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29/06/2022 | FRANCE | N°21-12654

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 juin 2022, 21-12654


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 juin 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 780 F-D

Pourvoi n° P 21-12.654

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 JUIN 2022

La société JSA, société d'exerc

ice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 5], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Cent...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 juin 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 780 F-D

Pourvoi n° P 21-12.654

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 JUIN 2022

La société JSA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 5], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Centre d'analyses environnementales, a formé le pourvoi n° P 21-12.654 contre l'arrêt rendu le 4 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [P] [U], domiciliée [Adresse 3], [Localité 6],

2°/ à l'AGS CGEA Île-de-France Est, dont le siège est [Adresse 1], [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société JSA, ès qualités, après débats en l'audience publique du 17 mai 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 novembre 2020), Mme [U] a été engagée par la société Centre d'analyses environnementales (la société CAE) en qualité de responsable des ressources humaines à compter du 1er août 2005.

2. La société Endetec, filiale du groupe Veolia, qui détenait la totalité des actions composant le capital de la société CAE, a cédé ces actions le 1er avril 2016 à la société Afenix. Les sociétés cédante et cessionnaire ont conclu une convention d'engagement social, annexe au contrat de cession, prévoyant, sous certaines conditions, une indemnité complémentaire de rupture au profit des salariés de la société CAE qui pourraient être amenés à quitter les effectifs de cette société.

3. Convoquée le 11 mai 2016 à un entretien préalable fixé au 26 mai, et mise à pied à titre conservatoire, la salariée a été licenciée pour faute grave le 2 juin 2016.

4. Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, elle a saisi la juridiction prud'homale.

5. Par jugement du 2 mai 2018, le tribunal de commerce a prononcé le redressement judiciaire de la société CAE, procédure convertie en liquidation judiciaire le 26 septembre 2018, la société JSA étant désignée en qualité de liquidateur.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. Le liquidateur judiciaire de la société CAE fait grief à l'arrêt de fixer la créance de la salariée au passif de la liquidation judiciaire de cette société à une certaine somme à titre d'indemnité complémentaire de rupture « Clause Veolia », alors « que la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société [CAE] conclu entre les sociétés Endetec et Afenix stipule qu' « en complément de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou de rupture conventionnelle, le cessionnaire s'engage à verser au salarié une indemnité spécifique complémentaire de rupture » ; qu'il résulte de ces termes clairs et précis que la société Cae n'était pas le cessionnaire ayant pris l'engagement de verser l'indemnité susvisée mais la société cédée ; qu'à la supposer donc due à la salariée, cette indemnité ne pouvait pas être fixée au passif de la société CAE ; que pourtant, écartant le moyen qui soutenait que la demande de la salariée aurait dû être formée contre la société cessionnaire Afenix, la cour d'appel a retenu que la demande de la salariée, dirigée contre son employeur dont la société Afenix avait acquis la totalité des parts sociales, était recevable et que la convention d'engagement social visait expressément la qualité d'employeur de la société Afenix en prévoyant que le cessionnaire était tenu de ses obligations du fait du contrat de travail qui le liait ou l'avait lié au salarié concerné, du versement de l'ensemble des éléments financiers dus au salarié concerné à titre légal, conventionnel ou contractuel au titre du présent engagement et de devoir assumer sa qualité d'employeur à l'égard du ou des salariés concernés devant les tribunaux compétents saisis par le ou les salari(és) concernés ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société CAE, a violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

7. Après avoir retenu que le licenciement de la salariée pour faute grave était sans cause réelle et sérieuse et que cette dernière avait droit au versement de l'indemnité complémentaire de rupture prévue par la convention d'engagement social conclue entre la société Entedec et la société Afenix, l'arrêt retient que la demande de la salariée dirigée contre son employeur, la société CAE, est recevable et fixe au passif de cette dernière la créance de la salariée au titre de cette indemnité à une certaine somme.

8. En statuant ainsi, alors que la convention d'engagement social conclue entre la société cédante et la société cessionnaire ne mettait le versement de l'indemnité complémentaire de rupture qu'à la charge de cette dernière société, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif relatif à la garantie par l'UNEDIC, délégation AGS CGEA d'Île-de-France Est en ce qu'il comprend la créance de 45 243,75 euros au titre de l'indemnité complémentaire de rupture.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe au passif de la société Centre d'analyses environnementales la créance de Mme [U] à la somme de 45 243,75 euros au titre de l'indemnité complémentaire de rupture « Clause Veolia » et dit que cette somme sera garantie par l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Île-de-France Est, l'arrêt rendu le 4 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société JSA, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Centre d'analyses environnementales ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société JSA, ès qualités

La société Jsa, ès qualité de mandataire liquidateur de la société Cae, fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé la créance de Mme [U] au passif de la liquidation judiciaire de la société Cae à la somme de 45 243,75 euros à titre d'indemnité complémentaire de rupture « Clause Veolia ».

1° ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société [Cae] conclu entre les sociétés Endetec et Afenix stipule que « le cessionnaire confirme son engagement de mettre en place un dispositif spécifique d'accompagnement des salariés du Cae qui pourraient être amenés à quitter les effectifs dans le cadre ci-après défini : - Salariés éligibles à ce dispositif : salariés du Cae en contrat de travail à durée indéterminée présents à la date effective de conclusion du contrat de cession des actions de la société Cae et dont la rupture de leur contrat du travail serait engagée dans le délai de 18 mois suivant cette date de cession. - Modes de rupture donnant accès à cette disposition : tous les modes de rupture du contrat de travail à l'exclusion des licenciements pour motif personnels, des démissions et des départs à la retraite. - Montant de l'indemnité spécifique complémentaire : en complément de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou de rupture conventionnelle, le cessionnaire s'engage à verser au salarié une indemnité spécifique complémentaire de rupture portant l'indemnité totale de rupture à 2,5 fois ladite indemnité légale ou conventionnelle dans la limite de deux plafonds de sécurité sociale » ; qu'il résulte de ces termes clairs et précis que l'indemnité spécifique complémentaire de rupture n'est versée qu'aux salariés licenciés pour un motif non inhérent à leur personne ; qu'en retenant que, dans la mesure où le licenciement pour faute grave était jugé non fondé, la salariée pouvait prétendre au versement de cette indemnité, cependant que le licenciement pour faute grave jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse conserve sa qualification de licenciement pour motif personnel, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société Cae, a violé principe susvisé.

2° ALORS, en tout cas, QUE la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société [Cae] conclu entre les sociétés Endetec et Afenix stipule qu' « en complément de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou de rupture conventionnelle, le cessionnaire s'engage à verser au salarié une indemnité spécifique complémentaire de rupture » ; qu'il résulte de ces termes clairs et précis que la société Cae n'était pas le cessionnaire ayant pris l'engagement de verser l'indemnité susvisée mais la société cédée ; qu'à la supposer donc due à la salariée, cette indemnité ne pouvait pas être fixée au passif de la société Cae ; que pourtant, écartant le moyen qui soutenait que la demande de la salariée aurait dû être formée contre la société cessionnaire Afenix, la cour d'appel a retenu que la demande de la salariée, dirigée contre son employeur dont la société Afenix avait acquis la totalité des parts sociales, était recevable et que la convention d'engagement social visait expressément la qualité d'employeur de la société Afenix en prévoyant que le cessionnaire était tenu de ses obligations du fait du contrat de travail qui le liait ou l'avait lié au salarié concerné, du versement de l'ensemble des éléments financiers dus au salarié concerné à titre légal, conventionnel ou contractuel au titre du présent engagement et de devoir assumer sa qualité d'employeur à l'égard du ou des salariés concernés devant les tribunaux compétents saisis par le ou les salari(és) concernés ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la convention d'engagement social annexe au contrat de cession d'actions de la société Cae, a violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-12654
Date de la décision : 29/06/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jui. 2022, pourvoi n°21-12654


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.12654
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