LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 septembre 2022
Rejet non spécialement motivé
M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10491 F
Pourvoi n° J 21-10.281
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 SEPTEMBRE 2022
1°/ Mme [D] [X], domiciliée [Adresse 2],
2°/ la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube, dont le siège est [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° J 21-10.281 contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2020 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Logista France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ à la Confédération des chambres syndicales départementales des débitants de tabac, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations écrites de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [X] et de la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Logista France, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Confédération des chambres syndicales départementales des débitants de tabac, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 juin 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux et signé par Mme Vaissette, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Mme [D] [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube font grief à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir déclarées irrecevables en leur demande visant à voir déclarer nul et inopposable aux débitants de tabac le protocole du 12 octobre 2001 et de les avoir déboutées de l'ensemble de leurs demandes ;
Alors qu'une cour d'appel, qui décide que la demande dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en déclarant irrecevables Mme [D] [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube en leur demande visant à faire déclarer nul et inopposable aux débitants de tabac le protocole du 12 octobre 2001, tout en confirmant le jugement les ayant déboutées de l'ensemble de leurs demandes, la cour d'appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Mme [D] [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube font grief à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir déclarées irrecevables en leur demande visant à voir déclarer nul et inopposable le protocole du 12 octobre 2001 et de les avoir déboutées de leurs demandes dirigées contre la société Logista France ;
Alors 1°) que le point de départ de l'action en nullité d'une convention se situe au jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande formée par Mme [X] visant à faire déclarer nul et inopposable aux débitants de tabac le protocole du 12 octobre 2001, la cour d'appel a énoncé que le protocole litigieux avait été signé le 12 octobre 2001 entre la société Altadis (Logista France) et la Confédération des chambres syndicales des débitants de tabac, qu'il avait été publié et explicité en détail dans le numéro de novembre 2001 de la revue Losange, qui était le magazine des débitants de tabac de France, de sorte que cette large publicité donnée à ce protocole avait donc permis, dès novembre 2001, à toute personne intéressée de connaître les stipulations qu'elle estimait susceptible d'être entachées de nullité ;
qu'elle a ajouté que Mme [X] est membre de la Chambre syndicale de l'Aube, laquelle est adhérente de la confédération nationale des buralistes de France et qu'en sa qualité de buraliste, elle a bénéficié d'un stage de formation « nouveau buraliste » s'étant tenue du 3 au 6 décembre 2013, au cours duquel elle a été informée sur la logistique du tabac, le formateur ayant attesté que « la logistique est traitée en deux temps : - séquence sur les crédits tabac, - séquence logistique (avec une présentation de Logista allant de la commande tabac à la facturation en passant par les livraisons, les contrôles, les réassorts (ajustements et dépannages) et les reprises de produits (...) » ; qu'en statuant par de tels motifs, tout en relevant que Mme [X] exploitait son fonds de buraliste depuis 2013, ce dont il résultait qu'elle n'avait pu, avant cette date, avoir eu connaissance de l'existence du protocole litigieux et que, dès lors, son action en nullité introduite par assignation des 28 et 30 décembre 2016, ainsi qu'elle l'avait encore constaté, ne pouvait être prescrite, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 2224 du code civil ;
Alors 2°) et en toute hypothèse qu'on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ; que, dans leurs conclusions d'appel (p. 4 s.), Mme [D] [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube ont fait valoir que le protocole litigieux contrevenait aux dispositions impératives issues de l'article 282 de l'annexe 2 du code général des impôts, suivant lequel est fixée, par arrêté du ministre de l'économie et des finances, « la valeur minimale de la commande qui entraîne l'obligation pour le fournisseur de livrer à ses frais, au débitant, les tabacs commandés » et de l'article 56 AB de l'annexe 4 du code général des impôts précisant que « chaque fournisseur est tenu de livrer à ses frais toute commande passée par un débitant dès lors que cette dernière correspond au moins à la valeur au prix de détail de deux mille cigarettes de la classe de prix la plus demandée au sens de l'article 575 du code général des impôts » ; qu'en donnant cependant effet au protocole litigieux, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si sa contrariété aux dispositions d'ordre public invoquées par les exposantes n'était pas de nature à le leur rendre inopposable, indépendamment de toute prescription de l'action en nullité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 du code civil ;
Alors 3°) que tout fait quelconque qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé de le réparer ; que, dans leurs conclusions d'appel (p. 4 s.), Mme [D] [X] et la Chambre syndicale des débitants de tabac de l'Aube ont fait valoir que le protocole litigieux contrevenait aux dispositions impératives issues de l'article 282 de l'annexe 2 du code général des impôts, suivant lequel est fixée, par arrêté du ministre de l'économie et des finances, « la valeur minimale de la commande qui entraîne l'obligation pour le fournisseur de livrer à ses frais, au débitant, les tabacs commandés » et de l'article 56 AB de l'annexe 4 du code général des impôts précisant que « chaque fournisseur est tenu de livrer à ses frais toute commande passée par un débitant dès lors que cette dernière correspond au moins à la valeur au prix de détail de deux mille cigarettes de la classe de prix la plus demandée au sens de l'article 575 du code général des impôts » ; qu'elles en ont conclu qu'elles étaient « recevables et fondées à déclarer abusive la position adoptée par la SAS Logista France, qui refuse le réassort de ses débitants tel que prévu par les dispositions de l'article 56 AB de l'annexe 4 du code général des impôts » et à être indemnisées, de ce chef, à hauteur de 10 000 euros ; qu'en énonçant, pour rejeter cette demande, qu'elle « ne justifie d'aucun élément probant au soutien de son argumentaire visant à dénoncer un abus de position dominante exercé par la société Logista », sans rechercher si la violation par la société Logista France des dispositions invoquées des annexes 2 et 4 du code général des impôts, n'était pas de nature, à elle seule, à constituer une faute, ouvrant droit à indemnisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.