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18/05/2022 | FRANCE | N°20-23648

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 mai 2022, 20-23648


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 300 F-D

Pourvoi n° T 20-23.648

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 MAI 2022

La société Cas

tel Monte Carlo, dont le siège est chez [Adresse 2], représentée par ses co-liquidateurs MM. [J] [H] et [R] [P], a formé le pourvoi n° T 20-23.648 c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 300 F-D

Pourvoi n° T 20-23.648

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 MAI 2022

La société Castel Monte Carlo, dont le siège est chez [Adresse 2], représentée par ses co-liquidateurs MM. [J] [H] et [R] [P], a formé le pourvoi n° T 20-23.648 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-2), dans le litige l'opposant à Mme [V] [I], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Castel Monte Carlo, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [I], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 22 mars 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 septembre 2020), rendu en référé, à la requête d'associés de la société Castel Monte Carlo (la société), M. [G] a été désigné par une ordonnance du 28 novembre 2014 administrateur provisoire de cette société. Mme [I], administrateur judiciaire, a pris la suite de M. [G] et son mandat a pris fin par la désignation de deux liquidateurs amiables le 21 juillet 2016.

2. La société, représentée par ses liquidateurs, a assigné en référé Mme [I] afin d'obtenir sa condamnation, sous astreinte, à lui remettre les documents et archives en sa possession intéressant la période de l'administration provisoire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors :

« 1°/ que le mandataire judiciaire désigné en qualité d'administrateur judiciaire provisoire d'une société ne dispose des documents sociaux qu'à titre provisoire, à charge de les restituer en fin de mission ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Castel Monte Carlo de sa demande en restitution par Me [I] de tous les documents sociaux et comptables la concernant pour la période du 28 novembre 2014 au 21 juillet 2016, la cour d'appel a considéré qu'elle ne justifiait pas du fondement de l'obligation de restitution des documents qu'elle invoque ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article L 811-1 du code du commerce ;

2°/ que l'obligation incombant au mandataire judiciaire de conserver les pièces de la société qu'il a administrée après la reddition des comptes n'est pas incompatible avec l'obligation corrélative de restituer à la demande de la société les pièces dont elle a besoin pour poursuivre sa gestion, les copies ayant même force probante que les originaux ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande, la cour d'appel a considéré que les demandes de restitution des documents sociaux et comptables concernant la SCA Castel Monte Carlo pour la période du 28 novembre 2014 au 21 juillet 2016 se heurtaient aux règles professionnelles imposant à Me [I] de conserver les documents sociaux pendant 5 ou 10 ans à la fin de sa mission selon le type de document ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article 4.6.4 de l'annexe 8-2 de l'article A 814-1 du code du commerce par fausse application, l'article 1379 du code civil par défaut d'application et l'article L 811-1 du code de commerce ;

3°/ que la société a intérêt à agir en restitution de l'ensemble des documents et archives lui appartenant ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Castel Monte Carlo de sa demande en restitution de l'ensemble des documents originaux et archives de la société restés en la possession de Me [I] au terme de son mandat d'administrateur judiciaire provisoire, la cour d'appel a considéré qu'elle disposait, à tout le moins, d'une copie de l'ensemble des documents sociaux dont elle réclame les originaux, de sorte qu'elle ne démontrait pas son intérêt à les obtenir ; qu'en statuant ainsi sans constater que la société Castel Monte Carlo avait pu obtenir l'ensemble des 11 cartons d'archives que Me [I] reconnaissait détenir en fin de mission et dont la société demandait la restitution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 du code de procédure civile et L 811-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte de l'article 4.6.4 des règles professionnelles des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires figurant à l'annexe 8-2 de l'article A. 814-1 du code de commerce, que pour chaque mandat ou mission, ces professionnels doivent assurer la conservation des pièces qu'ils sont amenés à détenir, pendant dix ans à compter de la date de la reddition des comptes pour les pièces essentielles du dossier (pièces de procédure, justificatifs des mouvements financiers sur les comptes ouverts au nom du professionnel), et pendant cinq ans pour les pièces moins essentielles, et que les archives confiées au professionnel par l'entreprise sous mandat doivent être conservées dans les conditions de durée prévues par les lois et les règlements.

5. L'arrêt relève que Mme [I], administrateur judiciaire, ne s'est pas opposée à toute communication, y compris de certaines pièces en original, qu'elle a dressé un inventaire des pièces susceptibles d'être remises en copie, de celles pouvant être consultées et de celles pouvant être restituées en original contre reçu, cette liste étant jointe à son courrier du 4 mars 2019 et visée dans la sommation du 9 septembre 2019, non suivie d'effet, et que les liquidateurs amiables n'ont jamais pris rendez-vous afin de venir consulter ou récupérer certaines pièces contre récépissé. L'arrêt relève ensuite que le cabinet en charge de la comptabilité de la société a expressément indiqué le 27 février 2019, d'une part, disposer des copies de toutes les pièces comptables pour 2015, 2016 et 2017, et, d'autre part, que les liquidateurs lui avaient remis par courriel les pièces justificatives scannées pour les années 2016 et 2017 lui permettant ainsi de mettre à jour la comptabilité et d'établir les comptes annuels. Il relève enfin que, par un procès-verbal d'assemblée générale du 21 juillet 2016, les comptes 2014 et 2015 ont été approuvés, et par un procès-verbal de consultation des associés par correspondance du 3 juillet 2019, les comptes annuels 2018 de la société ont été approuvés également, et retient que la société a disposé en conséquence, à tout le moins, d'une copie de l'ensemble des documents sociaux dont elle réclame aujourd'hui les originaux.

6. De ces constatations et appréciations, desquelles il résulte que Mme [I] était tenue, à la date de l'instance en référé, d'une obligation générale de conservation des pièces dont l'exécution ne troublait pas l'action des liquidateurs amiables, la cour d'appel a déduit exactement que la société n'établissait en rien l'existence d'un trouble manifestement illicite causé par un refus de communication des originaux.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Castel Monte Carlo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Castel Monte Carlo et la condamne à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour la société Castel Monte Carlo.

La société Castel Monte Carlo fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de Me [V] [I] à lui restituer l'ensemble des documents originaux sociaux et comptables de la société restés en sa possession au terme de son mandat d'administrateur judiciaire provisoire, sous astreinte ;

1°) Alors que le mandataire judiciaire désigné en qualité d'administrateur judiciaire provisoire d'une société ne dispose des documents sociaux qu'à titre provisoire, à charge de les restituer en fin de mission ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Castel Monte Carlo de sa demande en restitution par Me [I] de tous les documents sociaux et comptables la concernant pour la période du 28 novembre 2014 au 21 juillet 2016, la cour d'appel a considéré qu'elle ne justifiait pas du fondement de l'obligation de restitution des documents qu'elle invoque ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article L 811-1 du code du commerce ;

2°) Alors que l'obligation incombant au mandataire judiciaire de conserver les pièces de la société qu'il a administrée après la reddition des comptes n'est pas incompatible avec l'obligation corrélative de restituer à la demande de la société les pièces dont elle a besoin pour poursuivre sa gestion, les copies ayant même force probante que les originaux ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande, la cour d'appel a considéré que les demandes de restitution des documents sociaux et comptables concernant la SCA Castel Monte Carlo pour la période du 28 novembre 2014 au 21 juillet 2016 se heurtaient aux règles professionnelles imposant à Me [I] de conserver les documents sociaux pendant 5 ou 10 ans à la fin de sa mission selon le type de document ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article 4.6.4 de l'annexe 8-2 de l'article A 814-1 du code du commerce par fausse application, l'article 1379 du code civil par défaut d'application et l'article L 811-1 du code de commerce ;

3°) Alors que la société a intérêt à agir en restitution de l'ensemble des documents et archives lui appartenant ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Castel Monte Carlo de sa demande en restitution de l'ensemble des documents originaux et archives de la société restés en la possession de Me [I] au terme de son mandat d'administrateur judiciaire provisoire, la cour d'appel a considéré qu'elle disposait, à tout le moins, d'une copie de l'ensemble des documents sociaux dont elle réclame les originaux, de sorte qu'elle ne démontrait pas son intérêt à les obtenir ; qu'en statuant ainsi sans constater que la société Castel Monte Carlo avait pu obtenir l'ensemble des 11 cartons d'archives que Me [I] reconnaissait détenir en fin de mission (conclusions p 5, § 4) et dont la société demandait la restitution (conclusions p 8, § 2), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 du code de procédure civile et L 811-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-23648
Date de la décision : 18/05/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 septembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 mai. 2022, pourvoi n°20-23648


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.23648
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