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23/11/2022 | FRANCE | N°21-16164

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-16164


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

BD4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 novembre 2022

Rejet

M. SOMMER, président

Arrêt n° 1250 FS-D

Pourvoi n° D 21-16.164

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 NOVEMBRE 2022

M. [E] [M], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-16.164 contre l'ar

rêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Solocal, société anonyme, don...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

BD4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 novembre 2022

Rejet

M. SOMMER, président

Arrêt n° 1250 FS-D

Pourvoi n° D 21-16.164

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 NOVEMBRE 2022

M. [E] [M], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-16.164 contre l'arrêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Solocal, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Pages Jaunes, défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [M], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Solocal, les plaidoiries de Me Lyon-Caen et celles de Me Célice, et l'avis de Mme Grivel, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents M. Sommer, président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Mariette, conseiller doyen, M. Pietton, Mme Le Lay, MM. Barincou, Seguy, Mmes Grandemange, Douxami, conseillers, Mmes Prieur, Marguerite, M. Carillon, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 mars 2021), M. [M], engagé le 4 mars 1991 par la société Pages jaunes, devenue la société Solocal (la société), occupait en dernier lieu les fonctions de conseiller communication digitale.

2. Par lettre du 7 janvier 2014, l'employeur lui a proposé une modification de son contrat de travail, dans le cadre d'un projet de réorganisation donnant lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi contenu dans un accord collectif majoritaire signé le 20 novembre 2013 et validé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France (Direccte) le 2 janvier 2014. En l'absence de réponse du salarié, l'employeur lui a notifié, par lettre du 12 février 2014, l'entrée en vigueur de l'avenant au 30 juin 2014.

3. Par arrêt du 22 octobre 2014, statuant sur le recours d'un autre salarié, une cour administrative d'appel a annulé cette décision de validation, au motif que l'accord du 20 novembre 2013 ne revêtait pas le caractère majoritaire requis par les dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail et le Conseil d'Etat a, le 22 juillet 2015, rejeté les pourvois formés contre cet arrêt.

4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la nullité de son dernier contrat de travail.

5. Au cours de l'année 2018, le salarié s'est porté candidat au congé de mobilité mis en place dans le cadre d'un accord collectif du 22 juin 2018. L'autorisation de procéder à la rupture amiable de son contrat de travail a été accordée par l'inspection du travail le 28 septembre 2018. Le contrat de travail de M. [M] a pris fin le 23 février 2019.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à voir constate la nullité du nouveau contrat de travail de «conseiller communication digitale spécialiste» entré en vigueur le 1er juillet 2014, à voir ordonner son rétablissement dans son contrat de travail de conseiller commercial pour la période allant du 1er juillet 2014 au 23 février 2019, date de sa sortie des effectifs de la société Solocal, et à voir condamner cette société à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la période susvisée, au titre des congés payés afférents et au titre de l'indemnité de licenciement due en exécution de la convention de rupture et du congé de mobilité, alors :

« 1°/ que la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la cour d'appel que la modification du contrat de travail pour motif économique que M. [M] est réputé avoir acceptée trouve son origine dans un projet de réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité prévoyant la modification du contrat de travail de certains salariés et ayant donné lieu à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont il a été précisé au salarié qu'il serait fait application en cas de refus de sa part de la modification proposée ; qu'en jugeant néanmoins que l'avenant litigieux au contrat de travail de l'exposant ne pouvait être considéré comme un acte subséquent du plan de sauvegarde de l'emploi au motif inopérant que l'article L. 1222-6 du code du travail ne conditionnait pas la modification du contrat de travail pour motif économique à la mise en oeuvre d'un PSE, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations a violé les dispositions des articles L. 1222-6, L. 1233-25 et L. 1235-10 du code du travail ;

2°/ que la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite par un salarié ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la cour d'appel que la modification du contrat de travail pour motif économique que M. [M] est réputé avoir acceptée trouve son origine dans un projet de réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité prévoyant la modification du contrat de travail de certains salariés ainsi que diverses mesures d'accompagnement de la mise en oeuvre de ce projet adoptées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont il a été précisé au salarié qu'il serait fait application en cas de refus de sa part de la modification proposée ; qu'en jugeant néanmoins que l'avenant litigieux au contrat de travail de l'exposant ne pouvait être considéré comme un acte subséquent du plan de sauvegarde de l'emploi et que l'annulation par la juridiction administrative de la validation par la Direccte de l'accord portant plan de sauvegarde de l'emploi était sans effet sur la validité de l'avenant au contrat de travail de M. [M] aux motifs erronés que, ni la circonstance suivant laquelle l'employeur avait négocié et fait valider l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi avant de soumettre au salarié la modification de son contrat de travail, ni la mention, dans le courrier de proposition de cette modification de l'accord collectif susvisé n'avaient eu pour effet de créer un lien juridique entre l'avenant proposé et le PSE, et que la modification du contrat de travail du salarié trouvait son origine, non pas dans ce PSE, mais dans la réorganisation de l'entreprise, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1222-6, L. 1233-25 et L. 1235-10 du code du travail ;

3°/ que la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite par un salarié ; que pour juger en l'espèce que l'annulation par la juridiction administrative de la validation par la Direccte de l'accord portant plan de sauvegarde de l'emploi était sans effet sur la validité de l'avenant au contrat de travail de M. [M], la cour d'appel a retenu qu'aucune disposition légale ne prévoyait que l'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 du code du travail entraînait l'annulation d'une modification de contrat de travail intervenue par application de l'article L. 1222-6 dans le cadre du même projet de réorganisation ; qu'en statuant par de tels motifs alors qu'il ressortait de ses propres constatations que l'avenant à son contrat de travail régularisé par M. [M] constituait un acte subséquent du PSE adopté par voie d'accord collectif le 20 novembre 2013 si bien que la nullité affectant ce plan s'étendait à l'avenant litigieux, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1235-10 du code du travail ;

4°/ qu'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ; que le consentement du salarié à une modification de son contrat de travail n'est pas valable lorsqu'il a été donné sous la menace d'un licenciement qui ne pouvait être valablement prononcé ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'un vice du consentement donné par M. [M], la cour d'appel a retenu que l'employeur avait légitimement et de manière licite informé le salarié des conséquences légales d'un éventuel refus de la modification du contrat de travail qui lui était proposé ; qu'en statuant ainsi alors que, compte tenu de la nullité dont se trouvait entaché le plan de sauvegarde de l'emploi adopté par accord collectif le 20 novembre 2013, en cas de refus de la modification de son contrat de travail, la société employeur ne pouvait valablement procéder à son licenciement en vertu de ce plan, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1109 et 1112 du code civil dans leur version applicable au litige, ensemble celles des articles L. 1233-25 et L. 1235-10 du code du travail. »

Réponse de la Cour

8. D'une part, aux termes de l'article L. 1222-6 du code du travail, lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée.

9. L'article L. 1233-25 du code du travail dispose que lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique.

10. D'autre part, il résulte de l'article L. 1235-7-1 du code du travail que le juge judiciaire, compétent pour statuer sur les litiges relatifs à l'application des mesures comprises dans un plan de sauvegarde de l'emploi, est fondé, lorsque le défaut de validité de l'accord collectif déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi résulte des motifs de la décision du juge administratif annulant la décision de validation de cet accord, à écarter l'application des clauses de cet accord.

11. Il en résulte qu'une modification de contrat de travail intervenue, en application de l'article L. 1222-6 précité, dans le cadre d'un projet de réorganisation ayant donné lieu à l'élaboration d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, ne constitue pas un acte subséquent à cet accord, de sorte que les salariés ayant tacitement accepté cette modification ne sont pas fondés à se prévaloir du défaut de validité de l'accord collectif déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi pour obtenir la nullité de leur contrat de travail.

12. Le moyen, qui soutient le contraire, n'est donc pas fondé en ses trois premières branches.

13. La cour d'appel ayant ensuite relevé que l'employeur avait informé le salarié légitimement et de manière licite, des conséquences légales d'un éventuel refus de la proposition de modification de son contrat de travail et que la négociation et la validation préalables de l'accord majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi lui avaient permis d'être parfaitement éclairé sur les implications de son choix, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain, décidé que le vice du consentement invoqué ne pouvait être retenu.

14. Le moyen n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [M]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Monsieur [M] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes tendant à voir constate la nullité du nouveau contrat de travail de « conseiller communication digitale spécialiste » entré en vigueur le 1er juillet 2014, à voir ordonner son rétablissement dans son contrat de travail de conseiller commercial pour la période allant du 1er juillet 2014 au 23 février 2019, date de sa sortie des effectifs de la société SOLOCAL, et à voir condamner cette société à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la période susvisée, au titre des congés payés y afférents et au titre de l'indemnité de licenciement due en exécution de la convention de rupture et du congé de mobilité ;

ALORS en premier lieu QUE la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la Cour d'appel que la modification du contrat de travail pour motif économique que Monsieur [M] est réputé avoir acceptée trouve son origine dans un projet de réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité prévoyant la modification du contrat de travail de certains salariés et ayant donné lieu à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont il a été précisé au salarié qu'il serait fait application en cas de refus de sa part de la modification proposée ; qu'en jugeant néanmoins que l'avenant litigieux au contrat de travail de l'exposant ne pouvait être considéré comme un acte subséquent du plan de sauvegarde de l'emploi au motif inopérant que l'article L. 1222-6 du Code du travail ne conditionnait pas la modification du contrat de travail pour motif économique à la mise en oeuvre d'un PSE, la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations a violé les dispositions des articles L. 1222-6, L. 1233-25 et L. 1235-10 du Code du travail ;

ALORS en deuxième lieu QUE la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite par un salarié ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la Cour d'appel que la modification du contrat de travail pour motif économique que Monsieur [M] est réputé avoir acceptée trouve son origine dans un projet de réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité prévoyant la modification du contrat de travail de certains salariés ainsi que diverses mesures d'accompagnement de la mise en oeuvre de ce projet adoptées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont il a été précisé au salarié qu'il serait fait application en cas de refus de sa part de la modification proposée ; qu'en jugeant néanmoins que l'avenant litigieux au contrat de travail de l'exposant ne pouvait être considéré comme un acte subséquent du plan de sauvegarde de l'emploi et que l'annulation par la juridiction administrative de la validation par la DIRECCTE de l'accord portant plan de sauvegarde de l'emploi était sans effet sur la validité de l'avenant au contrat de travail de Monsieur [M] aux motifs erronés que, ni la circonstance suivant laquelle l'employeur avait négocié et fait valider l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi avant de soumettre au salarié la modification de son contrat de travail, ni la mention, dans le courrier de proposition de cette modification de l'accord collectif susvisé n'avaient eu pour effet de créer un lien juridique entre l'avenant proposé et le PSE, et que la modification du contrat de travail du salarié trouvait son origine, non pas dans ce PSE, mais dans la réorganisation de l'entreprise, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1222-6, L. 1233-25 et L. 1235-10 du Code du travail ;

ALORS en troisième lieu QUE la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi s'étend à tous les actes subséquents ; qu'il en est ainsi de la modification pour motif économique du contrat de travail acceptée par un salarié dès lors que cette modification s'inscrit dans un processus de réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu, avant toute proposition de modification des contrats de travail, à l'établissement d'un plan de sauvegarde l'emploi devant s'appliquer en cas de refus de la proposition faite par un salarié ; que pour juger en l'espèce que l'annulation par la juridiction administrative de la validation par la DIRECCTE de l'accord portant plan de sauvegarde de l'emploi était sans effet sur la validité de l'avenant au contrat de travail de Monsieur [M], la Cour d'appel a retenu qu'aucune disposition légale ne prévoyait que l'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 du Code du travail entrainait l'annulation d'une modification de contrat de travail intervenue par application de l'article L. 1222-6 dans le cadre du même projet de réorganisation ; qu'en statuant par de tels motifs alors qu'il ressortait de ses propres constatations que l'avenant à son contrat de travail régularisé par Monsieur [M] constituait un acte subséquent du PSE adopté par voie d'accord collectif le 20 novembre 2013 si bien que la nullité affectant ce plan s'étendait à l'avenant litigieux, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1235-10 du Code du travail ;

ALORS enfin et en toute hypothèse QU'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ; que le consentement du salarié à une modification de son contrat de travail n'est pas valable lorsqu'il a été donné sous la menace d'un licenciement qui ne pouvait être valablement prononcé ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'un vice du consentement donné par Monsieur [M], la Cour d'appel a retenu que l'employeur avait légitimement et de manière licite informé le salarié des conséquences légales d'un éventuel refus de la modification du contrat de travail qui lui était proposé ; qu'en statuant ainsi alors que, compte tenu de la nullité dont se trouvait entaché le plan de sauvegarde de l'emploi adopté par accord collectif le 20 novembre 2013, en cas de refus de la modification de son contrat de travail, la société employeur ne pouvait valablement procéder à son licenciement en vertu de ce plan, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 1109 et 1112 du Code civil dans leur version applicable au litige, ensemble celles des articles L. 1233-25 et L. 1235-10 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Monsieur [M] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir de débouté de sa demande tendant à voir condamner la société SOLOCAL à lui verser une somme à titre de dommages et intérêts pour manquements à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail et à l'obligation de sécurité ;

ALORS en premier lieu QUE le contrat de travail est exécuté de bonne foi ; qu'en l'espèce, Monsieur [M] faisait valoir que la société PAGES JAUNES avait manqué à cette obligation en ne lui permettant pas de bénéficier, à son retour d'arrêt maladie, d'une formation et d'un accompagnement adaptés à l'utilisation des nouveaux outils logiciels mis en place, pendant son arrêt de travail, en 2014 dans le cadre de la réorganisation de la société, au nombre desquels l'outil CRM, contrairement à ce que prévoient notamment l'accord de GPEC du 25 octobre 2012 et l'accord « séniors » du 2 octobre 2013 ; que pour écarter tout manquement de la part de l'employeur de ce chef, la Cour d'appel a relevé que Monsieur [M] avait bénéficié de deux journées de formation sur l'outil CRM les 10 juin 2013 et 17 mai 2013, c'est-à-dire avant l'arrêt maladie de Monsieur [M] et avant que cet outil ne soit mis en oeuvre dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, la Cour d'appel a violé les dispositions de des articles L. 1222-1 et L. 6321-1 du Code du travail ensemble celles de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC) au sein du groupe PAGES JAUNES du 25 octobre 2012et de l'accord en faveur de l'emploi et du maintien des séniors et relatif aux jeunes au sein de SOLOCALGROUP, dit accord « séniors » du 2 octobre 2013 ;

ALORS en second lieu QUE l'article 1.4 du chapitre 3 de l'accord en faveur de l'emploi et du maintien des séniors et relatif aux jeunes au sein de SOLOCALGROUP du 12 octobre 2013 prévoit qu'afin d'aider les salariés séniors à anticiper leur niveau de revenus lors de leur départ en retraite, SOLOCAL Group s'engage à financer un « bilan prévisionnel de retraite » personnalisé auprès d'un organisme extérieur spécialisé pour les salariés âgés de 56 ans et plus, en vue de réaliser un inventaire précis portant sur les droits acquis auprès de l'ensemble des systèmes existants, les étapes de la carrière et l'inventaire exhaustif des droits acquis, l'évaluation des droits restant à acquérir d'ici à l'âge de départ à la retraite, le calcul de l'âge optimisé de départ à la retraite, le montant estimé de la future pension et le montant que le collaborateur toucherait s'il optait pour une date de départ différente ; qu'en l'espèce, tout en relevant que la société SOLOCAL ne démontrait pas avoir permis à Monsieur [M] de bénéficier de ce bilan prévisionnel alors qu'il en remplissait les conditions, la Cour d'appel a néanmoins retenu que ce manquement ne suffisait pas à caractériser une exécution déloyale du contrat de travail au motif que le salarié « était visiblement informé des dispositifs prévus pour les séniors au sein de l'entreprise puisqu'il écrit à son manager le 8 mars 2016 : « Je souhaite enfin travailler à temps plein jusqu'en fin 2017, et bénéficier ensuite du dispositif d'aménagement du temps de travail séniors en vigueur dans l'entreprise pour les années qu'il me restera à accomplir avant ma retraite? » ; qu'en statuant par de tels motifs alors que le bilan prévisionnel de retraite n'a pas pour objet d'informer les salariés sur les dispositifs prévus pour les séniors au sein de l'entreprise mais sur les conditions dans lesquelles ils pourront faire valoir leurs droits à la retraite, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées de l'accord en faveur de l'emploi et du maintien des séniors et relatif aux jeunes au sein de SOLOCALGROUP du 2 octobre 2013 ensemble celles de l'article L. 1222-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-16164
Date de la décision : 23/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 nov. 2022, pourvoi n°21-16164


Composition du Tribunal
Président : M. Sommer (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 06/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.16164
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