LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CDS
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 mai 2022
Rejet
M. CATHALA, président
Arrêt n° 568 FS-B
Pourvoi n° U 21-10.083
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MAI 2022
Le Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC (SNEC CFE-CGC), dont le siège est [Adresse 5], [Localité 4], a formé le pourvoi n° U 21-10.083 contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat UNSA Printemps, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3],
2°/ à la société Printemps, société par actions simplifiée, dont le siège est 102 rue de Provence, [Localité 3],
3°/ à la Fédération des services CFDT, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 6],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat du Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Printemps, et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 mars 2022 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 novembre 2020), la société Printemps (la société) et les syndicats CFDT, CFE-CGC, UNSA Printemps ont conclu, le 30 décembre 2016, un accord collectif relatif au travail dominical.
2. Un différend a opposé le Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC, l'UNSA Printemps, et la société Printemps concernant le périmètre d'application de cet accord, plus particulièrement son article 2.1.
3. Le Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC (le syndicat) a saisi un tribunal de grande instance aux fins de voir ordonner à la société Printemps d'appliquer les dispositions de l'article 2.1 aux salariés des établissements ouverts le dimanche sur autorisation du maire.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le syndicat fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société d'appliquer les dispositions de l'article 2.1 de l'accord relatif au travail dominical du 30 décembre 2016 aux magasins ouverts le dimanche par application des dispositions des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail sous astreinte de 20 000 euros par infraction, alors « qu'aux termes de l'article L. 2222-1 du code du travail, les conventions et accords collectifs de travail déterminent leur champ d'application territorial et professionnel et qu'en vertu des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2222-3-3 du même code, la convention ou l'accord collectif contient un préambule présentant de manière succincte ses objectifs et son contenu ; qu'en l'espèce, l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps SAS du 30 décembre 2016 énonce en son préambule que si la société Printemps a souhaité engager des négociations avec ses organisations syndicales représentatives en application des articles L. 3132-24, L. 3132-25, L. 3132-25-1, L. 3132-25-3 et L. 3132-25-6 du code du travail, c'est à la demande des organisations syndicales la négociation a également porté sur la situation des salariés amenés à travailler le dimanche en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail, visant les dérogations au repos dominical accordées par le maire, de sorte que l'article 1.1.2 du protocole relatif au périmètre de l'accord énonce qu'il s'applique à l'ensemble des établissements du Printemps, sans restriction, et que l'article 1.1.2 du protocole relatif au périmètre de l'accord et aux salariés concernés, prévoit que le présent accord s'applique à l'ensemble des salariés de l'entreprise Printemps SAS travaillant dans un établissement ouvert le dimanche en application des dérogations géographiques, ou d'une dérogation accordée par le maire en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail", et ce sans aucune restriction quant à l'application des règles ensuite édictées par le protocole d'accord au bénéfice de l'ensemble des salariés conduits à travailler le dimanche ; que la stipulation incidente, figurant à l'articles 5.2.1 spécifique à l'application des autorisations dérogatoires au repos dominical accordées par le maire, était impropre à caractériser une exclusion de l'application de l'ensemble des autres dispositions de l'accord, et en particulier de son article 2.1, aux salariés pouvant bénéficier de dérogations d'ouverture dominicale accordées par le maire ; que la limite maximale de douze dimanches susceptibles d'être accordés par le maire en vertu de l'article L. 3132-26 du code du travail était compatible avec l'application de l'article 2.1 de l'accord, par lequel l'employeur s'engageait à autoriser les salariés le souhaitant à travailler six dimanches au maximum, cette garantie pouvant être réduite à due concurrence du nombre de dimanches effectivement autorisés par le maire en dessous de la limite de douze ; qu'en retenant néanmoins que la société Printemps avait fait une exacte application des stipulations de l'article 2.1 de l'accord du 30 décembre 2016, parce que ne s'appliquant pas aux salariés, dont la fonction n'est pas nécessaire à l'ouverture du magasin et dont le dimanche n'est pas un jour habituel de travail dans les zones de dérogations municipales visées à l'article L. 3132-26 du code du travail, la Cour d'appel de Paris a méconnu les dispositions susvisées du code du travail et celles des articles 1.1.2 et 2.1 de l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps SAS. »
Réponse de la Cour
5. Selon le préambule de l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps du 30 décembre 2016, la société a souhaité engager des négociations avec les organisations syndicales représentatives en application des articles L. 3132-24, L. 3132-25, L. 3132-25-1, L. 3132-25-3 et L. 3132-25-6 du code du travail issus de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, autorisant l'ouverture dominicale des établissements de commerce de détail qui mettent à disposition des biens et des services, situés dans les zones touristiques internationales, les zones touristiques, les zones commerciales et les gares à condition que les contreparties et les garanties pour les salariés en soient fixées par un accord collectif. Il ajoute que, par ailleurs, à la demande des organisations syndicales, la négociation a également porté sur la situation des salariés amenés à travailler le dimanche en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail, visant les dimanches du maire.
6. Concernant le périmètre de l'accord, l'article 1.1.1 se rapportant aux établissements concernés indique qu'il est rappelé qu'antérieurement à la loi précitée, les établissements de [Localité 7] et de [Localité 8], situés respectivement en zone touristique internationale et zone touristique au sens de la loi nouvelle, étaient déjà ouverts le dimanche au titre de l'ancien article L. 3132-25 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi du 6 août 2015, que par arrêtés ministériels d'autres zones telles que visées par la loi précitée ont également été créées. Il ajoute que le présent accord s'appliquera à l'ensemble des établissements de la société répondant aux critères de la loi susvisée. Par ailleurs, l'article 1.1.2 intitulé « salariés concernés » stipule que, le présent accord s'applique à l'ensemble des salariés de l'entreprise Printemps SAS travaillant dans un établissement ouvert le dimanche en application d'une dérogation géographique, ou d'une dérogation accordée par le maire en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail.
7. Selon l'article 1.4 intitulé « aide à la garde d'enfants », de façon plus favorable que les dispositions législatives, la société a répondu aux demandes des organisations syndicales visant à étendre cette aide à la garde d'enfants aux salariés travaillant le dimanche sous le régime de l'article L. 3132-26 du code du travail relatif aux « dimanches du maire », en sorte que ceux-ci en bénéficieront dans les mêmes conditions.
8. Concernant la date d'entrée en vigueur des dispositions conventionnelles, après avoir précisé les modalités d'entrée en vigueur de ces dispositions dans les établissements non encore ouverts le dimanche, l'article 5.2 de l'accord précise que, pour les établissements concernés uniquement par l'aide à la garde d'enfants (douze dimanches du maire), l'octroi de l'aide prévue dans les conditions de l'article 1.4 du présent accord sera effectif dès l'entrée en vigueur de l'accord.
9. L'article 2.1 de l'accord, intitulé « nombre de dimanches réalisés en plus du temps de travail », stipule que, les salariés dont le dimanche n'est pas un jour habituel de travail, ont la possibilité de travailler douze dimanches au maximum en plus de leur temps de travail habituellement planifié du lundi au samedi. Il est convenu que chaque salarié -à l'exclusion des salariés dont la fonction n'est pas nécessaire à l'ouverture du magasin- ayant émis le souhait de travailler de un à douze dimanches, se voit garantir jusqu'à six dimanches à des dates proposées par la direction sur la période de référence courant de juin N à mai N+1.
10. Il résulte de ces dispositions que l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps du 30 décembre 2016 a été conclu afin de rendre possible l'ouverture d'établissements bénéficiant de dérogations sur un fondement géographique en sorte qu'il est applicable aux salariés de ces établissements et que seules certaines de ses dispositions sont, dès lors qu'il existe une mention expresse en ce sens, applicables aux salariés travaillant le dimanche en vertu d'une dérogation accordée par le maire.
11. La cour d'appel qui a, tant par motifs propres, qu'adoptés, retenu que, si les dispositions de l'article 1.4 de l'accord relatives à la garde d'enfants bénéficiaient aux salariés travaillant le dimanche sous le régime des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail, l'article 2.1 de l'accord concernant le nombre de dimanches réalisés en plus du temps de travail, ne s'appliquait pas aux salariés travaillant le dimanche en vertu d'une dérogation accordée par le maire, a fait une exacte application de ces dispositions.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour le Syndicat national de l'encadrement du commerce CFE-CGC
Le Syndicat National de l'Encadrement du Commerce CFE-CGC (SNEC CFE-CGC) fait grief à l'arrêt confirmatif déféré d'avoir rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société Printemps d'appliquer les dispositions de l'article 2.1 de l'accord relatif au travail dominical du 30 décembre 2016 aux magasins ouverts le dimanche par application des dispositions des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail et ce, sous astreinte de 20.000 euros par infraction constatée,
Alors qu'aux termes de l'article L. 2222-1 du code du travail, les conventions et accords collectifs de travail déterminent leur champ d'application territorial et professionnel et qu'en vertu des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2222-3-3 du même code, la convention ou l'accord collectif contient un préambule présentant de manière succincte ses objectifs et son contenu ; qu'en l'espèce, l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps SAS du 30 décembre 2016 énonce en son préambule que si la société Printemps a souhaité engager des négociations avec ses organisations syndicales représentatives en application des articles L. 3132-24, L. 3132-25, L. 3132-25-1, L. 3132-25-3 et L. 3132-25-6 du code du travail, c'est à la demande des organisations syndicales la négociation a également porté sur la situation des salariés amenés à travailler le dimanche en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail, visant les dérogations au repos dominical accordées par le maire, de sorte que l'article 1.1.2 du protocole relatif au périmètre de l'accord énonce qu'il s'applique à l'ensemble des établissements du Printemps, sans restriction, et que l'article 1.1.2 du protocole relatif au périmètre de l'accord et aux salariés concernés, prévoit que « le présent accord s'applique à l'ensemble des salariés de l'entreprise Printemps SAS travaillant dans un établissement ouvert le dimanche en application des dérogations géographiques, ou d'une dérogation accordée par le maire en application des articles L. 3132-26 et L. 3132-27 du code du travail », et ce sans aucune restriction quant à l'application des règles ensuite édictées par le protocole d'accord au bénéfice de l'ensemble des salariés conduits à travailler le dimanche ; que la stipulation incidente, figurant à l'articles 5.2.1 spécifique à l'application des autorisations dérogatoires au repos dominical accordées par le maire, était impropre à caractériser une exclusion de l'application de l'ensemble des autres dispositions de l'accord, et en particulier de son article 2.1, aux salariés pouvant bénéficier de dérogations d'ouverture dominicale accordées par le maire ; que la limite maximale de douze dimanches susceptibles d'être accordés par le maire en vertu de l'article L. 3132-26 du code du travail était compatible avec l'application de l'article 2.1 de l'accord, par lequel l'employeur s'engageait à autoriser les salariés le souhaitant à travailler six dimanches au maximum, cette garantie pouvant être réduite à due concurrence du nombre de dimanches effectivement autorisés par le maire en dessous de la limite de douze ; qu'en retenant néanmoins que la société Printemps avait fait une exacte application des stipulations de l'article 2.1 de l'accord du 30 décembre 2016, parce que ne s'appliquant pas aux salariés, dont la fonction n'est pas nécessaire à l'ouverture du magasin et dont le dimanche n'est pas un jour habituel de travail dans les zones de dérogations municipales visées à l'article L. 3132-26 du code du travail, la Cour d'appel de Paris a méconnu les dispositions susvisées du code du travail et celles des articles 1.1.2 et 2.1 de l'accord relatif au travail dominical au sein de l'entreprise Printemps SAS.