La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2022 | FRANCE | N°20-22885

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2022, 20-22885


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1061 F-D

Pourvoi n° P 20-22.885

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Mme [G] [H], domiciliée

[Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-22.885 contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1061 F-D

Pourvoi n° P 20-22.885

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Mme [G] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-22.885 contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans le litige l'opposant à la société Afi Esca, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme [H], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Afi Esca, après débats en l'audience publique du 6 juillet 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 octobre 2020), Mme [H], a été engagée, le 2 janvier 2013, en qualité de déléguée régionale, par la société Afi Esca qui commercialise des produits d'assurance de personnes.

2. Elle a saisi le 6 novembre 2015 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de diverses demandes relatives à l'exécution du contrat de travail.

3. Elle a été licenciée le 26 novembre 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail et de toutes ses demandes afférentes ainsi que de sa demande à titre de rappel de commissions, alors : « que l'employeur ne peut en cours d'année modifier unilatéralement, pour l'année en cours, les objectifs précédemment assignés au salarié et dont dépendent sa rémunération variable ; que le contrat de travail prévoyait une rémunération variable '' ? fondée sur l'atteinte d'objectifs'' et précisait que ''Les modalités de calcul de cette rémunération variable sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année.'' ; qu'au soutien d'un moyen tiré du manquement de l'employeur à ses obligations, l'exposante avait fait valoir et démontré que ses objectifs pour 2015, dont dépendait sa rémunération variable, préalablement fixés le 18 décembre 2014, avaient été unilatéralement modifiés par son employeur par lettre du 16 juin 2015 aux termes de laquelle il lui était demandé ''d'atteindre un certain nombre d'objectifs d'ici au 31/12/2015 '' et notamment de limiter sa production annuelle liée aux 2 grands comptes VITAE et Meilleurtaux à maximum 65 % de sa production annuelle globale au 31/12/15 ce qui était contradictoire avec les instructions qu'elle avait préalablement reçues et traduisait la volonté de l'employeur de la déstabiliser et la faire échouer, une telle réorientation de son portefeuille vers des courtiers traditionnels n'étant pas réalisable dans le délai imparti ; que l'exposante ajoutait qu'elle avait été la seule commerciale dont les objectifs avaient ainsi été modifiés en milieu d'année ; que pour écarter le grief tiré de la faute de l'employeur, la cour d'appel qui énonce que, ainsi que le soutient la société, la lettre adressée le 16 juin 2015 par l'employeur qui impartit à l'exposante ''des objectifs à atteindre d'ici au 31 décembre 2015'' ne peut être considérée comme ''une modification abusive de l'objectif initialement imparti à Mme [H]'' s'est prononcée par un motif inopérant, la modification, en milieu d'année, des objectifs précédemment assignés au salarié et dont dépendent sa rémunération variable ne pouvant être effectuée unilatéralement par l'employeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil devenu 1103 du même code et L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1184 du code civil devenu 1224 dudit code et L. 1231-1 et L 1235-1 du Code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1134, alinéa 1, et 1184, alinéa 1, du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016 - 131 du 10 février 2016 :

5. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

6. Selon le second, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

7. Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.

8. Pour rejeter la demande de la salariée tendant à la résiliation du contrat de travail, l'arrêt retient que la lettre adressée à la salariée le 16 juin 2015 par le directeur du réseau courtage contient une analyse de son activité de janvier à fin mai et lui impartit une modification des objectifs à atteindre d'ici au 31 décembre 2015 ainsi déclinés : - recrutement d'au moins dix courtiers qui auront chacun réalisé au moins une affaire chacun au 31 décembre 2015, - limitation à 65 % de la production résultant des grands comptes, - répartir davantage la prospection entre les départements et les arrondissements parisiens, - atteinte d'au moins 75 % de l'objectif annuel.

9. L'arrêt ajoute qu'ainsi que le soutient l'employeur, cette lettre ne peut être considérée comme une modification abusive de l'objectif initialement imparti à la salariée.

10. En se déterminant ainsi par des motifs inopérants tirés de l'absence d'abus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

11. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement pour faute grave est justifié et est pourvu d'une cause réelle et sérieuse et de la débouter de toutes ses demandes à ce titre, alors que : « la cassation de l'arrêt à intervenir sur le premier moyen de cassation du chef du rejet de la demande de l'exposante de résiliation judiciaire du contrat de travail entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile sa censure en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave dont l'exposante a fait l'objet le 26 novembre 2015 était justifié et pourvu d'une cause réelle et sérieuse et débouté l'exposante de toutes ses demande à ce titre. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

12. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif de l'arrêt, disant le licenciement justifié par une faute grave et rejetant les demandes formées au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Et sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

13. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes au titre des heures supplémentaires et pour travail dissimulé, alors : « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en retenant que ''la seule production de mails envoyés à des heures matinales ou tardives ne permet pas de retenir la réalité de l'amplitude journalière de travail accomplie dans l'intervalle après ou avant les heures de ces messages'' que ''même si la salariée n'a pas tenu un décompte précis des horaires accomplis et ne produit en cause d'appel ni un tel décompte, ni, par exemple un agenda de ses rendez-vous, elle aurait pu, à tout le moins, donner une estimation de l'organisation de ses journées de travail'', que ''l'appréciation forfaitaire systématique qu'elle fait de son temps de travail évalué à 45 heures par semaine ne peut être considérée comme établie par la seule production de courriels'' pour conclure que ''la salariée n'étayait pas sa demande par des éléments suffisamment précis'' et la débouter de ses prétentions au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, la cour d'appel a fait peser sur la salariée la charge de la preuve des heures de travail accomplies et a violé l'article L 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

14. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er , du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

15. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

16. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant

17. Pour débouter la salariée de sa demande au titre des heures supplémentaires, l'arrêt, après avoir retenu l'invalidité de la convention individuelle de forfait en jours, relève que la seule production de mails envoyés à des heures matinales ou tardives ne permet pas de retenir la réalité de l'amplitude journalière de travail accomplie dans l'intervalle après ou avant les heures de ces messages et que même si la salariée n'a pas tenu un décompte précis des horaires accomplis et ne produit en cause d'appel ni un tel décompte, ni, par exemple un agenda de ses rendez-vous, elle aurait pu, à tout le moins, donner une estimation de l'organisation de ses journées de travail. L'arrêt ajoute que l'appréciation forfaitaire systématique qu'elle fait de son temps de travail évalué à 45 heures par semaine ne peut être considérée comme établie par la seule production de courriels dont généralement le contenu ne permet pas de retenir que la salariée était contrainte à une réponse immédiate tardive ou n'avait pas pu répondre antérieurement durant les " heures classiques de bureau " et ce, alors même que travaillant soit à son domicile soit en déplacements auprès des clients, elle disposait de toute latitude pour organiser son emploi du temps.

18. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que la salariée présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée de travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de Mme [H] en rappel de commissions, en résiliation du contrat de travail, en paiement de sommes afférentes à cette rupture, en paiement d'heures supplémentaires, d'indemnité pour travail dissimulé et en ce qu'il condamne la salariée aux dépens, à payer les sommes de 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, l'arrêt rendu le 13 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Afi Esca aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Afi Esca et la condamne à payer à Mme [H] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme [H]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté l'exposante de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de toutes ses demandes y afférent ainsi que de sa demande à titre de rappel de commissions ;

ALORS D'UNE PART QUE le contrat de travail prévoyait une rémunération variable « ? fondée sur l'atteinte d'objectifs. » et précisait que « Les modalités de calcul de cette rémunération variable sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. » ; qu'en affirmant que « le défaut de signature des notes relatives à la rémunération variable par la salariée est dépourvu de pertinence dans la mesure d'une part où le contrat ne prévoit pas que les modalités de calcul doivent être acceptées et, d'autre part qu'il n'est pas contesté que Mme [H] en a eu connaissance » la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat de travail en méconnaissance du principe faisant interdiction au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

ALORS D'AUTRE PART QUE le contrat de travail prévoyait une rémunération variable « ? fondée sur l'atteinte d'objectifs. » et précisait que « Les modalités de calcul de cette rémunération variable sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. » ; que l'exposante avait fait valoir qu'au titre de sa rémunération variable, l'employeur avait unilatéralement appliqué une pondération de 40 % sur les grands comptes sans que cette pondération importante sur ses commissions n'ait été prévue au contrat ni même indiquée dans les notes relatives à la part variable éditées par l'employeur au début de chaque année ; que l'exposante ajoutait qu'elle avait été ainsi privée de 40 % de ses droits à commissions sur les grands comptes lesquels représentaient 80 % de son portefeuille ; qu'en se bornant à relever que « le principe de cette pondération » était très clairement exprimé dans une note non contractuelle du 7 janvier 2013 et qu'il n'est pas allégué que le taux pratiqué, soit 40 %, a été modifié au cours de la relation contractuelle ou n'aurait pas été celui appliqué à l'ensemble des commerciaux, la cour d'appel qui n'a nullement recherché ni précisé d'où il ressortait que le taux de pondération ainsi pratiqué ressortait des stipulations du contrat de travail comme l'avait allégué l'employeur en réponse aux revendications de l'exposante ou qu'il avait été porté à sa connaissance chaque année préalablement à son application, au travers notamment de la note sur « les modalités de calcul de la rémunération variable » qui devait, conformément aux prévisions du contrat, être « signée par les deux parties au début de chaque année », s'est prononcée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil devenu 1103 du même code et L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1184 du code civil devenu 1224 dudit code et L. 1231-1 et L 1235-1 du Code du travail ;

ALORS DE TROISIEME PART QU'au titre du « secteur d'activité et lieu de travail » le contrat de travail stipulait que « Madame [G] [H] exercera son activité dans les départements et arrondissements suivants : 77-93-94-75003-75010-75011-75012-75013-75018-75019-75020-. Ce secteur d'activité pourra être modifié par avenant par la société AFI ESCA. Madame [G] [H] aura également en charge l'animation et la gestion des courtiers dont la liste lui sera remise contre décharge lors de son entrée dans la société. Cette liste précisera également les codes courtiers présents sur les départements et arrondissements indiqués ci-dessus et dont l'animation et la gestion seront conservés par Madame [N] [C], Déléguée Régionale sur la Région Ile de France » ; que conformément aux prévisions du contrat, par lettre en date du 20 décembre 2012, contresignée par l'exposante, l'employeur listait 55 courtiers opérant sur le secteur de Mme [H] ainsi que 4 courtiers, précisément identifiés qui, « pourtant présents sur votre secteur d'activité, seront conservées par Madame [N] [C] » ; que l'exposante avait fait valoir et démontré que postérieurement, c'est en violation des prévisions du contrat que l'employeur avait, sous couvert de « petits ajustements », imposé que 19 courtiers se trouvant sur le secteur de l'exposante soient en définitive conservés par Mme [N] [C] et, en réponse aux interrogations de l'exposante, lui avait écrit « tu as une liste de courtiers, si certains n'y figurent pas, c'est qu'ils sont à [N] » (conclusions d'appel p 11 à 15) ; que pour écarter les griefs tirés du non-respect par l'employeur du secteur commercial contractuellement défini de l'exposante, et de l'exécution déloyale par l'employeur du contrat, la cour d'appel qui énonce qu'il n'est pas justifié que l'un quelconque des courtiers figurant sur la liste remise à Mme [H] le 20 décembre 2012 lui a été retiré et que « les ajustements ultérieurs intervenus en cours de période d'essai de Mme [H] aboutissant à maintenir au profit de Mme [C] des courtiers démarchés par celle-ci antérieurement à l'embauche de Mme [H] relevaient en tout état de cause du pouvoir de direction de l'employeur, celui-ci ne s'étant engagé que sur la liste exhaustive figurant dans le courrier du 20 décembre 2012, en sorte que Mme [H] n'est pas fondée à revendiquer le retrait prétendu d'autres courtiers ne figurant pas sur la liste de ceux qui lui étaient attribués », n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles, au-delà des 4 courtiers précisément identifiés dans la lettre du 20 décembre 2012 comme devant être conservés par Mme [C], différents courtiers sur le secteur de l'exposante avaient été conservés par cette dernière en violation des prévisions du contrat et a violé les articles 1134 du code civil devenu 1103 du même code et L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1184 du code civil devenu 1224 dudit code et L. 1231-1 et L 1235-1 du Code du travail ;

ALORS ENCORE QU'au titre du « secteur d'activité et lieu de travail » le contrat de travail stipulait que « Madame [G] [H] exercera son activité dans les départements et arrondissements suivants : 77-93-94-75003-75010-75011-75012-75013-75018-75019-75020-. Ce secteur d'activité pourra être modifié par avenant par la société AFI ESCA. Madame [G] [H] aura également en charge l'animation et la gestion des courtiers dont la liste lui sera remise contre décharge lors de son entrée dans la société. Cette liste précisera également les codes courtiers présents sur les départements et arrondissements indiqués ci-dessus et dont l'animation et la gestion seront conservés par Madame [N] [C], Déléguée Régionale sur la Région Ile de France » ; que conformément aux prévisions du contrat, par courrier en date du 20 décembre 2012, contresigné par l'exposante, l'employeur listait 55 courtiers opérant sur le secteur de Mme [H] ainsi que 4 courtiers, précisément identifiés qui, « pourtant présents sur votre secteur d'activité, seront conservées par Madame [N] [C] » ; qu'en affirmant que « les ajustements ultérieurs intervenus en cours de période d'essai de Mme [H] aboutissant à maintenir au profit de Mme [C] des courtiers démarchés par celle-ci antérieurement à l'embauche de Mme [H] relevaient en tout état de cause du pouvoir de direction de l'employeur, celui-ci ne s'étant engagé que sur la liste exhaustive figurant dans le courrier du 20 décembre 2012, en sorte que Mme [H] n'est pas fondée à revendiquer le retrait prétendu d'autres courtiers ne figurant pas sur la liste de ceux qui lui étaient attribués » la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat de travail et de la lettre du 20 décembre 2012 dont il ressortait au contraire que l'employeur s'était engagé sur la liste des 4 courtiers identifiés dans cette lettre qui, « pourtant présents sur votre secteur d'activité, seront conservées par Madame [N] [C] », en violation du principe faisant interdiction au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

ALORS DE CINQUIEME PART QUE l'employeur ne peut en cours d'année modifier unilatéralement, pour l'année en cours, les objectifs précédemment assignés au salarié et dont dépendent sa rémunération variable ; que le contrat de travail prévoyait une rémunération variable « ? fondée sur l'atteinte d'objectifs » et précisait que « Les modalités de calcul de cette rémunération variable sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. » ; qu'au soutien d'un moyen tiré du manquement de l'employeur à ses obligations, l'exposante avait fait valoir et démontré que ses objectifs pour 2015, dont dépendait sa rémunération variable, préalablement fixés le 18 décembre 2014, avaient été unilatéralement modifiés par son employeur par lettre du 16 juin 2015 aux termes de laquelle il lui était demandé « d'atteindre un certain nombre d'objectifs d'ici au 31/12/2015 » et notamment de limiter sa production annuelle liée aux 2 grands comptes VITAE et Meilleurtaux à maximum 65 % de sa production annuelle globale au 31/12/15 ce qui était contradictoire avec les instructions qu'elle avait préalablement reçues et traduisait la volonté de l'employeur de la déstabiliser et la faire échouer, une telle réorientation de son portefeuille vers des courtiers traditionnels n'étant pas réalisable dans le délai imparti ; que l'exposante ajoutait qu'elle avait été la seule commerciale dont les objectifs avaient ainsi été modifiés en milieu d'année ; que pour écarter le grief tiré de la faute de l'employeur, la cour d'appel qui énonce que, ainsi que le soutient la société, la lettre adressée le 16 juin 2015 par l'employeur qui impartit à l'exposante « des objectifs à atteindre d'ici au 31 décembre 2015 » ne peut être considérée comme « une modification abusive de l'objectif initialement imparti à Mme [H] » s'est prononcée par un motif inopérant, la modification, en milieu d'année, des objectifs précédemment assignés au salarié et dont dépendent sa rémunération variable ne pouvant être effectuée unilatéralement par l'employeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil devenu 1103 du même code et L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1184 du code civil devenu 1224 dudit code et L. 1231-1 et L 1235-1 du Code du travail ;

ALORS DE SIXIEME PART QUE pour écarter le grief tiré de la faute de l'employeur, la cour d'appel qui énonce que, ainsi que le soutient la société, la lettre adressée le 16 juin 2015 par l'employeur qui impartit à l'exposante « des objectifs à atteindre d'ici au 31 décembre 2015 » ne peut être considérée comme « une modification abusive de l'objectif initialement imparti à Mme [H] », a méconnu les stipulations du contrat de travail qui prévoyait une rémunération variable « ? fondée sur l'atteinte d'objectifs. » et précisait que « Les modalités de calcul de cette rémunération variable sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. » et a violé l'article 1134 du code civil devenu 1103 du même code ;

ALORS DE SEPTIEME PART et en tout état de cause QU'aux termes de sa lettre du 16 juin 2015, l'employeur écrivait « ?j'ai décidé de vous demander d'atteindre un certain nombre d'objectifs d'ici au 31/12/2015. Ces objectifs devront vous permettre de ramener votre activité et vos résultats vers des normes conformes aux critères de la Compagnie et en adéquation avec l'ensemble des résultats du réseau. Ces objectifs sont les suivants : - Recrutement d'au moins 10 courtiers qui auront chacun réalisé au moins une affaire chacun au 31/12/2015 ; - la production annuelle liée aux 2 grands comptes principaux (VITAE et Meilleurtaux) ne devra pas représenter plus de 65 % de la production annuelle globale (au 31/12/2015) ; - atteinte d'au moins 75 % de votre objectif annuel ; - enfin, pour une meilleure répartition de la production, il conviendrait que votre prospection se répartisse davantage entre les départements et les arrondissements parisiens qui vous sont affectés. Ce dernier objectif est seulement souhaitable » ; que pour retenir que, ainsi que le soutient la société, la lettre adressée le 16 juin 2015 par l'employeur qui impartit à l'exposante « des objectifs à atteindre d'ici au 31 décembre 2015 » ne peut être considérée comme « une modification abusive de l'objectif initialement imparti à Mme [H] », la cour d'appel qui énonce que « ces objectifs intermédiaires ne concernaient que les mois à suivre et non des résultats annuels à réaliser » a dénaturé les termes clairs et précis de cette lettre du 16 juin 2015 dont il ressortait au contraire que les objectifs ainsi nouvellement assignés à l'exposante en milieu d'année portaient sur la production annuelle globale au 31 décembre 2015 et a violé le principe faisant interdiction au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

ALORS DE HUITIEME PART et en tout état de cause QU' à supposer même qu'au mépris du contrat de travail prévoyant que « Les modalités de calcul » de la rémunération variable de l'exposante « sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. », l'employeur ait pu, en milieu d'année, modifier unilatéralement les objectifs ainsi fixés pour l'année en cours à l'exposante et dont dépendait sa rémunération variable, c'est à la condition que ces nouveaux objectifs aient été réalisables ; qu'au soutien d'un moyen tiré du manquement de l'employeur à ses obligations et notamment de l'exécution déloyale du contrat de travail, l'exposante avait fait valoir et démontré que ses objectifs pour 2015, dont dépendait sa rémunération variable, préalablement fixés le 18 décembre 2014, avaient été unilatéralement modifiés par son employeur par lettre du 16 juin 2015 aux termes de laquelle il lui était demandé « d'atteindre un certain nombre d'objectifs d'ici au 31/12/2015 » et notamment « la production annuelle liée aux 2 grands comptes principaux (VITAE et Meilleurtaux) ne devra pas représenter plus de 65 % de la production annuelle globale (au 31/12/2015) » ce qui non seulement était contradictoire avec les instructions qu'elle avait préalablement reçues, mais aussi traduisait la volonté de l'employeur de la déstabiliser et la faire échouer, une telle réorientation de son portefeuille vers des courtiers traditionnels n'étant pas réalisable dans le délai imparti (conclusions d'appel p 16 à 19) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent des conclusions d'appel dont elle était saisie, tiré de ce que ce nouvel objectif chiffré fixé en milieu d'année et tenant à la proportion limitée à 65 % de la production liée aux grands comptes dans la production annuelle globale « au 31/12/2015 », n'était pas réalisable, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS ENFIN et en tout état de cause QU' à supposer même qu'au mépris du contrat de travail prévoyant que « Les modalités de calcul » de la rémunération variable de l'exposante « sont fixées dans une note signée par les deux parties au début de chaque année. », l'employeur ait pu, en milieu d'année, modifier unilatéralement les objectifs ainsi fixés pour l'année en cours à l'exposante et dont dépendait sa rémunération variable, c'est à la condition que ces nouveaux objectifs aient été réalisables ; qu'au soutien d'un moyen tiré du manquement de l'employeur à ses obligations et notamment de l'exécution déloyale du contrat de travail, l'exposante avait fait valoir et démontré que ses objectifs pour 2015, dont dépendait sa rémunération variable, préalablement fixés le 18 décembre 2014, avaient été unilatéralement modifiés par son employeur par lettre du 16 juin 2015 aux termes de laquelle il lui était demandé « d'atteindre un certain nombre d'objectifs d'ici au 31/12/2015 » et notamment « la production annuelle liée aux 2 grands comptes principaux (VITAE et Meilleurtaux) ne devra pas représenter plus de 65 % de la production annuelle globale (au 31/12/2015) » ce qui non seulement était contradictoire avec les instructions qu'elle avait préalablement reçues, mais aussi traduisait la volonté de l'employeur de la déstabiliser et la faire échouer, une telle réorientation de son portefeuille vers des courtiers traditionnels n'étant pas réalisable dans le délai imparti (conclusions d'appel p 16 à 19) ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si ce nouvel objectif chiffré fixé en milieu d'année et tenant à la proportion limitée à 65 % de la production liée aux grands comptes dans la production annuelle globale « au 31/12/2015 », était réalisable, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du code civil devenu 1103 du même code et L 1221-1 du code du travail ;

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR dit que le licenciement pour faute grave dont l'exposante a fait l'objet le 26 novembre 2015 est justifié et est pourvu d'une cause réelle et sérieuse et débouté l'exposante de toutes ses demande à ce titre ;

ALORS D'UNE PART QUE la cassation de l'arrêt à intervenir sur le premier moyen de cassation du chef du rejet de la demande de l'exposante de résiliation judiciaire du contrat de travail entrainera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile sa censure en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave dont l'exposante a fait l'objet le 26 novembre 2015 était justifié et pourvu d'une cause réelle et sérieuse et débouté l'exposante de toutes ses demande à ce titre ;

ALORS D'AUTRE PART QU' il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu'il invoque au soutien du licenciement ; que dans la lettre de licenciement l'employeur indiquait « en date du 21/10/2015, nous avons été alertés par un courtier (Cabinet Avoda) que depuis le mois de juillet 2015, vous n'avez donné suite à aucune de ses demandes et ce, malgré plusieurs dizaines de mails et de messages téléphoniques ; en raison de l'exaspération de ce partenaire, une intervention du directeur du Réseau Courtage, monsieur [M] [R] a été nécessaire afin que nous puissions poursuivre le développement de nos relations commerciales avec ce dernier, qui nous a confirmé ses multiples et vaines tentatives de vous joindre », ; que contestant ces faits et ce grief, l'exposante avait notamment fait valoir qu'elle n'avait jamais reçu aucun mail du cabinet AVODA de juillet à novembre 2015 ni de message téléphonique, et que l'employeur ne produisait d'ailleurs pas les « dizaines de mails » ni la preuve des messages téléphoniques du cabinet Avoda dont il faisait pourtant état dans la lettre de licenciement ; qu'en retenant pour juger établi ce grief que « nonobstant ses dénégations, Mme [H] ne justifie pas qu'il ait été donné suite au dernier courriel de ce client du 28 juillet 2015 (sa pièce 117) qui lui indique qu'il reste dans l'attente de la délégation à transmettre à [V] (M. [F]) ni n'explique pourquoi si, ainsi qu'elle le soutient, elle n'avait plus de démarche à effectuer, elle a adressé le 27 octobre 2015 à ce client un courrier « pour faire un point » le fait qu'elle ait signalé des difficultés de fonctionnement de son téléphone (et non de sa messagerie) étant inopérant à expliquer qu'elle n'aurait pas reçu les courriels de ce client », la cour d'appel a fait peser sur la salariée la charge de la preuve de l'absence des faits invoqués par l'employeur au soutien de la faute grave et a violé l'article 1315 du code civil ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE les faits invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement circonscrivent les termes du débat judiciaire ; que dans la lettre de licenciement l'employeur reprochait notamment à l'exposante de ne pas avoir répondu à plusieurs messages téléphoniques du responsable du courtier « Le Parrainage » ; que contestant ce grief, l'exposante avait fait valoir qu'elle n'avait jamais entendu parler d'un courtier dénommé « Le Parrainage » ; qu'en retenant que ce grief concernant le dernier client visé dans la lettre de licenciement, « à savoir le Crédit foncier (et non « le Parrainage ») » est établi, la cour d'appel qui s'est prononcée en considération d'un grief distinct de celui invoqué dans la lettre de licenciement a violé l'article L 1232-6 du code du travail ;

ALORS ENFIN QUE les faits invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement circonscrivent les termes du débat judiciaire ; que le juge ne peut retenir que le licenciement pour faute grave est fondé sur des fautes distinctes de celles invoquées dans la lettre de licenciement ; qu'au soutien de la faute grave invoquée, l'employeur reprochait à l'exposante de n'avoir pas répondu à plusieurs courtiers ayant fait part de leur mécontentement ainsi que d' avoir exercé une autre activité dans une autre société commerciale à l'origine d'un manque d'activité caractérisant une « exécution défectueuse délibérée de votre mission et donc du non-respect de vos obligations contractuelles » à l'origine d'une insuffisance de résultats ; qu'après avoir écarté le grief tiré du fait d'avoir exercé une autre activité et constaté que les résultats de l'exposante témoignent d'une répartition entre clients grands comptes et courtiers traditionnels hors de proportion avec les moyennes enregistrées par les autres commerciaux, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que, face à un déficit de prospection auprès des courtiers traditionnels, si « l'insuffisance des résultats obtenue avait été clairement notifiée à la salariée au mois de juin et une opportunité de redresser son activité lui avait été offerte ?. » l'exposante, au vu des nombreuses plaintes évoquées, n'avait pas respecté la priorité à la prospection auprès des courtiers traditionnels et a ainsi retenu une faute qui n'était pas invoquée dans la lettre de licenciement, en violation de l'article L 1232-6 du code du travail ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté l'exposante de ses demandes au titre des heures supplémentaires et pour travail dissimulé ;

ALORS D'UNE PART QU' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en retenant que « la seule production de mails envoyés à des heures matinales ou tardives ne permet pas de retenir la réalité de l'amplitude journalière de travail accomplie dans l'intervalle après ou avant les heures de ces messages » que « même si la salariée n'a pas tenu un décompte précis des horaires accomplis et ne produit en cause d'appel ni un tel décompte, ni, par exemple un agenda de ses rendez-vous, elle aurait pu, à tout le moins, donner une estimation de l'organisation de ses journées de travail », que « l'appréciation forfaitaire systématique qu'elle fait de son temps de travail évalué à 45 heures par semaine ne peut être considérée comme établie par la seule production de courriels » pour conclure que « la salariée n'étayait pas sa demande par des éléments suffisamment précis » et la débouter de ses prétentions au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, sans rechercher si les éléments produits par l'exposante au soutien de son évaluation de son nombre d'heures de travail hebdomadaire à 45, ne constituaient pas « des éléments suffisamment précis » pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant les éléments de contrôle de la durée du travail dont il devait disposer, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 3171-4 du code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART QU' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en retenant que « la seule production de mails envoyés à des heures matinales ou tardives ne permet pas de retenir la réalité de l'amplitude journalière de travail accomplie dans l'intervalle après ou avant les heures de ces messages » que « même si la salariée n'a pas tenu un décompte précis des horaires accomplis et ne produit en cause d'appel ni un tel décompte, ni, par exemple un agenda de ses rendez-vous, elle aurait pu, à tout le moins, donner une estimation de l'organisation de ses journées de travail », que « l'appréciation forfaitaire systématique qu'elle fait de son temps de travail évalué à 45 heures par semaine ne peut être considérée comme établie par la seule production de courriels » pour conclure que « la salariée n'étayait pas sa demande par des éléments suffisamment précis » et la débouter de ses prétentions au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, la cour d'appel a fait peser sur la salariée la charge de la preuve des heures de travail accomplies et a violé l'article L 3171-4 du code du travail ;

ALORS ENFIN et en tout état de cause QUE lorsque l'employeur a indument maintenu le salarié dans la croyance erronée qu'il était soumis à une convention régulière de forfait en jour, le privant ainsi de la faculté, pendant l'exécution du contrat, de solliciter le paiement de ses heures supplémentaires et en tout cas d'opérer le relevé précis des heures de travail qu'il accomplissait, le juge ne peut débouter le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires au motif qu'il n'étaierait pas sa demande par des éléments suffisamment précis, sans constater que l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, produisait les éléments de contrôle de la durée du travail dont il devait disposer ; que l'exposante avait fait valoir que se croyant employée en forfait jours, elle n'avait pas noté ses horaires de travail de sorte qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas produire un décompte de ses heures de travail alors qu'au contraire, il appartenait à l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité quant à la santé de ses salariés, de veiller à la régularité du forfait, de contrôler les heures de travail effectuées et de produire les éléments de ce contrôle ; qu'après avoir retenu que l'employeur convenait que la convention de forfait annuel en jours, prévue au contrat de travail de Mme [H], n'était pas valable (arrêt p 9), la cour d'appel qui pour débouter l'exposante de ses prétentions au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et de l'indemnité pour travail dissimulé, relève que « la salariée n'étayait pas sa demande par des éléments suffisamment précis » sans nullement constater que l'employeur à qui il appartenait de contrôler les heures de travail effectuées, produisait les éléments de ce contrôle et justifiait des heures de travail accomplies, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 3171-4 du code du travail, ensemble les articles L. 3171-2 et L. 3171-3 dudit code ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-22885
Date de la décision : 28/09/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 octobre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2022, pourvoi n°20-22885


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.22885
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award