LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° W 21-80.235 F-D
N° 00219
GM
16 FÉVRIER 2022
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 16 FÉVRIER 2022
M. [F] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises du Gard, en date du 26 novembre 2020, qui, pour viols et agressions sexuelles, aggravés, l'a condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [F] [K], les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat des consorts [T] et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du juge d'instruction du 5 avril 2016, M. [F] [K] a été mis en accusation pour viol incestueux sur mineur de 15 ans par ascendant, viol sur mineur par personne ayant autorité sur la victime, agression sexuelle incestueuse sur mineur de quinze ans par ascendant et agression sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur la victime, et renvoyé devant la cour d'assises.
3. La cour d'assises de l'Ardèche a condamné M. [K] par arrêt du 28 novembre 2019.
4. M. [K] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [K] coupable de viol sur mineur de 15 ans, d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans par ascendant, et d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur la victime, alors « qu'en cas de décision de condamnation prononcée par la cour d'assises, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises et qui ont été exposés au cours des délibérations ; qu'en l'espèce, pour déclarer l'exposant coupable des faits visés à l'accusation, la feuille de motivation fait état, sans mieux les expliciter, des « déclarations réitérées et concordantes entre elles des jeunes plaignantes », du « caractère circonstancié », de ces déclarations, de la « confirmation, globalement, de ces dénonciations, par l'accusé », enfin des « déclarations mêmes de l'accusé » ; qu'en l'état de ces énonciations, d'ordre général, qui ne font nullement état, de manière précise, d'atteintes sexuelles, et notamment d'actes de pénétration sexuelle, ni d'éléments susceptibles de caractériser la violence, la contrainte, la menace ou la surprise au sens des articles 222-22 et suivants du code pénal, la cour d'assises n'a pas légalement justifié sa décision au regard de ces textes et a violé l'article 365-1 du code de procédure pénale, ensemble l'article 388 du même code. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 365-1 du code de procédure pénale :
7. Il résulte de ce texte qu'en cas de condamnation, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge, exposés au cours des délibérations, qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises.
8. Après que la cour d'assises a répondu positivement à l'ensemble des questions principales relatives à la culpabilité de l'accusé, la feuille de motivation énonce que la cour a retenu comme éléments déterminants de la culpabilité de M. [K] les déclarations, réitérées, circonstanciées et concordantes des jeunes plaignantes, la découverte par sa mère de « rougeurs » sur le sexe d'une d'entre elles, les conclusions des expertises qui les exemptent d'affabulation.
9. Elle fait état des aveux de l'accusé, à l'exception des faits de viol sur une seule des victimes, de la conscience que celui-ci avait des faits qu'il commettait et de l'absence de trouble psychique ou neuro-psychique relevé expressément par l'expert psychiatre.
10. En prononçant ainsi, la cour d'assises, dont aucune des énonciations ne précise sur quels éléments de violence, contrainte, menace ou surprise, requis par la loi, elle a fondé sa conviction pour déclarer coupable l'accusé des chefs poursuivis, et qui ne fait pas état de ce qu'elle a retenu des actes de pénétration sexuelle justifiant les condamnations des chefs de viols n'a pas justifié sa décision.
11. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises du Gard, en date du 26 novembre 2020, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de Vaucluse, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises du Gard et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize février deux mille vingt-deux.