novembre 2015 en raison d'un doute légitime sur l'impartialité de l'expert dont les affirmations péremptoires sur la nonconformité de l'appartement aux normes de décence étaient contredites par les constatations du rapport d'expertise [Y] [T] du 14 décembre 2007 par lequel M. [Y] [T] avait constaté l'« état convenable » du logement et par le procès-verbal de constat du 7 novembre 2014 (concl. p. 13 et 14 et pièces n° 42 et 10) ; que la cour d'appel a toutefois déclaré ne pas confirmer le motif sibyllin du premier juge qui avait retenu une trop grande disparité entre le rapport [D] et les constatations de l'expert [Y] [T] sans aucun élément de démonstration, s'abstenant ainsi de se prononcer elle-même sur ce point ; qu'elle a donc violé l'article 561 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du code civil,

2°) Alors, subsidiairement, que le juge est tenu d'examiner, même sommairement, les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, il résultait clairement du rapport d'expertise du 23 novembre 2015 que M. [D] fondait ses conclusions sur le fait que les époux [O] auraient évolué dans un environnement insalubre « depuis plus de cinquante ans » (rapport, pièce n° 40, p. 24, 25, 26 et 35) et que « les désordres existaient lors de l'expertise [Y] [T] en date du 14.12.2007 » (rapport, p. 26) ; qu'en s'abstenant d'effectuer une analyse comparative des deux rapports d'expertise judiciaire pour vérifier si les affirmations sur lesquelles M. [D] fondait son rapport n'étaient pas manifestement controuvées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

3°) Alors que tout élément de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité de l'expert constitue une cause de nullité du rapport ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si l'existence d'un doute légitime sur l'impartialité de l'expert [D] n'était pas caractérisée par le fait que ses affirmations péremptoires sur la nécessité d'effectuer une rénovation complète de l'appartement étaient contredites par les constatations du procès-verbal établi par Me [R] au début des opérations d'expertise (le 7 novembre 2014) qui faisait état d'un « excellent état de réfection » pour le plafond de la chambre, les w.c. et la salle de bain, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 237 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme,

4°) Alors que manque à son devoir d'impartialité l'expert judiciaire qui fait état de ses convictions personnelles dans son rapport ; qu'en l'espèce, la société Compagnie Foncière Alpha faisait valoir que M. [D] avait manqué à son devoir d'impartialité pour avoir, d'une part, tenu des propos clairement hostiles ou désobligeants à son encontre (rapport, p. 35, 39, 41), et, d'autre part, assuré la défense des locataires afin de « prendre en compte la situation des parties au regard de l'égalité des armes » en formulant à leur profit des demandes non comprises dans sa mission au titre, par exemple, d'un « préjudice d'anxiété » décrit en ces termes « comment ne pas en tenir compte, depuis maintenant 41 années les époux [O] sont dans les spectatives [sic] et s'inquiètent de l'évolution du sinistre jour après jour ! » (rapport, p. 35 et 45. – cf. concl. p. 12 à 13) ; qu'en affirmant que le rapport [D] était exempt de toute critique sans rechercher comme il lui était demandé, si l'expert n'avait pas tenu ainsi des propos inappropriés de nature à faire naître un doute légitime sur son impartialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes,

5°) Alors que l'impartialité de l'expert constitue une formalité substantielle dont l'inobservation est de nature à entraîner l'annulation de l'expertise ; qu'en l'espèce, la société Compagnie Foncière Alpha faisait valoir, preuve à l'appui, qu'avant même d'avoir effectué « des contrôles de présence d'humidité et de fuites d'eau éventuelles dans l'appartement des consorts [O] », M. [D] avait d'emblée prévu la réfection intégrale de l'appartement en « convoqu[ant] trois entreprises, MIE Étanchéité, Aldeguer Électricité, Martin Peinture, afin d'établir des devis des travaux » (concl. p. 11 et 12 et courrier du décembre 2014, pièce n° 50) ; qu'en s'abstenant de rechercher si le fait pour M. [D] d'avoir programmé une rénovation intégrale de l'appartement avant toute investigation n'était pas de nature à faire naître un doute légitime sur son impartialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes,

6°) Alors qu'en l'espèce, la société Compagnie Foncière Alpha faisait valoir que les nombreuses incohérences et contradictions du rapport confirmaient encore que l'expert n'avait pas établi ses conclusions à la fin des opérations sur la base de faits dûment vérifiés ainsi qu'en attestaient, par exemple, ses conclusions sur l'existence d'une humidité persistante établie sur la base de relevés d'humidité qu'il avait initialement fixés à plus de 150 % (ce qui est impossible), avant d'admettre qu'en réalité les taux d'humidité n'étaient que de 7 à 8,5 % (rapport, p. 14 et 15), attestant ainsi que les murs étaient parfaitement secs (concl. p. 17 in fine à 19 et pièce n° 48), ou ses observations sur l'inutilité de VMC dans les bâtiments anciens dont les fenêtres « assuraient un renouvellement de l'air supprimé par des [fenêtres] nouvelles » après avoir toutefois attribué l'« Origine des désordres » à l'absence de cet équipement (rapport, p. 18) dans un bâtiment datant du « 17e siècle » (rapport p. 34 §1) ; qu'en jugeant le rapport exempt de toute critique à la faveur de considérations aussi générales qu'imprécises sur le fait que les désordres avaient tous été attribués à une conséquence de la vétusté des lieux et de l'absence de travaux d'entretien depuis un grand nombre d'années, sans rechercher concrètement, comme il lui était demandé, si les incohérences et contradictions dénoncées par la société Compagnie Foncière Alpha étaient caractérisées en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes,

7°) Alors qu'en se bornant à affirmer que les conclusions du rapport étaient fondées sur des analyses précises et circonstanciées sans rechercher, comme il lui était demandé (concl. p. 14 et 17 et pièces n° 43 à 47), si le recours massif à des « copier-coller » de documents trouvés sur internet, en guise de justification de l'origine des désordres et de la nécessité d'une rénovation intégrale de l'appartement, n'était pas de nature à faire naître un doute légitime sur son impartialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
– Subsidiaire

La SCI Compagnie Foncière Alpha fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à faire exécuter dans un délai de quatre mois suivant la signification de l'arrêt, sous une astreinte de 2.000 € par mois de retard, sous le contrôle de la société France Pierre Patrimoine, les travaux de réparation des désordres préconisés par le rapport d'expertise dans son point 5, pages 27 à 33, pour le montant total évalué au moment de l'expertise à la somme de 65.436,61 €
TTC, conformément aux normes NF C15-100 publiées par l'UTE, reprises sur le Guide des travaux de mise en sécurité de l'habitat existant édité par Promotelec (version 2008) et de l'avoir condamnée, solidairement avec la société France Pierre Patrimoine, à payer à M. et Mme [O] une somme de 10.000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance des lieux,

1°) Alors qu'il est prohibé au juge de dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Compagnie Foncière Alpha faisait valoir, preuve à l'appui, que les conclusions du rapport quant à la dangerosité du logement pour les locataires étaient fondées, d'une part, sur de simples hypothèses en ce qui concerne la dangerosité des peintures du seul fait qu'elles « peuvent contenir du plomb » (rapport, p. 20), la nécessité de détruire une partie des travaux de rénovation de la salle de bain en ce que « l'humidité peut encore être présente » (rapport, p. 28), l'humidité en provenance de la terrasse qui a été admise « suivant les dires de M. [O] » (rapport, p. 22 avant dern. §) ou la nécessité d'installation d'une aération directe de la chaudière contredite par un rapport d'intervention (rapport, p. 21 et pièce n° 52) et, d'autre part, sur des motifs contradictoires en ce qui concerne notamment la nécessité d'installer des VMC après que M. [D] a admis que cet équipement était superflu pour les logements anciens (concl. p. 23 à 30) ; qu'en énonçant, pour écarter les moyens dont elle était ainsi saisie, que la société Compagnie Foncière Alpha avait formulé de simples « critiques de principe » sur la qualité technique du rapport quand cette affirmation était contredite par les écritures sur lesquelles elle prétendait la fonder, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile,

2°) Alors, subsidiairement, que le défaut de réponse à conclusion équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre aux moyens dont elle était ainsi saisie sur les incohérences du rapport à la faveur d'une simple affirmation selon laquelle les critiques de principe de la société Compagnie Foncière Alpha n'apparaissaient pas pertinentes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

3°) Alors que seuls les logements neufs doivent être conformes à la norme NF C 15-100, dans sa version en vigueur au moment du dépôt du permis de construire ou de la déclaration préalable de construction ; que cette norme n'ayant pas d'effet rétroactif, elle est inapplicable aux logements construits avant que leur application ait été rendue obligatoire par arrêté du 22 octobre 1969 ; qu'en adoptant les conclusions du rapport fondant la rénovation de l'installation électrique sur sa non-conformité aux normes AFNOR NF C 15-100 les plus récentes sans rechercher, comme il lui était pourtant demandé (concl. p. 27), si ce fait était impropre à justifier légalement les travaux prescrits dès lors que ces normes n'étaient pas obligatoires pour les logements anciens, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'arrêté du 22 octobre 1969, ensemble l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002,

4°) Alors que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que la société Compagnie Foncière Alpha faisait en outre valoir que la non-conformité d'un logement ancien aux normes AFNOR les plus récentes en ce qui concerne la terrasse (DTU 43.5) et la chaudière (DTU 68.1) était, à elle seule, impropre à caractériser un défaut de sécurité dès lors qu'elles n'étaient pas obligatoires (concl. p. 28 in fine et p. 29) ; qu'en se bornant à affirmer que l'expert judiciaire avait fait une « juste appréciation des travaux nécessaires » sans répondre au moyen dont elle était ainsi saisie, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

5°) Alors que pour les logements construits avant l'entrée en vigueur de l'arrêté du 22 octobre 1969, la rénovation des installations et équipements d'un logement ne peut être ordonnée qu'à partir du moment où il est établi qu'ils sont affectés de défauts compromettant la sécurité physique ou la santé des locataires ; qu'en se bornant à affirmer que l'expert judiciaire avait fait une « juste appréciation des travaux nécessaires » sans jamais caractériser, dans sa décision, aucune atteinte à la sécurité physique ou à la santé des locataires justifiant la condamnation du bailleur à réaliser des travaux correspondant à une remise à neuf de l'appartement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
– Plus subsidiairement

La SCI Compagnie Foncière Alpha fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée, solidairement avec la société France Pierre Patrimoine, à payer à M. et Mme [O] une somme de 10.000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance des lieux,

1°) Alors que le préjudice de jouissance lié à un logement non décent doit être indemnisé à hauteur de la gravité du trouble en résultant pour le locataire ; qu'en affirmant qu'il y avait lieu de faire droit à la juste prétention des époux [O] à l'indemnisation de leur préjudice de défaut de jouissance paisible des lieux, pendant et avant les travaux et sans distinction d'un préjudice moral particulier, à une somme globale de 10.000 €, sans procéder à aucune évaluation du préjudice de jouissance au regard de sa durée ou de sa gravité, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et l'article 1719 du même code,

2°) Alors que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; qu'en l'espèce, les époux [O] faisaient valoir que l'absence de jouissance paisible des lieux leur ouvrait droit à indemnisation au titre, d'une part, du trouble de jouissance proprement dit, d'autre part, des troubles consécutifs aux travaux à venir et, enfin, du préjudice moral subi de ces chefs (concl. adv. p. 7 § 1 et s. et p. 9) ; qu'en retenant qu'il y avait lieu de faire droit aux justes prétentions des époux [O] qui devaient être indemnisés pour le défaut de jouissance paisible des lieux à hauteur de 10.000 € « sans distinction d'un préjudice moral particulier », la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inintelligibles qui ne permettent pas de savoir si elle indemnisé le préjudice moral invoqué par les locataires, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [O] (demandeurs au pourvoi incident)

M. et Mme [O] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de leur demande tendant à la condamnation de leur bailleur, la société SAS France Pierre Patrimoine, in solidum avec la société Compagnie Foncière Alpha à faire exécuter les travaux de réparation des désordres affectant le logement objet du bail ;

ALORS QUE l'obligation de délivrance pesant sur le bailleur est une obligation continue qui se transmet à l'acquéreur de l'immeuble objet du bail ; qu'en déboutant M. et Mme [O] de leur demande tendant à la condamnation de la société France Pierre Patrimoine, leur nouveau bailleur, au motif inopérant que l'expertise qui a permis l'évaluation des travaux à réaliser ne lui aurait pas été opposable, quand cette société devait, en qualité d'acquéreur de l'immeuble, supporter les obligations mises à la charge de son vendeur, en qualité de bailleur, la cour d'appel a violé l'article 1743 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-14498
Date de la décision : 07/12/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 17 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 déc. 2022, pourvoi n°21-14498


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Delvolvé et Trichet, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.14498
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