La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/05/2022 | FRANCE | N°21-10081

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mai 2022, 21-10081


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 577 F-D

Pourvoi n° S 21-10.081

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 15 octobre 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU

NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MAI 2022

M. [J] [C], domicilié chez Mme...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 577 F-D

Pourvoi n° S 21-10.081

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 15 octobre 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MAI 2022

M. [J] [C], domicilié chez Mme [O] [C], épouse [D], [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 21-10.081 contre l'arrêt rendu le 13 février 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Axima réfrigération, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SARL Corlay, avocat de M. [C], de la SAS Hannotin avocats, avocat de la société Axima réfrigération, après débats en l'audience publique du 22 mars 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 13 février 2019), M. [C] a relevé appel le 11 août 2017 d'un jugement du conseil de prud'hommes puis a sollicité le 24 août 2017 le bénéfice de l'aide juridictionnelle qui lui a été accordée le 18 octobre 2017.

2. Il a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant prononcé la caducité de sa déclaration d'appel en application de l'article 908 du code de procédure civile, à défaut d'avoir remis au greffe ses conclusions dans le délai de 3 mois de la déclaration d'appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance de caducité de la déclaration d'appel, alors :

« 1°/ que le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat et à celle de tous officiers publics ou ministériels dont la procédure requiert le concours ; du moment que l'appel a été formé dans le délai, et que l'aide juridictionnelle a été demandée dans le délai de dépôt des conclusions, le droit d'accès au juge exclut que ce délai puisse courir tant qu'il n'a pas été définitivement statué sur une demande d'aide juridictionnelle; qu'il est constant en l'espèce que l'appel a été formé dans le délai de déclaration d'appel, le 11 août 2017, que la demande d'aide juridictionnelle a été formée le 24 août 2017, dans le délai de trois mois pour conclure, et acceptée le 18 octobre 2017 ; que les conclusions ont été déposées le 16 novembre 2017, moins d'un mois après la décision d'aide juridictionnelle ; qu'en retenant que la demande d'aide juridictionnelle n'interrompt que le délai d'appel mais non les délais pour remettre les conclusions au greffe ou les notifier ou signifier aux parties adverses, la cour d'appel qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. [C] à un recours effectif au juge, a violé l'article 908 du code de procédure civile, ensemble l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991, l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

2°/ que le principe de sécurité juridique implique que de nouvelles règles, prises dans leur ensemble, soient accessibles et prévisibles et n'affectent pas le droit à l'accès effectif au juge, dans sa substance même ; que le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 venant clarifier les dispositions du décret n° 2016-1876 du 27 décembre 2016 n'est entré en vigueur que le 1er septembre 2017, hormis en ses dispositions relatives à l'aide juridictionnelle pour lesquelles l'article 53 dudit décret dispose que « Par exception au I, les dispositions des articles 38 et 52 entrent en vigueur le lendemain de la publication du présent décret. IV. - Les dispositions de l'article 38 sont applicables aux demandes d'aide juridictionnelle faisant l'objet d'une décision intervenue à compter de la date d'entrée en vigueur du présent décret. » ; que l'article 38 nouvellement rédigé énonce uniquement que « lorsque la demande d'aide juridictionnelle est déposée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile, ces délais courent dans les conditions prévues aux b, c et d. », sans faire référence directement à l'article 908 ; que de la circulaire d'application du décret du 27 décembre 2016 affirmait que « L'extension de l'effet interruptif aux délais d'appel s'applique également aux délais prévus aux articles 902 et 908 à 910 du code de procédure civile, comme cela était le cas jusqu'à présent en vertu de l'ancien article 38-1 du décret du 19 décembre 1991. » ; qu'il est constant en l'espèce que l'appel a été formé dans le délai de déclaration d'appel, le 11 août 2017, que la demande d'aide juridictionnelle a été formée le 24 août 2017, dans le délai de trois mois pour conclure, et acceptée le 18 octobre 2017 ; que les conclusions ont été déposées le 16 novembre 2017, moins d'un mois après la décision d'aide juridictionnelle ; qu'en déclarant cependant caduque la déclaration d'appel pour irrecevabilité des conclusions aux motifs que la demande d'aide juridictionnelle, formée après l'appel, n'était pas susceptible d'interrompre le délai pour conclure, en dépit de l'incertitude affectant les textes applicables, la cour d'appel qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. [C] à un recours effectif au juge, a violé l'article 908 du code de procédure civile ensemble l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991, l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte de l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, qui a rétabli, pour partie, le dispositif prévu par l'article 38-1 du décret du 19 décembre 1991 abrogé par le décret n° 2016-1876 du 27 décembre 2016, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours. Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile.

5. Ces règles, qui ne prévoient pas, au profit de l'appelant, un report du point de départ du délai pour remettre ses conclusions au greffe, en application de l'article 908 du code de procédure civile, poursuivent néanmoins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent par une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.

6. En effet, en se conformant à l'article 38 du décret, la partie qui entend former un appel avec le bénéfice de l'aide juridictionnelle est mise en mesure, de manière effective, par la désignation d'un avocat et d'autres auxiliaires de justice, d'accomplir l'ensemble des actes de la procédure.

7. Ce dispositif, dénué d'ambiguïté pour un avocat, permet de garantir un accès effectif au juge d'appel au profit de toute personne dont la situation pécuniaire la rend éligible au bénéfice d'une aide juridictionnelle au jour où elle entend former un appel.

8. La cour d'appel ayant constaté que le salarié n'avait pas remis au greffe ses conclusions dans le délai de trois mois de la déclaration d'appel, c'est dès lors, sans encourir les griefs du moyen, qu'elle a prononcé la caducité de la déclaration d'appel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [C] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Corlay, avocat aux Conseils, pour M. [C]

Monsieur [C] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir prononcé la caducité de la déclaration d'appel,

Alors que 1°) le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat et à celle de tous officiers publics ou ministériels dont la procédure requiert le concours ; du moment que l'appel a été formé dans le délai, et que l'aide juridictionnelle a été demandée dans le délai de dépôt des conclusions, le droit d'accès au juge exclut que ce délai puisse courir tant qu'il n'a pas été définitivement statué sur une demande d'aide juridictionnelle; qu'il est constant en l'espèce que l'appel a été formé dans le délai de déclaration d'appel, le 11 août 2017, que la demande d'aide juridictionnelle a été formée le 24 août 2017, dans le délai de trois mois pour conclure, et acceptée le 18 octobre 2017 ; que les conclusions ont été déposées le 16 novembre 2017, moins d'un mois après la décision d'aide juridictionnelle ; qu'en retenant que la demande d'aide juridictionnelle n'interrompt que le délai d'appel mais non les délais pour remettre les conclusions au greffe ou les notifier ou signifier aux parties adverses, la cour d'appel qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. [C] à un recours effectif au juge, a violé l'article 908 du code de procédure civile ensemble l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991, l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ;

Alors que 2°) le principe de sécurité juridique implique que de nouvelles règles, prises dans leur ensemble, soient accessibles et prévisibles et n'affectent pas le droit à l'accès effectif au juge, dans sa substance même ; que le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 venant clarifier les dispositions du décret n° 2016-1876 du 27 décembre 2016 n'est entré en vigueur que le 1er septembre 2017, hormis en ses dispositions relatives à l'aide juridictionnelle pour lesquelles l'article 53 dudit décret dispose que « Par exception au I, les dispositions des articles 38 et 52 entrent en vigueur le lendemain de la publication du présent décret. IV. - Les dispositions de l'article 38 sont applicables aux demandes d'aide juridictionnelle faisant l'objet d'une décision intervenue à compter de la date d'entrée en vigueur du présent décret. » ; que l'article 38 nouvellement rédigé énonce uniquement que « lorsque la demande d'aide juridictionnelle est déposée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile, ces délais courent dans les conditions prévues aux b, c et d. », sans faire référence directement à l'article 908 ; que de la circulaire d'application du décret du 27 décembre 2016 affirmait que « L'extension de l'effet interruptif aux délais d'appel s'applique également aux délais prévus aux articles 902 et 908 à 910 du code de procédure civile, comme cela était le cas jusqu'à présent en vertu de l'ancien article 38-1 du décret du 19 décembre 1991. » ; qu'il est constant en l'espèce que l'appel a été formé dans le délai de déclaration d'appel, le 11 août 2017, que la demande d'aide juridictionnelle a été formée le 24 août 2017, dans le délai de trois mois pour conclure, et acceptée le 18 octobre 2017 ; que les conclusions ont été déposées le 16 novembre 2017, moins d'un mois après la décision d'aide juridictionnelle ; qu'en déclarant cependant caduque la déclaration d'appel pour irrecevabilité des conclusions aux motifs que la demande d'aide juridictionnelle, formée après l'appel, n'était pas susceptible d'interrompre le délai pour conclure , en dépit de l'incertitude affectant les textes applicables, la cour d'appel qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. [C] à un recours effectif au juge, a violé l'article 908 du code de procédure civile ensemble l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991, l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-10081
Date de la décision : 18/05/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 13 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mai. 2022, pourvoi n°21-10081


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Corlay, SAS Hannotin Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.10081
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award