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30/03/2022 | FRANCE | N°21-12817

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mars 2022, 21-12817


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 mars 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 385 F-D

Pourvoi n° R 21-12.817

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 MARS 2022

La société Axis alternatives, soci

été par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-12.817 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2020 par la cour ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 mars 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 385 F-D

Pourvoi n° R 21-12.817

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 MARS 2022

La société Axis alternatives, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-12.817 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [X] [C] [B], domiciliée [Adresse 1],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les sept moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Axis alternatives, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [C] [B], après débats en l'audience publique du 9 février 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Ala, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-3, alinéa 2 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 décembre 2020), Mme [C] [B] a été engagée par la société Axis alternatives à compter du 4 octobre 2010 en qualité de « consultante senior ».

2. La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 8 décembre 2015 pour obtenir notamment la résiliation judiciaire du contrat de travail.

3. Le contrat de travail a pris fin le 14 juin 2016 à la suite de l'adhésion de la salariée à un contrat de sécurisation professionnelle.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et les deuxième, quatrième, cinquième et septième moyens, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler la convention de forfait et de le condamner au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos, alors « que c'est au salarié qui conteste l'opposabilité de la convention de forfait contenue dans son contrat de travail d'établir que les conditions de validité de celle-ci n'ont pas été respectées par l'employeur ; qu'en relevant, pour écarter la convention de forfait jours convenue entre les parties, qu'il n'était pas justifié d'un entretien annuel portant sur l'activité de la salariée dans le cadre du dit forfait, lorsqu'il appartenait, non pas à l'employeur d'établir l'effectivité d'un tel entretien, mais à la salariée d'en démontrer l'absence, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé, ce faisant, l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 du dit code. »

Réponse de la Cour

6. Il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a satisfait, conformément à l'article L. 3121-46 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, à l'obligation d'organiser l'entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

7. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée une certaine somme à titre d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos, alors « que la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite Syntec ne prévoit, au profit des cadres, aucun contingent annuel dérogatoire à celui issu de l'article D. 3121-14-1 du code du travail, soit 220 heures ; qu'en l'espèce, il était constant que cette convention collective était applicable à la relation contractuelle et que si l'entreprise appliquait en outre un accord collectif dit d'aménagement du temps de travail, celui-ci ne dérogeait pas à ladite convention collective en particulier s'agissant du contingent annuel applicable ; qu'en appréciant le dépassement du contingent annuel au-delà de 150 heures, lorsque la convention collective applicable ne prévoyait pas un tel contingent pour les salariés revêtant la qualité de cadre tels que l'intéressée, la cour d'appel a violé l'article 33 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite Syntec, l'article L. 3121-11, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, du code du travail et l'article D. 3121-14-1 du dit code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article D. 3121-14-1 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2008-1132 du 4 novembre 2008 :

9. Selon ce texte, le contingent annuel d'heures supplémentaires prévu à l'article L. 3121-11 est fixé à deux cent vingt heures par salarié.

10. Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos, l'arrêt retient que le contingent annuel de 150 heures a été dépassé à une reprise en 2014.

11. En se déterminant ainsi, sans préciser sur quel accord collectif dérogatoire elle s'est fondée pour retenir un contingent annuel de 150 heures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Et sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

12. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et discrimination, alors « que lorsque le salarié conteste la sanction qui lui a été notifiée, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier ladite sanction au vu des éléments fournis tant par l'employeur que par le salarié ; qu'en l'espèce, la salariée avait fait l'objet d'une mise à pied de trois jours pour avoir faussement déclaré dans ses feuilles de temps être en « inter contrat » ou en « chantier interne » au cours de plusieurs journées ou demi-journées du mois de juillet 2015, ce qui avait notamment conduit une cliente à se plaindre auprès de l'un des associés de la société Axis Alternatives, le 27 juillet 2015, des absences fréquentes de la salariée et de la difficulté à faire avancer les sujets ; que pour écarter ce grief, la cour d'appel s'est bornée à relever que la salariée justifiait avoir, aux dates litigieuses, correspondu par courriels avec d'autres salariés de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir en quoi l'envoi des dits courriels, quelques minutes aux dates concernées, était de nature à démontrer la réalité d'une présence effective de la salariée en inter-contrat ou en chantier durant toute la journée ou la demi-journée correspondante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

14. Pour condamner l'employeur à payer deux indemnités distinctes pour harcèlement moral, d'une part, et pour discrimination, d'autre part, l'arrêt retient que la salariée, licenciée pour des motifs non démontrés alors qu'elle était enceinte et que sa situation était connue de son employeur a subi une discrimination et que le harcèlement moral est également démontré.

15. En statuant ainsi, alors que dans le dispositif de ses conclusions, la salariée demandait l'allocation de 20 000 euros à titre dommages-intérêts pour discrimination et aucune somme au titre du harcèlement moral, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. La cassation sur le sixième moyen n'atteint pas le chef de dispositif condamnant l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour discrimination, par ailleurs justifié.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Axis alternatives à payer à Mme [C] [B] les sommes de 2 000 euros à titre d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos et 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme [C] [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Axis alternatives

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé la convention de forfait et de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée diverses sommes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de congés payés sur ce rappel et d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos ;

1°) ALORS QUE c'est au salarié qui conteste l'opposabilité de la convention de forfait contenue dans son contrat de travail d'établir que les conditions de validité de celle-ci n'ont pas été respectées par l'employeur ; qu'en relevant, pour écarter la convention de forfait jours convenue entre les parties, qu'il n'était pas justifié d'un entretien annuel portant sur l'activité de la salariée dans le cadre dudit forfait, lorsqu'il appartenait, non pas à l'employeur d'établir l'effectivité d'un tel entretien, mais à la salariée d'en démontrer l'absence, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé, ce faisant, l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 dudit code ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, afin d'établir l'organisation effective des entretiens individuels annuels sur le temps de travail prévus par le code du travail, l'accord collectif du 4 octobre 2013 relatif à l'aménagement du temps de travail au sein de la société Axis Alternatives et l'avenant du 7 juillet 2014, en sus du système auto-déclaratif mis en place pour garantir aux salariés une amplitude et une charge de travail raisonnables, l'employeur avait produit différents échanges de mails évoquant la tenue de tels entretiens au profit de la salariée (cf. les pièces d'appel de l'employeur n° 9, 12 , 13 et 14 – productions n° 5 à 8) ; qu'au vu de ces éléments, les premiers juges avaient retenu que « ces entretiens ont été tenus » ; que pour dire la preuve de ces entretiens non rapportée et en déduire l'absence de véritable suivi du temps de travail de la salariée de nature à garantir son droit au repos, la cour d'appel s'est bornée à examiner le courriel adressé par la salariée le 26 juillet 2015 pour y relater la tenue d'entretiens annuels d'évaluation en novembre 2014 et le 17 juillet 2015 ou les vérifications effectuées à la suite du courriel d'une cliente à la fin du mois de juillet 2015 ; qu'en limitant son examen à ces seuls éléments, sans analyser, même sommairement, les autres mails produits par l'employeur lesquels avaient déterminé la décision des premiers juges, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée diverses sommes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de congés payés sur ce rappel et d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos ;

ALORS QUE le salarié qui sollicite le paiement d'heures supplémentaires doit présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, pour retenir que la salariée avait accompli des heures supplémentaires durant les mois de mars à juillet 2014, la cour d'appel s'est bornée à constater que si les quelques courriels professionnels envoyés entre 2012 et 2015 à des heures tardives consistaient seulement en de simples accusés de réception à des messages envoyés durant les heures de bureau, en des messages dont elle avait pris l'initiative pour informer de son absence à une réunion le lendemain ou pour solliciter de collaborateurs une réponse prompte ou encore en des réponses à des messages envoyés dans la journée précédente à des heures de bureau sans que le contenu de ses messages permettent de retenir que l'employeur avait entendu obliger la salariée à une réponse ne pouvant être différée jusqu'au prochain jour de travail, la salariée versait aux débats des déclarations de temps pour les périodes de mars à juillet 2014 faisant état d'un temps 100% facturable aux clients dont elle déduisait, sans être contredite par l'employeur lequel ne produisait aucun élément, l'impossibilité de se livrer à un autre travail que celui réalisé en clientèle sans avoir à effectuer des heures supplémentaires ; qu'en se basant sur ces seuls éléments, lorsque les déclarations de temps précitées se bornaient à renvoyer à un pourcentage de la journée dédiée à une activité déterminée sans la moindre indication horaire, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé que la salariée produisait des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétendait avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée une somme à titre d'indemnisation pour non-respect de la contrepartie obligatoire en repos ;

1°) ALORS QUE la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite Syntec ne prévoit, au profit des cadres, aucun contingent annuel dérogatoire à celui issu de l'article D. 3121-14-1 du code du travail, soit 220 heures ; qu'en l'espèce, il était constant que cette convention collective était applicable à la relation contractuelle et que si l'entreprise appliquait en outre un accord collectif dit d'aménagement du temps de travail, celui-ci ne dérogeait pas à ladite convention collective en particulier s'agissant du contingent annuel applicable ; qu'en appréciant le dépassement du contingent annuel au-delà de 150 heures, lorsque la convention collective applicable ne prévoyait pas un tel contingent pour les salariés revêtant la qualité de cadre tels que l'intéressée, la cour d'appel a violé l'article 33 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite Syntec, l'article L. 3121-11, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, du code du travail et l'article D. 3121-14-1 dudit code ;

2°) ALORS subsidiairement QU'en affirmant que le contingent conventionnel avait été dépassé à une reprise en 2014, sans faire ressortir en quoi le seul fait pour la salariée d'avoir accompli des heures supplémentaires sur une période réduite de quelques mois (de mars à juillet 2014), en ce compris une semaine d'absence pour maladie au mois de mars et à compter du 27 juillet, avait entrainé un dépassement du contingent annuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-11 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 l'article 18 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement de la salariée nul, de l'AVOIR condamnée à lui verser des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés sur ce préavis, de dommages-intérêts pour licenciement nul, de dommages-intérêts pour harcèlement moral et de dommages-intérêts pour discrimination ;

1°) ALORS QUE si l'existence d'un motif économique de licenciement ne caractérise pas, à elle seule, l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse, une telle impossibilité est caractérisée en cas de suppression du poste du salarié due à une réorganisation de l'entreprise consécutive à des difficultés économiques ; qu'en l'espèce, la salariée avait vu son contrat de travail rompu en raison de « l'impossibilité de maintenir [son] contrat de travail pour [des] motifs (?) totalement étrangers à [son] état de grossesse » tirés de la suppression de son poste de consultant manager en conséquence d'une réorganisation de l'entreprise (recentrage de son activité sur son coeur de métier) consécutive à des difficultés économiques ; qu'en se bornant à retenir que l'existence d'une cause économique ne caractérisait pas à elle seule l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, sans rechercher si la réorganisation invoquée n'avait pas concrètement rendu impossible le maintien du contrat de travail de la salariée en ce qu'elle avait entrainé la suppression de son poste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1225-4, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

2°) ALORS QUE la baisse de plusieurs indicateurs économiques et en particulier du résultat d'exploitation de l'entreprise caractérise des difficultés économiques ; qu'en l'espèce, les premiers juges avaient constaté qu'entre 2015 et 2016, la société Axis Alternatives avait enregistré une baisse de son résultat d'exploitation (994 636 en 2015 contre 710 595 euros en 2016), de son résultat courant avant impôts (998 267 euros en 2015 contre 713 992 euros en 2016), de son chiffre d'affaires (9 520 915 en 2015 contre 9 012 790 en 2016) et de son bénéfice (764 023 en 2015 contre 762 314 euros en 2016) ; qu'en affirmant que l'employeur ne justifiait pas plus qu'en première instance, de l'existence des difficultés économiques invoquées à l'appui de la rupture du contrat de travail de la salariée, lorsqu'il ressortait des énonciations du jugement que celui-ci établissait la baisse significative de plusieurs indicateurs économiques sur les exercices précédent la rupture, et en particulier de son résultat d'exploitation, la cour d'appel a violé l'article L.1233-3 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable au litige ;

3°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, afin d'établir les vaines recherches de reclassement entreprises, la société Axis Alternatives produisait un courrier adressé par la directrice des ressources humaines, le 19 avril 2016, aux associés de la société Axis Alternatives, seule société française du groupe, afin de les interroger sur les possibilités de reclassement de la salariée existant dans l'entreprise et les réponses négatives obtenues (cf. production n° 14) ; qu'étaient en outre versées aux débats les correspondances échangées entre la société et la salariée sur son souhait éventuel d'être reclassée dans une autre société du groupe située à l'étranger dont il ressortait que l'intéressée « ne souhait[ait] pas que [l'employeur] étend[e] [ses] recherches en dehors de la France » (cf. productions n° 15 à 17) ; qu'en affirmant que l'employeur ne démontrait pas avoir mis en oeuvre sérieusement l'obligation de reclassement lui incombant sans examiner, serait-ce sommairement, les pièces précitées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé la mise à pied du 6 octobre 2015 et de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée des sommes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et de dommages-intérêts pour discrimination ;

ALORS QUE lorsque le salarié conteste la sanction qui lui a été notifiée, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier ladite sanction au vu des éléments fournis tant par l'employeur que par le salarié ; qu'en l'espèce, la salariée avait fait l'objet d'une mise à pied de trois jours pour avoir faussement déclaré dans ses feuilles de temps être en « inter contrat » ou en « chantier interne » au cours de plusieurs journées ou demi-journées du mois de juillet 2015, ce qui avait notamment conduit une cliente à se plaindre auprès de l'un des associés de la société Axis Alternatives, le 27 juillet 2015, des absences fréquentes de la salariée et de la difficulté à faire avancer les sujets ; que pour écarter ce grief, la cour d'appel s'est bornée à relever que la salariée justifiait avoir, aux dates litigieuses, correspondu par courriels avec d'autres salariés de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir en quoi l'envoi desdits courriels, quelques minutes aux dates concernées, était de nature à démontrer la réalité d'une présence effective de la salariée en inter-contrat ou en chantier durant toute la journée ou la demi-journée correspondante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1333-1 du code du travail.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :
SUBSIDIAIRE

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée des sommes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et de dommages-intérêts pour discrimination ;

ALORS QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions des parties reprises au dispositif de leurs écritures ; que si, au dispositif de ses écritures transmises le 7 septembre 2020, la salariée invitait la cour d'appel à « constater que Mme [C] [B] a fait l'objet de harcèlement moral de la part de son employeur ayant donné lieu à une dégradation de ses conditions de travail », elle ne sollicitait de ce chef aucune condamnation indemnitaire spécifique ; qu'en condamnant la société Axis Alternatives à payer à la salariée des dommages et intérêts pour harcèlement moral, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé, ce faisant, l'article 4 du code de procédure civile.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :

SUBSIDIAIRE

La société Axis alternatives fait grief à la décision attaquée de l'AVOIR condamnée à verser à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts pour discrimination ;

1°) ALORS QU'en vertu du principe de la réparation intégrale du préjudice, les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi par elle sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; que pour allouer à la salariée des dommages et intérêts pour discrimination en sus d'une indemnité pour licenciement nul, la cour d'appel s'est bornée à relever que l'intéressée avait été licenciée pour des motifs non démontrés alors qu'elle était enceinte et que sa situation était connue de l'employeur ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir en quoi cette situation avait causé à la salarié un préjudice distinct de celui déjà réparé par l'indemnité pour licenciement nul, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé, ensemble l'article 1382 du code civil devenu l'article 1240 dudit code ;

2°) ALORS à supposer que l'intégralité des agissements venant au soutien du harcèlement ait été retenue comme fondant également la discrimination QUE le juge ne peut accorder des dommages et intérêts pour discrimination sans relever l'un des motifs prohibés par l'article L. 1132-1 du code du travail, ni faire ressortir l'existence d'un lien entre celui-ci et les mesures discriminatoires alléguées ; que pour condamner l'employeur à indemniser la salariée « au titre de la discrimination », la cour d'appel s'est bornée à relever toute une série d'agissements de l'employeur (un licenciement prétendument illicite, le prononcé d'une mise à pied jugée injustifiée, l'absence de sanction face à des propos dégradants tenus à l'endroit de la salariée, des retards de traitement des arrêts de travail de la salariée) tout en constatant que la salariée ne justifiait pas que l'annonce de sa grossesse en avril 2013 avait eu une incidence sur son évolution professionnelle ou qu'elle aurait subi un retard de carrière par rapport à d'autres collègues masculins ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir en quoi ces éléments disparates trouvaient leur cause dans un motif précis et unifié de discrimination, ni préciser lequel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2016-832 du 24 juin 2016.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-12817
Date de la décision : 30/03/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 décembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 mar. 2022, pourvoi n°21-12817


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.12817
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