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15/06/2022 | FRANCE | N°19-20608

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 juin 2022, 19-20608


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 718 F-D

Pourvoi n° T 19-20.608

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

M. [P] [N], domicilié [Adresse 2]

, a formé le pourvoi n° T 19-20.608 contre l'arrêt rendu le 29 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'oppos...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 718 F-D

Pourvoi n° T 19-20.608

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JUIN 2022

M. [P] [N], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 19-20.608 contre l'arrêt rendu le 29 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Orly Flight Services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à la société Alyzia, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à la société Alyzia, Orly Ramp, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

4°/ à la société Bally MJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de mandataire liquidateur de la société Orly Flight Services,

défenderesses à la cassation.

Les sociétés Alyzia et Alizia Orly Ramp ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [N], de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer et Bouniol-Brochier, avocat de la société [Localité 4] Flight Services, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés Alyzia et Alyzia [Localité 4] Ramp, après débats en l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 mai 2019), M. [N], salarié de la société [Localité 4] Flight Services (la société OFS), a été informé le 22 mai 2012 du transfert de son contrat de travail à la société Alyzia à compter du 29 mai 2012, en application de l'annexe VI de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale, dans sa rédaction issue de l'avenant n° 65 du 11 juin 2002.

2. Par lettre du 26 juillet 2012 de la société Alyzia Orly Ramp (la société A.O.P), filiale de la société Alyzia, le salarié a été informé du transfert de son contrat de travail en son sein à compter du 1er juillet 2012 .

3. Contestant la régularité de ces transferts successifs, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

4. A la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société OFS par jugement du 31 décembre 2019, le salarié a appelé en la cause le liquidateur judiciaire, la société Bally MJ.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux premières branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt, après avoir confirmé le chef du jugement ayant jugé que le transfert de son contrat de travail de la société Alyzia à sa filiale la société A.O.P effectif au 1er juillet 2012 s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse par la société Alyzia, d'infirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le montant des condamnations mises à la charge de la société Alyzia au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité conventionnelle de licenciement et statuant à nouveau de condamner la société Alyzia à lui verser, d'une part, diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013 et, d'autre part, une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, avec intérêt au taux légal à compter du jugement entrepris, et de le débouter de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement dirigée contre la société Alyzia, alors « que l'ancienneté à prendre en considération pour l'appréciation des droits du salarié, dont le contrat de travail a été transféré conventionnellement de manière irrégulière et qui est effectivement passé au service du repreneur, est l'ancienneté acquise dès l'embauche ; que c'est cette ancienneté qui doit être prise en compte pour le calcul des sommes dont le salarié est créancier à raison de son licenciement par le repreneur ; qu'en jugeant au contraire, pour minorer le montant des indemnités dues au salarié au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et débouter le salarié de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement, que la relation de travail qui s'est nouée entre le salarié et la société Alyzia, en l'absence de transfert régulier, avait duré à peine plus d'un mois, du fait de l'absence de reprise d'ancienneté, la cour d'appel a violé l'annexe VI de la convention collective des entreprises de transport aérien-personnel au sol du 11 juin 2002, l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

7.Ayant retenu, par des motifs qui ne sont pas contestés, d'une part, qu'en l'absence d'accord exprès du salarié, son contrat de travail n'avait pas été transféré à la société Alyzia, en sorte que la rupture de ce contrat de travail par la société OFS s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'autre part, qu'une nouvelle relation de travail s'était, de fait, nouée entre la société Alyzia et le salarié à compter du 29 mai 2012, en l'absence de transfert du contrat de travail existant avec le précédent employeur, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le salarié ne pouvait prétendre à la reprise de l'ancienneté acquise au sein de la société OFS.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

9. Les sociétés Alyzia et A.O.P font grief à l'arrêt de condamner la société Alyzia à verser au salarié des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents et des dommages-intérêts pour licenciement abusif alors « que lorsque l'article L. 1224-1 du code du travail est applicable, le changement d'employeur s'opère au jour du transfert de l'entité économique dont relève le salarié, c'est-à-dire à celui auquel le nouvel exploitant est en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée ; que pour dire que la société Alyzia avait mis fin au contrat de travail du salarié de manière irrégulière, cette rupture devant s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que le transfert du contrat de travail de la société Alyzia à sa filiale AOP ne relevait pas de l'article L. 1224-1 et que rien n'établissait que le salarié avait expressément consenti à ce transfert ; que pour dire que le transfert du contrat de travail ne relevait pas de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a estimé que la restructuration par laquelle la société Alyzia a transféré l'activité de ses établissements, notamment celui d'[Localité 4], à différentes filiales, chacune spécialisée dans une des branches de l'assistance en escale (piste, passage, trafic) et dédiée à un site, [Localité 4] ou [Localité 5] était intervenue antérieurement au transfert du contrat de travail ; que pour retenir l'antériorité de la date du transfert de l'entité économique par rapport à la date de transfert du contrat de travail au cas présent, la cour d'appel s'est bornée à se référer aux extraits k-bis produits au débat, établissant que la date de création des filiales remontait à décembre 2011, au fait que la société Alyzia avait informé le comité central d'entreprise le 9 janvier 2012 du projet de réorganisation de ses activités et du transfert des salariés au sein des différentes filiales et au fait que la société Alyzia ne produisait aucune pièce pour justifier que le transfert d'activité aux filiales ne serait intervenu que postérieurement au 29 mai 2012, date du transfert du contrat de travail à la société Alyzia ; qu'en se déterminant de la sorte, en prenant en compte des éléments inopérants et sans rechercher, ce qui relevait de son office, la date à laquelle la société AOP était effectivement en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1224-1 et L. 1235-3 du code du travail.»

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1224-1 et L. 1235-3 du code du travail :

10. En application du premier de ces textes, le transfert d'une entité économique autonome s'opère à la date à laquelle le nouvel exploitant est mis en mesure d'assurer la direction de cette entité.

11. Après avoir constaté que la société Alyzia avait restructuré ses activités et transféré l'activité de ses établissements, notamment celui d'[Localité 4], à différentes filiales, chacune spécialisée dans une des branches de l'assistance en escale et dédiée à un site, [Localité 4] ou [Localité 5], l'arrêt retient que cette restructuration est cependant intervenue antérieurement au transfert du contrat de travail. Il constate qu'il résulte en effet des extraits k-bis produits au débat que ces filiales ont été créées en décembre 2011 et qu'il est par ailleurs établi que dès le 9 janvier 2012, la société Alyzia avait informé le comité central d'entreprise du projet de réorganisation de ses activités et du transfert des salariés au sein des différentes filiales. Relevant que la société Alyzia ne produit aucune pièce pour justifier que le transfert d'activité aux filiales ne serait intervenu que postérieurement au 29 mai 2012, date du transfert du contrat de travail du salarié à la société Alyzia, l'arrêt en déduit que le transfert du contrat de travail de la société Alyzia à sa filiale A.O.P, ne relève pas de l'article L. 1224-1 du code du travail et que l'accord du salarié était nécessaire.

12. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, tirés de la seule antériorité de la création de la filiale et de l'information du comité central d'entreprise d'un projet de réorganisation, sans rechercher la date à laquelle la société filiale était effectivement en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

13. La cassation sur le moyen unique du pourvoi incident emporte la cassation des chefs de dispositif relatifs à la condamnation de la société Alyzia au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi incident, la Cour :

REJETTE le pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Alyzia à verser à M. [N] les sommes de 1 832,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 183,27 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013 et la somme de 500 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et en ce qu'il condamne la société Alyzia à payer à M. [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 29 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. [N], demandeur au pourvoi principal.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, après avoir confirmé le chef du jugement ayant jugé que le transfert du contrat de travail de M. [N] de la société Alyzia à sa filiale la société AOP effectif au 1er juillet 2012 s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse par la société Alyzia, d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qui concerne le montant des condamnations mises à la charge de la société Alyzia au titre de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité conventionnelle de licenciement et statuant à nouveau d'avoir condamné la société Alyzia à verser à M. [N], d'une part, les sommes de 1 832,74 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 183,27 € au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013 et, d'autre part, la somme de 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif, avec intérêt au taux légal à compter du jugement entrepris, et d'avoir débouté M. [N] de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement dirigée contre la société Alyzia ;

AUX MOTIFS QUE Sur les demandes liées à l'irrégularité des transferts Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (?) Sur l'indemnité due par la société Alyzia il n'est pas débattu qu'une relation de travail s'est nouée entre la société Alyzia et M. [N] à compter du 29 mai 2012, caractérisée par le paiement d'une rémunération et l'existence d'un lien de subordination juridique et la fourniture d'une prestation de travail ; que cette relation de travail s'est cependant nouée en l'absence de transfert du contrat de travail existant avec le précédent employeur ; que dès lors, le salarié ne peut prétendre à la reprise d'ancienneté qui aurait été attachée au transfert ; qu'aux termes de l'article L. 1235-5 du code du travail en sa version applicable à l'espèce, si le salarié a moins de deux ans d'ancienneté, il a droit à une indemnisation à hauteur de son préjudice ; que la convention collective des entreprises de transport aérien – personnel au sol ne prévoit aucune disposition particulière à ce titre ; que le salarié percevait un salaire mensuel de 1 832,74 euros au 1er juillet 2012, lors de sa rupture avec la société Alyzia ; que la relation de travail entre le salarié et la société Alyzia a duré à peine plus d'un mois, période à l'issue de laquelle une relation de travail s'est immédiatement nouée avec un troisième employeur ; que dans ce contexte, il sera alloué à M. [N] une indemnité de 500 € en réparation de son préjudice, avec intérêt au taux légal à compter du jugement déféré, en application de l'article 1231-7 du code civil ; que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ; Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement l'article 20 de la convention collective des entreprises de transport aérien - personnel au sol prévoit qu'en cas de licenciement hors faute grave et faute lourde, les salariés disposant d'une ancienneté de 1 an à 5 ans bénéficient d'une indemnité égale à 1/5 de mois par année de présence à compter de la date d'entrée dans l'entreprise ; (?) Sur l'indemnité due par la société Alyzia M. [N] ne justifie pas d'une ancienneté lui ouvrant droit à indemnité au moment de la rupture de son contrat de travail avec la société Alyzia ; qu'il sera débouté de sa demande à l'encontre de la société Alyzia ; que le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs ; que Sur l'indemnité compensatrice de préavis l'article 15 de l'annexe III de la convention collective applicable disposant que sauf cas de force majeure ou de faute grave, la durée du préavis est fixée à 1 mois en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur si le salarié justifie d'une ancienneté de moins de 2 ans et à 2 mois si le salarié justifie d'une ancienneté d'au moins 2 ans ; (?) que Sur l'indemnité due par la société Alyzia le transfert irrégulier du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit au paiement de son préavis correspondant à 1 mois de salaire ; que la société Alyzia sera condamnée à verser la somme de 1 832,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 183,27 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013 ;

que le jugement sera infirmé de ce chef ;

1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; qu'en minorant le montant des indemnités dues à M. [N] au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement, en se fondant sur une ancienneté du salarié d'un mois seulement, alors même que le salarié comme la société Alyzia reconnaissaient expressément que l'ancienneté acquise par M. [N], et qui était de 4 ans au moment de son transfert à la société AOP, avait été reprise lors du transfert conventionnel du contrat de travail, fût-il irrégulier, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge est tenu, en toute circonstance, de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en minorant le montant des indemnités dues à M. [N] au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement, en se fondant sur une ancienneté du salarié d'un mois seulement, sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré du caractère nouveau de la relation de travail qui s'était noué en l'absence de transfert conventionnel régulier, excluant toute reprise d'ancienneté du salarié, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°) ALORS QUE l'ancienneté à prendre en considération pour l'appréciation des droits du salarié, dont le contrat de travail a été transféré conventionnellement de manière irrégulière et qui est effectivement passé au service du repreneur, est l'ancienneté acquise dès l'embauche ; que c'est cette ancienneté qui doit être prise en compte pour le calcul des sommes dont le salarié est créancier à raison de son licenciement par le repreneur ; qu'en jugeant au contraire, pour minorer le montant des indemnités dues à M. [N] au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et débouter le salarié de sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement, que la relation de travail qui s'est nouée entre le salarié et la société Alyzia, en l'absence de transfert régulier, avait duré à peine plus d'un mois, du fait de l'absence de reprise d'ancienneté, la cour d'appel a violé l'annexe VI de la convention collective des entreprises de transport aérien-personnel au sol du 11 juin 2002, l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1134 devenu 1103 du code civil.

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour les sociétés Alyzia et Alyzia [Localité 4] Ramp, demanderesses au pourvoi incident.

Il est fait grief à l'arrêt attaque d'AVOIR condamné la Société ALYZIA à verser à Monsieur [N] les sommes de 1.832,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis avec 183,27 euros au titre des congés payés afférents et la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur le transfert du contrat de travail de la société Alyzia à la société Alyzia [Localité 4] Ramp / L'article L. 1224-1 du code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. Cette disposition s'applique à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise même en l'absence d'un lien de droit entre les employeurs successifs. Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuite un objectif propre ; Dès lors que les conditions de l'article L. 1224-1, qui est d'ordre public et s'impose aux parties, sont remplies, le contrat de travail du salarié se poursuit de plein droit avec le nouvel employeur. Il est constant que la société Alyzia a restructuré ses activités et transféré l'activité de ses établissements, notamment celui d'[Localité 4], à différentes filiales, chacune spécialisée dans une des branches de l'assistance en escale (piste, passage, trafic) et dédiée à un site, [Localité 4] ou [Localité 5]. Cette restructuration est cependant intervenue antérieurement au transfert du contrat de travail. Il résulte en effet des extraits k-bis produits au débat que ces filiales ont été créées en décembre 2011. Il est par ailleurs établi que dès le 9 janvier 2012, la société Alyzia a informé le comité central d'entreprise du projet de réorganisation de ses activités et du transfert des salariés au sein des différentes filiales. La société Alyzia ne produit aucune pièce pour justifier que le transfert d'activité aux filiales ne serait intervenu que postérieurement au 29 mai 2012, date du transfert du contrat de travail de M. [N] à la société Alyzia. Dès lors, le transfert du contrat de travail de M. [N] de la société Alyzia à sa filiale AOP ne relève pas de l'article L. 1224-1 du code du travail et l'accord du salarié était nécessaire. Or, l'acceptation par le salarié du transfert de son contrat de travail ne saurait résulter de la simple poursuite du travail et aucun élément ne démontre que le salarié y a expressément consenti. Dès lors, le transfert est irrégulier. La société Alyzia ayant mis fin au contrat de travail de manière irrégulière, cette rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il convient donc de confirmer le jugement de ce chef. ».

ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER ADOPTÉS, QUE « le transfert conventionnel du contrat de travail de Monsieur [N] de la société OFS au sein de la société SAS LYZIA effectif au 29/05/2012, pour être intervenu sans l'accord exprès du salarié, s'analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse par la société OFS, dont il est bien-fondé à solliciter l'indemnisation ; que le transfert du contrat de travail de Monsieur [N] de la société SAS ALYZIA à sa filiale la société AOP effectif au 1/07/2012, découlant du premier transfert irrégulier, s'analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse par la société SAS ALYZIA, dont il est bien-fondé à solliciter l'indemnisation » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE lorsque l'article L. 1224-1 du code du travail est applicable, le changement d'employeur s'opère au jour du transfert de l'entité économique dont relève le salarié, c'est-à-dire à celui auquel le nouvel exploitant est en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée ; qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, c'est par le seul effet de la loi que les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise, cette transmission s'imposant aux salariés comme à l'employeur ; qu'il en résulte que le fait que le cédant et le cessionnaire aient pu fixer la date du transfert du contrat de travail à une date postérieure à la date du transfert de l'entité économique ne peut justifier la condamnation du premier au titre d'une rupture injustifiée du contrat de travail ; que pour dire que la société ALYZIA avait mis fin au contrat de travail de Monsieur [N] de manière irrégulière, cette rupture devant dès lors s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que le transfert du contrat de travail de la société ALYZIA à sa filiale AOP ne relevait pas de l'article L. 1224-1 et que rien n'établissait que Monsieur [N] avait expressément consenti à ce transfert ; que pour dire que le transfert du contrat de travail ne relevait pas de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a estimé que la restructuration par laquelle la société ALYZIA a transféré l'activité de ses établissements, notamment celui d'[Localité 4], à différentes filiales, chacune spécialisée dans une des branches de l'assistance en escale (piste, passage, trafic) et dédiée à un site, [Localité 4] ou [Localité 5] est intervenue antérieurement au transfert du contrat de travail ; qu'en se déterminant de la sorte, par des motifs dont le seul objet était de prétendument caractériser que le transfert du contrat de travail était intervenu après le transfert effectif de l'entité économique, constatation dont elle ne pouvait déduire que le cédant devait être considéré comme responsable d'une rupture du contrat de travail à ses torts, la cour d'appel a violé les articles L. 1224-1 et L. 1235-3 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE lorsque l'article L. 1224-1 du code du travail est applicable, le changement d'employeur s'opère au jour du transfert de l'entité économique dont relève le salarié, c'est-à-dire à celui auquel le nouvel exploitant est en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée ; que pour dire que la société ALYZIA avait mis fin au contrat de travail de Monsieur [N] de manière irrégulière, cette rupture devant s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que le transfert du contrat de travail de la société ALYZIA à sa filiale AOP ne relevait pas de l'article L. 1224-1 et que rien n'établissait que Monsieur [N] avait expressément consenti à ce transfert ; que pour dire que le transfert du contrat de travail ne relevait pas de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel a estimé que la restructuration par laquelle la société ALYZIA a transféré l'activité de ses établissements, notamment celui d'[Localité 4], à différentes filiales, chacune spécialisée dans une des branches de l'assistance en escale (piste, passage, trafic) et dédiée à un site, [Localité 4] ou [Localité 5] était intervenue antérieurement au transfert du contrat de travail ; que pour retenir l'antériorité de la date du transfert de l'entité économique par rapport à la date de transfert du contrat de travail au cas présent, la cour d'appel s'est bornée à se référer aux extraits k-bis produits au débat, établissant que la date de création des filiales remontait à décembre 2011, au fait que la société ALYZIA avait informé le comité central d'entreprise le 9 janvier 2012 du projet de réorganisation de ses activités et du transfert des salariés au sein des différentes filiales et au fait que la société ALYZIA ne produisait aucune pièce pour justifier que le transfert d'activité aux filiales ne serait intervenu que postérieurement au 29 mai 2012, date du transfert du contrat de travail à la société ALYZIA ; qu'en se déterminant de la sorte, en prenant en compte des éléments inopérants et sans rechercher, ce qui relevait de son office, la date à laquelle la Société AOP était effectivement en mesure d'assurer la direction de l'entité transférée, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1224-1 et L. 1235-3 du code du travail ;

ALORS, ENCORE SUBSIDIAIREMENT, QUE celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que pour dire que le transfert du contrat de travail de Monsieur [N] ne relevait pas de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d'appel s'est bornée à retenir que la société ALYZIA ne produisait aucune pièce permettant de justifier que le transfert d'activité aux filiales serait intervenu postérieurement à la date du transfert du contrat de travail à la société ALYZIA ; qu'en statuant de la sorte, cependant qu'il incombait au salarié, qui prétendait que le transfert de son contrat de travail de la société ALYZIA à l'une de ses filiales était irrégulier du fait de son caractère tardif et en déduisait un droit à indemnisation de prouver cette irrégularité, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 ;

ALORS, ENFIN ET ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT QU' en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, c'est par le seul effet de la loi que les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise, cette transmission s'imposant aux salariés comme à l'employeur ; que l'irrégularité du transfert conventionnel opéré entre la société OFS et la société ALYZIA ne pouvait en soi faire échec à un transfert du contrat de travail postérieur entre la société ALYZIA et sa filiale, la société AOP, dès lors que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail étaient réunies ; qu'en supposant les motifs des premiers juges adoptés, la cour d'appel a violé les articles L. 1224-1 et L. 1235-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-20608
Date de la décision : 15/06/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jui. 2022, pourvoi n°19-20608


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.20608
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