LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 mai 2022
Rejet
M. CATHALA, président
Arrêt n° 655 FP-B+R
Pourvoi n° H 21-15.247
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MAI 2022
La société FSM, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée Fives Stein Manufacturing, a formé le pourvoi n° H 21-15.247 contre l'arrêt rendu le 15 février 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [C] [O], domiciliée [Adresse 4],
2°/ à Pôle emploi de [Localité 6], dont le siège est [Adresse 5],
défendeurs à la cassation.
Parties intervenant volontairement :
1°/ le Syndicat des avocats de France (SAF), dont le siège est [Adresse 2],
2°/ le syndicat d'Avocats d'entreprise en droit social (AVOSIAL), dont le siège est [Adresse 1].
Mme [O] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, et de Mme Prache, conseiller référendaire, assistés de Mme Safatian, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société FSM, de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme [O], de la SCP Zribi et Texier, avocat du Syndicat des avocats de France (SAF), de Me Ridoux, avocat du syndicat AVOSIAL, les plaidoiries de Me Célice pour la société FSM, de Me Didier pour Mme [O], de Me Zribi pour le SAF et celles de Me Ridoux pour le syndicat AVOSIAL, et l'avis de Mme Berriat, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 31 mars 2022 où étaient présents M. Cathala, président, M. Barincou, conseiller corapporteur, Mme Prache, conseiller référendaire corapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Mariette, MM. Rinuy, Pion, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Monge, Ott, conseillers, Mmes Ala, Chamley-Coulet, Valéry, conseillers référendaires, Mme Berriat, premier avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application des articles R. 421-4-1 et R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Examen d'office de la recevabilité des interventions volontaires, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code du procédure civile
1. Selon les articles 327 et 330 du code de procédure civile, les interventions volontaires ne sont admises devant la Cour de cassation que si elles sont formées à titre accessoire, à l'appui des prétentions d'une partie et ne sont recevables que si leur auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.
2. Le Syndicat des avocats de France (SAF) et le syndicat d'Avocats d'entreprise en droit social (AVOSIAL) ne justifiant pas d'un tel intérêt dans le présent litige, leurs interventions volontaires ne sont pas recevables ;
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 15 février 2021), Mme [O] a été engagée par la société Fives Stein Manufacturing, aux droits de laquelle se trouve la société FSM, à compter du 15 septembre 1981 en qualité de secrétaire.
4. Un projet de restructuration et de réduction des effectifs, emportant la suppression de sept postes, a été mis en oeuvre à compter du 27 mars 2017.
5. Par lettre du 18 septembre 2017, la salariée a été convoquée à un entretien préalable au licenciement, fixé au 2 octobre 2017, puis licenciée pour motif économique par lettre du 13 octobre 2017. La salariée a adhéré au congé de reclassement qui a débuté le 14 octobre 2017 pour s'achever le 22 septembre 2018.
6. Le 2 octobre 2018, la salariée a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal, ci-après annexé
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
8. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que l'article L. 1235-3 du code du travail n'est pas contraire à l'article 24 de la Charte sociale européenne et, en conséquence, de limiter à la somme de 48 000 euros le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :
« 1°/ que l'article 24 de la Charte sociale européenne dispose qu'"en vue d'assurer l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à reconnaître (...) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée" ; que ce texte est d'effet direct en droit interne dans les litiges entre particuliers pour accorder un droit aux individus et ne requérir l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire effet à l'égard des autres particuliers ; qu'en jugeant au contraire, pour faire application du barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et, ainsi, limiter l'indemnisation accordée aux salariés, qu'"eu égard à l'importance de la marge d'appréciation laissée aux parties contractantes par les termes de l'article 24 de la Charte sociale, rapprochés de ceux des parties I et III du même texte, les dispositions de l'article 24 de ladite Charte ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers", la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que lorsqu'un acte du droit de l'Union appelle des mesures nationales de mise en oeuvre, il reste loisible aux autorités et aux juridictions nationales d'appliquer des standards nationaux de protection des droits fondamentaux, pourvu que cette application ne compromette pas le niveau de protection prévu par la Charte, telle qu'interprétée par la Cour, ni la primauté, l'unité et l'effectivité du droit de l'Union ; qu'ainsi, la marge d'appréciation laissée aux parties contractantes par l'article 24 de la Charte n'implique pas le droit pour elles de déroger aux exigences minimales de ce texte ; que le mécanisme d'indemnisation du salarié licencié sans motif valable d'une législation nationale n'est conforme à ce texte qu'à la condition qu'il prévoie le remboursement des pertes financières subies entre la date du licenciement et la décision de l'organe de recours, la possibilité de réintégration du salarié et/ou des indemnités d'un montant suffisamment élevé pour dissuader l'employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime ; qu'il s'ensuit que le barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 -en ce qu'il prévoit l'allocation d'une indemnité compensatoire plafonnée ne couvrant pas les pertes financières effectivement encourues par le salarié depuis la date du licenciement et n'ayant pas de véritable effet dissuasif pour l'employeur dans la mesure où l'indemnisation ne peut excéder un montant prédéfini et que la compensation octroyée au salarié devient ainsi au fil du temps inadéquate par rapport au préjudice subi- ne permet pas au salarié licencié sans motif valable d'obtenir réparation adéquate, proportionnée au préjudice subi et de nature à dissuader le recours aux licenciements illégaux et contrevient ainsi aux dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne révisée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand la marge de manoeuvre laissée aux États contractants n'autorisait pas l'État français à s'affranchir des exigences minimales fixées par l'article 24 de la charte sociale européenne révisée relatives aux modalités d'indemnisation du salarié licencié sans motif valable, par la fixation d'un barème d'indemnisation uniquement fonction de l'ancienneté du travailleur et des effectifs dans l'entreprise, la cour d'appel a derechef violé ce texte, ensemble l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. »
Réponse de la Cour
9. D'une part, aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux.
10. Selon l'article L. 1235-3-1 du code du travail, dans sa version en vigueur du 24 septembre 2017 au 22 décembre 2017, l'article L. 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Les nullités mentionnées à l'alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à la violation d'une liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4, à un licenciement discriminatoire dans les conditions prévues aux articles L. 1134-4 et L. 1132-4 ou consécutif à une action en justice, en matière d'égalité professionnelle entre hommes et femmes dans les conditions mentionnées à l'article L. 1144-3 et en cas de dénonciation de crimes et délits, ou à l'exercice d'un mandat par un salarié protégé mentionné au chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la deuxième partie, ainsi qu'aux protections dont bénéficient certains salariés en application des articles L. 1225-71 et L. 1226-13.
11. D'autre part, dans la partie I de la Charte sociale européenne, « les Parties reconnaissent comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les moyens utiles, sur les plans national et international, la réalisation de conditions propres à assurer l'exercice effectif des droits et principes » ensuite énumérés, parmi lesquels figure le droit des travailleurs à une protection en cas de licenciement.
12. Selon l'article 24 de cette même Charte, « en vue d'assurer l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à reconnaître :
a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou du service ;
b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée.
A cette fin les Parties s'engagent à assurer qu'un travailleur qui estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement sans motif valable ait un droit de recours contre cette mesure devant un organe impartial. »
13. L'annexe de la Charte sociale européenne précise qu'il « est entendu que l'indemnité ou toute autre réparation appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée par la législation ou la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute autre manière appropriée aux conditions nationales. »
14. L'article 24 précité figure dans la partie II de la Charte sociale européenne qui indique que « les Parties s'engagent à se considérer comme liées, ainsi que prévu à la partie III, par les obligations résultant des articles et des paragraphes » qu'elle contient.
15. Dans la Partie III de la Charte, il est indiqué que « chacune des Parties s'engage :
a) à considérer la partie I de la présente Charte comme une déclaration déterminant les objectifs dont elle poursuivra par tous les moyens utiles la réalisation, conformément aux dispositions du paragraphe introductif de ladite partie ;
b) à se considérer comme liée par six au moins des neuf articles suivants de la partie II de la Charte : articles 1, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 19 et 20 ;
c) à se considérer comme liée par un nombre supplémentaire d'articles ou de paragraphes numérotés de la partie II de la Charte, qu'elle choisira, pourvu que le nombre total des articles et des paragraphes numérotés qui la lient ne soit pas inférieur à seize articles ou à soixante-trois paragraphes numérotés. »
16. Il résulte de la loi n° 99-174 du 10 mars 1999, autorisant l'approbation de la Charte sociale européenne, et du décret n° 2000-110 du 4 février 2000 que la France a choisi d'être liée par l'ensemble des articles de la Charte sociale européenne.
17. L'article I de la partie V de la Charte sociale européenne, consacrée à la « Mise en oeuvre des engagements souscrits » prévoit que « les dispositions pertinentes des articles 1 à 31 de la partie II de la présente Charte sont mises en oeuvre par :
a) la législation ou la réglementation ;
b) des conventions conclues entre employeurs ou organisations d'employeurs et organisations de travailleurs ;
c) une combinaison de ces deux méthodes ;
d) d'autres moyens appropriés. »
18. Enfin, l'annexe de la Charte sociale européenne mentionne à la Partie III : « Il est entendu que la Charte contient des engagements juridiques de caractère international dont l'application est soumise au seul contrôle visé par la partie IV » qui prévoit un système de rapports périodiques et de réclamations collectives.
19. Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct, les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.
20. Il résulte des dispositions précitées de la Charte sociale européenne que les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en oeuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application selon les modalités rappelées aux paragraphes 13 et 17 du présent arrêt et dont ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique rappelé au paragraphe 18 (Assemblée plénière, avis de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011 ; 1re Civ., 21 novembre 2019, pourvoi n° 19-15.890, publié).
21. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que, les dispositions de la Charte sociale européenne n'étant pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers, l'invocation de son article 24 ne pouvait pas conduire à écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail et qu'il convenait d'allouer en conséquence à la salariée une indemnité fixée à une somme comprise entre les montants minimaux et maximaux déterminés par ce texte.
22. La Charte sociale européenne ayant été adoptée par les Etats membres du Conseil de l'Europe, la seconde branche du moyen, fondée sur des principes tirés du droit de l'Union européenne, est inopérante.
23. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DECLARE IRRECEVABLES les interventions volontaires du Syndicat des avocats de France (SAF) et du syndicat d'Avocats d'entreprise en droit social (AVOSIAL) ;
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société FSM, demanderesse au pourvoi principal
La société Fives Stein Manufacturing (aujourd'hui dénommée FSM SASU) fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement et qu'en conséquence le licenciement de Mme [O] était sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société Fives Stein Manufacturing à payer à Mme [O] 48.000 euros de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR ordonné le remboursement par l'employeur à l'organisme concerné des indemnités de chômage effectivement payées à la salariée à la suite de son licenciement sans la limite de six mois ;
ALORS QU'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement lorsque l'employeur justifie de l'absence de poste disponible compatible avec les compétences du salarié à l'époque du licenciement dans l'entreprise ou dans le groupe auquel elle appartient ; qu'en l'espèce, la société Fives Stein Manufacturing soutenait qu'en dépit des recherches personnalisées et répétées effectuées en son sein et auprès des autres entreprises du groupe, elle n'avait pu identifier aucun poste compatible avec les qualifications de Mme [O] ; qu'en conséquence, elle lui avait adressé, par courrier du 11 juillet 2017, la liste de l'ensemble des postes disponibles dans le groupe, en lui laissant la faculté de déposer sa candidature si elle estimait que l'un de ces postes était susceptible de lui convenir ; qu'en retenant, pour dire que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, que le courrier adressé à Mme [O], le 11 juillet 2017, comportait un tableau répertoriant les 15 postes disponibles dans différentes filiales du groupe, sans autre précision que leur intitulé, ce qui ne constituait pas une offre précise, concrète et personnalisée, sans rechercher si un seul des postes disponibles dans le groupe à la date du licenciement était compatible avec les compétences de la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme [O], demanderesse au pourvoi incident
Mme [C] [O] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'article L. 1235-2 [lire, « 1235-3 »] du code du travail n'est pas contraire à l'article 24 de la Charte sociale européenne et, en conséquence, d'AVOIR limité le montant des dommages-intérêts dus par la société FSM à Mme [C] [O] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 48.000 € ;
1°) ALORS QUE l'article 24 de la Charte sociale européenne dispose qu' « en vue d'assurer l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à reconnaître le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée » ; que ce texte est d'effet direct en droit interne dans les litiges entre particuliers pour accorder un droit aux individus et ne requérir l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire effet à l'égard des autres particuliers ; qu'en jugeant au contraire, pour faire application du barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et, ainsi, limiter l'indemnisation accordée Mme [O] qu' « eu égard à l'importance de la marge d'appréciation laissée aux parties contractantes par les termes de l'article 24 de la Charte sociale, rapprochés de ceux des parties I et III du même texte, les dispositions de l'article 24 de ladite Charte ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers » , la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°) ET ALORS, subsidiairement, QUE, lorsqu'un acte du droit de l'Union appelle des mesures nationales de mise en oeuvre, il reste loisible aux autorités et aux juridictions nationales d'appliquer des standards nationaux de protection des droits fondamentaux, pourvu que cette application ne compromette pas le niveau de protection prévu par la Charte, telle qu'interprétée par la Cour, ni la primauté, l'unité et l'effectivité du droit de l'Union ; qu'ainsi, la marge d'appréciation laissée aux parties contractantes par l'article 24 de la Charte n'implique pas le droit pour elles de déroger aux exigences minimales de ce texte ; que le mécanisme d'indemnisation du salarié licencié sans motif valable d'une législation nationale n'est conforme à ce texte qu'à la condition qu'il prévoie le remboursement des pertes financières subies entre la date du licenciement et la décision de l'organe de recours, la possibilité de réintégration du salarié et/ou des indemnités d'un montant suffisamment élevé pour dissuader l'employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime ; qu'il s'ensuit que le barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 -en ce qu'il prévoit l'allocation d'une indemnité compensatoire plafonnée ne couvrant pas les pertes financières effectivement encourues par le salarié depuis la date du licenciement et n'ayant pas de véritable effet dissuasif pour l'employeur dans la mesure où l'indemnisation ne peut excéder un montant prédéfini et que la compensation octroyée au salarié devient ainsi au fil du temps inadéquate par rapport au préjudice subi- ne permet pas au salarié licencié sans motif valable d'obtenir réparation adéquate, proportionnée au préjudice subi et de nature à dissuader le recours aux licenciements illégaux et contrevient ainsi aux dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne révisée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand la marge de manoeuvre laissée aux États contractants n'autorisait pas l'État français à s'affranchir des exigences minimales fixées par l'article 24 de la charte sociale européenne révisée relatives aux modalités d'indemnisation du salarié licencié sans motif valable, par la fixation d'un barème d'indemnisation uniquement fonction de l'ancienneté du travailleur et des effectifs dans l'entreprise, la cour d'appel a derechef violé ce texte, ensemble l'article L. 1235-3 du code du travail en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.