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20/04/2022 | FRANCE | N°20-20682

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 avril 2022, 20-20682


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 avril 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 348 F-D

Pourvoi n° U 20-20.682

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 AVRIL 2022

1°/ M. [M] [V],
2°/ Mme [D] [Y]-[B], épouse [V],

domici

liés tous deux [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° U 20-20.682 contre l'arrêt rendu le 11 juin 2020 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximit...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 avril 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 348 F-D

Pourvoi n° U 20-20.682

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 AVRIL 2022

1°/ M. [M] [V],
2°/ Mme [D] [Y]-[B], épouse [V],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° U 20-20.682 contre l'arrêt rendu le 11 juin 2020 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige les opposant à la société Crédit du Nord, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. et Mme [V], de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Crédit du Nord, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 11 juin 2020), suivant offres acceptées les 14 et 30 juillet 2014, la société Crédit du Nord (la banque) a consenti à M. et Mme [V] (les emprunteurs) deux prêts de 25 000 euros et 41 700 euros.

2. A la suite d'incidents de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme de chacun de ces prêts, puis assigné les emprunteurs en paiement des sommes restant dues.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches

Enoncé du moyen

4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt d'accueillir la demande en paiement de la banque, alors :

« 1°/ qu'il était soutenu que, dans le cadre de son devoir de mise en garde, la banque prêteuse avait commis une faute en ne s'assurant pas de la réalité des déclarations faites par les époux, au moment de la souscription des emprunts litigieux, s'agissant de leurs revenus et de leur patrimoine ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code civil ;

2°/ que le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs profanes au regard non seulement des charges du prêt mais aussi des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'il appartient dès lors à l'organisme de crédit de s'enquérir des capacités financières et de remboursement des emprunteurs et, même en l'absence d'anomalie apparente, de vérifier, par des diligences élémentaires, les informations fournies par l'emprunteur lors de la conclusion du contrat ; qu'au cas d'espèce, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si la banque avait procédé aux vérifications élémentaires, en sollicitant les avis d'imposition des emprunteurs et les titres de propriété des biens dont ils prétendaient être propriétaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°/ que le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs profanes au regard non seulement des charges du prêt mais aussi des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; que pour apprécier les capacités financières des emprunteurs à rembourser les prêts litigieux, et exclure tout manquement de la banque à son devoir de mise en garde à leur égard, la cour d'appel a relevé que le montant total des échéances, soit 1.595 euros, était inférieur de 330 euros au tiers des revenus déclarés à la banque et que le patrimoine immobilier des emprunteurs était évalué à 500 0000 euros ; qu'en raisonnant de la sorte, sans tenir compte du fait que ceux-ci étaient parents de cinq enfants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Ayant relevé qu'il résultait de la fiche d'information signée par les emprunteurs au mois de juillet 2014 que ceux-ci devaient s'acquitter d'échéances mensuelles pour un montant total inférieur de 330 euros au tiers de leurs revenus déclarés et qu'ils disposaient d'un patrimoine immobilier évalué à 500 000 euros, la cour d'appel, qui a pris en considération l'existence de cinq enfants à charge et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à la recherche sur les avis d'imposition et les titres de propriété des emprunteurs dont l'omission est dénoncée, a légalement justifié sa décision d'exclure tout devoir de mise en garde de la banque.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. Les emprunteurs font le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ qu'en condamnant solidairement les emprunteurs à payer à la banque les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 euros et de 24.716,73 euros, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande, la cour d'appel a violé l'objet du litige, partant a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en condamnant solidairement les emprunteurs à payer à la banque les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 euros et de 24.716,73 euros, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande dans le dispositif de ses conclusions, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en condamnant solidairement les emprunteurs à payer à la banque les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 euros et de 24.716,73 euros, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande dans le dispositif de ses conclusions, la cour d'appel a dénaturé le dispositif de ces conclusions, partant a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend en réalité qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond quant au sens des conclusions d'appel de la banque.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [V] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Krivine et Viaud, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [V].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Monsieur et Mme [V] font grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé la jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la société Crédit du Nord de ses demandes en paiement formées à l'encontre de M. et Mme [V] au titre des offres de prêt acceptées les 14 juillet 2014 et 30 juillet 2014, et, statuant à nouveau, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord les sommes suivantes : 33.062,45 €, outre les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur la somme de 32.062,45 €, et 25.716,73 €, outre les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur la somme de 24.716,73 € ;

1. ALORS QU'il était soutenu que, dans le cadre de son devoir de mise en garde, la banque prêteuse avait commis une faute en ne s'assurant pas de la réalité des déclarations faites par les époux, au moment de la souscription des empruntes litigieux, s'agissant de leurs revenus et de leur patrimoine (conclusions de Mme [V], p. 7, § 3 s.) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code civil ;

2. ALORS, subsidiairement, QUE le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs profanes au regard non seulement des charges du prêt mais aussi des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'il appartient dès lors à l'organisme de crédit de s'enquérir des capacités financières et de remboursement des emprunteurs et, même en l'absence d'anomalie apparente, de vérifier, par des diligences élémentaires, les informations fournies par l'emprunteur lors de la conclusion du contrat ; qu'au cas d'espèce, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée (conclusions de Mme [V], p. 7, § 3 s.), si la société Crédit du Nord avait procédé aux vérifications élémentaires, en sollicitant les avis d'imposition des emprunteurs et les titres de propriété des biens dont ils prétendaient être propriétaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3. ALORS, en tout état de cause, QUE le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs profanes au regard non seulement des charges du prêt mais aussi des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; que pour apprécier les capacités financières de M. et Mme [V] à rembourser les prêts litigieux, et exclure tout manquement de la société Crédit du Nord à son devoir de mise en garde à leur égard, la cour d'appel a relevé que le montant total des échéances, soit 1.595 €, était inférieur de 330 € au tiers des revenus déclarés à la banque et que le patrimoine immobilier des emprunteurs était évalué à 500.0000 € ; qu'en raisonnant de la sorte, sans tenir compte du fait que ceux-ci étaient parents de cinq enfants (conclusions de Mme [V], p. 2), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4. ALORS QU'en relevant d'office que M. et Mme [V] ne « justifiaient pas précisément de leur situation financière actuelle et donc de leur impossibilité de faire face à leur endettement » (arrêt, p. 8, § 9), sans qu'il ressorte de la procédure que les parties aient été invitées à présenter leurs observations, d'une part, sur la situation financière actuelle des emprunteurs, d'autre part, sur l'influence que celle-ci pourrait avoir sur la responsabilité civile du prêteur au regard de son obligation de mise en garde, la cour d'appel a violé les exigences du contradictoire, partant l'article 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. ALORS, subsidiairement, QU'en relevant que M. et Mme [V] ne « justifiaient pas précisément de leur situation financière actuelle et donc de leur impossibilité de faire face à leur endettement », la cour d'appel a statué par un motif impuissant à écarter la responsabilité civile du banquier dispensateur de crédit pour méconnaissance de son obligation de mise en garde, partant, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Monsieur et Mme [V] font grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé la jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la société Crédit du Nord de ses demandes en paiement formées à l'encontre de M. et Mme [V] au titre des offres de prêt acceptées les 14 juillet 2014 et 30 juillet 2014, et, statuant à nouveau, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord les intérêts au taux de 5,8 %, à compter du 15 mai 2019, sur les sommes de 32.062,45 € et de 24.716,73 € ;

1. ALORS QU'en condamnant solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 € et de 24.716,73 €, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande, la cour d'appel a violé l'objet du litige, partant a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2. ALORS, subsidiairement, QUE la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en condamnant solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 € et de 24.716,73 €, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande dans le dispositif de ses conclusions, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;

3. ALORS, plus subsidiairement, QU'en condamnant solidairement M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord les intérêts au taux de 5,8 % à compter du 15 mai 2019 sur les sommes de 32.062,45 € et de 24.716,73 €, cependant que la banque n'en avait pas formulé la demande dans le dispositif de ses conclusions (conclusions de la société Crédit du Nord, p. 14 s.), la cour d'appel a dénaturé le dispositif de ces conclusions, partant a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-20682
Date de la décision : 20/04/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 11 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 avr. 2022, pourvoi n°20-20682


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Krivine et Viaud

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.20682
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