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28/09/2022 | FRANCE | N°21-20357

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 septembre 2022, 21-20357


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 552 FS-D

Pourvoi n° M 21-20.357

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

1°/ La société Mon Courti

er en pharmacie, société par actions simplifiée, anciennement dénommée Pyxis Services et Pyxis Pharma

2°/ la société Sagitta Pharma, société par...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 552 FS-D

Pourvoi n° M 21-20.357

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

1°/ La société Mon Courtier en pharmacie, société par actions simplifiée, anciennement dénommée Pyxis Services et Pyxis Pharma

2°/ la société Sagitta Pharma, société par actions simplifiée,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

3°/ la société Pharmacie [X] [Adresse 1], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

4°/ l'association Pyxis Pharma SRA, dont le siège est [Adresse 4],

ont formé le pourvoi n° M 21-20.357 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5 - chambre 4), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Bristol-Myers Squibb, société à responsabilité limitée,

2°/ à la société Upsa, société par actions simplifiée,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Les sociétés Bristol-Meyers Squibb et Upsa ont formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les demanderesses au pourvoi incident éventuel invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat des sociétés Mon Courtier en pharmacie, anciennement dénommée Pyxis Services et Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, Pharmacie [X] [Adresse 1] et l'association Pyxis Pharma SRA, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat des sociétés Bristol-Myers Squibb et Upsa, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 juin 2022 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, Mmes Poillot-Peruzzetto, Champalaune, conseillers, M. Blanc, Mmes Comte, Bessaud, Bellino, M. Regis, conseillers référendaires, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2021), la société Upsa, filiale de la société Bristol-Myers Squibb (la société BMS), fabrique et commercialise neuf médicaments non remboursables, couramment utilisés par le public. La société Sagitta Pharma, dont le représentant légal, M. [Y] [X], est titulaire d'une officine de pharmacie, exerce une activité de centrale d'achat pharmaceutique (CAP) et la société Pyxis Pharma, devenue la société Pyxis Services, puis la société Mon Courtier en pharmacie, dont le représentant légal est M. [L] [X], exerce une activité de structure de regroupement à l'achat (SRA).

2. Ayant constaté que ces sociétés exploitaient un site internet proposant aux officines adhérentes de la société Pyxis Pharma la vente des médicaments non remboursés de la gamme Upsa et soutenant qu'elles avaient mis en place un réseau de rétrocession illicite organisé, constitutifs d'actes de concurrence déloyale, la société Upsa les a assignées, ainsi que la société Pharmacie [X] [Adresse 1], dirigée par M. [L] [X], qui exploite une officine de pharmacie à [Localité 5], en demandant réparation de divers préjudices.

3. L'association Pyxis Pharma est intervenue volontairement à l'instance en cause d'appel en soutenant avoir repris l'activité de SRA de la société Pyxis Pharma.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches, le troisième moyen, pris en sa première branche, et le quatrième moyen du pourvoi principal, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui sont, pour le deuxième moyen, irrecevable et ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation, pour les autres.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. Les sociétés Mon Courtier en pharmacie, Pharmacie [X] [Adresse 1], Sagitta Pharma et l'association Pyxis Pharma SRA font grief à l'arrêt de rejeter les demandes de la société Mon Courtier en pharmacie et de l'association Pyxis Pharma tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Upsa de leur communiquer, en qualité de SRA, les conditions générales de vente adéquates, c'est-à-dire celles sur la base desquelles elle négocie avec les officines lorsque celles-ci procèdent à des achats en direct, en précisant que ces conditions constitueraient le socle de la négociation annuelle entre le fournisseur Upsa et la SRA, et de leurs demandes subséquentes, alors :

« 1°/ qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019, et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que "le refus de la société Upsa de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle réserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines", l'arrêt attaqué retient "qu'il est établi que la société Mon Courtier en pharmacie a négocié en qualité de commissionnaire à l'achat, ce qui l'a engagée, certes, pour le compte des pharmaciens d'officine qu'elle regroupe mais, cependant, en son propre nom, ce qui constitue à l'égard du fournisseur une différence objective avec la catégorie des officines avec lesquelles elle traite directement et auxquelles elle réserve une autre catégorie de conditions générales de vente" ; qu'en statuant ainsi, quand l'intermédiation d'un commissionnaire, qui n'est qu'un mandataire, ne constituait pas un critère objectif propre à justifier l'application aux SRA de conditions générales de vente différentes de celles réservées aux officines, dès lors que les effets réels des ventes conclues par le commissionnaire se produisaient directement dans la personne des officines commettantes, la
cour d'appel a violé les articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 ;

2°/ qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que "le refus de la société Upsa de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle réserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines", l'arrêt attaqué retient que "cette différence objective avec la situation des officines regroupées par la SRA est d'autant plus marquée que la négociation des conditions tarifaires avec le fournisseur s'effectue globalement avec la SRA dans le cadre d'une relation contractuelle dans laquelle le fournisseur ne s'engage qu'à l'égard de la SRA" ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de relation contractuelle directe du fournisseur avec l'officine ne constitue pas un critère objectif, dès lors que le transfert de propriété se fait dans le patrimoine de l'officine commettante qui a un rôle de conseil envers le consommateur final, la cour d'appel a violé les articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 ;

3°/ qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que "le refus de la société Upsa de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle réserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines", l'arrêt attaqué retient d'une part "qu'il est établi que la société Mon Courtier en pharmacie a négocié en qualité de commissionnaire à l'achat, ce qui l'a engagée, certes, pour le compte des pharmaciens d'officine qu'elle regroupe mais, cependant, en son propre nom, ce qui constitue à l'égard du fournisseur une différence objective avec la catégorie des officines avec lesquelles elle traite directement et auxquelles elle réserve une autre catégorie de conditions générales de vente" et d'autre part, que "cette différence objective avec la situation des officines regroupées par la SRA est d'autant plus marquée que la négociation des conditions tarifaires avec le fournisseur s'effectue globalement avec la SRA dans le cadre d'une relation contractuelle dans laquelle le fournisseur ne s'engage qu'à l'égard de la SRA" ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que le fournisseur a établi, selon des critères objectifs, que la SRA n'appartenait pas à la catégorie d'acheteurs correspondant aux officines, la cour d'appel a privé sa décision de base légale [au regard des] articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019. »

Réponse de la Cour

6. Après avoir rappelé que l'article L. 442-6, I, 9° du code de commerce oblige le fournisseur de produits à communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions de l'article L. 441-6 du même code, l'arrêt relève qu'il est constant que la société Upsa a fourni, en l'espèce, à la société Mon Courtier en pharmacie des conditions générales de vente différenciées relatives aux SRA, lesquelles sont indistinctement utilisées par ce fournisseur à l'égard des CAP. Il précise que la pratique suivie par celui-ci distingue ces conditions générales de celles destinées aux officines, d'une part, de celles destinées aux grossistes répartiteurs, d'autre part, et, enfin, de celles destinées aux hôpitaux et établissements publics de santé.

7. L'arrêt relève encore qu'il est établi que la société Mon Courtier en pharmacie a négocié en qualité de commissionnaire à l'achat, ce qui l'a engagée, certes, pour le compte des pharmaciens d'officine qu'elle regroupe mais, cependant, en son propre nom, ce qui constitue à l'égard du fournisseur une différence objective avec la catégorie des officines avec lesquelles elle traite directement et auxquelles elle réserve une autre catégorie de conditions générales de vente. Il ajoute que cette différence objective avec la situation des officines regroupées par la SRA est d'autant plus marquée que la négociation des conditions tarifaires avec le fournisseur s'effectue globalement avec la SRA dans le cadre d'une relation contractuelle dans laquelle le fournisseur ne s'engage qu'à l'égard de la SRA.

8. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire, en présence de conditions de vente spécifiquement prévues pour les SRA et CAP, sans qu'il importe que le transfert de propriété des produits vendus se fasse directement dans le patrimoine des officines commettantes pour le compte desquelles intervenait la SRA en qualité de commissionnaire et donc en son nom propre en négociant elle-même les prix et les achats, que celle-ci n'appartenant pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines, le refus de ce fournisseur de lui communiquer les conditions générales qu'elle réservait aux officines qui commandaient les produits directement auprès d'elle reposait sur un critère objectif.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

10. Les sociétés Mon Courtier en pharmacie, Pharmacie [X] [Adresse 1], Sagitta Pharma et l'association Pyxis Pharma SRA font grief à l'arrêt de dire que les sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma et Pharmacie [X] [Adresse 1] sont entièrement responsables des conséquences dommageables subies par les sociétés Upsa et BMS du fait des rétrocessions illicites effectuées au moyen du site internet www.lacentralepharma.com, et en conséquence, de condamner les trois premières à payer diverses sommes à la société et d'ordonner la publication de l'arrêt, alors « que la participation volontaire de celui qui se plaint d'un acte de concurrence déloyale à l'activité illicite qu'il critique est susceptible de constituer une cause d'exonération partielle ou totale de la responsabilité de son auteur ; que pour refuser de retenir, comme l'avaient fait les premiers juges, un partage de responsabilité pour faute de la prétendue victime des actes de concurrence déloyale litigieux, l'arrêt retient que "non seulement rien ne prouve (...) que la société Upsa a elle-même sollicité son client afin de procéder à la rétrocession illicite, mais encore qu'il ne peut être valablement retenu que le fournisseur a accepté le dispositif illicite ou qu'il l'a toléré en connaissance de cause" ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, d'une part, s'il ne ressortait pas des pièces saisies par l'huissier chez la société Mon Courtier en pharmacie, anciennement dénommée société Pyxis Pharma, que la société BMS avait sans discontinuer pendant la période considérée libellé ses factures emportant remise de 30 % à l'ordre de "M. [X] [L]. Phie [Adresse 1] Pyxis Pharmat", qu'elle en avait reçu systématiquement le paiement de la part de la société Pyxis Pharma au moyen de lettres de change relevé présentées à l'encaissement auprès du Crédit mutuel professions de santé [Localité 5], teneur du compte ouvert dans ses livres par Pyxis Pharma, d'autre part, si eu égard au montant du chiffre d'affaires ainsi traité, 530 927,86 euros TTC pendant la période précédant le constat, dont le volume dépassait largement les besoins spécifiques de la pharmacie [Adresse 1] à Paris et au mode de facturation et de paiement utilisés, la société BMS-Upsa ne pouvait pas ne pas connaître le canal de distribution emprunté par ses produits, canal qu'elle avait d'abord toléré jusqu'au 7 avril 2014, puis nécessairement accepté pour en avoir été avisée par les constatations effectuées par l'huissier à cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

11. Après avoir relevé que le niveau des commandes des médicaments non remboursés de la Pharmacie [X] [Adresse 1] avait déjà commencé d'augmenter significativement à partir de 2009 et que les sociétés BMS et Upsa objectaient que la société Upsa ne disposait pas d'un outil de gestion qui lui aurait permis de détecter l'existence d'un système de rétrocession illicite, l'arrêt rappelle que la faute du fournisseur doit être prouvée et retient que les éléments produits ne démontrent pas une telle faute et que rien n'établit que la société Upsa ait elle-même sollicité son client afin de procéder à la rétrocession illicite. Il en déduit qu'il ne peut être valablement retenu que le fournisseur ait accepté le dispositif illicite ou qu'il l'ait toléré en connaissance de cause.

12. En l'état de ces constatations, énonciations et appréciations, c'est souverainement que la cour d'appel, qui a examiné les éléments invoqués et produits par les sociétés Mon Courtier en pharmacie, Pharmacie [X] [Adresse 1] et Sagitta Pharma, a estimé qu'elles ne démontraient pas l'acceptation ou la tolérance de la pratique incriminée.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

14. Les sociétés Mon Courtier en pharmacie, Pharmacie [X] [Adresse 1], Sagitta Pharma et l'association Pyxis Pharma SRA font grief à l'arrêt de condamner in solidum ces trois sociétés à payer à la société Upsa une somme de 163 996 euros au titre du préjudice économique sur la période 2010-17 avril 2014, de condamner in solidum les sociétés Mon Courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société Upsa une somme de 54 914 euros au titre du préjudice économique sur la période postérieure au 17 avril 2014 et allant jusqu'au 29 juillet 2015, de condamner in solidum les sociétés Mon Courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société Upsa une somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la perte de marge, pour la période postérieure au 29 juillet 2015, alors « qu'après avoir retenu que "l'organisation du réseau de rétrocession illicite a eu pour but et pour effet de faire bénéficier des officines commandant en réalité des petites quantités de médicaments de remises correspondant au plein volume des commandes passées par l'intermédiaire de la Pharmacie [Adresse 1], qu'il est établi que ces officines n'auraient pu y prétendre compte tenu de la politique commerciale mise en place par le fournisseur", et que "le préjudice indemnisable qui en découle s'évalue à la perte de marge causé par la différence entre les marges obtenues et celles qui auraient été obtenues par les officines adhérentes de la SRA si elles avaient traité directement avec le fournisseur", l'arrêt attaqué, pour évaluer le préjudice, retranche le "CA effectif" du plein tarif avant application de toute remise ("CA théorique avant remise de 30 %") ; qu'en statuant ainsi, quand la méthode d'évaluation qu'elle avait elle-même fixée aurait dû la conduire à retrancher de la somme portée à la troisième ligne ("CA théorique après remise de 20 %" c'est-à-dire la somme à laquelle les officines avaient seul droit) la somme portée à la première ligne ("CA effectif" c'est-à-dire la somme effectivement payée au Laboratoire grâce à l'intervention de la SRA avec remise de 30 %), la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale et l'article 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil et le principe de la réparation intégrale du préjudice :

15. La réparation du dommage doit correspondre au préjudice subi.

16. Pour évaluer le préjudice commercial lié à la perte de marge de la société Upsa, l'arrêt, après avoir retenu que l'organisation du réseau de rétrocession illicite a eu pour but et pour effet d'obtenir pour des officines commandant des petites quantités de médicaments de remises correspondant au plein volume des commandes passées par l'intermédiaire de la société Pharmacie [X] [Adresse 1], tandis que ces officines n'auraient pu bénéficier de ce taux de remise compte tenu de la politique commerciale mise en place par le fournisseur, énonce que le préjudice indemnisable qui en découle s'évalue à la perte de marge causée par la différence entre les marges obtenues et celles qui auraient été obtenues par les officines adhérentes de la SRA, si elles avaient traité directement avec le fournisseur. L'arrêt procède ensuite à l'évaluation du préjudice en retranchant le chiffre d'affaires effectif, correspondant à la somme effectivement payée annuellement au laboratoire avec remise de 30 %, de la somme correspondant au plein tarif avant application de toute remise pour la même année, somme à laquelle il applique le taux de marge de la société Upsa.

17. En statuant ainsi, alors que la méthode d'évaluation qu'elle avait elle-même fixée aurait dû la conduire à retrancher le chiffre d'affaires effectif de la somme correspondant au chiffre d'affaires théorique après remise de 20 %, c'est-à-dire la somme que les officines auraient dû payer compte tenu de la remise à laquelle elles pouvaient prétendre, et non la somme qu'elles auraient dû payer sans aucune réduction, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief du pourvoi principal ni sur le pourvoi incident qui n'est qu'éventuel en cas de cassation sur le premier moyen du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum les sociétés Pharmacie [X] [Adresse 1], Mon Courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société Upsa les sommes de 163 996 euros au titre du préjudice économique sur la période écoulée entre l'année 2010 et le 17 avril 2014, 54 914 euros pour la période postérieure au 17 avril 2014, jusqu'au 29 juillet 2015 et 5 000 euros pour la période postérieure au 29 juillet 2015, l'arrêt rendu le 2 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne les sociétés Bristol-Myers Squibb et Upsa aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux et signé par Mme Darbois, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Mouillard, président empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour les sociétés Mon Courtier en pharmacie, anciennement dénommée Pyxis Services et Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, Pharmacie [X] [Adresse 1] et l'association Pyxis Pharma SRA.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

d'AVOIR débouté la société Mon courtier en pharmacie et l'association Pyxis Pharma de leur demande tendant à voir enjoindre à la société UPSA de communiquer à la Société Mon Courtier en Pharmacie et à la SRA Association Pyxis Pharma, en leur qualité de structure de regroupement à l'achat, les conditions générales de ventes adéquates, c'est-à-dire celles sur la base desquelles elle négocie avec les officines lorsque celles-ci procèdent à des achats en direct, en précisant que ces conditions constitueront le socle de la négociation annuelle entre le fournisseur UPSA et la structure de regroupement à l'achat et de leurs demandes subséquentes,

1°) Alors qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L.441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019, et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que « le refus de la société UPSA de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle réserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines » , l'arrêt attaqué retient « qu'il est établi que la société Mon courtier en pharmacie a négocié en qualité de commissionnaire à l'achat, ce qui l'a engagée, certes, pour le compte des pharmaciens d'officine qu'elle regroupe mais, cependant, en son propre nom, ce qui constitue à l'égard du fournisseur une différence objective avec la catégorie des officines avec lesquelles elle traite directement et auxquelles elle réserve une autre catégorie de conditions générales de vente »; qu'en statuant ainsi, quand l'intermédiation d'un commissionnaire, qui n'est qu'un mandataire, ne constituait pas un critère objectif propre à justifier l'application aux SRA de conditions générales de vente différentes de celles réservées aux officines, dès lors que les effets réels des ventes conclues par le commissionnaire se produisaient directement dans la personne des officines commettantes, la cour d'appel a violé les articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 ;

2°) Alors qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L.441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que « le refus de la société UPSA de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle réserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines », l'arrêt attaqué retient que « cette différence objective avec la situation des officines regroupées par la SRA est d'autant plus marquée que la négociation des conditions tarifaires avec le fournisseur s'effectue globalement avec la SRA dans le cadre d'une relation contractuelle dans laquelle le fournisseur ne s'engage qu'à l'égard de la SRA » ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de relation contractuelle directe du fournisseur avec l'officine ne constitue pas un critère objectif, dès lors que le transfert de propriété se fait dans le patrimoine de l'officine commettante qui a un rôle de conseil envers le consommateur final, la cour d'appel a violé les articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 ;

3°)Alors qu'un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l'article L.441-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019 et qu'il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s'il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n'appartient pas à la catégorie concernée ; que pour considérer que « le refus de la société UPSA de communiquer à la SRA les conditions générales qu'elle reìserve aux officines se fonde en l'espèce, selon des critères objectifs, sur le fait que la SRA n'appartient pas à la même catégorie d'acheteurs que les officines », l'arrêt attaqué retient d'une part « qu'il est eìtabli que la société Mon courtier en pharmacie a négocié en qualité de commissionnaire à l'achat, ce qui l'a engagée, certes, pour le compte des pharmaciens d'officine qu'elle regroupe mais, cependant, en son propre nom, ce qui constitue à l'égard du fournisseur une différence objective avec la catégorie des officines avec lesquelles elle traite directement et auxquelles elle réserve une autre catégorie de conditions générales de vente » et d'autre part, que « cette différence objective avec la situation des officines regroupées par la SRA est d'autant plus marquée que la négociation des conditions tarifaires avec le fournisseur s'effectue globalement avec la SRA dans le cadre d'une relation contractuelle dans laquelle le fournisseur ne s'engage qu'à l'égard de la SRA » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que le fournisseur a établi, selon des critères objectifs, que la SRA n'appartenait pas à la catégorie d'acheteurs correspondant aux officines, la cour d'appel a privé sa décision de base légale articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

d'AVOIR dit que les sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma et Pharmacie [X] [Adresse 1] sont entièrement responsables des conséquences dommageables subies par les sociétés UPSA et BMS du fait des rétrocessions illicites effectuées au moyen du site internet www.lacentralepharma.com, et en conséquence, condamné in solidum les sociétés Pharmacie [X] [Adresse 1], Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma, à payer à la société UPSA une somme de 163 996 euros au titre du préjudice économique sur la période 2010-17 avril 2014, condamné in solidum les sociétés Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société UPSA une somme de 54 914 euros au titre du préjudice économique sur la période postérieure au 17 avril 2014 et allant jusqu'au 29 juillet 2015,condamné in solidum les sociétés Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société UPSA une somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la perte de marge, pour la période postérieure au 29 juillet 2015, condamné in solidum les sociétés Pharmacie [X] [Adresse 1], Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma, à payer à la société UPSA une somme de 50 000 euros au titre du préjudice de désorganisation commerciale, ordonné la publication de l'arrêt, intégralement ou par extrait, dans trois journaux ou magazines au choix de la société UPSA, ainsi que sur le site internet www.lacentralepharma.com, le coût total de ces insertions ne pouvant excéder 15 000 euros HT à la charge in solidum des sociétés Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma,

1°) Alors que la concurrence déloyale consiste à user de procédés contraires aux usages loyaux du commerce pour nuire à un concurrent afin de détourner sa clientèle ; que pour considérer que les sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, devenues la société Mon Courtier en pharmacie, et Pharmacie [X] [Adresse 1] s'étaient rendues coupables de tels actes du fait des rétrocessions illicites effectuées au moyen du site internet www.lacentralepharma.com, l'arrêt attaqué retient qu'entre le 20 août 2010 et le 29 juillet 2015, tandis que « le fournisseur appliquait aux termes de ses conditions générales de vente un système de remises différenciées tenant compte de la qualité de l'acheteur et du volume commandé, plaçant les SRA, quant au point de départ de la négociation commerciale, dans une position moins favorables que celle des officines commandant individuellement en grosse quantité, pendant la même période (?), les petites officines adhérentes de la SRA Pyxis Pharma ont pu indirectement profiter de taux de remise supérieurs à ceux auxquels elles auraient pu prétendre vis-à-vis de BMS-UPSA si elles avaient commandé en direct, ce grâce au dispositif mis en oeuvre par les défenderesses qui consistait à grouper leurs commandes passées à partir de la SELARL [X]-[Adresse 1], laquelle assurait la réception des marchandises et en faisait payer le prix par la SRA Pyxis Pharma, pour être ensuite revendues par celle-ci à ses adhérents, faisant ainsi de la société Pyxis Pharma un acheteur revendeur de produits pharmaceutiques non remboursés » ; qu'en statuant ainsi, quand le fait d'empêcher un laboratoire de pratiquer des conditions financières moins avantageuses à l'égard des petites officines ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil ;

2°) Alors que la concurrence déloyale consiste à user de procédés contraires aux usages loyaux du commerce pour nuire à un concurrent afin de détourner sa clientèle ; que pour considérer que les sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, devenues la société Mon Courtier en pharmacie, et Pharmacie [X] [Adresse 1] s'étaient rendues coupables de tels actes du fait des rétrocessions illicites effectuées au moyen du site internet www.lacentralepharma.com, l'arrêt attaqué retient qu'entre le 20 août 2010 et le 29 juillet 2015, tandis que «le fournisseur appliquait aux termes de ses conditions générales de vente un système de remises différenciées tenant compte de la qualité de l'acheteur et du volume commandé, plaçant les SRA, quant au point de départ de la négociation commerciale, dans une position moins favorable que celle des officines commandant individuellement en grosse quantité, pendant la même période (?), les petites officines adhérentes de la SRA Pyxis Pharma ont pu indirectement profiter de taux de remise supérieurs à ceux auxquels elles auraient pu prétendre vis-à-vis de BMS-UPSA si elles avaient commandé en direct, ce grâce au dispositif mis en oeuvre par les défenderesses qui consistait à grouper leurs commandes passées à partir de la SELARL [X]-[Adresse 1], laquelle assurait la réception des marchandises et en faisait payer le prix par la SRA Pyxis Pharma, pour être ensuite revendues par celle-ci à ses adhérents, faisant ainsi de la société Pyxis Pharma un acheteur revendeur de produits pharmaceutiques non remboursés » et qu'il est constant que ces faits sont constitutifs d'infractions à la prohibition de rétrocession en gros de médicaments résultant des dispositions des articles L.5124-1 et L.5121-5 du code de la santé publique ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser un acte de concurrence déloyale impliquant l'usage de procédés contraires aux usages loyaux du commerce ayant pour objectif de nuire à un concurrent afin de détourner sa clientèle, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil ;

3°) Alors que la participation volontaire de celui qui se plaint d'un acte de concurrence déloyale à l'activité illicite qu'il critique est susceptible de constituer une cause d'exonération partielle ou totale de la responsabilité de son auteur ; que pour refuser de retenir, comme l'avaient fait les premiers juges, un partage de responsabilité pour faute de la prétendue victime des actes de concurrence déloyal litigieux, l'arrêt retient que « non seulement rien ne prouve (?) que la société UPSA a elle-même sollicité son client afin de procéder à la rétrocession illicite, mais encore qu'il ne peut être valablement retenu que le fournisseur a accepté le dispositif illicite ou qu'il l'a toléré en connaissance de cause » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, d'une part, s'il ne ressortait pas des pièces saisies par l'huissier chez la société Mon courtier en pharmacie, anciennement dénommée société Pyxis Pharma, que la société BMS avait sans discontinuer pendant la période considérée libellé ses factures emportant remise de 30% à l'ordre de « M. [X] [L]. Phie [Adresse 1] Pyxis Pharmat », qu'elle en avait reçu systématiquement le paiement de la part de la société Pyxis Pharma au moyen de lettres de change relevé présentées à l'encaissement auprès du crédit mutuel professions de santé [Localité 5] (CMPS- [Localité 5]), teneur du compte ouvert dans ses livres par Pyxis Pharma, d'autre part, si eu égard au montant du chiffre d'affaires ainsi traité, 530 927,86 € TTC pendant la période précédant le constat, dont le volume dépassait largement les besoins spécifiques de la pharmacie [Adresse 1] à Paris et au mode de facturation et de paiement utilisés, la société BMS-UPSA ne pouvait pas ne pas connaître le canal de distribution emprunté par ses produits, canal qu'elle avait d'abord toléré jusqu'au 7 avril 2014, puis nécessairement accepté pour en avoir été avisée par les constatations effectuées par l'huissier à cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

d'AVOIR condamné in solidum les sociétés Pharmacie [X] [Adresse 1], Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma, à payer à la société UPSA une somme de 163 996 euros au titre du préjudice économique sur la période 2010-17 avril 2014, condamné in solidum les sociétés Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société UPSA une somme de 54 914 euros au titre du préjudice économique sur la période postérieure au 17 avril 2014 et allant jusqu'au 29 juillet 2015,condamné in solidum les sociétés Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma à payer à la société UPSA une somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la perte de marge, pour la période postérieure au 29 juillet 2015,

1°) Alors que dans leurs conclusions d'appel (p. 35, n° 127), les sociétés Mon courtier en pharmacie, Sagitta Pharma et Pharmacie [X] [Adresse 1] faisaient valoir que le prétendu manque à gagner dont se plaignait la société UPSA était « simplement caractérisé par la volonté du laboratoire UPSA de ne pas perdre le bénéfice d'un avantage qu'il impose de manière irrégulière », de sorte que le préjudice dont la société UPSA se prévalait ne correspondait pas « à une atteinte à un intérêt légitime juridiquement protégé, comme l'exige la jurisprudence lorsqu'elle souligne que la victime ne peut obtenir la réparation des pertes de ses rémunérations que lorsque celle-ci sont licites » ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) Alors qu'après avoir retenu que « l'organisation du réseau de rétrocession illicite a eu pour but et pour effet de faire bénéficier des officines commandant en réalité des petites quantités de médicaments de remises correspondant au plein volume des commandes passées par l'intermédiaire de la Pharmacie [Adresse 1], qu'il est établi que ces officines n'auraient pu y prétendre compte tenu de la politique commerciale mise en place par le fournisseur », et que « le préjudice indemnisable qui en découle s'évalue à la perte de marge causé par la différence entre les marges obtenues et celles qui auraient été obtenues par les officines adhérentes de la SRA si elles avaient traité directement avec le fournisseur », l'arrêt attaqué, pour évaluer le préjudice, retranche le « CA effectif » du plein tarif avant application de toute remise (« CA théorique avant remise de 30 % »); qu'en statuant ainsi, quand la méthode d'évaluation qu'elle avait elle-même fixée aurait dû la conduire à retrancher de la somme portée à la troisième ligne (« CA théorique après remise de 20% » c'est-à-dire la somme à laquelle les officines avaient seul droit) la somme portée à la première ligne (« CA effectif », c'est-à-dire la somme effectivement payée au Laboratoire grâce à l'intervention de la SRA avec remise de 30 %), la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale et l'article 1240 du code civil ;

3°) Alors qu'après avoir retenu que « l'organisation du réseau de rétrocession illicite a eu pour but et pour effet de faire bénéficier des officines commandant en réalité des petites quantités de médicaments de remises correspondant au plein volume des commandes passées par l'intermédiaire de la Pharmacie [Adresse 1], qu'il est établi que ces officines n'auraient pu y prétendre compte tenu de la politique commerciale mise en place par le fournisseur », et que « le préjudice indemnisable qui en découle s'évalue à la perte de marge causé par la différence entre les marges obtenues et celles qui auraient été obtenues par les officines adhérentes de la SRA si elles avaient traité directement avec le fournisseur », l'arrêt attaqué, pour évaluer le préjudice, retranche le « CA effectif » du plein tarif avant application de toute remise (« CA théorique avant remise de 30 % ») quand la méthode d'évaluation qu'elle avait elle-même fixée aurait dû la conduire à retrancher de la somme portée à la troisième ligne (« CA théorique après remise de 20% » c'est-à-dire la somme à laquelle les officines avaient seul droit) la somme portée à la première ligne (« CA effectif », c'est-à-dire la somme effectivement payée au Laboratoire grâce à l'intervention de la SRA avec remise de 30 %) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est contredite et ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(tout aussi subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

d'AVOIR condamné in solidum les sociétés Pharmacie [X] [Adresse 1], Mon courtier en pharmacie et Sagitta Pharma, à payer à la société UPSA une somme de 50 000 euros au titre du préjudice de désorganisation commerciale,

Alors qu'en affirmant que les rétrocessions illicites avaient laissé croire aux officines adhérentes qu'il était admis par UPSA que « la société Pharmacie [Adresse 1] ou tout autre pharmacie mise à contribution puisse, sans nécessité, réexpédier des quantités de médicaments hors de proportion avec ses propres capacités de distribution, ce dans des conditions aggravant collectivement le risque sanitaire », sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le fait qu'il y ait toujours eu un prestataire logistique s'occupant de l'entreposage et de la livraison aux officines n'était pas de nature à exclure que les officines adhérentes aient pu penser qu'UPSA avait autorisé des rétrocessions dont ces officines n'avaient pas connaissance du fait du système de livraison mis en place, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du code civil. Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les sociétés Bristol-Myers Squibb et Upsa.

La SARL Bristol-Myers Squibb et la SAS Upsa font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'intervention en cause d'appel de l'association Pyxis Pharma et les demandes de la société Mon courtier en pharmacie sont recevables ;

Alors, d'une part, que peut intervenir à titre principal, en cause d'appel, celui qui élève une prétention à son profit lorsqu'il a le droit d'agir relativement à cette prétention ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer recevable l'intervention en cause d'appel de l'association Pyxis Pharma, que « les statuts de l'association Pyxis Pharma déclarée en préfecture après le prononcé du jugement entrepris mentionnent qu'elle a pour objet la mise en place et l'exploitation d'une structure de regroupement à l'achat au sens de l'article D 5125-24-16 du code de santé publique » et que « le procès-verbal de réunion d'assemblée extraordinaire de l'association tenue le 26 août 2019 précise, à l'occasion de la deuxième résolution adoptée, que l'objet de l'association est désormais de reprendre les activités résiduelles de commissionnaire de la société Mon courtier en pharmacie ex-Pyxis Pharma », sans constater, ce qui était contesté, que la société Pyxis Pharma aurait effectivement cédé son activité de structure de regroupement à l'achat à l'association Pyxis Pharma, la Cour d'appel a violé les articles 329 et 554 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que peut intervenir à titre principal, en cause d'appel, celui qui élève une prétention à son profit lorsqu'il a le droit d'agir relativement à cette prétention ; qu'en relevant, pour déclarer recevable l'intervention en cause d'appel de l'association Pyxis Pharma, que « les statuts de l'association Pyxis Pharma déclarée en préfecture après le prononcé du jugement entrepris mentionnent qu'elle a pour objet la mise en place et l'exploitation d'une structure de regroupement à l'achat au sens de l'article D 5125-24-16 du code de santé publique » et que « le procès-verbal de réunion d'assemblée extraordinaire de l'association tenue le 26 août 2019 précise, à l'occasion de la deuxième résolution adoptée, que l'objet de l'association est désormais de reprendre les activités résiduelles de commissionnaire de la société Mon courtier en pharmacie ex-Pyxis Pharma », motifs dont il résulte que l'association Pyxis Pharma, exerçant une activité de structure de regroupement à l'achat, pouvait agir, elle-même, aux fins d'obtenir la communication des conditions générales de vente du fournisseur et, à défaut d'obtenir une telle communication, former une telle demande en justice, mais non qu'elle pouvait intervenir, à titre principal, afin de reprendre la prétention initialement formulée par la société Pyxis Pharma, aucun des motifs de l'arrêt n'établissant que la société Pyxis Pharma aurait cédé son activité de structure de regroupement à l'achat à l'association Pyxis Pharma, la Cour d'appel a violé les articles 329 et 554 du code de procédure civile ;

Alors, de troisième part, que le droit de la société Pyxis Pharma, devenue Mon courtier en pharmacie, d'agir en justice aux fins d'obtenir la communication des conditions générales de vente de la société Upsa sur la base desquelles elle négocie avec les officines lorsque celles-ci procèdent à des achats en direct, en précisant que ces conditions constitueront le socle de la négociation annuelle entre ce fournisseur et elle-même impliquait que cette société exerce une activité de structure de regroupement à l'achat ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer recevables les demandes de la société Mon courtier en pharmacie, qu'elle était « en mesure de vérifier que cette personne morale a continué d'avoir expressément pour objet social l'activité de toutes structures de regroupement à l'achat », sans indiquer en quoi ses statuts le lui auraient permis, ce qui était contesté, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles D.5124-24-1 du code de la santé publique et L. 441-6 et L. 442-6, I, 9°, du code de commerce, dans leur rédaction applicable en la cause, ensemble les articles 31 et 32 du code de procédure civile ;

Alors, de quatrième part, subsidiairement, que l'article 2 des statuts de la société Pyxis Services modifiés le 4 décembre 2017 énonce clairement que « la Société a pour objet en France ou à l'étranger la réalisation de toutes prestations de services liées à la négociation, à la promotion et à la bonne exécution des approvisionnements des officines de pharmacies (exploitées sous forme individuelle ou en société), regroupées ou non, relativement aux produits suivants : produits pharmaceutiques, parapharmaceutiques et homéopathiques [?], étant précisé que la Société n'interviendra pas dans l'opération même d'achat-vente et ne procèdera pas au stockage et à la distribution en gros ou au détail des produits précités. L'objet de la Société comprend toutes activités et toutes prestations à destination des officines de pharmacie (exploitées sous forme individuelle ou en société) et/ou groupements d'officines, en ce compris les structures de regroupement à l'achat, tendant à améliorer l'activité pharmaceutique et notamment toute prestation liée à la formation, au conseil pharmaceutique ou à l'aménagement de l'officine de pharmacie » ; qu'il indique ainsi clairement non pas que cette société exerce une activité de structure de regroupement à l'achat, mais qu'elle exerce son activité « à destination », notamment, de ces structures ; qu'en retenant que la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, avait toujours pour objet social, après les modifications successives de celui-ci intervenues en 2017 et 2018, l'activité de structure de regroupement à l'achat, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, violant ainsi le principe de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis et l'article 1103 du code civil ;

Alors, de cinquième part, toujours subsidiairement, que le procès-verbal de la société Pyxis Services du 25 septembre 2018 énonce clairement, en son article 1°, relatif à la modification de son objet social, que l'article 2 de ses statuts est modifié en ce sens que « la Société a pour objet en France ou à l'étranger : - L'activité de courtage de médicaments au sens de l'article L.5124-19 du Code de la santé publique c'est-à-dire toute activité liée à la vente ou à l'achat de médicaments qui ne comprend pas de manipulations physiques et qui consiste à négocier, indépendamment et au nom d'une personne physique ou morale. La société déclarée en tant que telle auprès de l'Agence nationale de sécurité d'un médicament et des produits de santé ; - A titre accessoire de son activité de courtage, la fourniture de services annexes d'ordre administratif (telle que gestion de command, suivi de transactions...), en ce compris l'exécution de mandat de facturation ou d'encaissement en complément de sa mission de courtier. La société ne pourra en aucun cas acquérir, stocker, transporter ou distribuer en gros les médicaments dont elle négocie l'achat ou la vente ; - la réalisation de toutes prestations de services liées à la négociation, à la promotion et à la bonne exécution des approvisionnements des officines de pharmacies (exploitées sous forme individuelle ou en société), regroupées ou non, relativement aux produits suivants : produits pharmaceutiques, parapharmaceutiques et homéopathiques [?], étant précisé que la Société n'interviendra pas dans l'opération même d'achat-vente et ne procèdera pas au stockage et à la distribution en gros ou au détail des produits précités. L'objet de la Société comprend toutes activités et toutes prestations à destination des officines de pharmacie (exploitées sous forme individuelle ou en société) et/ou groupements d'officines, en ce compris les structures de regroupement à l'achat, tendant à améliorer l'activité pharmaceutique et notamment toute prestation liée à la formation, au conseil pharmaceutique ou à l'aménagement de l'officine de pharmacie » ; qu'il indique ainsi clairement non pas que cette société exerce une activité de structure de regroupement à l'achat, mais qu'elle exerce son activité « à destination », notamment, de ces structures ; qu'en retenant que la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, avait toujours pour objet social, après les modifications successives de celui-ci intervenues en 2017 et 2018, l'activité de structure de regroupement à l'achat, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, violant ainsi le principe de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis et l'article 1103 du code civil ;

Alors, de sixième part, toujours subsidiairement, que l'article 2 des statuts de la société Mon courtier en pharmacie mis à jour au 25 septembre 2018 énonce clairement que « la Société a pour objet en France ou à l'étranger : - L'activité de courtage de médicaments au sens de l'article L.5124-19 du Code de la santé publique c'est-à-dire toute activité liée à la vente ou à l'achat de médicaments qui ne comprend pas de manipulations physiques et qui consiste à négocier, indépendamment et au nom d'une personne physique ou morale. La société déclarée en tant que telle auprès de l'Agence nationale de sécurité d'un médicament et des produits de santé ; - A titre accessoire de son activité de courtage, la fourniture de services annexes d'ordre administratif (telle que gestion de command, suivi de transactions...), en ce compris l'exécution de mandat de facturation ou d'encaissement en complément de sa mission de courtier. La société ne pourra en aucun cas acquérir, stocker, transporter ou distribuer en gros les médicaments dont elle négocie l'achat ou la vente ; - la réalisation de toutes prestations de services liées à la négociation, à la promotion et à la bonne exécution des approvisionnements des officines de pharmacies (exploitées sous forme individuelle ou en société), regroupées ou non, relativement aux produits suivants : produits pharmaceutiques, parapharmaceutiques et homéopathiques [?], étant précisé que la Société n'interviendra pas dans l'opération même d'achat-vente et ne procèdera pas au stockage et à la distribution en gros ou au détail des produits précités. L'objet de la Société comprend toutes activités et toutes prestations à destination des officines de pharmacie (exploitées sous forme individuelle ou en société) et/ou groupements d'officines, en ce compris les structures de regroupement à l'achat, tendant à améliorer l'activité pharmaceutique et notamment toute prestation liée à la formation, au conseil pharmaceutique ou à l'aménagement de l'officine de pharmacie » ; qu'il indique ainsi clairement non pas que cette société exerce une activité de structure de regroupement à l'achat, mais qu'elle exerce son activité « à destination », notamment, de ces structures ; qu'en retenant que la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, avait toujours pour objet social, après les modifications successives de celui-ci intervenues en 2017 et 2018, l'activité de structure de regroupement à l'achat, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, violant ainsi le principe de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis et l'article 1103 du code civil ;

Alors, de septième part, qu'en s'abstenant, en outre, de répondre aux conclusions des sociétés Bristol-Myers Squibb et Upsa soutenant que l'activité de courtage de médicaments, relevant de l'article L. 5124-19 du code de la santé publique, désormais exercée par la société Mon courtier en pharmacie, excluait qu'elle ait pu continuer à exercer l'activité de structure de regroupement à l'achat, régie par l'article D. 5125-24-16 du même code, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Et alors, enfin, et en toute hypothèse, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant à la fois, d'abord, pour déclarer recevable l'intervention en cause d'appel de l'association Pyxis Pharma, que l'association Pyxis Pharma avait repris l'activité de structure de regroupement à l'achat antérieurement exercée par la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, et, ensuite, pour déclarer recevables les demandes de la société Mon courtier en pharmacie, que la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, avait continué d'exercer cette activité de structure de regroupement à l'achat, la Cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-20357
Date de la décision : 28/09/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 sep. 2022, pourvoi n°21-20357


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.20357
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