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26/10/2022 | FRANCE | N°21-15045

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2022, 21-15045


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1127 F-D

Pourvoi n° N 21-15.045

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 OCTOBRE 2022

La Caisse nationale de sécuri

té sociale minière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-15.045 contre l'arrêt rendu le 11 février 2021 par la cour d'appel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1127 F-D

Pourvoi n° N 21-15.045

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 OCTOBRE 2022

La Caisse nationale de sécurité sociale minière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-15.045 contre l'arrêt rendu le 11 février 2021 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à Mme [E] [G], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Caisse nationale de sécurité sociale minière, de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme [G], après débats en l'audience publique du 14 septembre 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 11 février 2021), Mme [G] a été engagée en qualité de médecin généraliste par la Caisse régionale de la sécurité sociale minière (CARMI) de l'ouest à compter du 1er décembre 2009. Son contrat était soumis à la convention collective des omnipraticiens des centres de santé miniers du 23 janvier 2008. A l'occasion de la fusion des CARMI, la CARMI de l'ouest a été absorbée par la CARMI du nord.

2. Le 1er mars 2017, la salariée a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir le paiement d'un rappel de salaire de la Caisse nationale de sécurité sociale minière (la caisse) dont dépendent les CARMI.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une certaine somme à titre de rappel de salaire sur rémunération variable, outre congés payés afférents, de dire que les équivalents C maladie devront être intégrés au calcul de la rémunération variable et de la débouter de sa demande reconventionnelle en répétition de l'indu, alors « que l'existence d'un usage suppose la caractérisation d'une pratique générale, constante et fixe au sein de l'entreprise ; qu'il incombe à celui qui se prévaut d'un usage d'en rapporter la preuve ; que pour retenir que les équivalents C des jours de maladie devaient être intégrés au calcul de la rémunération variable, correspondant à la moyenne par jour de l'activité durant les douze mois précédent la maladie, la cour d'appel a retenu qu'il n'avait plus été tenu compte, à compter de 2016, des équivalents C des jours de maladie mais qu'il en avait été différemment avant, depuis 2012, par une interprétation en ce sens des termes de la convention collective, dénuée de clarté ; qu'elle en a déduit qu'il était ainsi pratiqué par la caisse dont dépendait la salariée et que rien n'établissait que cette caisse était la seule à procéder de cette façon ou qu'il ne s'agissait pas d'une pratique générale, notamment pas les trois attestations versées aux débats par la caisse ; qu'elle en a conclu que la salariée était en droit de revendiquer l'usage qui lui avait été appliqué pendant plusieurs années consécutives et n'avait pas été régulièrement dénoncé ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il incombait à la salariée d'établir la généralité caractérisant le prétendu usage, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1315, devenus 1103 et 1353, du code civil. »

Recevabilité du moyen

4. La salariée conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que le moyen est nouveau, voire contraire à la thèse défendue en cause d'appel.

5. Cependant, le moyen, né de l'arrêt, est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-1131 du 10 février 2016 et l'article 1315, devenu 1353, du code civil :

6. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

7. Selon le second, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

8. Pour condamner la caisse à payer à la salariée un rappel de salaire au titre de sa rémunération variable, dire que les équivalents C maladie devraient être intégrés au calcul de cette rémunération et débouter la caisse de sa demande en répétition de l'indu, l'arrêt constate qu'il n'a pas été tenu compte, à compter de 2016, des équivalents C des jours de maladie, l'indication étant ultérieurement donnée à la salariée que seuls les actes cotés étaient intégrés dans le calcul de la rémunération variable. Il relève que pour les années antérieures (depuis 2012), il en avait été différemment et qu'il avait été tenu compte des équivalents C des jours de maladie pour le calcul de la rémunération variable, par une interprétation en ce sens des termes de la convention collective. Il ajoute qu'il était ainsi pratiqué par la caisse dont dépendait la salariée, que rien n'établit que cette caisse était la seule à procéder de cette façon et qu'il ne s'agissait pas d'une pratique générale. Il retient que seules trois attestations sont versées aux débats qui ne l'établissent pas, ces attestations n'étant corroborées par aucun autre élément précis et n'apportant en toute hypothèse pas de preuve pour l'ensemble des caisses.

9. Il en déduit que la salariée est en droit de revendiquer l'usage qui lui a été appliqué pendant plusieurs années consécutives et n'a pas été régulièrement dénoncé.

10. En se déterminant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser la généralité de l'usage dont se prévalait la salariée et qu'il incombait à celle-ci d'établir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquence de la cassation

11. La cassation prononcée n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la CASSNM-CARMI nord à payer à Mme [G] les sommes de 8 139,40 euros à titre de rappel sur rémunération variable et 813,94 euros au titre des congés payés afférents, dit que les équivalents C devront être intégrés au calcul de la rémunération variable et déboute la CASSNM-CARMI nord de sa demande en répétition de l'indu, l'arrêt rendu le 11 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne Mme [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Cavrois, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du président empêché, en l'audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Caisse nationale de sécurité sociale minière

La Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Mme [G] les sommes de 8 139,40 euros à titre de rappel de salaire sur rémunération variable et de 813,94 euros à titre de congés payés afférents et d'avoir dit que les équivalents C maladie devaient être intégrés au calcul de la rémunération variable, et de l'avoir débouté de sa demande reconventionnelle en répétition de l'indu ;

Alors 1°) que l'existence d'un usage suppose la caractérisation d'une pratique générale, constante et fixe au sein de l'entreprise ; qu'il incombe à celui qui se prévaut d'un usage d'en rapporter la preuve ; que pour retenir que les équivalents C des jours de maladie devaient être intégrés au calcul de la rémunération variable, correspondant à la moyenne par jour de l'activité durant les 12 mois précédent la maladie, la cour d'appel a retenu qu'il n'avait plus été tenu compte, à compter de 2016, des équivalents C des jours de maladie mais qu'il en avait été différemment avant, depuis 2012, par une interprétation en ce sens des termes de la convention collective, dénuée de clarté ; qu'elle en a déduit qu'il était ainsi pratiqué par la caisse dont dépendait la salariée et que rien n'établissait que cette caisse était la seule à procéder de cette façon ou qu'il ne s'agissait pas d'une pratique générale, notamment pas les trois attestations versées aux débats par la CANSSM ; qu'elle en a conclu que la salariée était en droit de revendiquer l'usage qui lui avait été appliqué pendant plusieurs années consécutives et n'avait pas été régulièrement dénoncé ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il incombait à la salariée d'établir la généralité caractérisant le prétendu usage, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1315, devenus 1103 et 1353, du code civil.

Alors 2°) que la volonté de l'employeur de créer un usage doit être caractérisée ; qu'une erreur, même répétée, ne peut être constitutive d'un droit acquis ni d'un usage ; qu'en se bornant à énoncer que de 2012 à 2016, il était tenu compte des équivalents C des jours de maladie pour le calcul de la rémunération variable, par une interprétation en ce sens des termes de la convention collective, dénuée de clarté dès lors que le complément variable se calculait sur les actes au delà du seuil du salaire de base lequel était exprimé en équivalents C et que la maladie conduisait à ajouter un nombre d'équivalents C correspondant à la moyenne par jour de l'activité enregistrée durant les 12 mois précédant la maladie, avant d'affirmer, par ailleurs, que les deux interprétations de la convention collective étant possibles à la lecture des termes de celle-ci, la CANSSM ne pouvait se prévaloir d'une erreur manifeste commise en procédant pendant plusieurs années au versement de sommes conformément à l'une des interprétations possibles et fondées de la convention collective, la cour d'appel, qui s'est abstenue d'interpréter la convention collective sur le sens de laquelle les parties divergeaient, a statué par des motifs impropres à exclure l'erreur et à caractériser la volonté de créer un usage, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1134 devenu 1103 du code civil.

Alors 3°), en tout état de cause, qu'en s'abstenant d'interpréter la convention collective sur le sens de laquelle les parties divergeaient alors pourtant qu'il appartient au juge de trancher le litige en interprétant lui-même la convention collective, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-15045
Date de la décision : 26/10/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 11 février 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2022, pourvoi n°21-15045


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 01/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.15045
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