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07/07/2022 | FRANCE | N°21-10560

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 07 juillet 2022, 21-10560


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 juillet 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 779 F-D

Pourvoi n° N 21-10.560

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 JUILLET 2022

La société XL insurance company SE, société de droit étranger, d

ont le siège est [Adresse 6] (Irlande), venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurance, a formé le pourvoi n° N 21-10.560 contre...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 juillet 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 779 F-D

Pourvoi n° N 21-10.560

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 JUILLET 2022

La société XL insurance company SE, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 6] (Irlande), venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurance, a formé le pourvoi n° N 21-10.560 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2020 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Fides, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], anciennement dénommée société EMJ, ayant un établissement secondaire [Adresse 3], prise en la personne de M. [U] [R], en qualité de liquidateur judiciaire du Gaec des Serres florales,

2°/ à la société Coopérative de réalisations industrielles et agricoles, dont le siège est [Adresse 7],

3°/ à la société Tech'map, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

4°/ à la société Aviva assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

5°/ à la société ML conseils, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], prise en la personne de M. [J] [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société XL insurance company SE, venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurance, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société ML conseils, prise en la personne de M. [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Fides, anciennement dénommée EMJ, prise en la personne de M. [R], en qualité de liquidateur judiciaire du Gaec des Serres florale, de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Coopérative de réalisations industrielles et agricoles, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la société Aviva assurances, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 mai 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 décembre 2020), le 9 septembre 2008, la société Coopérative de réalisations industrielles et agricoles (la société Coria) a établi à l'attention du Gaec des Serres florales (le Gaec), spécialisé dans la production de fleurs sous serres, un devis pour la mise en place d'une pompe à chaleur fabriquée par la société Airwell France (la société Airwell), cette dernière ayant été successivement assurée auprès de la société Aviva assurances (la société Aviva), puis, à compter du 1er juin 2011, de la société Axa corporate solutions (la société Axa), aux droits de laquelle vient la société XL insurance company SE (la société XL insurance).

2. L'installation a été mise en service par la société Tech'map.

3. Des dysfonctionnements sont apparus auxquels les sociétés Airwell et Tech'map ont vainement tenté de remédier.

4. Après avoir obtenu en référé, le 23 janvier 2012, une expertise tendant à l'évaluation de ses préjudices, le Gaec a été placé en liquidation judiciaire et la société Fides représentée par M. [R] a repris l'instance et, en qualité de liquidateur judiciaire du Gaec, a assigné les sociétés Coria et Tech'map, M. [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell et la société Axa, en indemnisation de ses préjudices. La société Coria a appelé en la cause la société Aviva.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, et le second moyen, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches

Enoncé du moyen

6. La société XL insurance fait grief à l'arrêt de condamner la société Axa à garantir "la liquidation judiciaire" de la société Airwell et la société Coria des condamnations prononcées à leur encontre, alors :

« 1°/ que lorsque la garantie est déclenchée par la réclamation, l'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable, entendu comme la cause du dommage, à la date de la souscription de la garantie ; que, par ailleurs, le vendeur professionnel est présumé connaître le vice affectant la chose vendue ; que pour condamner la compagnie Axa à garantir la société Airwell, la cour d'appel a énoncé qu'il ne ressortait d'aucune pièce du dossier que celle-ci connaissait l'existence du vice de fabrication avant la conclusion du contrat d'assurance ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle relevait que « le défaut de fabrication mis en évidence par l'expertise constitue un vice caché » ce dont il résultait que la société Airwell, fabricant-vendeur des pompes à chaleur défectueuses, était réputée connaître le vice dont ces dernières étaient affectées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé l'article L. 124-5 du code des assurances ;

3°/ que le contrat d'assurance étant un contrat aléatoire, la garantie n'est pas due lorsque l'assuré savait, au moment de la souscription du contrat, qu'un sinistre de nature à engager sa responsabilité était survenu ; qu'au cas d'espèce, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 124-5 du code des assurances la cour d'appel qui a condamné la compagnie Axa à garantir la société Airwell après avoir elle-même constaté « qu'à la date de la souscription de la police d'assurance, la société Airwell était parfaitement informée des dysfonctionnements [affectant les pompes à chaleur] », ce dont il se déduisait que la société Airwell savait, à la date de la souscription du contrat, qu'un sinistre susceptible de lui être imputé était survenu. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen, pris en sa première branche

7. La société ML conseils, prise en la personne de M. [X] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell, et la société Fides ès qualités, contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent qu'il est nouveau et mélangé de fait.

8. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est de pur droit.

9. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

10. Selon l'article L. 124-5 du code des assurances, lorsque la garantie est déclenchée par la réclamation, l'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie.

11. Selon l'article L. 124-1-1 du même code, le fait dommageable est celui qui constitue la cause génératrice du dommage.

12. La jurisprudence a déduit de l'article 1645 du code civil une présomption irréfragable de connaissance par le vendeur professionnel du vice de la chose vendue, afin que l'acquéreur obtienne réparation de l'intégralité de tous les dommages qui en sont la conséquence (1re Civ., 22 mai 2019, pourvoi n° 17-31.248 ; Com., 19 mai 2021, pourvoi n° 19-18.230).

13. Cependant, dans l'hypothèse où la cause génératrice d'un dommage consiste dans la livraison d'une chose affectée d'un vice, seule la connaissance réelle, par le vendeur, du fait dommageable à la date de souscription du contrat, caractérise l'inexistence de l'aléa induisant l'absence de couverture du risque par l'assureur.

14. Dès lors, la présomption précitée ne peut être appliquée pour considérer que le vendeur professionnel a nécessairement connaissance du fait dommageable, au sens de l'article L. 124-5 du code des assurances.

15. L'arrêt attaqué énonce que le fait dommageable résulte non pas des dysfonctionnements de la pompe à chaleur mais de la détermination de leur cause qui permet de retenir la responsabilité sur le fondement de l'article 1641 du code civil soit en l'espèce, la fabrication de la pompe à chaleur défectueuse. Il ajoute qu'à la date de la souscription de la police d'assurance, la société Airwell était parfaitement informée des dysfonctionnements mais qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle connaissait l'existence du vice de fabrication, lequel a été mis en évidence par le rapport d'expertise après les analyses du laboratoire HRS.

16. En l'état de ces constatations et énonciations, et dès lors que l'existence de dysfonctionnements n'impliquait pas, de manière certaine, la mise en cause de la responsabilité de l'assuré, la cour d'appel a exactement retenu que la garantie de la société Axa était due.

17. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société XL insurance company SE aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société XL insurance company SE et la condamne à payer à la société ML conseils, prise en la personne de M. [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France, la somme de 3 000 euros, à la société Fides, prise en la personne de M. [R], en qualité de liquidateur judiciaire du Gaec des Serres florales, la somme de 3 000 euros, à la société Coopérative de réalisations industrielles et agricoles la somme de 3 000 euros et à la société Aviva assurances la somme de 1 200 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société XL insurance company SE, venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurance

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société XL Insurance, venant aux droits de la compagnie Axa Corporate Solutions, fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à garantir « la liquidation judiciaire de la société Airwell », et la société Coria des condamnations prononcées à leur encontre ;

1°) ALORS D'UNE PART QUE lorsque la garantie est déclenchée par la réclamation, l'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable, entendu comme la cause du dommage, à la date de la souscription de la garantie ; que, par ailleurs, le vendeur professionnel est présumé connaître le vice affectant la chose vendue ; que pour condamner la compagnie Axa à garantir la société Airwell, la cour d'appel a énoncé qu'il ne ressortait d'aucune pièce du dossier que celle-ci connaissait l'existence du vice de fabrication avant la conclusion du contrat d'assurance ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle relevait que « le défaut de fabrication mis en évidence par l'expertise constitue un vice caché » ce dont il résultait que la société Airwell, fabricant-vendeur des pompes à chaleur défectueuses, était réputée connaître le vice dont ces dernières étaient affectées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé l'article L. 124-5 du code des assurances ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QU'en toute hypothèse, lorsque la garantie est déclenchée par la réclamation, l'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie ; que pour condamner la compagnie Axa à garantir la société Airwell, la cour d'appel a énoncé qu'il ne ressortait d'aucune pièce du dossier que celle-ci connaissait l'existence du vice de fabrication avant la conclusion du contrat d'assurance ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait par ailleurs que la société Airwell était intervenue à de multiples reprises pour tenter de remédier aux dysfonctionnements en série constatés sur la pompe à chaleur achetée par la société Prigent mais aussi par d'autres sociétés de la même commune et qu'elle avait même procédé, sans succès, au remplacement des compresseurs fabriqués par la société Danfoss ce dont il résultait que la société Airwell était parfaitement informée, au jour de la souscription du contrat d'assurance auprès de la compagnie Axa, du fait que la cause des désordres constatés tenait à un défaut de fabrication, la cour d'appel a violé l'article L. 124-5 du code des assurances ;

3°) ALORS ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le contrat d'assurance étant un contrat aléatoire, la garantie n'est pas due lorsque l'assuré savait, au moment de la souscription du contrat, qu'un sinistre de nature à engager sa responsabilité était survenu ; qu'au cas d'espèce, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 124-5 du code des assurances la Cour d'appel qui a condamné la compagnie Axa à garantir la société Airwell après avoir elle-même constaté « qu'à la date de la souscription de la police d'assurance, la société Airwell était parfaitement informée des dysfonctionnements [affectant les pompes à chaleur] », ce dont il se déduisait que la société Airwell savait, à la date de la souscription du contrat, qu'un sinistre susceptible de lui être imputé était survenu.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La société XL Insurance, venant aux droits de la compagnie Axa Corporate Solutions, fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à garantir « la liquidation judiciaire de la société Airwell », et la société Coria des condamnations prononcées à leur encontre ;

ALORS D'UNE PART QUE l'attestation d'assurance et la note de couverture suffisent à permettre de déterminer l'objet, la durée et l'étendue de la garantie ; qu'au cas d'espèce, pour établir que le contrat souscrit par la société Airwell garantissait uniquement les conséquences pour les tiers des incidents afférents aux produits livrés par l'assuré, et ne pouvait donc couvrir les obligations de la société Airwell à l'égard de ses cocontractants au titre de la garantie des vices cachés, la compagnie produisait aux débats l'attestation d'assurance et la note de couverture ; qu'en affirmant que ces documents étaient impropres à faire la preuve de ce que lesdites franchises avaient été portées à la connaissance des assurés, la Cour d'appel a violé les articles L. 112-2 et L. 112-3 du code des assurances ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'attestation d'assurance et la note de couverture suffisent à permettre de déterminer l'objet, la durée et l'étendue de la garantie ; qu'au cas d'espèce, pour justifier de l'application des franchises prévues au contrat d'assurance, la compagnie Axa produisait aux débats l'attestation d'assurance et la note de couverture faisant état des franchises contractuelles de 5.000 € pour les dommages matériels et de 50.000 € pour les dommages immatériels ; qu'en affirmant que ces documents étaient impropres à faire la preuve de ce que lesdites franchises avaient été portées à la connaissance des assurés, la Cour d'appel a violé les articles L. 112-2 et L. 112-3 du code des assurances.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 03 décembre 2020


Publications
Proposition de citation: Cass. Civ. 2e, 07 jui. 2022, pourvoi n°21-10560

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Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Formation : Chambre civile 2
Date de la décision : 07/07/2022
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21-10560
Numéro NOR : JURITEXT000046056375 ?
Numéro d'affaire : 21-10560
Numéro de décision : 22200779
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2022-07-07;21.10560 ?
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