La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/11/2022 | FRANCE | N°21-24046

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 novembre 2022, 21-24046


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

VB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 novembre 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 789 F-D

Pourvoi n° W 21-24.046

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 NOVEMBRE 2022

1°/ M. [Y] [B],

2°/ Mme [U] [Z], épouse [B],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° W 21-24.046 contre l'arrêt rendu le 7 janvier 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 7...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

VB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 novembre 2022

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 789 F-D

Pourvoi n° W 21-24.046

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 NOVEMBRE 2022

1°/ M. [Y] [B],

2°/ Mme [U] [Z], épouse [B],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° W 21-24.046 contre l'arrêt rendu le 7 janvier 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 7), dans le litige les opposant au ministre de la Transition écologique et solidaire, ministère chargé des transports, dont le siège est Direction générale des infrastructures, des transports , [Adresse 7], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. et Mme [B], de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat du ministre de la Transition écologique et solidaire, ministère chargé des transports, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 janvier 2021), l'Etat a saisi le juge de l'expropriation aux fins de fixation de l'indemnité d'éviction revenant à M. [B] et Mme [B] à la suite de l'expropriation partielle de deux parcelles situées sur la commune de [Localité 6] et cadastrées section ZO n° [Cadastre 1] et n° [Cadastre 5].

2. Mme [B] a saisi la même juridiction d'une demande d'éviction totale de son exploitation et, subsidiairement, d'emprise totale des parcelles cadastrées ZO n° [Cadastre 1], n° [Cadastre 5] et n° [Cadastre 2].

3. Les deux instances ont été jointes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première à troisième branches

Enoncé du moyen

5. M. et Mme [B] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande d'éviction totale d'exploitation formée par Mme [B] et de rejeter la demande de mise hors de cause de M. [B], alors :

« 1°/ que lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, que celle-ci est propriétaire de l'une des parcelles qu'elle exploite, quand seul comptait le fait qu'elle ne soit pas propriétaire des parcelles ZO [Cadastre 1] et ZO [Cadastre 5] objets de l'emprise partielle, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi en violation de l'article L. 242-4 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

2°/ que lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; que le versement des indemnités par l'expropriant à l'exploitant entraîne de plein droit, si elle n'est intervenue, la résiliation du bail ; qu'en cas de bail consenti à des copreneurs qui n'exploitent pas conjointement, l'exploitant s'entend de celui qui met effectivement en valeur les biens pris à bail ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, que cette demande aurait également dû être formée par M. [Y] [B] eu égard à sa qualité de co-preneur avec Mme [B] des parcelles ZO [Cadastre 1], ZO [Cadastre 2], ZO [Cadastre 4] et ZO [Cadastre 5] car selon l'article L. 242-5, la demande d'éviction totale de l'exploitation et l'indemnisation de l'exploitant impliquent la résiliation du bail, la cour d'appel, qui a ainsi refusé de s'attacher à la seule qualité d'exploitant des parcelles dont il était demandé l'éviction totale, qualité exclusivement présentée par Mme [B], a violé les articles L. 242-4 2° et L. 242-5 alinéa 2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

3°/ que lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, « qu'en cas de mise à disposition par le preneur à un tiers, seul doit être pris en considération pour les demandes d'éviction totale le déséquilibre résultant de l'expropriation sur l'exploitation des parcelles dont l'exproprié était locataire et non sur celle de l'exploitant », quand Mme [B] n'était pas un « tiers » exploitant par mise à disposition, la cour d'appel a violé l'article L. 242-4 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. »

Réponse de la Cour

6. Par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a souverainement retenu que, contrairement aux allégations de M. et Mme [B], il existait une unité d'exploitation entre les parcelles dont chacun revendiquait être l'exploitant et qu'il n'était pas établi que Mme [B] était seule exploitante des parcelles sous emprise partielle, sur lesquelles ils étaient co-titulaires d'un bail.

7. Elle en a déduit, à bon droit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et troisième branches, que Mme [B] était irrecevable à demander seule l'éviction totale des parcelles constituant l'exploitation en application des dispositions de l'article L. 242-4, 2°, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [B],

M. et Mme [B] reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande d'éviction totale d'exploitation formée par Mme [U] [B] et d'avoir débouté M. [B] de sa demande de mise hors de cause,

1°) ALORS QUE lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, que celle-ci est propriétaire de l'une des parcelles qu'elle exploite, quand seul comptait le fait qu'elle ne soit pas propriétaire des parcelles ZO [Cadastre 1] et ZO [Cadastre 5] objets de l'emprise partielle, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi en violation de l'article L. 242-4 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

2°) ALORS QUE lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; que le versement des indemnités par l'expropriant à l'exploitant entraîne de plein droit, si elle n'est intervenue, la résiliation du bail ; qu'en cas de bail consenti à des copreneurs qui n'exploitent pas conjointement, l'exploitant s'entend de celui qui met effectivement en valeur les biens pris à bail ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, que cette demande aurait également dû être formée par M. [Y] [B] eu égard à sa qualité de co-preneur avec Mme [B] des parcelles ZO [Cadastre 1], ZO [Cadastre 2], ZO [Cadastre 4] et ZO [Cadastre 5] car selon l'article L. 242-5, la demande d'éviction totale de l'exploitation et l'indemnisation de l'exploitant impliquent la résiliation du bail, la cour d'appel, qui a ainsi refusé de s'attacher à la seule qualité d'exploitant des parcelles dont il était demandé l'éviction totale, qualité exclusivement présentée par Mme [B], a violé les articles L. 242-4 2° et L. 242-5 alinéa 2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

3°) ALORS QUE lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, « qu'en cas de mise à disposition par le preneur à un tiers, seul doit être pris en considération pour les demandes d'éviction totale le déséquilibre résultant de l'expropriation sur l'exploitation des parcelles dont l'exproprié était locataire et non sur celle de l'exploitant », quand Mme [B] n'était pas un « tiers » exploitant par mise à disposition, la cour d'appel a violé l'article L. 242-4 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

4°) ALORS QUE lorsqu'une emprise partielle résultant de l'expropriation compromet la structure d'une exploitation agricole de nature à provoquer sa disparition ou à lui occasionner un grave déséquilibre au sens des articles L. 123-4 à L. 123-5-6 et L. 352-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exploitant qui n'est pas lui-même propriétaire peut, s'il n'entend pas poursuivre l'exploitation, demander à l'expropriant les indemnités auxquelles il aurait pu prétendre en application de l'article L. 322-1 dans le cas où la totalité de l'exploitation aurait été expropriée ; qu'il était justifié de la qualité d'exploitante de Mme [B] des parcelles ZO [Cadastre 1] , ZO [Cadastre 2], ZO [Cadastre 5], à l'exclusion de la parcelle ZO [Cadastre 4] exploitée par M. [B], par la production de leurs relevés d'exploitation MSA respectifs ; qu'en retenant, pour déclarer Mme [B] irrecevable en sa demande d'éviction totale de son exploitation, que les photos aériennes des parcelles en cause montrent une continuité de cultures et donc une unité d'exploitation entre les parcelles ZO [Cadastre 1], ZO [Cadastre 2], ZO [Cadastre 4] et ZO [Cadastre 5], et qu'il était donc impossible de déterminer avec certitude qui était l'exploitant desdites parcelles (motifs adoptés du jugement p.11), la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants et a refusé de tirer les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article L. 242-4 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 21-24046
Date de la décision : 16/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 janvier 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 nov. 2022, pourvoi n°21-24046


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.24046
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award