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28/09/2022 | FRANCE | N°20-23378

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2022, 20-23378


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1038 F-D

Pourvoi n° Z 20-23.378

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

M. [R] [B], domicilié [Adresse 1], a form

é le pourvoi n° Z 20-23.378 contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'op...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1038 F-D

Pourvoi n° Z 20-23.378

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

M. [R] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 20-23.378 contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à la société Weatherford Services Limited, dont le siège est [Adresse 2]), défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [B], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Weatherford Services Limited, après débats en l'audience publique du 29 juin 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 novembre 2020), M. [B], de nationalité congolaise, a été engagé à compter du 1er mai 2013, par la société Weatherford services limited (la société), dont le siège social est situé aux Bermudes (Royaume-Uni), en qualité de coordinateur logistique, suivant un contrat de travail de droit congolais, à durée déterminée de douze mois. Ce premier contrat a été conclu à [Localité 4].

2. Le 1er mai 2014, le salarié a conclu, avec cette société, à [Localité 3] (Congo), un contrat de travail à durée indéterminée, soumis à la même législation.

3. Il a été licencié par lettre du 9 novembre 2015.

4. Le salarié a saisi, le 18 septembre 2017, le conseil de prud'hommes de Toulouse de diverses demandes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer incompétent le conseil des prud'hommes de Toulouse pour juger l'affaire et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, alors :

« 1°/ que le juge français doit appliquer le droit étranger prévu au contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 13 du contrat de travail liant M. [B] à la société Weatherford Services Ltd prévoyait l'application du code du travail congolais ; que l'exposant faisait valoir que l'article 212 du code du travail congolais dispose que ''pour les litiges nés de la résiliation du contrat de travail, et nonobstant toute attribution conventionnelle de juridiction, le travailleur dont le lieu de recrutement est situé dans une autre localité que celle du lieu de l'emploi aura le choix entre le tribunal de ce lieu de recrutement et celui du travail'' ; qu'en refusant de faire application de la loi congolaise qui permettait au salarié de saisir le juge français, au motif que la compétence devrait s'apprécier au regard de la loi française, bien que la loi congolaise soit celle du contrat et que l'option de compétence reconnue au salarié s'imposait au juge français qui devait en apprécier les conditions au regard du droit congolais applicable, la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du code du travail, ensemble l'article 1103 du code civil, l'article 212 du code du travail congolais et les articles 3 et 8 du règlement CE du 17 juin 2008 n° 593/2008 ;

2°/ que le conseil des prud'hommes français du lieu où l'engagement a été contracté est compétent pour connaître d'un litige relatif à un contrat de travail exécuté à l'étranger ; qu'en l'espèce, M. [B] avait conclu un contrat à durée déterminée à [Localité 4], avant de poursuivre la relation contractuelle par un contrat à durée indéterminée conclu à [Localité 3] ; qu'en considérant que le conseil des prud'hommes de [Localité 4] n'était pas compétent pour en connaître, bien que le second contrat ne soit que la poursuite du premier contrat et que l'exposant, qui avait d'ailleurs conservé l'ancienneté attachée au premier contrat dans le cadre du second, avait donc bien été engagé à [Localité 4], la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du code du travail ;

4°/ que l'exception de litispendance s'apprécie au jour où le conseil des prud'hommes statue et non au jour de sa saisine ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir qu'une seule instance prud'homale avait été mise en oeuvre au Congo et que celle-ci avait pris fin le 20 avril 2018, soit avant que le conseil des prud'hommes ne statue, ce qui faisait obstacle à toute litispendance ; qu'à supposer que les motifs du jugement soient réputés adoptés, la cour d'appel, faute de s'être expliquée sur ce moyen péremptoire des conclusions de l'exposant, a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte de l'article 21 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale qu'un employeur qui n'est pas domicilié sur le territoire français, peut être attrait, en France, i) devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail, ou ii) lorsque le travailleur n'accomplit pas ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur.

8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a constaté que l'employeur du salarié était domicilié aux Bermudes et que le salarié avait exécuté son contrat de travail uniquement au Congo, se trouve légalement justifié en ce qu'il retient l'incompétence du conseil de prud'hommes de Toulouse.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour M. [B]

M. [B] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré incompétent le conseil des prud'hommes de Toulouse pour juger l'affaire et d'AVOIR renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;

1°) ALORS QUE le juge français doit appliquer le droit étranger prévu au contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 13 du contrat de travail liant M. [B] à la société Weatherford Services Ltd prévoyait l'application du Code du travail congolais ; que l'exposant faisait valoir que l'article 212 du Code du travail congolais dispose que « pour les litiges nés de la résiliation du contrat de travail, et nonobstant toute attribution conventionnelle de juridiction, le travailleur dont le lieu de recrutement est situé dans une autre localité que celle du lieu de l'emploi aura le choix entre le tribunal de ce lieu de recrutement et celui du travail » (V. concl., p. 7) ; qu'en refusant de faire application de la loi congolaise qui permettait au salarié de saisir le juge français, au motif que la compétence devrait s'apprécier au regard de la loi française, bien que la loi congolaise soit celle du contrat et que l'option de compétence reconnue au salarié s'imposait au juge français qui devait en apprécier les conditions au regard du droit congolais applicable, la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du Code du travail, ensemble l'article 1103 du Code civil, l'article 212 du Code du travail congolais et les articles 3 et 8 du règlement CE du 17 juin 2008 n° 593/2008 ;

2°) ALORS QUE le conseil des prud'hommes français du lieu où l'engagement a été contracté est compétent pour connaître d'un litige relatif à un contrat de travail exécuté à l'étranger ; qu'en l'espèce, M. [B] avait conclu un contrat à durée déterminée à [Localité 4], avant de poursuivre la relation contractuelle par un contrat à durée indéterminée conclu à [Localité 3] ; qu'en considérant que le conseil des prud'hommes de Toulouse n'était pas compétent pour en connaître, bien que le second contrat ne soit que la poursuite du premier contrat et que l'exposant, qui avait d'ailleurs conservé l'ancienneté attachée au premier contrat dans le cadre du second, avait donc bien été engagé à [Localité 4], la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du Code du travail ;

3°) ALORS QUE le salarié est recevable à saisir le conseil des prud'hommes de son domicile lorsque le juge étranger théoriquement compétent ne présente pas les garanties du procès équitable, imposer l'intervention d'un tel juge s'apparentant à un pur et simple déni de justice ; qu'en l'espèce, M. [B] soutenait que le tribunal du travail de Pointe-Noire était insusceptible de lui rendre justice à raison de son manque d'impartialité et d'indépendance face à une partie aussi puissante localement que la société pétrolière Weatherford Services Ltd ; qu'en affirmant pourtant, après avoir constaté que M. [B] était domicilié dans le ressort du conseil des prud'hommes de Toulouse à la date de l'assignation, que le conseil des prud'hommes était incompétent, sans rechercher si le tribunal de Pointe-Noire présentait les garanties requises pour que M. [B] puisse voir sa cause y être jugée selon les règles du procès équitable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 1412-1, ensemble l'article 4 du Code civil, le principe du déni de justice et l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 14§1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

4°) ALORS QUE l'exception de litispendance s'apprécie au jour où le conseil des prud'hommes statue et non au jour de sa saisine ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir qu'une seule instance prud'homale avait été mise en oeuvre au Congo et que celle-ci avait pris fin le 20 avril 2018, soit avant que le conseil des prud'hommes ne statue, ce qui faisait obstacle à toute litispendance ; qu'à supposer que les motifs du jugement soient réputés adoptés, la cour d'appel, faute de s'être expliquée sur ce moyen péremptoire des conclusions de l'exposant, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-23378
Date de la décision : 28/09/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 06 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2022, pourvoi n°20-23378


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.23378
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