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01/06/2022 | FRANCE | N°20-20957

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 01 juin 2022, 20-20957


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juin 2022

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 462 F-D

Pourvoi n° T 20-20.957

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUIN 2022

1°/ la société Ekip, dont le siège est [Adresse 2]

, représentée par M. [K] [F], agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Nina Félix,

2°/ la société Nina-Félix, so...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juin 2022

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 462 F-D

Pourvoi n° T 20-20.957

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUIN 2022

1°/ la société Ekip, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [K] [F], agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Nina Félix,

2°/ la société Nina-Félix, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ Mme [T] [R],

4°/ M. [X] [N],

domiciliés tous deux bar [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° T 20-20.957 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2020 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige les opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], dont le siège est [Adresse 3], représenté par son syndic la société Citya Carnot Syndgest, domicilié [Adresse 5],

2°/ à M. [Z] [C], domicilié [Adresse 1],

3°/ à la société Dufourcet, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Ekip, ès qualités, de la société Nina-Félix, de Mme [R] et de M. [N], de Me Balat, avocat de M. [C], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Dufourcet, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat du syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], après débats en l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. David, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 19 mars 2020), le 17 octobre 2013, la société civile immobilière Dufourcet (la SCI), propriétaire d'un local à usage commercial dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, l'a donné à bail à la société Nina Félix pour y exploiter un fonds de café, bar, jeux et concerts.

2. A raison d'infiltrations d'eau dans le local loué, une expertise a été ordonnée en référé le 30 juin 2015.

3. Les 19 et 21 septembre 2017, la société Nina Félix a assigné la SCI, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] (le syndicat des copropriétaires) et M. [C], propriétaire de l'immeuble mitoyen, en suspension du paiement des loyers à compter de juillet 2017 et en condamnation des trois défendeurs à réaliser les travaux de réfection préconisés par l'expert ainsi qu'à l'indemniser de sa perte d'exploitation et de son préjudice commercial.

4. Le 4 septembre 2018, la société Nina Félix a été placée en liquidation judiciaire, la société Ekip étant désignée en qualité de liquidateur.

5. Mme [R] et M. [N], associés de la société Nina Félix, sont intervenus à l'instance aux fins d'indemnisation de leurs pertes de revenus consécutives à la liquidation judiciaire.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. La société Ekip, la société Nina Félix, Mme [R] et M. [N] font grief à l'arrêt de rejeter la demande au titre du préjudice commercial, alors :

« 1°/ que la partie qui, dans le dispositif de ses conclusions devant la cour d'appel, demande l'infirmation partielle du jugement de première instance du chef des demandes dont elle a été déboutée et la confirmation du jugement pour le surplus, n'est pas tenue de réitérer expressément, dans le dispositif de ses conclusions, la demande du chef de laquelle elle a obtenu gain de cause en première instance ; qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait alloué la somme de 30 000 euros à la société Nina Félix en réparation de son préjudice commercial, par la considération que cette demande n'était pas expressément reprise au dispositif des conclusions d'appel de cette société, cependant qu'au dispositif de ces conclusions, la société Nina Félix avait expressément limité les demandes de condamnation de ses adversaires à la réparation de ses préjudices consécutifs à sa perte d'exploitation, au passif résultant de sa liquidation judiciaire et à la perte de son fonds de commerce et avait demandé la confirmation du jugement pour le surplus, ce dont il résultait qu'elle avait demandé l'infirmation partielle du jugement uniquement du chef des demandes dont elle avait été déboutée en première instance et la confirmation du jugement pour le surplus et n'était donc pas tenue de réitérer expressément dans le dispositif de ses conclusions d'appel la demande en réparation de son préjudice commercial du chef de laquelle elle avait obtenu gain de cause en première instance, la cour d'appel a violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;

2°/ que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement de première instance d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement ; qu'en conséquence, la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation partielle du jugement, est réputée s'en approprier les motifs relatifs à ce dont il est demandé la confirmation ; qu'en infirmant le jugement de première instance en ce qu'il avait alloué la somme de 30 000 euros à la société Nina Félix au titre de son préjudice commercial, par la considération que cette dernière n'aurait pas développé de moyens relatifs à cette demande dans ses conclusions d'appel, cependant que cette société qui avait sous ce rapport demandé la confirmation du jugement sans énoncer de moyens nouveaux, devait être regardée comme s'en étant approprié les motifs relatifs au préjudice commercial, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4 et 954 du code de procédure civile :

8. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense.

9. Il résulte du second que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement.

10. Pour rejeter la demande en indemnisation du préjudice commercial, l'arrêt énonce que la société Nina Félix sollicitait en appel l'indemnisation de sa perte d'exploitation, du passif résultant de sa liquidation judiciaire ainsi que de la perte de son fonds, et n'avait pas expressément repris, au dispositif de ses conclusions d'appel et dans les moyens par elle développés, la demande au titre de laquelle le tribunal lui avait alloué la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice commercial.

11. En statuant ainsi, alors que, outre les demandes indemnitaires susvisées, la société Nina Félix, d'une part, sollicitait expressément la confirmation du jugement pour le surplus et n'était, en conséquence, pas tenue de réitérer, dans le dispositif de ses conclusions, la demande en indemnisation du préjudice commercial pour laquelle elle avait obtenu gain de cause en première instance, d'autre part, à défaut d'énonciation de moyens nouveaux, était réputée s'être appropriée les motifs du jugement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la société Nina Félix de sa demande au titre du préjudice commercial alloué en première instance, l'arrêt rendu le 19 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Pau autrement composée ;

Condamne la société civile immobilière Dufourcet et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par Mme [R], M. [N], la société civile immobilière Dufourcet, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] et M. [C] et condamne la société civile immobilière Dufourcet et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], à payer à la société Ekip, prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Nina Félix, la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société l'Ekip, ès qualités, la société Nina Félix, Mme [R] et M. [N].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté la société Nina Félix de sa demande au titre du préjudice commercial ;

Alors, en premier lieu, que la partie qui, dans le dispositif de ses conclusions devant la cour d'appel, demande l'infirmation partielle du jugement de première instance du chef des demandes dont elle a été déboutée et la confirmation du jugement pour le surplus, n'est pas tenue de réitérer expressément, dans le dispositif de ses conclusions, la demande du chef de laquelle elle a obtenu gain de cause en première instance ; qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait alloué la somme de 30.000 euros à la société Nina Félix en réparation de son préjudice commercial, par la considération que cette demande n'était pas expressément reprise au dispositif des conclusions d'appel de cette société (arrêt, p. 17, § 7), cependant qu'au dispositif de ces conclusions, la société Nina Félix avait expressément limité les demandes de condamnation de ses adversaires à la réparation de ses préjudices consécutifs à sa perte d'exploitation, au passif résultant de sa liquidation judiciaire et à la perte de son fonds de commerce et avait demandé la confirmation du jugement pour le surplus, ce dont il résultait qu'elle avait demandé l'infirmation partielle du jugement uniquement du chef des demandes dont elle avait été déboutée en première instance et la confirmation du jugement pour le surplus et n'était donc pas tenue de réitérer expressément dans le dispositif de ses conclusions d'appel la demande en réparation de son préjudice commercial du chef de laquelle elle avait obtenu gain de cause en première instance, la cour d'appel a violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;

Alors, en second lieu, que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement de première instance d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement ; qu'en conséquence, la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation partielle du jugement, est réputée s'en approprier les motifs relatifs à ce dont il est demandé la confirmation ; qu'en infirmant le jugement de première instance en ce qu'il avait alloué la somme de 30.000 euros à la société Nina Félix au titre de son préjudice commercial, par la considération que cette dernière n'aurait pas développé de moyens relatifs à cette demande dans ses conclusions d'appel (arrêt, p. 17, § 7), cependant que cette société qui avait sous ce rapport demandé la confirmation du jugement sans énoncer de moyens nouveaux, devait être regardée comme s'en étant approprié les motifs relatifs au préjudice commercial, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté la société Nina Félix de sa demande au titre du préjudice d'exploitation ;

Alors, en premier lieu, que le bailleur, qui doit pendant toute la durée du contrat de bail faire toutes les réparations nécessaires autres que locatives, commet une faute en relation causale avec tout dommage consécutif à la non-exécution des réparations qui lui incombent ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait constaté que dès l'année 2014, des infiltrations d'eau étaient apparues dans le local commercial donné à bail à la société Nina Félix et que cette dernière avait – mais vainement – aussitôt entrepris des démarches judiciaires en vue de contraindre son bailleur à procéder aux réparations nécessaires pour y mettre fin (arrêt, p. 4, § 4), que le bailleur était tenu de réparer les désordres subis par la société Nina Félix du fait des infiltrations constatées et dénoncées (arrêt p. 16, § 4), et qu'au vu de ces infiltrations, la commission de sécurité et d'accessibilité de Pau avait émis le 17 juillet 2017 un avis défavorable au fonctionnement de l'établissement pour des raisons de sécurité et une mise en demeure de procéder aux réparations nécessaires dans un délai d'un mois à peine de fermeture administrative (arrêt, p. 18, § 5), à la suite duquel la société Nina Félix avait cessé toute activité dans le local commercial ; qu'il résultait de telles constatations l'existence d'un lien de causalité direct entre la non-exécution par le bailleur des travaux de réparation des infiltrations qui lui incombaient et l'impossibilité pour la société Nina Félix, locataire, d'exploiter le local donné à bail ; qu'en retenant le contraire (arrêt, p. 19, § 3), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1147 et 1151, devenus 1231-1 et 1231-4 du code civil ;

Alors, en deuxième lieu, que la cour d'appel avait constaté que dès l'année 2014, des infiltrations d'eau étaient apparues dans le local commercial donné à bail à la société Nina Félix et que cette dernière avait – mais vainement – aussitôt entrepris des démarches judiciaires en vue de contraindre la copropriété de l'immeuble situé [Adresse 3] à procéder aux réparations nécessaires pour y mettre fin (arrêt, p. 4, § 4), que le syndicat des copropriétaires était effectivement tenu de réparer les désordres subis par la société Nina Félix du fait des infiltrations constatées et dénoncées et qu'en s'abstenant de le faire, il avait commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle (arrêt p. p. 15, § 1 et 16, § 6), qu'au vu de ces infiltrations, la commission de sécurité et d'accessibilité de Pau avait émis le 17 juillet 2017 un avis défavorable au fonctionnement de l'établissement pour des raisons de sécurité et une mise en demeure de procéder aux réparations nécessaires dans un délai d'un mois à peine de fermeture administrative (arrêt, p. 18, § 5), à la suite duquel la société Nina Félix avait cessé toute activité dans le local commercial ; qu'il résultait de telles constatations l'existence d'un lien de causalité direct entre la non-exécution par le syndicat des copropriétaires des travaux de réparation des infiltrations qui lui incombaient et l'impossibilité pour la société Nina Félix d'exploiter le local pris à bail ; qu'en retenant le contraire (arrêt, p. 19, § 3), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Alors, en troisième lieu, qu'en matière contractuelle, la faute de la victime n'est une cause d'exonération totale qu'à la condition de présenter les caractères de la force majeure ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société Nina Félix, locataire, de sa demande dirigée contre son bailleur en réparation de son préjudice tenant à l'impossibilité totale d'exploiter le local pris à bail en raison des infiltrations - donc pour exonérer le bailleur de sa responsabilité contractuelle envers le preneur -, que le fait pour la société Nina Félix de n'avoir pas entrepris de démarches judiciaires après l'avis défavorable émis le 17 juillet 2017 par la commission de sécurité et d'accessibilité de Pau, aurait été la cause exclusive de ce préjudice (p. 19, §§ 1, 2 et 3), sans faire apparaître en quoi un tel fait aurait pu constituer une faute et aurait pu de surcroît présenter les caractères de la force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil ;

Alors, en quatrième lieu, qu' en matière délictuelle, la faute de la victime n'est une cause d'exonération totale qu'à la condition de présenter les caractères de la force majeure ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société Nina Félix de sa demande dirigée contre le syndicat des copropriétaires en réparation de son préjudice tenant à l'impossibilité totale d'exploiter son local en raison des infiltrations - donc pour exonérer le syndicat des copropriétaires de sa responsabilité délictuelle envers le preneur -, que le fait pour la société Nina Félix de n'avoir pas entrepris de démarches judiciaires après l'avis défavorable émis le 17 juillet 2017 par la commission de sécurité et d'accessibilité de Pau aurait été la cause exclusive de ce préjudice (p. 19, §§ 1, 2 et 3), sans faire apparaître en quoi un tel fait aurait pu constituer une faute et aurait pu de surcroît présenter les caractères de la force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Alors, en cinquième lieu, qu'en matière contractuelle, l'auteur d'un dommage doit en réparer toutes les conséquences et que la victime n'est pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable ; qu'il suit de là qu'en l'état d'un bailleur n'exécutant pas les travaux qui lui incombent dans un local donné à bail, il ne peut être reproché au preneur à bail, victime de l'inertie de son bailleur et ayant fait l'objet d'une menace de fermeture administrative du local, de ne pas avoir agi en justice et notamment en référé pour obtenir l'exécution de travaux de nature à éviter la fermeture administrative et, partant, l'aggravation de son préjudice consécutif ; qu'en retenant le contraire (arrêt, p. 19, §§ 1, 2, 4), pour exonérer le bailleur de sa responsabilité contractuelle envers le preneur, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil ;

Alors, en sixième lieu, qu'en matière délictuelle, l'auteur d'un dommage doit en réparer toutes les conséquences et que la victime n'est pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable ; qu'il suit de là qu'en l'état d'un syndicat des copropriétaires n'exécutant pas les travaux qui lui incombent dans un local donné à bail et situé dans l'immeuble, il ne peut être reproché au preneur à bail, victime de l'inertie du syndicat des copropriétaires et ayant fait l'objet d'une menace de fermeture administrative du local, de ne pas avoir agi en justice et notamment en référé pour obtenir l'exécution de travaux de nature à éviter la fermeture administrative et, partant, l'aggravation de son préjudice consécutif ; qu'en retenant le contraire (arrêt, p. 19, §§ 1, 2, 4), pour exonérer le syndicat des copropriétaires de sa responsabilité délictuelle envers le preneur, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté la société Nina Félix représentée par son liquidateur judiciaire, de sa demande de suspension des loyers ;

Alors que le locataire n'est pas tenu de payer le loyer quand il se trouve dans l'impossibilité d'utiliser les lieux loués comme le prévoit le bail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait constaté qu'en l'état des infiltrations dans le local donné à bail à la société Nina Félix et de l'absence des réparations nécessaires, la commission de sécurité et d'accessibilité de Pau avait émis un avis défavorable à son exploitation (arrêt, p. 18, § 5), ce dont il résultait que la société Nina Félix se trouvait, en l'absence de toute réparation, dans l'impossibilité d'utiliser les lieux loués comme le prévoyait le bail et pouvait donc se prévaloir de l'exception d'inexécution pour suspendre le paiement des loyers ; qu'en retenant le contraire (arrêt, p. 20, §§ 1 à 3), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1184 ancien du code civil, repris quant à ce à l'article 1219 nouveau du même code ;

Alors, de surcroît, qu'il n'est pas nécessaire, pour que soit caractérisée l'impossibilité d'utiliser les lieux loués conformément au bail, que soit prononcée une interdiction administrative d'exploiter les lieux loués ; qu'en se fondant, pour dénier à la locataire le bénéfice de l'exception d'inexécution, sur la considération de ce qu'une interdiction administrative d'exploiter les lieux n'avait pas encore été prononcée lorsque la locataire avait cessé d'exploiter les lieux (arrêt, p. 20, §§ 1 à 3), donc en regardant une telle interdiction administrative comme nécessaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés, par fausse interprétation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 20-20957
Date de la décision : 01/06/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 19 mars 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 01 jui. 2022, pourvoi n°20-20957


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : Me Balat, SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.20957
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