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19/10/2022 | FRANCE | N°18-86793

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 octobre 2022, 18-86793


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° N 18-86.793 F-D

N° 01297

GM
19 OCTOBRE 2022

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 OCTOBRE 2022

M. [L] [T] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre, chambre correctionnelle, en date du 25 septembre 2018, qui, sur renvoi après cassatio

n (Crim., 18 juillet 2017, n° 16-85.969), dans la procédure suivie contre lui des chefs de faux, usage de faux et infraction...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° N 18-86.793 F-D

N° 01297

GM
19 OCTOBRE 2022

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 OCTOBRE 2022

M. [L] [T] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre, chambre correctionnelle, en date du 25 septembre 2018, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 18 juillet 2017, n° 16-85.969), dans la procédure suivie contre lui des chefs de faux, usage de faux et infractions au code de l'urbanisme, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.

Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [L] [T], les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. [W] [M], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 21 septembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre,et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [W] [M] a confié à M. [L] [T], architecte, la mission de construire une résidence en bord de mer, sur l'île de [Localité 1]. À la suite d'un contrôle réalisé sur le chantier, des violations du permis de construire et du plan d'occupation des sols ont été constatées. À l'issue de l'information judiciaire ouverte sur cette affaire, M. [T] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour faux et usage, et infractions au code de l'urbanisme.

3. Par jugement du 3 juillet 2015, le tribunal correctionnel de Basse-Terre a, sur l'action publique, déclaré M. [T] coupable de faux et usage, et d'exécution de travaux en méconnaissance du permis de construire et du plan d'occupation des sols. Il a condamné le prévenu à six mois d'emprisonnement avec sursis, 600 000 euros d'amende, ainsi qu'à la publication et à l'affichage du jugement. Par ailleurs, le tribunal a ordonné à l'égard de M. [M], bénéficiaire des travaux, des mesures de démolition et de mise en conformité sous astreinte. Sur l'action civile, le tribunal correctionnel a reçu M. [M] en sa constitution de partie civile, mais l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

4. Par arrêt du 13 septembre 2016, la cour d'appel de Basse-Terre a partiellement relaxé M. [T] des chefs de faux et usage, confirmé le jugement sur la culpabilité pour le restant, et condamné M. [T] à six mois d'emprisonnement avec sursis, 100 000 euros d'amende, à la publication et à l'affichage du jugement. La cour d'appel a également ordonné des mesures de démolition et de mise en conformité des constructions. Elle a confirmé la décision sur l'action civile.

5. Sur pourvoi de M. [M], partie civile, la chambre criminelle de la Cour de cassation, par arrêt du 18 juillet 2017, a cassé cet arrêt, en ses seules dispositions relatives aux intérêts civils, et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée.

Examen de la recevabilité du pourvoi, contestée en défense

6. Il ne saurait être fait grief à M. [T] de ne pas avoir formé son pourvoi en cassation dans les cinq jours francs suivant la date à laquelle l'arrêt a été rendu contradictoirement, soit le 25 septembre 2018, dès lors qu'il ressort des mentions de cet arrêt qu'il a été rendu par mise à disposition au greffe, procédé qui n'est pas prévu par le code de procédure pénale. En conséquence, le délai pour se pourvoir a couru à compter de la signification à M. [T] de l'arrêt attaqué, le 19 octobre 2018.

7. Le pourvoi, formé le 23 octobre 2018, est recevable.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen

8. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Énoncé du moyen

9. Le moyen est pris de la violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale.

10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, après avoir dit que la partie civile avait participé à la réalisation de son préjudice dans la limite de 30 %, condamné M. [T] à lui verser la somme de la somme de 775 355 euros au titre de son préjudice matériel et 100 000 euros au titre de son préjudice moral, alors « qu'en vertu de l'article 2 du code de procédure pénale, seuls ceux qui ont subi un préjudice résultant directement de l'infraction sont recevables en leur action ; qu'il s'en déduit que la personne qui a intentionnellement participé à la réalisation de l'infraction, qui serait la cause de son dommage, n'est pas recevable en son action civile, contrairement à celle dont la négligence n'a pas permis d'éviter l'infraction ; qu'en l'espèce, dès lors qu'elle a relevé qu'il se déduisait des échanges de mails « que les époux [M] ont participé, en toute connaissance de cause, à la stratégie litigieuse, contribuant ainsi à leur propre préjudice », tant en demandant que le cottage ne soit pas détruit, qu'en acceptant que la demande de permis déposée dissimule le plan de surface, qu'en donnant des instructions afin que la construction commence sans attendre la modification du POS, la cour d'appel qui constatait que la partie civile avait intentionnellement participé aux faits infractionnels dont elle sollicitait réparation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en méconnaissance de l'article 2 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

11. Faute d'avoir été soulevée devant les juges du fond, l'exception d'irrecevabilité de la constitution de partie civile de M. [M], proposée pour la première fois devant la Cour de cassation, constitue un moyen nouveau, mélangé de fait et de droit et, comme tel, irrecevable.

Sur le deuxième moyen

Énoncé du moyen

12. Le moyen est pris de la violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3, 464, 591 et 593 du code de procédure pénale.

13. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a alloué à la partie civile 470 600 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice d'immobilisation et de perte de jouissance, alors « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'au titre du préjudice d'immobilisation et de perte de jouissance, la partie civile sollicitait 470 600 euros ; que la cour d'appel a fait droit à cette demande, aux motifs que l'intimé ne faisait pas de proposition ; qu'en se prononçant ainsi, sans s'expliquer sur l'existence et l'évaluation de ce préjudice que M. [T] contestait, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. »

Réponse de la Cour

14. Pour allouer à la partie civile la somme de 470 600 euros au titre de l'immobilisation et de la privation de jouissance du bien immobilier, l'arrêt attaqué énonce que le chantier est arrêté depuis le 13 décembre 2010, et que faute de proposition de M. [T] concernant ce poste de préjudice, le calcul proposé par M. [M] sera retenu.

15. En l'état de ces énonciations, dont il ressort que les juges se sont fondés pour évaluer ce préjudice sur l'estimation proposée par la partie civile, à partir d'un calcul forfaitaire qu'ils ont appliqué depuis la date de cessation du chantier, et dès lors qu'ils pouvaient approuver ce procédé d'évaluation dans le cadre de leur pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a justifié sa décision.

16. Ainsi le moyen doit être écarté.

Sur le quatrième moyen

Énoncé du moyen

17. Le moyen est pris de la violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3, 464, 591 et 593 du code de procédure pénale.

18. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a évalué le préjudice moral de la partie civile à 100 000 euros, alors « qu'en considérant que la partie civile avait subi un préjudice moral qu'elle a évalué à la somme de 100 000 euros, sans prendre en considération le partage de responsabilité entre la partie civile et l'intimé, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. »

Réponse de la Cour

19. Il ne saurait être reproché à la cour d'appel de ne pas avoir appliqué, pour fixer la somme allouée à la partie civile en réparation de son préjudice moral, le partage de responsabilité qu'elle a précédemment énoncé, dès lors qu'il ressort du dispositif de l'arrêt attaqué que ce partage de responsabilité a été appliqué à l'ensemble des indemnisations accordées à la partie civile, sans distinction entre son préjudice matériel et son préjudice moral.

20. D'où il suit que le moyen n'est pas fondé.

21. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf octobre deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-86793
Date de la décision : 19/10/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 25 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 oct. 2022, pourvoi n°18-86793


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:18.86793
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