La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2022 | FRANCE | N°20-17903

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 mars 2022, 20-17903


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mars 2022

Cassation partielle sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 295 F-B

Pourvoi n° Y 20-17.903

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 MARS 2022

M. [B] [T], domicilié [Adresse 2], a formé le

pourvoi n° Y 20-17.903 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-8), dans le litige l'opposant ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 mars 2022

Cassation partielle sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 295 F-B

Pourvoi n° Y 20-17.903

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 MARS 2022

M. [B] [T], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 20-17.903 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-8), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de la Côte d'Azur, défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [T], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur, venant aux droits de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de la Côte d'Azur, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er février 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 décembre 2019), la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de la Côte d'Azur, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF), a notifié à M. [T] (le cotisant) plusieurs mises en demeure pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard dues pour la période comprise entre le mois d'octobre 2014 et le deuxième trimestre 2017.

2. Le cotisant a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. Le cotisant fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement le condamnant au paiement d'une somme de 2 000 euros à titre d'amende civile, alors « que l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale ayant été abrogé au 1er janvier 2019 par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, la cour d'appel ne pouvait confirmer le jugement entrepris, fût-il antérieur à l'abrogation, en tant qu'il avait condamné le cotisant au paiement d'une amende sur le fondement de ce texte ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 11 du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. L'URSSAF conteste la recevabilité du moyen au motif qu'il est nouveau et incompatible avec la thèse soutenue par le cotisant devant la cour d'appel.

6. Cependant, le moyen ne se prévalant d'aucun fait qui n'ait été constaté par la cour d'appel, est de pur droit et peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation.

7. En outre, il n'est pas incompatible avec la thèse antérieurement soutenue par le cotisant.

8. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 2 du code civil et 17, III, du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 :

9. Les dispositions du second de ces textes abrogeant l'article R. 144-10, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, selon lequel une amende civile peut être prononcée lorsque la procédure est jugée dilatoire ou abusive, sont d'application immédiate aux instances en cours.

10. L'arrêt confirme le jugement ayant condamné le cotisant au paiement d'une amende civile, tout en relevant que l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale, sur lequel se fonde l'URSSAF pour réclamer cette condamnation, a été abrogé.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un texte abrogé, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

14. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 9 et 10 que l'URSSAF doit être déboutée de sa demande en condamnation du cotisant au paiement d'une amende civile.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement ayant condamné le cotisant au paiement d'une amende civile, l'arrêt rendu le 13 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DÉBOUTE l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur de sa demande en condamnation du cotisant au paiement d'une amende civile.

Condamne l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées tant devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence que devant la Cour de cassation ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. [T]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué par M. [T] encourt la censure ;

EN CE QU' il a, confirmant le jugement, rejeté les contestations élevées par M. [T], débouté M. [T] de ses demandes et constaté que M. [T] était redevable de la somme totale de 34.707 euros au titre des cotisations dues pour les mois d'octobre 2014, décembre 2014, février 2015, mars 2015, juin 2015, juillet 2015, août 2015 et décembre 2015, ainsi que pour le 1er trimestre 2016, le 2e trimestre 2016, le 3e trimestre 2016, le 4e trimestre 2016, le 1e trimestre 2017 et le 2e trimestre 2017, outre la somme de 2203 euros au titre des majorations de retard ;

ALORS QUE, premièrement, une URSSAF ne dispose de la personnalité juridique que pour autant qu'elle a été régulièrement constituée, ses statuts ayant été déposés et agréés par l'autorité ministérielle compétente ; qu'il lui appartient, en cas de contestation, de justifier de sa constitution régulière ; qu'en décidant que l'URSSAF n'avait pas à produire les documents utiles à établir sa capacité juridique, quand M. [T] contestait la régularité de sa constitution, les juges du fond ont violé les articles L. 213-1, L. 216-1 et L. 281-4 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1353 nouveau [1315 ancien] du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, la mise en demeure doit permettre au cotisant de connaître la cause, la nature et le montant de ses obligations ; qu'à ce titre, il est requis qu'elle indique les bases et modes de calcul des sommes réclamées ; qu'en retenant que les mises en demeure sont motivées, sans s'expliquer, comme ils y étaient invités, quant au fait qu'elles ne comportaient aucun détail du calcul des sommes réclamées, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale ;

ALORS QUE, troisièmement, cause nécessairement un préjudice au cotisant le fait pour l'URSSAF de fractionner, en méconnaissance de l'article D. 642-1 du code de la sécurité sociale, l'exigibilité des cotisations, dès lors que cette pratique contraint le cotisant, qui entend contester les sommes réclamées, à multiplier les procédures ; qu'en retenant que M. [T] ne démontrait l'existence d'aucun préjudice résultant de la pratique de l'URSSAF, les juges du fond ont violé l'article 1382 ancien [1240 nouveau] du code civil, ensemble l'article D. 642-1 du code de la sécurité sociale.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué par M. [T] encourt la censure ;

EN CE QU' il a, confirmant le jugement, condamné M. [T] en paiement d'une somme de 2000 euros à titre d'amende civile ;

ALORS QUE, l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale ayant été abrogé au 1er janvier 2019 par le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018, la cour d'appel ne pouvait confirmer le jugement entrepris, fût-il antérieur à l'abrogation, en tant qu'il avait condamné M. [T] au paiement d'une amende sur le fondement de ce texte ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 11 du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-17903
Date de la décision : 17/03/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Contentieux général - Procédure - Procédure gratuite et sans frais - Limite - Recours dilatoire ou abusif - Amende civile - Domaine d'application - Loi plus douce - Portée

LOIS ET REGLEMENTS - Application immédiate - Instances en cours - Cas - Rétroactivité in mitius - Champ d'application - Sécurité sociale

Les dispositions de l'article 17, III, du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 abrogeant l'article R. 144-10, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, selon lequel une amende civile peut être prononcée lorsque la procédure est jugée dilatoire ou abusive, sont d'application immédiate aux instances en cours. Viole l'article 2 du code civil et l'article 17, III, du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, l'arrêt qui se fonde sur un texte abrogé pour confirmer le jugement ayant prononcé une amende civile


Références :

Article 17, III, du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 abrogeant l'article R. 144-10, alinéa 5, du code de la sécurité sociale

article 2 du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 mar. 2022, pourvoi n°20-17903, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.17903
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award