LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 novembre 2022
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 845 F-D
Pourvoi n° C 21-10.206
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022
M. [Y] [O], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 21-10.206 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Centre de gestion immobilière, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société [O] immobilier,
2°/ à la société Galian assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Galian ,
3°/ à la société Galian, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bacache-Gibeili, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [O], de la SCP Duhamel Rameix Gury Maitre, avocat de la société Galian assurances, après débats en l'audience publique du 11 octobre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Bacache-Gibeili, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [O] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Centre de gestion immobilière, venant aux droits de la société [O] immobilier.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 novembre 2020), le 31 décembre 2012, M. [O], associé puis gérant de la société [O] Immobilier, syndic de copropriétés, a cédé ses parts et cessé ses fonctions le 31 décembre 2012.
3. Le 18 février 2014, invoquant avoir découvert des détournements de fonds attribués à M. [O] au préjudice de syndicats des copropriétaires entre 2008 et 2011, la société [O] immobilier l'a assigné en remboursement des sommes qu'elle devait verser aux copropriétaires victimes de ses détournements, ainsi qu'en paiement de dommages intérêts.
4. Le 21 février 2014, la société Galian, société de caution mutuelle, a conclu avec la société [O], aux droits de laquelle se trouve la société Centre de gestion immobilière, un « protocole transactionnel » selon lequel elle a procédé, au titre de la mise en jeu de sa garantie financière, au règlement de la somme de 127 066 euros pour le compte des syndicats de copropriétaires ayant subi les détournements de fonds.
5. La société Galian, aux droits de laquelle se trouve la société Galian assurances, est ensuite intervenue volontairement à l'instance pour réclamer à M. [O] le remboursement de la somme de 127 066 euros, en invoquant être subrogée dans les droits et actions de la société [O] et des syndicats des copropriétaires lésés.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. M. [O] fait grief à l'arrêt de déclarer la demande de paiement de la société Gallian Assurances bien fondée à raison de sa subrogation dans les droits et actions des syndicats des copropriétaires victimes des détournements commis et de le condamner en conséquence à lui verser la somme de 116 769,40 euros, alors :
« 1°/ que la subrogation est conventionnelle lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur; qu'en relevant, pour condamner M. [O] à verser la somme de 116 769,40 euros à la société Galian, qu'aux termes de l'article 2 du protocole, cette société était subrogée « dans les droits et actions des mandants du cabinet [O] immobilier à l'encontre du Cabinet [O] immobilier », « la Sarl [O] immobilier se port[ant] fort de l'accord de chacun des syndicats des copropriétaires », la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs qui ne caractérisent pas une manifestation expresse de volonté des différents syndicats de subroger la société Galian dans leurs droits et actions contre M. [O], a violé l'article 1250 al. 1er, dans sa version applicable à la cause ;
2°/ que la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur ; qu'en condamnant M. [O] à verser la somme de 116 769,40 euros à la société Galian sur le fondement de la subrogation légale de la caution visée à l'article 2306 du code civil, quand le paiement effectué par la société Galian en exécution de son engagement de caution n'avait pu, le cas échéant, la subroger dans les droits des copropriétés qu'envers la société [O] immobilier dont elle garantissait les engagements, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
3°/ que la subrogation dans les droits d'un créancier, qu'elle soit légale ou conventionnelle, suppose un paiement effectif du créancier ; qu'en se bornant à relever, pour condamner M. [O] à verser la somme de 116 769,40 € à la société Galian, que le règlement global qu'avait effectué cette société, en vertu du protocole du 21 février 2014, entre les mains de la société [O] immobilier, l'avait été pour le compte des différents syndicats qui avaient subi des détournements de fonds et que « la Sarl [O] immobilier se port[ait] fort de l'accord de chacun des syndicats des copropriétaires concernés », la cour d'appel, qui a ainsi statué par des motifs desquels il ne résultait pas l'existence de paiements effectifs opérés aux différents syndicats dans les droits desquels la société Galian prétendait être subrogée, la cour d'appel a violé les articles 1249, 1250 et 1251 3° du code civil ;
4°/ qu'en toute hypothèse, l'exposant soulignait, dans ses conclusions, que le syndic, qui avait pu détourner les sommes reçues de la société Galian, en méconnaissance du mandat qu'auraient pu lui confier les différentes copropriétés, devait donc justifier les avoir effectivement remises entre les mains des syndicats ; qu'en jugeant, pour estimer que les conditions de la subrogation étaient remplies, que le paiement global de 127 066 euros effectué par la société Galian en vertu du protocole du 21 février 2014, l'avait été pour le compte des différentes copropriétés dont la liste était annexée , sans répondre aux conclusions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
7. Il résulte de l'article 1250, 3° du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et de l'article 2306 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, que le garant qui a, par son paiement, libéré celui sur lequel doit peser la charge définitive de la dette est subrogé dans les droits du créancier et dispose de toutes les actions qui appartenaient à celui-ci et qui se rattachaient à sa créance immédiatement avant le paiement, même si ce paiement a été réalisé entre les mains de la personne garantie, pour le compte du créancier.
8. La cour d'appel a relevé que la société Galian avait remis à la société [O] immobilier le chèque de 127 066 euros, en sa qualité de caution de la représentation des fonds par celle-ci aux syndicats des copropriétaires, à la suite de la découverte de la falsification et du détournement de chèques au bénéfice de M. [O].
9. Elle a constaté que le protocole mentionnait expressément que ce règlement était effectué pour le compte des syndicats des copropriétaires ayant subi les détournements de fonds.
10. Elle en a déduit, à bon droit, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, que la société Galian assurances était légalement subrogée dans les droits des syndicats des copropriétaires, victimes des détournements reprochés à M. [O].
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [O] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [O]
M. [Y] [O] fait grief à l'arrêt d'AVOIR déclaré la demande de paiement de la société Gallian Assurances, venant aux droits de la société Galian, bien fondée à raison de sa subrogation dans les droits et actions des syndicat des copropriétaires victimes des détournements qu'il aurait commis, de l'AVOIR condamné en conséquence à lui verser la somme de 116 769,40 euros ;
1°) ALORS QUE la subrogation est conventionnelle lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur ; qu'en relevant, pour condamner M. [Y] [O] à verser la somme de 116 769,40 € à la société Galian, qu'aux termes de l'article 2 du protocole, cette société était
subrogée « dans les droits et actions des mandants du cabinet [O] Immobilier à l'encontre du Cabinet [O] Immobilier », « la Sarl [O] Immobilier se port[ant] fort de l'accord de chacun des syndicats des copropriétaires » (arrêt page 11, al. 2), la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs qui ne caractérisent pas une manifestation expresse de volonté des différents syndicats de subroger la société Galian dans leurs droits et actions contre M. [Y] [O], a violé l'article 1250 al. 1er, dans sa version applicable à la cause ;
2°) ALORS QUE la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur ; qu'en condamnant M. [Y] [O] à verser la somme de 116 769,40 € à la société Galian sur le fondement de la subrogation légale de la caution visée à l'article 2306 du code civil, quand le paiement effectué par la société Galian en exécution de son engagement de caution n'avait pu, le cas échéant, la subroger dans les droits des copropriétés qu'envers la société [O] immobilier dont elle garantissait les engagements, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
3°) ALORS QUE la subrogation dans les droits d'un créancier, qu'elle soit légale ou conventionnelle, suppose un paiement effectif du créancier ; qu'en se bornant à relever, pour condamner M. [Y] [O] à verser la somme de 116 769,40 € à la société Galian, que le règlement global qu'avait effectué cette société, en vertu du protocole du 21 février 2014, entre les mains de la société [O] immobilier, l'avait été pour le compte des différents syndicats qui avaient subi des détournements de fonds et que « la Sarl [O] Immobilier se port[ait] fort de l'accord de chacun des syndicats des copropriétaires concernés », la cour d'appel, qui a ainsi statué par des motifs desquels il ne résultait pas l'existence de paiements effectifs opérés
aux différents syndicats dans les droits desquels la société Galian prétendait être subrogée, la cour d'appel a violé les articles 1249, 1250 et 1251 3° du code civil ;
4°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'exposant soulignait, dans ses conclusions, que le syndic, qui avait pu détourner les sommes reçues de la société Galian, en méconnaissance du mandat qu'auraient pu lui confier les différentes copropriétés, devait donc justifier les avoir effectivement remises entre les mains des syndicats (conclusions d'appel, page 14, al. 1er ; page 15, dernier al. se poursuivant page 16 et page 16, al. 1er) ; qu'en jugeant, pour estimer que les conditions de la subrogation étaient remplies, que le paiement global de 127 066 € effectué par la société Galian en vertu du protocole du 21 février 2014, l'avait été pour le compte des différentes copropriétés dont la liste était annexée (arrêt page 11, al. 2), sans répondre aux conclusions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile