LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 septembre 2022
Cassation partielle
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1060 F-D
Pourvoi n° W 19-19.346
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022
La société DXC Technology France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée CSC Computer Sciences, a formé le pourvoi n° W 19-19.346 contre l'arrêt rendu le 15 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l'opposant à M. [G] [F], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
M. [G] [F] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l‘appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi incidant invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés également au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société DXC Technology France, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 6 juillet 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, le 15 mai 2019), M. [F] a été engagé en qualité de partner, suivant contrat du 23 juillet 2009, par la société CSC Computer Sciences, aux droits de laquelle vient la société DXC Technology France.
2. Le 24 décembre 2012, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture du contrat de travail.
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première, troisième à dixième branches, le troisième moyen du pourvoi principal de l'employeur ainsi que sur les deux moyens du pourvoi incident du salarié, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche du pourvoi principal de l'employeur
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une somme de 1 728 000 euros à titre de rappel de primes de rémunération variable, outre celle de 172 800 euros au titre des congés payés afférents ainsi qu'au paiement de diverses sommes à titre de rappel de primes de vacances et d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de le condamner aux dépens, alors «que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en accordant au salarié une indemnité de congés payés sur la rémunération variable de 172 800 euros, quand il ne sollicitait à ce titre que la somme de 20 700 euros, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
6. Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme de 172 800 euros au titre des congés payés afférents au rappel de rémunération variable, l'arrêt retient qu'il convient de condamner l'employeur, au titre de l'ensemble de la rémunération variable, au paiement d'une somme de 1 728 000 euros à titre de rappel de primes, outre celle de 172 800 euros au titre des congés payés afférents.
7. En statuant ainsi, alors que dans le dispositif de ses conclusions, le salarié ne réclamait qu'une somme de 20 700 euros au titre des congés payés afférents à la rémunération variable, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation n'atteint pas le chef de dispositif condamnant l'employeur au paiement d'une somme au titre des primes de vacances, calculée sur le seul rappel de salaire variable, hors indemnité de congés payés.
9. De même, la cassation n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens et à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, La Cour
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société DXC Technology France à payer à M. [F] la somme de 172 800 euros au titre des congés payés afférents au rappel de prime sur rémunération variable, avec intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2013, l'arrêt rendu le 15 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Dit que chacune des parties conservera à sa charge ses propres dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société DXC Technology France, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de la société DXC Technology France, anciennement dénommée CSC Computer Sciences, tendant à écarter certaines pièces des débats, d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] à effet au 15 mai 2019, d'AVOIR dit qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] les sommes de 1 728 000 euros à titre de rappel de primes de rémunération variable outre celle de 172 800 euros au titre des congés payés afférents, 10 901,57 euros à titre de rappel de congés payés et de RTT, 2 905,33 euros à titre de remboursement des indemnités journalières de sécurité sociale, 53 578,24 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 140 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR ordonné à la société DXC Technology France la remise à M. [F] des documents sociaux conformes au jugement, d'AVOIR condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] la somme de 17 971,20 euros à titre de rappel de primes de vacances, ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société DXC Technology France aux dépens,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Ainsi que l'a relevé à juste titre le premier juge, la plupart des pièces ont été traduites soit par M. [F], soit par la société DXC Technology France. La fidélité des traductions n'est en outre pas discutée. Les pièces qui n'ont pas été traduites sont rédigées dans un anglais simple. Leur contenu est compris des deux parties. Il l'est également de la cour. Il conviendra donc de rejeter la demande de la société DXC Technology France tendant à les voir écartées des débats. » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la plupart des pièces étant traduites et rédigées dans un anglais simple et dans la mesure où elles émanent, pour la plupart, de la société CSC elle-même qui les a communiquées à son salarié, elles suffiront à éclairer le conseil et ne seront pas conséquent pas écartées » ;
1. ALORS QU'en cas de contestation, le juge doit écarter des débats un document écrit en langue étrangère non accompagné d'une traduction en langue française ; qu'en l'espèce, l'employeur soulignait (conclusions d'appel, p. 9) que parmi les 157 pièces de M. [F], 40 étaient rédigées en anglais sans être accompagnées d'une traduction en français (pièces adverses n° 5, 8, 9, 9-1, 30, 31, 33, 36, 38, 39, 42 à 51, 53, 57 à 63, 65 à 69, 71, 74, 75, 78, 80, 81 et 84) ; qu'en refusant d'écarter ces pièces des débats au prétexte qu'elles étaient rédigées dans un anglais simple, que leur contenu était compris des deux parties et de la cour, la cour d'appel a violé l'ordonnance de Villers-Cotterêts du 25 août 1539, ensemble les articles 2 de la Constitution et 1er de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 ;
2. ALORS à tout le moins QUE le juge ne peut retenir un document rédigé en langue étrangère non accompagné d'une traduction en français qu'à condition d'en préciser la signification en français ; qu'en refusant d'écarter des débats les 40 pièces du salarié rédigées en anglais et non accompagnées d'une traduction en français au prétexte qu'elles étaient rédigées dans un anglais simple et que leur contenu était compris des deux parties et de la cour, sans préciser leur signification en français, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ordonnance de Villers-Cotterêts du 25 août 1539, ensemble les articles 2 de la Constitution et 1er de la loi n° 94-665 du 4 août 1994.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] les sommes de 1 728 000 euros à titre de rappel de primes de rémunération variable outre celle de 172 800 euros au titre des congés payés afférents, 17 971,20 euros à titre de rappel de primes de vacances, ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société DXC Technology France aux dépens,
AUX MOTIFS QUE « B. Sur les primes et bonus : M. [F] expose qu'en dépit des termes de son contrat, il n'a pas été rétribué de la partie variable de sa rémunération et que ses objectifs n'ont jamais été fixés ; qu'il en va de même de ses bonus, précisant à cet égard que les pièces contractuelles qu'il verse aux débats permettent d'établir qu'il était éligible tant à des primes annuelles qu'à des bonus, ces deux éléments de rémunération étant distincts. Pour sa part, la société DXC Technology France considère que la rémunération et le « bonus » dont il est question dans l'avenant constituent la même rémunération, le bonus ne devant en aucun cas être versé en sus de la rémunération variable. Elle ajoute que les objectifs de M. [F] lui étaient connus et qu'il ne les a pas atteints de telle sorte qu'il ne peut prétendre à la prime afférente. 1) Sur le bonus : L'article 1156 du code civil, dans sa rédaction en vigueur au jour où l'avenant du 25 septembre 2009 a été signé, dispose que le juge doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes. En l'espèce, l'article 4 du contrat de travail du 23 juillet 2009, à effet au 5 octobre 2009 stipule : « votre rémunération brute sera constituée par :
- une partie fixe brute de 115 000 euros versée en 12 mensualités de 9 594 euros,
- une partie variable brute annuelle de 81 000 euros versée à la fin de l'exercice fiscal en fonction de la réalisation des objectifs de l'année définis par la direction générale par voie d'avenant ; l'exigibilité et le paiement de cette partie variable sont subordonnés à la signature de l'avenant par les deux parties. A titre exceptionnel, nous vous garantissons le versement anticipé de 24 000 euros de cette partie variable brute annuelle. Cette somme sera versée en 6 mensualités de 4 000 euros à compter de votre date d'arrivée. » L'avenant du 25 septembre 2009 prévoit : « (') suite à nos entretiens, en complément de votre contrat de travail, nous avons le plaisir de vous confirmer les éléments suivants. Vous bénéficiez d'un plan de bonus annuel, en plus de votre rémunération annuelle. Nous vous joignons à ce courrier un plan de bonus, exhibit A applicable à votre date d'entrée au sein de notre société. Votre (salaire de base de référence) correspond à la somme de votre salaire fixe et de votre salaire variable suivant votre contrat de travail. Vos objectifs annuels pour le plan de bonus seront définis par la direction générale par voie d'avenant qui devra être signé par les deux parties. » (pièce 6 du salarié). Il ressort de la pièce 5 du salarié (traduite en pièce 46 de l'employeur - cette pièce étant un courriel adressé par M. [O] à M. [F] le 29 juillet 2009) que les parties parlaient d'un « bonus » pour désigner ce qui dans le contrat du 23 juillet 2009 est qualifié de « partie variable brute de la rémunération ». Il est ainsi démontré que pour les parties, qui étaient encore en négociation sur la rémunération de M. [F], même après la signature de son contrat de travail qui ne devait entrer en vigueur que le 5 octobre 2009, la « partie variable de la rémunération » et le « bonus » constituent la même chose. Cette interprétation est renforcée par la pièce 48 de l'employeur (courriel interne du 28 juillet 2009 entre M. [O] et Mme [I] - responsable du recrutement au sein de la société -) qui montre que, dans l'esprit de l'employeur, il convenait de réviser le plafonnement de la rémunération variable (prévu à 81 000 euros par an dans le contrat de travail) pour le porter au triple c'est-à-dire à 243 000 euros par an en cas d'atteinte à 100 % des objectifs. En effet, de ce courriel interne il ressort que M. [O] proposait d'élever de 3 fois le plafond de rémunération : « My proposal is to cap at three times (...) The bonus will be capped at a multiple of 3, that is 3 x euros 81K = euros 243 K ». Cette pièce montre en outre que l'employeur n'a pas entendu accorder à M. [F] un bonus en plus de ses primes. Il faut déduire de ces éléments que, contrairement à la décision du premier juge, l'avenant du 25 septembre 2009 ne fait que préciser la prime convenue dans le contrat de travail du salarié incluant ses remarques antérieures et que ledit avenant se substitue à la partie du contrat de travail consacrée à la rémunération variable de M. [F]. M. [F] le sait au demeurant fort bien puisqu'il verse au dossier en pièce 130 un courriel qu'il a adressé à son supérieur hiérarchique - M. [H] -. Par ce courriel du 6 septembre 2011, M. [F] évoque la question de sa rémunération variable en ces termes : « Avec notre DRH, nous avons aussi parlé du variable contractuel, il est légitime que celui-ci me soit versé dans sa totalité. Je t'ai transmis à ta demande un e-mail succinct le 17 août 2011 avec mes réalisations et contributions pour la région SetW. De plus, compte tenu du contrat que j'ai apporté avec ArcelorMittal, un déplafonnement tel que nous en avions parlé par le passé serait une juste reconnaissance de ma contribution. En effet, tu te souviendras que chez HCL technologies (l'ancien employeur de M. [F]), le montant du variable est déplafonné et est multiplié par 4 pour des affaires de ce volume ou pour des nouveaux logos (nouveaux clients). [R] [O] a confirmé par email avant mon entrée dans CSC que dans le cadre de mon contrat, il y a bien déplafonnement du variable ». Ainsi, M. [F] n'évoque-t-il en réalité qu'une seule rémunération variable déplafonnée et non un bonus qui serait distinct de sa rémunération variable et s'y ajouterait. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a estimé que le salarié avait droit à deux systèmes de rémunération variable. En revanche, il est manifeste que ses deux demandes l'une au titre de la rémunération variable annuelle d'octobre 2009 à mars 2012 l'autre au titre du bonus nouveaux contrats n'en forme qu'une, au titre de l'ensemble de la rémunération variable, d'un montant global de 2 002 176 euros. 2) Sur la rémunération variable : Les objectifs dont dépend la rémunération variable d'un salarié doivent avoir été portés à la connaissance de ce salarié en début d'exercice. À défaut, ils ne peuvent lui être opposés et les objectifs antérieurs ne peuvent donc être révisés. Dès lors qu'il a été jugé que le bonus prévu par avenant constitue la partie variable de la rémunération de M. [F] telle que prévue par le contrat de travail, la rémunération du salarié était constituée de la manière suivante :
. une partie fixe brute de 115 000 euros versée en 12 mensualités de 9 594 euros,
. une partie variable brute annuelle de 81 000 euros.
L'exhibit A remis au salarié en même temps que l'avenant prévoit en son 2.6 que « si vous dépassez votre objectif de plus de 50%, vous serez en droit de recevoir la prime (bonus) supplémentaire au même taux que 2.4 ci-dessus plafonnée à 3 fois le salaire de base de référence ». Suivant l'avenant du 25 septembre 2009, le salaire de base de référence « correspond à la somme de votre salaire fixe et de votre salaire variable suivant votre contrat de travail ». Le salaire de base de référence doit donc être évalué à 196 000 euros (115 000 + 81 000). Il résulte du point 1 précédent et de l'exhibit A que la partie variable de la rémunération de M. [F] a été plafonnée à 3 fois le salaire de référence soit 588 000 euros si les objectifs étaient dépassés de 50%. Les objectifs devaient être fixés en début d'exercice, c'est-à-dire au 1er avril pour un versement en fin d'exercice fiscal le 31 mars de l'année suivante. En outre, se référant à l'Exhibit A versé aux débats, les objectifs du salarié appelés « Target » ne sont dus qu'autant que le salarié est en position de « Lead ». Il faut donc en déduire que les Exhibit A versés aux débats ne peuvent être complets que si le salarié est par avance avisé de ceux d'entre les dossiers pour lesquels il est clairement identifié comme « Lead ». Pour justifier qu'elle a donné à M. [F] des objectifs, la société DXC Technology France expose :
. que pour l'exercice 2009/2010 le plan de prime sur les ventes de l'exercice était prévu par l'avenant du 25 septembre 2009 renvoyant à son manager le soin d'établir les objectifs ; que ledit manager - M. [O] -, a fixé les objectifs de M. [F] par courriel comme en témoigne sa pièce 47,
. que pour l'exercice 2010/2011, il convient de se référer à la pièce adverse 6 qui en son point 2.7 conditionne l'obtention de la rémunération variable à hauteur des montants suivants : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année), . que pour l'exercice 2011/2012 les objectifs du salarié ont été fixés à 15 millions de dollars (pour la valeur totale du contrat) ainsi qu'il ressort des pièces 31bis, 50 et 52 de la société,
. que pour l'exercice 2012/2013, M. [F] a été en arrêt pour maladie en janvier 2012 et qu'ainsi il ne peut revendiquer le paiement d'une rémunération variable et que le conseil de prud'hommes a à juste titre considéré que la rémunération variable portant sur l'exercice clos le 31 mars 2013 ne pouvait pas être due puisque le salarié avait été en arrêt pour maladie depuis janvier 2012,
. que pour l'exercice 2013/2014, M. [F] a renoncé à sa demande et qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner cet exercice.
M. [F] sollicitant la confirmation du jugement, ses demandes ne portent que sur le paiement des primes de 2009/2010 (FY10), 2010/2011 (FY11) et 2011/2012 (FY12).
Il convient dès lors d'examiner tour à tour les justificatifs apportés par l'employeur pour chacun de ces exercices, étant précisé qu'il lui appartient de démontrer qu'il a bien fixé des objectifs à son salarié et que ces objectifs ont été fixés en début d'exercice soit au 1er avril de chaque année pour l'année fiscale à venir.
L'exercice 2009/2010 : La pièce 47 de la société DXC Technology France est un courriel de M. [O] en date du 22 juillet 2009. Il n'a été adressé ni directement ni en copie à M. [F]. Il ne peut donc valoir objectif.
L'exercice 2010/2011 : La pièce 6 de M. [F], sur laquelle la société DXC Technology France se fonde pour soutenir que ses objectifs ont été fixés pour l'exercice 2010/2011 contient plusieurs feuillets en même temps que l'avenant du 25 septembre 2009. Si en principe, les objectifs du salarié sont fixés unilatéralement par l'employeur, il demeure que suivant le contrat de travail et l'avenant du 25 septembre 2009, les « objectifs de l'année » sont « définis par la direction générale par voie d'avenant ; l'exigibilité et le paiement de cette partie variable sont subordonnés à la signature de l'avenant par les deux parties. ». Or, la partie de la pièce 6 du salarié (le deuxième feuillet en l'occurrence) qui évoque effectivement des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année)) n'est pas signé. Il comporte, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne peuvent à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011. Enfin, comme il a été dit plus haut l'Exhibit A ne peut valablement constituer un objectif que si, et seulement si, il définit par avance les dossiers pour lesquels le salarié est qualifié de « Lead ». Si au contraire l'employeur peut à loisir décider à tout moment que le salarié est ou non « Lead » sur tel ou tel projet, alors l'Exhibit A ne peut valoir objectif. Or, la pièce 6 ne précise pas par avance sur quels projets M. [F] a la qualité de « Lead ».
L'exercice 2011/2012 : Dans ses conclusions, la société DXC Technology France vise sa pièce 31bis comme indiqué plus haut. Le bordereau ne porte cependant pas trace d'une pièce 31bis. Il s'agit en réalité de la pièce 31 de l'employeur qui est un courriel du 3 octobre 2011 adressé par « Vish Buldawoo » à Madame [V] [T] (copie à M. [O]) dans lequel il est question du « plan de primes sur ventes pour [G] (c'est-à-dire M. [F]) » et comportant en pièce jointe un « accord de rémunération incitative à la vente - année fiscale 2012 » devant manifestement être adressé à M. [F]. La pièce 50 de la société est une traduction en français de la pièce 31. Quant à la pièce 52, il s'agit d'un courriel du 14 octobre 2011 de Mme [T] à M. [F] lui fixant effectivement ses objectifs pour l'exercice FY12. Force est cependant de constater qu'il n'est pas établi que le courriel du 3 octobre 2011 a été porté à la connaissance de M. [F] puisqu'il ne figure pas au rang des destinataires du courriel. La pièce jointe n'est au demeurant pas signée. Concernant le courriel du 14 octobre 2011, il convient d'observer qu'il ne fixe les objectifs du salarié que 6 mois et demi après que l'exercice a commencé et qu'il n'a pas été fixé par voie d'avenant signé par les deux parties, alors que le contrat de travail de même que l'avenant relatif au bonus prévoyaient la signature d'un avenant par les deux parties. En outre, il doit être observé qu'ainsi que l'a relevé avec pertinence le premier juge, par sa pièce 82, M. [F] établit que par courriel du 31 mars 2011, Mme [T], directrice des ressources humaines de la société, lui écrivait : « suite à tes questions, dans tous les cas ton variable est dû au minimum à 100% sur FY10, FY11 et FY12. Seul le déplafonnement au-dessus du montant contractuel du variable est à discrétion de l'organisation, je n'ai pas de doute sur ce déplafonnement en ce qui te concerne spécialement suite au deal majeur ArcelorMittal que tu as apporté à CSC ». Il faut en déduire qu'à supposer qu'un objectif ait été assigné à M. [F] au titre de l'exercice 2011/2012 (année fiscale de la signature du contrat ArcelorMittal courant juillet 2011), il a été réalisé. Il importe peu que Mme [T] ait été licenciée pour faute grave le 9 octobre 2013, puisqu'il n'est pas établi que le courriel du 31 mars 2011 est à l'origine de ce licenciement.
3) En synthèse sur les primes et bonus :
Aucun objectif n'a donc été valablement fixé par avenant à M. [F] par l'employeur durant toute l'étendue de la relation contractuelle en ce qui concerne la rémunération variable prévue par le contrat de travail modifiée par l'avenant de septembre 2009. Il donc inutile de vérifier si les objectifs ont ou non été remplis par M. [F]. Il n'y a donc d'autre choix que d'allouer à M. [F] le plafond de ses primes soit 588 000 euros par an pour les exercices de 2009/2010, 2010/2011 et 2011/2012, soit la somme totale de 1 764 000 euros (588 000 x 3) dont il convient de déduire cependant la somme de 36 000 euros que M. [F] reconnaît avoir perçue en 2009 ce qui représente une somme restant due à M. [F] de 1 728 000 euros. Le jugement sera infirmé et, statuant à nouveau, il conviendra de condamner la société DXC Technology France à payer à M. [F] au titre de l'ensemble de sa rémunération variable la somme de 1 728 000 euros à titre de rappel de primes outre celle de 172 800 euros au titre des congés payés afférents. M. [F] sera débouté de sa demande de rappel de bonus. (...)
D. Sur les primes de vacances : M. [F] expose que les primes de vacances sont payées en juillet de chaque année en fonction de la somme perçue au titre du salaire incluant les primes, à concurrence de 1,040% ; qu'étant éligible à un rappel de primes, sa prime de vacances s'en trouve augmentée ; qu'au surplus, compte tenu de sa maladie professionnelle indemnisée par les indemnités journalières de sécurité sociale complété par AON AG2R (maintien de salaire à 100%) ouvrant les mêmes droits que pour tout salarié en activité, il est éligible aux primes de vacances des années 2014, 2015 et 2016 (jusqu'au 3 juin seulement et donc sur 5 mois) sur la base de son salaire fixe (9 872 euros bruts par mois). La société DXC Technology France objecte que pour les années 2010 à 2012, aucun variable n'étant dû, M. [F] ne saurait réévaluer ses primes de vacances. Elle ajoute que pour les années 2014 à 2016, la convention collective indique que cette prime de vacances est applicable prorata temporis et que M. [F] étant absent depuis janvier 2012, il ne peut prétendre à la prime de vacances au titre de ces années. En tout état de cause, la société DXC Technology France expose que le salarié n'a formé sa demande de rappel de prime de vacances qu'en cause d'appel et pour la première fois par conclusions d'intimée réceptionnées par la société le 27 avril 2018 ; que compte tenu du délai de prescription de 3 ans pour agir, il ne peut remonter que jusqu'au 27 avril 2015. Sur la prescription, la saisine de la juridiction prud'homale emporte interruption de la prescription pour l'ensemble des actions nées du même contrat de travail. La société DXC Technology France ne peut donc, au seul motif que M. [F] n'a formé pour la première fois sa demande de rappel de primes que le 27 avril 2018, être accueillie en sa fin de non-recevoir, dès lors que la saisine du conseil de prud'hommes le 24 décembre 2012 par le salarié emportait interruption de l'ensemble des actions nées de son contrat de travail, ce qui englobe celles de ses demandes qui ont été formées postérieurement à cette saisine. Il a été jugé que M. [F] était éligible au bénéfice d'un rappel de primes. Il n'est pas discuté que la prime de vacances est assise sur les salaires perçus, lesdits salaires incluant les primes. Il en résulte que M. [F] est fondé à demander un rappel de primes de vacances correspondant à 1,040% du rappel qui lui a été accordé soit 17 971,20 euros (1 728 000 x 1,04%). En ce qui concerne les primes de vacances au titre des années 2013 à 2016 (jusqu'au 3 juin 2016 ainsi qu'il est demandé (soit sur 3 ans et 5 mois)), l'article 31 de la convention collective applicable n'impose aucune condition de présence puisqu'elle s'applique à « l'ensemble des salariés » sans restriction. Toutefois, pendant les arrêts de travail de M. [F] son contrat de travail a nécessairement été suspendu. Il en résulte qu'il n'est pas, pour cette période, éligible au bénéfice des prime de vacances. Ainsi, ajoutant au jugement, la société DXC Technology France sera condamnée à payer à M. [F] la somme de 17 971,20 euros à titre de rappel de primes de vacances. » ;
1. ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, le salarié sollicitait, d'une part, une somme de 207 000 €, outre 20 7000 € à titre de congés payés afférents, au titre de la rémunération variable annuelle d'octobre 2009 à mars 2012, et d'autre part, une somme de 1 795 176 € au titre du bonus nouveaux contrats ; qu'en affirmant, après avoir jugé que la partie variable de la rémunération et le « bonus » constituaient la même chose et que le salarié n'avait pas droit aux deux, que ses deux demandes, l'une au titre de la rémunération variable annuelle d'octobre 2009 à mars 2012, l'autre au titre du bonus nouveaux contrats, n'en formaient qu'une, au titre de l'ensemble de la rémunération variable, d'un montant global de 2 002 176 euros, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2. ALORS en outre QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en accordant au salarié une indemnité de congés payés sur la rémunération variable de 172 800 € quand il ne sollicitait à ce titre que la somme de 20 700 €, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3. ALORS QUE le juge ne peut modifier les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, le salarié se bornait à prétendre qu'aucun objectif ne lui avait été fixé, sans alléguer qu'ils l'auraient été tardivement ou de façon insuffisamment précise faute pour l'employeur d'avoir défini par avance les dossiers pour lesquels il était qualifié de « Lead » ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que les objectifs devaient être fixés en début d'exercice et que le salarié devait être avisé par avance des dossiers pour lesquels il était identifié comme « Lead », que s'agissant de l'exercice 2010/2011, la partie de la pièce 6 du salarié (le deuxième feuillet en l'occurrence) qui évoquait effectivement des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année) comportait, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne pouvait à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011, que la pièce 6 ne précisait pas par avance sur quels projets M. [F] avait la qualité de « Lead », et que pour l'exercice 2011/2012, le courriel du 14 octobre 2011 ne fixait les objectifs du salarié que 6 mois et demi après que l'exercice a commencé, la cour d'appel a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
4. ALORS à tout le moins QUE le juge, qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en énonçant que les objectifs devaient être fixés en début d'exercice et que le salarié devait être avisé par avance des dossiers pour lesquels il était identifié comme « Lead », que s'agissant de l'exercice 2010/2011, la partie de la pièce 6 du salarié (le deuxième feuillet en l'occurrence) qui évoquait effectivement des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année) comportait, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne pouvait à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011, que la pièce 6 ne précisait pas par avance sur quels projets M. [F] avait la qualité de « Lead », et que pour l'exercice 2011/2012, le courriel du 14 octobre 2011 ne fixait les objectifs du salarié que 6 mois et demi après que l'exercice a commencé, la cour d'appel, qui a relevé d'office ces moyens sans inviter les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5. ALORS QUE le juge ne peut modifier les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, le salarié admettait que le plan « Exhibit A » fourni à M. [F] était signé par le PDG et lui-même et faisait partie de l'avenant à son contrat de travail (conclusions d'appel, p. 18, § 5 et p. 35, avant dernier §) sans se prévaloir d'une absence de signature du feuillet évoquant des chiffres cibles ou de la date et de l'heure indiquée en pied de page ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le deuxième feuillet de la pièce 6 du salarié qui évoquait effectivement des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année) n'était pas signée et comportait, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne pouvait à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
6. ALORS QUE le juge, qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le deuxième feuillet de la pièce 6 du salarié qui évoquait effectivement des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année) n'était pas signée et comportait, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne pouvait à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
7. ALORS en toute hypothèse QUE la signature par le salarié de l'avenant faisant référence à une annexe, laquelle définit ses objectifs, suffit à établir l'accord du salarié sur ses objectifs ; qu'en l'espèce, il était constant que salarié et employeur avaient signé l'avenant du 25 septembre 2009 se référant à l'« Exhibit A » annexée ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le deuxième feuillet de la pièce 6 du salarié qui évoquait des chiffres cibles (Exhibit A : 5,1 millions de dollars (au titre de la valeur totale du contrat) et 1,5 millions de dollars (au titre du revenus de l'année) n'était pas signée et comportait, en pied de page, l'indication d'une date et d'une heure (« 21/12/2012 15:44 ») qui ne pouvait à l'évidence correspondre à la définition d'objectifs qui sont supposés donnés pour l'exercice 2010/2011, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
8. ALORS en outre QUE l'employeur soulignait que la notion de « lead » impliquait que la rémunération variable était versée uniquement au salarié « responsable » de l'obtention du contrat litigieux, autrement dit à celui ayant eu le rôle décisif de prospection (conclusions de l'employeur, p. 20) ; qu'en jugeant que le salarié devait être avisé par avance des dossiers pour lesquels il était identifié comme « Lead » et que s'agissant de l'exercice 2010/2011, la pièce 6 ne précisait pas par avance sur quels projets M. [F] avait la qualité de « Lead », sans rechercher si cette qualité, impliquant un rôle décisif de prospection, n'était pas déterminable qu'a posteriori, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
9. ALORS subsidiairement QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail, et à défaut d'accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères fixés au contrat et des accords conclus les années précédentes par les parties ou des éléments de la cause ; que pour cela, s'agissant de primes d'objectifs, il doit rechercher les objectifs qui auraient dû être fixés puis les comparer avec les résultats obtenus pour chaque année ; que le juge ne peut se considérer comme tenu d'accorder au salarié, sans aucun examen de ses résultats, le maximum de la prime ; qu'en affirmant qu'aucun objectif n'ayant été valablement fixé par avenant à M. [F] par l'employeur durant toute l'étendue de la relation contractuelle en ce qui concerne la rémunération variable, il était inutile de vérifier si les objectifs avaient ou non été remplis par M. [F] et il n'y avait d'autre choix que d'allouer à M. [F] le plafond de ses « primes », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
10. ALORS enfin QUE la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité s'acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l'entreprise au cours de l'exercice ; qu'en l'espèce, l'employeur soulignait que M. [F] ayant été engagé à compter du 5 octobre 2009, plus de six mois après le début de l'exercice fiscal sur la base duquel la rémunération variable était fixée, il ne pouvait prétendre à l'intégralité de sa rémunération variable pour l'exercice 2009/2010 (conclusions d'appel, p. 19) ; qu'en accordant cependant l'intégralité de la rémunération variable 2009/2010 à M. [F], présent moins de six mois sur l'exercice fiscal en cause, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] à effet au 15 mai 2019, d'AVOIR dit qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] les sommes de 53 578,24 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 140 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR ordonné à la société DXC Technology France la remise à M. [F] des documents sociaux conformes au jugement (attestation pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte), d'AVOIR condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société DXC Technology France aux dépens,
AUX MOTIFS QUE « H. Sur la demande de résiliation du contrat de travail : L'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. Lorsque le salarié demande la résiliation du contrat de travail, il doit apporter la démonstration de manquements de l'employeur à l'exécution de ses obligations contractuelles et que ces manquement présentent une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail. Si les manquements sont établis et présentent un degré de gravité suffisant, la résiliation est alors prononcée aux torts de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou - si la résiliation est fondée sur des faits de harcèlement moral - d'un licenciement nul par l'effet de l'article L. 1152-3 du code du travail. La résiliation produit effet au jour où le juge la prononce si à cette date, le salarié est toujours au service de son employeur (et en cas d'arrêt confirmatif, à la date du jugement de première instance). Si en revanche le salarié a été licencié à la date du prononcé de la résiliation, alors c'est à la date d'envoi de la notification du licenciement qu'est fixée la prise d'effet de la résiliation judiciaire. Si les manquements invoqués par le salarié ne sont pas établis ou ne présentent pas un caractère de gravité suffisant, alors le juge doit débouter le salarié de sa demande. En l'espèce, il a été jugé que M. [F] n'avait pas été rétribué des primes auxquelles il pouvait prétendre. Ce fait, à lui seul et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs que M. [F] formule à l'encontre de son employeur, constituent un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail, d'autant que M. [F] avait sollicité le paiement de la part variable de sa rémunération depuis au moins le 17 août 2011, date à laquelle il a indiqué à son supérieur hiérarchique « Je m'aperçois que je n'ai pas encore reçu de versement de bonus » (pièce 83 du salarié). Il conviendra en conséquence d'infirmer sur ce point le jugement de première instance en ce qu'il a dit que la rupture, justifiée par un harcèlement moral dont l'existence n'a pas été retenue par la cour, produisait les effets d'un licenciement nul. Statuant à nouveau, il conviendra de dire que la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dès lors que l'exécution du contrat de travail s'est poursuivie au delà du jugement du 30 janvier 2017 la date d'effet de la résiliation judiciaire est fixée à la date de l'arrêt confirmatif. ; I. Sur les conséquences financières de la rupture :
Conformément à la demande de M. [F], il convient de fixer son salaire brut mensuel moyen à la somme de 16 622 euros par mois. Sur ces bases, M. [F] peut prétendre à :
. une indemnité compensatrice de préavis correspondant à 3 mois de salaire soit 49 866 euros, outre 4 986 euros au titre des congés payés afférents,
. une indemnité conventionnelle de licenciement arrêtée à la date du présent arrêt soit 53 578,24 euros.
Par ailleurs, M. [F] peut prétendre, sur le fondement de l'article L. 1235-3 issu de l'ordonnance du 22 septembre 2017 à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Compte tenu de l'ancienneté de M. [F] d'environ 10 ans, de son niveau de rémunération, compte tenu également de son âge - M. [F] étant né en 1963 -, compte tenu encore des problèmes médicaux qui l'affectent toujours, le préjudice qui résulte, pour lui, de la perte de son emploi, sera intégralement réparé par l'octroi d'une indemnité d'un montant de 140 000 euros. Il en résulte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société DXC Technology France à payer à M. [F] une indemnité compensatrice de préavis de 49 866 euros outre la somme de 4 986 euros au titre des congés payés afférents. Le jugement sera donc infirmé sur l'indemnité conventionnelle de licenciement et sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau, la société DXC Technology France sera condamnée à payer à M. [F] :
. 53 578, 24 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 140 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. » ;
1. ALORS QUE la cassation à intervenir sur le deuxième moyen relatif à la rémunération variable entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail sur le fondement de l'absence de versement à M. [F] de ladite rémunération variable, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2. ALORS subsidiairement QU'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet n'est fixée à la date de la décision la prononçant que si, à cette date, le contrat de travail n'a pas été rompu et le salarié est toujours au service de son employeur ; qu'en cas de confirmation en appel du jugement prononçant la résiliation judiciaire du contrat de travail, la date de la rupture est celle fixée par le jugement, à moins que l'exécution du contrat de travail ne se soit en fait poursuivie après cette décision ; qu'en l'espèce, il était constant que M. [F] était en arrêt de travail depuis le mois de janvier 2012, et l'employeur soulignait que si la cour d'appel confirmait la résiliation judiciaire du contrat de travail, la date devrait en être fixée au plus tard au jour du jugement, soit le 30 janvier 2017 dès lors que M. [F] avait cessé de travailler pour la société depuis plusieurs années et exerçait le métier de professeur de yoga bien avant le prononcé de la décision, tout en étant en poste au sein d'une société (conclusions d'appel, p. 56 ; prod. 7 et 8) ; qu'en affirmant que dès lors que l'exécution du contrat de travail s'était poursuivie au-delà du jugement du 30 janvier 2017, la date d'effet de la résiliation judiciaire devait être fixée à la date de l'arrêt confirmatif, quand le salarié ne soutenait pas être resté au service de son employeur postérieurement au jugement ni que l'exécution du contrat de travail se serait en fait poursuivie après cette date, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3. ALORS en toute hypothèse QU'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet n'est fixée à la date de la décision la prononçant que si, à cette date, le contrat de travail n'a pas été rompu et le salarié est toujours au service de son employeur ; qu'en l'espèce, il était constant que M. [F] était en arrêt de travail depuis le mois de janvier 2012, et l'employeur soulignait que si la cour d'appel confirmait la résiliation judiciaire du contrat de travail, la date devrait en être fixée au plus tard au jour du jugement, soit le 30 janvier 2017 dès lors que M. [F] avait cessé de travailler pour la société depuis plusieurs années et exerçait le métier de professeur de yoga bien avant le prononcé de la décision, tout en étant en poste au sein d'une société (conclusions d'appel, p. 56 ; prod. 7 et 8) ; qu'en affirmant que dès lors que l'exécution du contrat de travail s'était poursuivie au-delà du jugement du 30 janvier 2017, la date d'effet de la résiliation judiciaire devait être fixée à la date de l'arrêt confirmatif, sans préciser en quoi l'exécution du contrat de travail se serait poursuivie au-delà du jugement ni rechercher si le salarié était resté au service de l'employeur ou s'il avait repris une autre activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016
Moyens produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [F], demandeur au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. [F] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE « L'article L.1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Sur le terrain de la preuve, il ressort de l'article L. 1154-1 que lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1 le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que les agissements qui lui sont reprochés et qui sont établis ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il revient donc au salarié d'établir la matérialité de faits précis et concordants, à charge pour le juge d'apprécier si ces éléments, pris en leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Dans la négative, le fait de harcèlement ne peut être reconnu. Dans l'affirmative, il revient à l'employeur de prouver que ces éléments ne constituent pas un harcèlement.
En l'espèce, M. [F] adresse plusieurs reproches à son employeur que celui-ci conteste :
. l'absence de définition précise de ses missions et fonctions,
. la pression que lui a fait subir son employeur du fait :
. de la privation de sa rémunération globale,
. de l'avoir empêché de connaître ses missions,
. de lui refuser délibérément de lui donner les moyens d'accomplir ses fonctions,
. de l'écarter à la dernière minute d'un projet auquel il a pourtant été déterminant dans la réussite,
. de ne lui manifester aucune considération ni respect dans la réussite et la conduite d'un projet qualifié de « mega deal »,
. de lui refuser une évaluation annuelle alors que tous les autres salariés y avaient droit,
. de dénigrer constamment la qualité et la pertinence de son travail ainsi que son utilité,
. de remettre en question sans raison chacune de ses propositions et la pertinence de ses décisions,
. de l'appeler à toutes heures du jour et de la nuit pour l'accabler,
. de lui refuser toute responsabilité et tâches en corrélation avec son contrat de travail ;
QU‘en ce qui concerne l'absence de définition précise de ses missions et fonctions, force est de constater que rien, dans les documents contractuels produits, ne vient définir avec précision les missions confiées à M. [F]. Le seul document qui fasse référence aux missions de M. [F] consiste en un courriel du 14 octobre 2011 (courriel de Mme [T] - pièce 52 de l'employeur). Ce courriel apparaît tardif s'agissant d'un salarié embauché en octobre 2009.
En ce qui concerne ce que le salarié regroupe sous ce qu'il considère comme constituant des pressions, il apparaît que M. [F] a été privé de sa rémunération globale, faute pour l'employeur d'avoir défini ses objectifs, ce qui est du reste le corollaire du défaut de précision des missions qui étaient confiées au salarié.
Concernant le grief tendant au fait que l'employeur n'a manifesté à M. [F] « aucune considération ni respect dans la réussite et la conduite d'un projet qualifié de mega deal », le salarié fait implicitement référence au contrat conclu entre sa société et ArcelorMittal. La société DXC Technology France expose que M. [F] n'était qu'en « support » et qu'il ne peut, seul, revendiquer la paternité de ce contrat pour lequel il n'était pas « lead ». Elle indique que la responsable du marché était Mme [D] et que M. [F] n'a pas été l'acteur majeur de la conclusion de ce contrat. Toutefois, rien ne permet en l'état d'établir qu'effectivement, Mme [D] était bien responsable des négociations avec ArcelorMittal. M. [F] démontre quant à lui son implication dans les discussions avec cette société, en témoignent les courriels qu'il verse aux débats. Il a donc nécessairement concouru à la signature de ce contrat. A ceci, il convient d'ajouter que la distinction entre les statuts de « lead » ou de « support », qui conditionnait l'octroi ou non de la prime litigieuse, supposait que la société précise clairement, dans le cadre de la définition des objectifs du salarié, s'il était, pour les négociations avec ArcelorMittal, « lead » ou « support ». Or, les précisions quant au statut « lead » ou « support » du salarié relativement au client ArcelorMittal n'ont été faites que le 14 octobre 2011 (pièce 52 de l'employeur), c'est-à-dire à un moment où le contrat avait déjà été signé puisqu'il a été signé au mois de juillet 2011. Ainsi, le salarié apporte-t-il la démonstration d'un flou entretenu dans les missions de M. [F] particulièrement en ce qui concernait ArcelorMittal.
Il n'est enfin pas contesté que M. [F] n'a jamais eu d'évaluation annuelle.
Les autres griefs ne sont pas démontrés.
Les griefs retenus ne font pas présumer l'existence d'un harcèlement moral de telle sorte qu'infirmant la décision du premier juge, il conviendra, statuant à nouveau, de débouter M. [F] de ce chef de demande. » ;
1°) ALORS QU'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. [F] établissait avoir été victime, de la part de son employeur, des agissements suivants : l'absence de définition précise de ses missions et fonctions, la « privation de sa rémunération globale, faute pour l'employeur d'avoir défini ses objectifs », l'absence de « considération [et] de respect dans la réussite et la conduite d'un projet qualifié de « méga deal », et l'absence d'entretien d'évaluation ; qu'en concluant cependant que les griefs ainsi retenus ne faisaient pas présumer l'existence d'un harcèlement moral la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.1152-1 du code du travail ;
2°) ALORS en outre QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail ; qu'en déboutant M. [F] de ses demandes tendant à voir juger qu'il avait fait l'objet d'un harcèlement moral sans examiner l'ensemble des faits invoqués, telle l'initiation, le 6 janvier 2012, d'une procédure de licenciement abandonnée par la suite, ni les éléments produits, et notamment le rapport réalisé par l'expert du CHSCT restitué lors de la réunion du 10 septembre 2012, et le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine du 17 septembre 2018 imputant à une faute inexcusable de la société CSC Computer Sciences la maladie professionnelle sous forme de « dépression réactionnelle et burn-out au travail » soufferte par M. [F], la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1, L.1152-4, L.1153-4 et L.1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. [F] « de sa demande de rappel de bonus » ;
AUX MOTIFS QUE « M. [F] expose qu'en dépit des termes de son contrat, il n'a pas été rétribué de la partie variable de sa rémunération et que ses objectifs n'ont jamais été fixés ; qu'il en va de même de ses bonus, précisant à cet égard que les pièces contractuelles qu'il verse aux débats permettent d'établir qu'il était éligible tant à des primes annuelles qu'à des bonus, ces deux éléments de rémunération étant distincts.
Pour sa part, la société DXC Technology France considère que la rémunération et le « bonus » dont il est question dans l'avenant constituent la même rémunération, le bonus ne devant en aucun cas être versé en sus de la rémunération variable. Elle ajoute que les objectifs de M. [F] lui étaient connus et qu'il ne les a pas atteints de telle sorte qu'il ne peut prétendre à la prime afférente.
1) Sur le bonus :
L'article 1156 du code civil, dans sa rédaction en vigueur au jour où l'avenant du 25 septembre 2009 a été signé, dispose que le juge doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes.
En l'espèce, l'article 4 du contrat de travail du 23 juillet 2009, à effet au 5 octobre 2009 stipule :
« votre rémunération brute sera constituée par :
. une partie fixe brute de 115 000 euros versée en 12 mensualités de 9 594 euros,
. une partie variable brute annuelle de 81 000 euros versée à la fin de l'exercice fiscal en fonction de la réalisation des objectifs de l'année définis par la direction générale par voie d'avenant ; l'exigibilité et le paiement de cette partie variable sont subordonnés à la signature de l'avenant par les deux parties.
A titre exceptionnel, nous vous garantissons le versement anticipé de 24 000 euros de cette partie variable brute annuelle. Cette somme sera versée en 6 mensualités de 4 000 euros à compter de votre date d'arrivée. »
L'avenant du 25 septembre 2009 prévoit : « (') suite à nos entretiens, en complément de votre contrat de travail, nous avons le plaisir de vous confirmer les éléments suivants. Vous bénéficiez d'un plan de bonus annuel, en plus de votre rémunération annuelle. Nous vous joignons à ce courrier un plan de bonus, exhibit A applicable à votre date d'entrée au sein de notre société. Votre (salaire de base de référence) correspond à la somme de votre salaire fixe et de votre salaire variable suivant votre contrat de travail. Vos objectifs annuels pour le plan de bonus seront définis par la direction générale par voie d'avenant qui devra être signé par les deux parties. » (pièce 6 du salarié).
Il ressort de la pièce 5 du salarié (traduite en pièce 46 de l'employeur - cette pièce étant un courriel adressé par M. [O] à M. [F] le 29 juillet 2009) que les parties parlaient d'un « bonus » pour désigner ce qui dans le contrat du 23 juillet 2009 est qualifié de « partie variable brute de la rémunération ». Il est ainsi démontré que pour les parties, qui étaient encore en négociation sur la rémunération de M. [F] même après la signature de son contrat de travail qui ne devait entrer en vigueur que le 5 octobre 2009, la « partie variable de la rémunération » et le « bonus » constituent la même chose. Cette interprétation est renforcée par la pièce 48 de l'employeur (courriel interne du 28 juillet 2009 entre M. [O] et Mme [I] - responsable du recrutement au sein de la société) qui montre que, dans l'esprit de l'employeur, il convenait de réviser le plafonnement de la rémunération variable (prévu à 81 000 euros par an dans le contrat de travail) pour le porter au triple c'est-à-dire à 243 000 euros par an en cas d'atteinte à 100% des objectifs. En effet, de ce courriel interne il ressort que M. [O] proposait d'élever de 3 fois le plafond de rémunération : « My proposal is to cap at three times (') The bonus will be capped at a multiple of 3, that is 3 x euros 81K = euros 243 K ». Cette pièce montre en outre que l'employeur n'a pas entendu accorder à M. [F] un bonus en plus de ses primes.
Il faut déduire de ces éléments que, contrairement à la décision du premier juge, l'avenant du 25 septembre 2009 ne fait que préciser la prime convenue dans le contrat de travail du salarié incluant ses remarques antérieures et que ledit avenant se substitue à la partie du contrat de travail consacrée à la rémunération variable de M. [F].
M. [F] le sait au demeurant fort bien puisqu'il verse au dossier en pièce 130 un courriel qu'il a adressé à son supérieur hiérarchique M. [H]. Par ce courriel du 6 septembre 2011, M. [F] évoque la question de sa rémunération variable en ces termes : « Avec notre DRH, nous avons aussi parlé du variable contractuel, il est légitime que celui-ci me soit versé dans sa totalité. Je t'ai transmis à ta demande un e-mail succinct le 17 août 2011 avec mes réalisations et contributions pour la région SetW. De plus, compte tenu du contrat que j'ai apporté avec ArcelorMittal, un déplafonnement tel que nous en avions parlé par le passé serait une juste reconnaissance de ma contribution. En effet, tu te souviendras que chez HCL technologies (l'ancien employeur de M. [F]), le montant du ariable est déplafonné et est multiplié par 4 pour des affaires de ce volume ou pour des nouveaux logos (nouveaux clients). [R] [O] a confirmé par email avant mon entrée dans CSC que dans le cadre de mon contrat, il y a bien déplafonnement du variable ». Ainsi, M. [F] n'évoque-t-il en réalité qu'une seule rémunération variable déplafonnée et non un bonus qui serait distinct de sa rémunération variable et s'y ajouterait.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a estimé que le salarié avait droit à deux systèmes de rémunération variable » ;
ALORS QUE que le contrat de travail du 23 juillet 2009 stipulait : « votre rémunération brute sera constituée par :
. une partie fixe brute de 115 000 euros versée en 12 mensualités de 9 594 euros,
. une partie variable brute annuelle de 81 000 euros versée à la fin de l'exercice fiscal en fonction de la réalisation des objectifs de l'année définis par la direction générale par voie d'avenant (?) » et que l'avenant du 25 septembre 2009 à ce contrat énonçait : «? en complément de votre contrat de travail, nous avons le plaisir de vous confirmer les éléments suivants. Vous bénéficiez d'un plan de bonus annuel, en plus de votre rémunération annuelle. Nous vous joignons à ce courrier un plan de bonus, exhibit A applicable à votre date d'entrée au sein de notre société. Votre salaire de base de référence correspond à la somme de votre salaire fixe et de votre salaire variable suivant votre contrat de travail. Vos objectifs annuels pour le plan de bonus seront définis par la direction générale par voie d'avenant qui devra être signé par les deux parties. » ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que « l'avenant du 25 septembre 2009 ne fait que préciser la prime convenue dans le contrat de travail du salarié incluant ses remarques antérieures et que ledit avenant se substitue à la partie du contrat de travail consacrée à la rémunération variable de M. [F] » quand cet avenant du 25 septembre 2009 prévoyait un plan de bonus annuel s'ajoutant à la rémunération contractuelle totale, fixe et variable, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet avenant et, partant, violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016