LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 juillet 2022
Cassation
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 840 F-D
Pourvoi n° Y 20-23.193
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [X].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 novembre 2020.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022
Mme [P] [X], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 20-23.193 contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association familiale du Crès, établissement multi-accueil [3], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [X], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de l'association familiale du Crès, établissement multi-accueil [3], après débats en l'audience publique du 25 mai 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 30 octobre 2019), Mme [X] a été engagée par l'association familiale du Crès, en qualité d'agent d'entretien, suivant contrat unique d'insertion relevant du secteur non marchand du 22 décembre 2012 et contrat d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée jusqu'au 21 octobre 2013.
2. Contestant le non-renouvellement de son contrat, elle a saisi la juridiction prud'homale le 5 décembre 2013.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La salariée fait grief à l'arrêt attaqué de la débouter de l'intégralité de ses demandes tendant à faire juger que la rupture de son contrat de travail à durée déterminée était intervenue aux torts de l'employeur et à le condamner à lui payer, sur le fondement de l'article L. 1243-4 du code du travail, une certaine somme à titre de dommages-intérêts correspondant aux salaires dus jusqu'au terme initial du contrat de travail, alors « que la vérification d'écriture doit être faite au vu de l'original de l'écrit contesté ; que pour qualifier de douteux le document produit par Mme [X] portant renouvellement du contrat unique d'insertion et d'accompagnement dans l'emploi, la cour d'appel a procédé à une vérification des écritures par comparaison de la copie du document produit par la salariée avec d'une part, la copie de l'attestation de la présidente de l'association et d'autre part, le certificat de travail et l'avenant signés par la directrice de la structure, pour en déduire que les signatures étaient différentes ; qu'en statuant ainsi et en procédant à une vérification d'écriture à partir d'une copie et non l'original de l'attestation de la présidente de l'association qui faisait valoir qu'elle était seule habilitée à engager ou à promettre d'engager du personnel au nom de l'Association et qu'elle n'avait donné aucune délégation de signature de ce chef, ce dont il suit également que la comparaison avec la signature de Mme [R] était inopérante, la cour d'appel a violé les articles 287 et 288 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
4. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il fait valoir que la salariée n'a pas soutenu que la vérification d'écriture devait être faite au vu de l'original de l'écrit contesté.
5. Cependant le moyen est de pur droit.
6. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 287 et 288 du code de procédure civile :
7. Il résulte de ces textes que la vérification d'écriture doit être faite au vu de l'original de l'écrit contesté.
8. Pour dire que la signature figurant sur l'écrit contesté n'est celle, ni de la présidente, ni de la directrice de l'association, l'arrêt procède à une comparaison d'une copie de cet écrit avec, d'une part, la signature figurant sur une attestation de la présidente et, d'autre part, un avenant signé par la directrice.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne l'association familiale du Crès aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association familiale du Crès à payer à la SCP Bauer-Violas, Fexchottes-Desbois et Sebagh la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour Mme [X]
Mme [P] [X] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'intégralité de ses demandes tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail à durée déterminée était intervenue aux torts de l'Association Crèche [3] et la voir condamnée à lui payer, sur le fondement de l'article L. 1243-4 du code du travail, la somme de 10 332,29 € nets à titre de dommages et intérêts correspondant aux salaires dus jusqu'au terme initial du contrat de travail,
1°ALORS QUE la vérification d'écriture doit être faite au vu de l'original de l'écrit contesté ; que pour qualifier de douteux le document produit par Mme [X] portant renouvellement du contrat unique d'insertion et d'accompagnement dans l'emploi, la cour d'appel a procédé à une vérification des écritures par comparaison de la copie du document produit par la salariée avec d'une part, la copie de l'attestation de la présidente de l'association et d'autre part, le certificat de travail et l'avenant signés par la directrice de la structure, pour en déduire que les signatures étaient différentes ; qu'en statuant ainsi et en procédant à une vérification d'écriture à partir d'une copie et non l'original de l'attestation de la présidente de l'association qui faisait valoir qu'elle était seule habilitée à engager ou à promettre d'engager du personnel au nom de l'Association et qu'elle n'avait donné aucune délégation de signature de ce chef, ce dont il suit également que la comparaison avec la signature de Mme [R] était inopérante, la cour d'appel a violé les articles 287 et 288 du code de procédure civile,
2° ALORS QUE le juge est tenu de motiver sa décision et de répondre aux moyens des conclusions des parties de nature à influer sur la solution du litige ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen des conclusions d'appel de Mme [X] (notamment, p. 6, § 4) par lequel elle faisait valoir que l'argument, selon lequel seul le Conseil d'Administration détenait le pouvoir de valider l'embauche d'un salarié et d'autoriser le renouvellement, n'était pas probant dès lors que l'employeur ne produisait pas la délibération ayant autorisé son embauche en 2012, la cour d'appel a violé 455 du code de procédure civile.