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21/04/2022 | FRANCE | N°20-23119

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 avril 2022, 20-23119


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 avril 2022

Cassation partielle sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 525 F-D

Pourvoi n° T 20-23.119

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 AVRIL 2022

M. [M] [J], domicilié [A

dresse 2], a formé le pourvoi n° T 20-23.119 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 avril 2022

Cassation partielle sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 525 F-D

Pourvoi n° T 20-23.119

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 AVRIL 2022

M. [M] [J], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 20-23.119 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section 1), dans le litige l'opposant à la société Alliance bois matériel, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de Me Brouchot, avocat de M. [J], de Me Balat, avocat de la société Alliance bois matériel, après débats en l'audience publique du 9 mars 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 29 septembre 2020), M. [J], d'abord mis à disposition comme intérimaire puis engagé le 4 mai 1998 selon contrat à durée indéterminée en qualité de mécanicien par la société Centre Ouest matériel, devenue la société Alliance bois matériel (la société), a été élu délégué du personnel titulaire.

2. Estimant être victime d'un harcèlement moral et d'une discrimination syndicale, il a saisi le 13 juillet 2016 la juridiction prud'homale aux fins de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et obtenir le paiement de diverses sommes.

3. L'employeur ayant engagé une procédure de licenciement disciplinaire, l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de licenciement par une décision du 13 mai 2015, dont le recours hiérarchique porté devant le ministre du travail a donné lieu à un rejet implicite. Par jugement du 13 juillet 2017, le tribunal administratif d'Orléans a annulé ces deux décisions.

4. Le 13 septembre 2017, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement du salarié, licenciement qui lui a été notifié le 18 septembre 2017 pour faute grave.

5. La décision d'autorisation du 13 septembre 2017 a été annulée le 5 février 2018 pour défaut de respect du principe du contradictoire par le ministre du travail qui a autorisé le licenciement du salarié.

6. Le 23 avril 2018, le salarié a sollicité sa réintégration.

7. Par arrêt du 17 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif du 13 juillet 2017 ayant annulé la décision initiale de refus d'autorisation de l'inspecteur du travail ainsi que la décision implicite de rejet du ministre du travail. Par arrêt du 24 juillet 2019, le Conseil d'Etat a déclaré non admis le pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt de la cour administrative d'appel.

8. Le salarié, réintégré le 5 juin 2019 suite à une ordonnance de référé du 23 mai 2019 du conseil des prud'hommes de Tours, a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 3 avril 2020 en invoquant différents manquements de l'employeur.

Examen des moyens

Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, ci-après annexés

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité de congés payés afférente à la somme de 2 943,19 euros que la société a été condamnée à lui payer à titre d'indemnité équivalente aux salaires qu'il aurait dû percevoir pour la période du 1er mai 2019 au 4 juin 2019, alors « que l'employeur a l'obligation de payer au salarié licencié en vertu d'une autorisation administrative annulée et qui demande sa réintégration les salaires dus depuis cette demande ; que ces salaires ouvrent droit à indemnité de congés payés ; qu'en rejetant la demande de M. [J] au titre de cette indemnité de congés payés, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 2422-4 et L. 3141-24 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 2422-4 du code du travail :

11. En vertu de ce texte, lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.

12. L'indemnité due, en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, au salarié protégé, licencié sur le fondement d'une décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ensuite annulée, a, de par la loi, le caractère d'un complément de salaire. Il en résulte que cette indemnité ouvre droit au paiement des congés payés afférents.

13. Pour rejeter la demande formée par le salarié au titre des congés payés, l'arrêt retient que, ne s'agissant que d'une indemnité, la demande d'indemnité de congés payés afférente sera rejetée.

14. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

16. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [J] de sa demande en paiement des congés payés afférents à la somme de 2 943,19 euros que la société Alliance bois matériel a été condamnée à lui payer à titre d'indemnité équivalente aux salaires qu'il aurait dû percevoir du 1er mai 2019 au 4 juin 2019, l'arrêt rendu le 29 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne la société Alliance bois matériel à payer à M. [J] la somme de 294,31 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité équivalente aux salaires qu'il aurait dû percevoir du 1er mai 2019 au 4 juin 2019 ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. [J]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. [J] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande d'indemnité de congés payés afférente à la somme de 2. 943,19 euros que la société Alliance Bois Matériel a été condamnée à lui payer à titre d'indemnité équivalente aux salaires qu'il aurait dû percevoir pour la période du 1er mai 2019 au 4 juin 2019 ;

ALORS QUE l'employeur a l'obligation de payer au salarié licencié en vertu d'une autorisation administrative annulée et qui demande sa réintégration les salaires dus depuis cette demande ; que ces salaires ouvrent droit à indemnité de congés payés ; qu'en rejetant la demande de M. [J] au titre de cette indemnité de congés payés, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 2422-4 et L. 3141-24 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

M. [J] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour licenciement nul ;

1) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que le refus de DIF était motivé et n'apparaissait donc pas abusif ; que, concernant le manquement à l'obligation de sécurité, il ne pouvait être considéré que l'employeur ait manqué à son obligation, que le salarié n'avait engagé aucune procédure en indemnisation de la faute inexcusable et que le salarié ne démontrait aucun préjudice consécutif au défaut de visite médicale d'embauche en 2016 ; que, concernant les sanctions disciplinaires injustifiées, ces sanctions, quoique non justifiées, sont anciennes et ne peuvent à elles seules constituer un harcèlement moral ; que, concernant la procédure de licenciement, elle a été engagée avec l'accord des autorités compétentes et que, même si un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes a finalement annulé l'autorisation, le dossier est complexe et ne peut caractériser un harcèlement moral ; qu'en déboutant M. [J] de sa demande relative au harcèlement moral, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié et en justifiant chacun d'eux aux lieu et place de l'employeur – dont les conclusions et pièces étaient irrecevables, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en rejetant la demande de M. [J] relative au harcèlement moral sans examiner les griefs relatifs à l'absence de mise à disposition des protège-genoux préconisés par le médecin du travail, à l'absence de visite médicale de reprise consécutive à un accident du travail et à l'engagement par l'employeur de multiples procédures judiciaires infondées contre le salarié, la cour d'appel a derechef violé les dispositions de l'article L. 1154-1 du code du travail ;

3) ALORS QUE l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, doit en assurer l'effectivité ; qu'il doit prendre en compte les recommandations du médecin du travail et, en cas de refus, faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite ; qu'il en résulte que, lorsque le salarié fait valoir que l'employeur n'a pas adapté son poste de travail conformément aux recommandations du médecin du travail, il appartient à l'employeur de justifier qu'il a procédé à une telle adaptation ; qu'en rejetant la demande de M. [J] aux motifs qu'il n'établissait pas le non-respect par son employeur des restrictions d'aptitude établies par le médecin du travail, alors qu'il appartenait à l'employeur d'établir la preuve qu'il avait aménagé le poste de travail du salarié conformément aux recommandations du médecins du travail, la cour d'appel a violé l'article L. 4121-1 et L. 4624-1 du code du travail, ensemble l'article 1353 alinéa 2 du code civil ;

4) ET ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en rejetant la demande de M. [J] aux motifs que « l'atteinte aux droits de M. [J] et à sa dignité, l'altération de sa santé physique ou mentale ou la compromission de son avenir professionnel ne résultent d'aucun élément du dossier, étant rappelé que M. [J] a, par courrier du 23 avril 2018, demandé et obtenu sa réintégration au sein de l'entreprise », alors même qu'elle avait préalablement constaté que M. [J] avait été victime d'un accident du travail ayant occasionné un arrêt de plus de huit mois et avait en outre été licencié par son employeur, puis que sa demande de réintégration avait fait l'objet d'un refus de l'employeur qui n'a réintégré le salarié que plus d'un an après sa demande sur injonction d'une ordonnance de référé du conseil de prud'hommes du 23 mai 2019, la cour d'appel n'a pas donné de motifs à sa décision et a ainsi violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

M. [J] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination ;

1) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'une discrimination syndicale ou liée aux origines, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que les faits invoqués par le salarié (procédure de licenciement et procédures l'ayant suivie, refus de paiement du salaire de mai 2019, retenues sur salaires opérées par l'employeur) s'inscrivent dans le contexte litigieux opposant les parties, tournant autour du vol reproché à l'intéressé ; qu'en déboutant M. [J] de sa demande relative à la discrimination, sans rechercher si ces faits laissaient supposer l'existence d'une discrimination et en les justifiant aux lieu et place de l'employeur, dont les conclusions et pièces étaient irrecevables, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis laissaient supposer l'existence d'une discrimination, et dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

2) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'une discrimination syndicale ou liée aux origines, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, pour débouter M. [J] de sa demande, que les faits invoqués par lui (procédure de licenciement et procédures l'ayant suivie, refus de paiement du salaire de mai 2019, retenues sur salaires opérées par l'employeur) s'inscrivent dans le contexte litigieux opposant les parties, tournant autour du vol reproché à l'intéressé ; qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants relatifs à l'existence d'un conflit, impropres à justifier un licenciement, un refus de paiement de salaire ainsi que des retenues sur salaires, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, violant ainsi les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

3) ALORS QUE le juge judiciaire doit, sous peine d'excès de pouvoir, respecter l'autorité de la chose jugée par le juge administratif ; qu'en l'espèce, un arrêt définitif de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 17 décembre 2018 a définitivement rejeté la requête de la société Alliance Bois Matériel tendant à l'annulation de la décision administrative de refus d'autorisation de licenciement, aux motifs que les faits de vol reprochés au salarié n'étaient pas démontrés ; que cette appréciation de fond s'impose au juge judiciaire ; qu'en déboutant M. [J] de sa demande relative à la discrimination aux motifs que les griefs allégués s'inscrivent dans le contexte litigieux opposant les parties, tournant autour du vol reproché à l'intéressé, alors qu'elle aurait dû retenir – conformément à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 17 décembre 2018 – que cette considération ne démontrait pas que les décisions de l'employeur n'étaient pas justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, le principe de séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article L. 1134-1 du code du travail ;

4) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'une discrimination syndicale ou liée aux origines, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que les faits invoqués par le salarié (procédure de licenciement et procédures l'ayant suivie, refus de paiement du salaire de mai 2019, retenues sur salaires opérées par l'employeur) s'inscrivent dans le contexte litigieux opposant les parties, tournant autour du vol reproché à l'intéressé ; qu'en déboutant M. [J] de sa demande relative à la discrimination, alors qu'elle avait elle-même constaté que les salaires réclamés par le salarié étaient dus, ce dont elle aurait dû déduire que la décision de l'employeur n'était pas justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

5) ET ALORS QUE l'existence d'une discrimination prohibée n'implique pas nécessairement une comparaison avec les autres salariés ; qu'en déboutant le salarié de sa demande relative à la discrimination aux motifs qu'aucun élément de preuve n'établissait de différence de traitement avec les autres salariés et que les éléments susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité ne sont pas établis, alors que laissent supposer l'existence d'une discrimination syndicale, l'absence de toute évolution de carrière et de rémunération depuis l'engagement syndical du salarié dix ans auparavant, le licenciement injustifié du salarié quelques jours après sa décision en qualité de délégué syndical puis, après avoir obtenu sa réintégration en justice, le refus de l'employeur de lui payer son salaire intervenu quelques jours seulement après sa désignation en qualité de représentant de section syndicale, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141 5 du code du travail.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

M. [J] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour entrave ;

1) ALORS QUE la réparation par le juge prud'homal du préjudice résultant pour le salarié d'une entrave à la désignation ou à l'exercice d'un mandat syndical ou de représentant du personnel ne nécessite ni plainte pénale préalable ni élément intentionnel de l'employeur ; qu'en déboutant M. [J] de sa demande de dommages-intérêts pour entrave aux motifs qu'il n'apparaît pas qu'une plainte pénale ait été déposée et qu'il n'est pas démontré l'existence d'une faute intentionnelle de l'employeur, alors qu'il lui appartenait de rechercher, comme il le lui était demandé, si les faits dénoncés par le salarié avaient entravé l'exercice de son mandat de délégué syndical et lui avaient fait perdre une chance sérieuse d'être élu membre de la délégation du personnel au comité social et économique, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1240 du code civil, ensemble l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

2) ET ALORS QUE cause nécessairement un préjudice qu'il appartient au juge de réparer l'impossibilité pour le salarié, face au refus de l'employeur d'organiser les élections professionnelles qui lui sont demandées, de bénéficier du droit à la représentation collective des salariés au sein de l'entreprise ; qu'en déboutant le salarié de sa demande par des motifs inopérants, après avoir pourtant constaté que M. [J] invoquait également qu'il avait été entravé dans son droit à être lui-même représenté collectivement par un représentant, la cour d'appel a violé l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.

CINQUIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

M. [J] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est justifiée et produit les effets d'un licenciement nul, ou subsidiairement, d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de ses demandes d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d'indemnité pour violation du statut protecteur et de dommages-intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ;
1) ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'un quelconque des premier, deuxième, troisième ou quatrième moyens du pourvoi, entraînera l'annulation par voie de conséquence des dispositions relatives à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail et aux indemnités en découlant, en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE lorsqu'un salarié protégé prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits reprochés à son employeur, cette rupture produit soit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur si les faits reprochés à l'employeur sont établis et empêchent la poursuite du contrat de travail, soit dans le cas contraire les effets d'une démission ; que la lettre de rupture ne fixe pas les limites du litige et que le juge est tenu d'examiner l'ensemble des griefs invoqués devant lui par le salarié à l'appui de sa demande ; qu'il doit examiner, d'une part, si les griefs allégués sont établis et, d'autre part, si les griefs établis, pris dans leur ensemble, sont d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en déboutant M. [J] de ses demandes relatives à la prise d'acte de la rupture, en faisant une appréciation séparée des faits établis en écartant le grief des sanctions disciplinaires injustifiées aux motifs inopérants que ce grief était bien antérieur à la prise d'acte de la rupture et sans examiner les griefs concernant le défaut de paiement de sommes allouées par la cour d'appel à titre de frais irrépétibles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des dispositions de l'article L. 1235-3-2 du code du travail ;

3) ALORS QU'il appartient à l'employeur qui considère injustifiée la prise d'acte de la rupture par un salarié qui, étant victime d'un accident du travail, invoque une inobservation des règles de prévention et de sécurité, de démontrer que la survenance de cet accident est étrangère à tout manquement à son obligation de sécurité de résultat ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes relatives à la prise d'acte de la rupture aux motifs que le manquement à l'obligation de sécurité n'était pas établi, alors que le salarié invoquait à l'appui de la rupture la survenance de deux accidents du travail causés par l'inobservation par son employeur des préconisations du médecin du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1235-3-2, L.4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, ensemble l'article 1353 alinéa 2 du code civil ;

4) ALORS QUE, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, l'employeur doit en assurer l'effectivité ; qu'il ne peut laisser reprendre le travail par son salarié, arrêté pour cause d'accident du travail pendant plus de trente jours, sans le faire bénéficier d'une visite médicale de reprise ; qu'à défaut de visite médicale de reprise, le contrat reste suspendu, peu important que le salarié ait en réalité repris le travail ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes relatives à la prise d'acte de la rupture, au motif inopérant qu'il n'établissait pas le préjudice que lui avait causé le défaut de visite médicale de reprise, alors pourtant qu'il résultait de ses propres constatations que, le salarié ayant été arrêté pendant plus d'un an pour cause d'accident du travail, il devait bénéficier d'une visite médicale de reprise et alors qu'elle aurait dû rechercher, comme il le lui était demandé, si le contrat de travail ne se trouvait pas suspendu indéfiniment depuis plusieurs années par la faute de son employeur, qui empêchait ainsi la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des dispositions des articles L. 1235-3-2, L. 4121-1 et R. 4624-31 du code du travail ;

5) ET ALORS QUE l'obligation de payer les salaires est exigible sans qu'il soit besoin d'une condamnation en justice, qui ne fait que constater l'existence d'une dette préalable de l'employeur ; qu'en jugeant que la dette de salaire invoquée par le salarié pour justifier la prise d'acte de la rupture était minime et faisait l'objet d'un litige que seul la cour pouvait trancher, et alors même qu'elle a reconnu que les retenues sur salaires opérées par l'employeur, qu'elle a d'ailleurs condamné à restitution, étaient dépourvues de toutes justifications, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants insusceptibles de justifier le défaut d'impossibilité de poursuivre le contrat de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-23119
Date de la décision : 21/04/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 29 septembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 avr. 2022, pourvoi n°20-23119


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, Me Brouchot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.23119
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