LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 novembre 2022
Cassation partielle
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1220 F-D
Pourvoi n° J 21-10.787
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 NOVEMBRE 2022
M. [J] [P], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 21-10.787 contre l'arrêt rendu le 2 septembre 2020 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Ambulances Pomi, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [P], de la SAS Boulloche,Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Ambulances Pomi, après débats en l'audience publique du 28 septembre 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 2 septembre 2020), M. [P] a été engagé par la société Ambulances Pomi, en qualité de chauffeur ambulancier, suivant contrat de travail à durée indéterminée à effet du 1er mai 2012. Son ancienneté a été reprise à compter du 1er octobre 2008.
2. Une rupture conventionnelle a été signée entre les parties, avec homologation de la Direccte, effective au 12 novembre 2015.
3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 2 mai 2016, de diverses demandes en paiement au titre de l'exécution du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de l'employeur au paiement d'un complément de rémunération pendant la période d'arrêt de travail pour maladie du 19 avril au 7 octobre 2013, alors « qu'aux termes de l'article 10 ter, 2°-b de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport, en cas d'incapacité de travail temporaire, le personnel ouvrier mensualisé bénéficie d'une garantie de ressources à l'issue d'un délai de carence de cinq jours ; que la durée et les pourcentages d'indemnisation varient en fonction de l'ancienneté du salarié ; que ces pourcentages s'appliquent sur la base de la rémunération qui aurait été perçue si ce personnel avait continué à travailler ; que ces indemnités sont réduites, pour les jours effectivement indemnisés, de la valeur des indemnités journalières auxquelles le salarié a droit ; que pour débouter M. [P] de sa demande de rappel de ce complément de rémunération conventionnel pour la période du 19 avril au 7 octobre 2013, la cour d'appel a énoncé qu' ‘'au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués, en net (base qui ne s'élève pas à 1695 euros net tel que soutenu par l'appelant principal), du délai de carence, des sommes versées, l'employeur, appelant incident à cet égard, justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû'‘ ; qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le montant du salaire de référence retenu, ni mentionner le complément de rémunération dû et le montant des sommes versées la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
6. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
7. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un complément de rémunération pour la période de son arrêt de travail pour maladie du 19 avril au 7 octobre 2013, l'arrêt retient qu'au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués, en net (base qui ne s'élève pas à 1695 euros net tel que soutenu par le salarié), du délai de carence, des sommes versées, l'employeur justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû.
8. En statuant ainsi, par des motifs dont la généralité et l'imprécision ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la conformité de la décision attaquée aux règles de droit, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Et sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de l'employeur au paiement d'un rappel de complément de rémunération pendant la période d'arrêt pour accident du travail du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015, alors « qu'aux termes de l'article 10 ter, 2°-c de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport, en cas d'incapacité de travail temporaire consécutive à un accident du travail, le personnel ouvrier mensualisé bénéficie d'une garantie de ressources ; que la durée et les pourcentages d'indemnisation varient en fonction de l'ancienneté du salarié ; que ces pourcentages s'appliquent sur la base de la rémunération qui aurait été perçue si ce personnel avait continué à travailler ; que ces indemnités sont réduites, pour les jours effectivement indemnisés, de la valeur des indemnités journalières auxquelles le salarié a droit ; que pour débouter M. [P] de sa demande de rappel de ce complément de rémunération conventionnel pour la période du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015, la cour d'appel a énoncé qu' ‘'au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués en net (base qui ne s'élève pas à 1911 euros net tel que soutenu par l'appelant principal), des sommes versées, l'employeur justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû‘' ; qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le montant du salaire de référence retenu, ni mentionner le complément de rémunération dû et le montant des sommes versées la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
10. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
11. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un complément de rémunération pour la période de son arrêt pour accident du travail du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015, l'arrêt retient qu'au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués en net (base qui ne s'élève pas à 1911 euros net tel que soutenu par le salarié), des sommes versées, l'employeur justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû.
12. En statuant ainsi, par des motifs dont la généralité et l'imprécision ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la conformité de la décision attaquée aux règles de droit, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [P] de ses demandes de condamnation de la société Ambulances Pomi au titre du maintien de salaire durant son arrêt maladie du 19 avril au 7 octobre 2013 ainsi que durant son accident du travail du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015, l'arrêt rendu le 2 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bastia autrement composée ;
Condamne la société Ambulances Pomi aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ambulances Pomi et la condamne à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Flores, conseiller le plus ancien, en ayant délibéré en remplacement du président empêché, en l'audience publique du seize novembre deux mille vingt-deux, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [P]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. [P] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande de condamnation de la société Ambulances Pomi au paiement d'une somme de 1 001 € à titre de complément de rémunération pendant la période d'arrêt de travail pour maladie du 19 avril au 7 octobre 2013 ;
ALORS QU' aux termes de l'article 10 ter, 2°-b de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport, en cas d'incapacité de travail temporaire, le personnel ouvrier mensualisé bénéficie d'une garantie de ressources à l'issue d'un délai de carence de cinq jours ; que la durée et les pourcentages d'indemnisation varient en fonction de l'ancienneté du salarié ; que ces pourcentages s'appliquent sur la base de la rémunération qui aurait été perçue si ce personnel avait continué à travailler ; que ces indemnités sont réduites, pour les jours effectivement indemnisés, de la valeur des indemnités journalières auxquelles le salarié a droit ; que pour débouter M. [P] de sa demande de rappel de ce complément de rémunération conventionnel pour la période du 19 avril au 7 octobre 2013, la cour d'appel a énoncé qu' « au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués, en net (base qui ne s'élève pas à 1695 euros net tel que soutenu par l'appelant principal), du délai de carence, des sommes versées, l'employeur, appelant incident à cet égard, justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû » ; qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le montant du salaire de référence retenu, ni mentionner le complément de rémunération dû et le montant des sommes versées la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
M. [P] reproche à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande de condamnation de la société Ambulances Pomi au paiement d'une somme de 1 585 € à titre de rappel de complément de rémunération pendant la période d'arrêt pour accident du travail du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015 ;
ALORS QU'aux termes de l'article 10 ter, 2°-c de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport, en cas d'incapacité de travail temporaire consécutive à un accident du travail, le personnel ouvrier mensualisé bénéficie d'une garantie de ressources ; que la durée et les pourcentages d'indemnisation varient en fonction de l'ancienneté du salarié ; que ces pourcentages s'appliquent sur la base de la rémunération qui aurait été perçue si ce personnel avait continué à travailler ; que ces indemnités sont réduites, pour les jours effectivement indemnisés, de la valeur des indemnités journalières auxquelles le salarié a droit ; que pour débouter M. [P] de sa demande de rappel de ce complément de rémunération conventionnel pour la période du 11 octobre 2014 au 21 janvier 2015, la cour d'appel a énoncé qu' « au regard des dispositions conventionnelles, de la base de rémunération sur laquelle les calculs sont effectués en net (base qui ne s'élève pas à 1911 euros net tel que soutenu par l'appelant principal), des sommes versées, l'employeur justifie qu'aucun rappel sur maintien de salaire n'est dû » ; qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le montant du salaire de référence retenu, ni mentionner le complément de rémunération dû et le montant des sommes versées la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
M. [P] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à la condamnation de la société Ambulances Pomi au paiement d'une somme de 195 € au titre de l'entretien de ses vêtements professionnels ;
1°) ALORS QUE lorsqu'un employeur est lié par les clauses d'une convention ou d'un accord, ces clauses s'appliquent aux contrats de travail conclus avec lui, sauf stipulations plus favorables ; qu'aux termes de l'article 22 bis de l'annexe 1 de Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, applicable « au personnel à bord de véhicules sanitaires » : « La présentation et la tenue du personnel ambulancier doivent être particulièrement soignées. Cette tenue comporte obligatoirement une blouse blanche.
Les blouses (3 au minimum par salarié) sont fournies et entretenues par l'entreprise qui renouvellera une blouse chaque année » ; qu'en déboutant M. [P] de sa demande au motif inopérant qu'il « n'est pas mis en évidence que le port d'un vêtement professionnel a été imposé au salarié par la SAS Ambulances Pomi », quand tant la fourniture que l'entretien d'une blouse professionnelle dont le port était obligatoire étaient mis à la charge de l'employeur par les dispositions conventionnelles applicables, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 22 bis de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport, ensemble l'article 2254-1 du code du travail .
2°) ALORS subsidiairement QUE les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que tel est le cas de l'entretien d'un vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi, peu important la source de cette obligation ; qu'en déboutant M. [P] de sa demande au motif inopérant qu'il « n'est pas mis en évidence que le port d'un vêtement professionnel a été imposé au salarié par la SAS Ambulances Pomi », quand le port d'une blouse professionnelle était imposé dans l'intérêt commun du salarié et de l'entreprise de transport sanitaire par les dispositions conventionnelles applicables, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 22 bis de l'accord du 16 juin 1961 relatif aux ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport