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09/11/2022 | FRANCE | N°22-80598

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 novembre 2022, 22-80598


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° M 22-80.598 F-D

N° 01368

SL2
9 NOVEMBRE 2022

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 9 NOVEMBRE 2022

Mme [B] [V] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 janvier 2022, qui, dans l'informatio

n suivie contre elle du chef de blanchiment aggravé, a confirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge d'instruct...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° M 22-80.598 F-D

N° 01368

SL2
9 NOVEMBRE 2022

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 9 NOVEMBRE 2022

Mme [B] [V] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 janvier 2022, qui, dans l'information suivie contre elle du chef de blanchiment aggravé, a confirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge d'instruction.

Par ordonnance en date du 31 mars 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de Mme [B] [V], et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 octobre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Par ordonnance du 24 décembre 2020, le juge d'instruction a ordonné le maintien de la saisie en valeur de la somme de 537 327,79 euros figurant au crédit d'un compte bancaire dont est titulaire à [1] la demanderesse, mise en examen pour blanchiment aggravé de fraude fiscale.

3. Son avocat a interjeté appel de la décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

4. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de maintien de la saisie en valeur des sommes inscrites au crédit de son compte bancaire, alors :

« 2°/ que le produit de la fraude fiscale est constitué de l'économie qu'elle a permis de réaliser et dont le montant est équivalent à celui des impôts éludés ; que les sommes d'argent inscrites au crédit d'un compte bancaire dissimulé à l'administration fiscale ne constituent pas l'objet du blanchiment de ce délit mais l'assiette de la fraude fiscale originaire ; qu'en confirmant l'ordonnance ayant ordonné une saisie en valeur pour un montant de 537 327,79 euros, au motif que celui-ci était inférieur à celui des avoirs non déclarés de la société [2] SA, la chambre de l'instruction qui a confondu le produit de la fraude fiscale avec son assiette, a méconnu les articles 131-21, 324-1, 324-7 du code pénal, 706-141-1, 706-153, 706-154 et 591 du Code de procédure pénale ;

3°/ qu'en confirmant l'ordonnance de maintien de la saisie qui se fondait expressément sur la proposition de rectification établie par l'administration fiscale d'un montant de 1 345 904 euros, sans prendre en compte le jugement ayant déclaré infondée la proposition de rectification et prononcé la décharge totale de ces sommes, en retenant, sans mieux s'expliquer, que cette évolution de la saisie fiscale de Mme [V] ne suffit pas à remettre en cause le bien fondé de la saisie pénale critiquée, la chambre de l'instruction n'a pas suffisamment justifié sa décision au regard des articles 131-21, alinéas 3 et 9, du Code pénal, 706-141-1, 706-153 et 706-154 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 131-21, alinéas 3 et 9, du code pénal, 706-141-1 et
706-154 du code de procédure pénale, 324-1 du code pénal, 1741 du code général des impôts :

6. Il résulte du premier de ces textes que, dans les cas prévus par la loi ou le règlement, la peine complémentaire de confiscation porte notamment sur tous les biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction, à l'exception des biens qui sont susceptibles de restitution à la victime. La confiscation peut être prononcée en valeur.

7. Selon les deuxième et troisième, l'objet ou le produit de l'infraction dont la confiscation est prévue par l'article 131-21 du code pénal peut être saisi en valeur.

8. Il se déduit des quatrième et cinquième que l'objet du délit de blanchiment de fraude fiscale est constitué de l'économie qu'elle a permis de réaliser et dont le montant est équivalent à celui des impôts éludés.

9. Pour confirmer la saisie en valeur, l'arrêt retient, après avoir constaté que par jugement du 1er avril 2021 le tribunal judiciaire de Nanterre a déclaré infondée la proposition de rectification adressée à la demanderesse et prononcé la décharge totale des droits de mutation à titre gratuit d'un montant de 1 345 904 euros, que la somme d'argent saisie est d'un montant inférieur aux revenus dissimulés par Mme [V] sur des comptes bancaires non déclarés à l'administration fiscale ouverts aux noms de sociétés établies à l'étranger dont elle-même ou des membres de sa famille sont bénéficiaires économiques, pour un montant supérieur à 4 000 000 euros.

10. Les juges ajoutent que, dans ces conditions, le montant des sommes saisies étant inférieur au montant du produit de l'infraction tel qu'il ressort des éléments du dossier comme étant d'au moins 4 282 922 euros, la saisie n'est pas disproportionnée au regard du droit de propriété de
Mme [V], non plus qu'au regard de son droit à la vie privée et familiale dès lors que l'intéressée perçoit des revenus dans le cadre de sa profession dont elle ne démontre pas qu'ils soient d'un montant ne lui permettant pas de faire face aux exigences de la vie courante comme elle l'affirme.

11. En se déterminant ainsi, alors que l'objet du délit de blanchiment de fraude fiscale susceptible d'être saisi en valeur correspond au seul impôt éludé, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés.

12. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf novembre deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 22-80598
Date de la décision : 09/11/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, 21 janvier 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 nov. 2022, pourvoi n°22-80598


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:22.80598
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