La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2022 | FRANCE | N°20-15626

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 février 2022, 20-15626


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2022

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 206 F-D

Pourvoi n° Y 20-15.626

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 FÉVRIER 2022

L'association Léo Lagrange Centre-E

st, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 20-15.626 contre l'arrêt rendu le 12 mars 2020 par la cour d'appel de Colmar (chambre s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CA3

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2022

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 206 F-D

Pourvoi n° Y 20-15.626

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 FÉVRIER 2022

L'association Léo Lagrange Centre-Est, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 20-15.626 contre l'arrêt rendu le 12 mars 2020 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [I] [U], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi de Strasbourg, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'association Léo Lagrange Centre-Est, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de Mme [U], après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 12 mars 2020), Mme [U] engagée le 18 novembre 2002 en qualité d'éducatrice dans une crèche par l'association de gestion des équipements sociaux, occupait en dernier lieu les fonctions de directrice d'une halte-garderie et de coordinatrice de quatre structures, son contrat de travail ayant été transféré à l'association Léo Lagrange Centre-Est à laquelle a été confiée une délégation du service public.

2. Licenciée le 20 janvier 2015, elle a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à verser à la salariée des dommages-intérêts, alors « que si aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, les faits antérieurs à deux mois peuvent être pris en compte s'ils sont de la même nature que les fautes commises postérieurement ; qu'en écartant, comme prescrits, l'ensemble des faits antérieurs au 3 octobre 2014, sans rechercher s'ils n'étaient pas de la même nature que les faits non prescrits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail. »

Recevabilité du moyen

4. La salariée conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit.

5. Cependant, il résulte de la lecture des conclusions de l'employeur qu'il soutenait que les faits n'étaient pas prescrits.

6. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail :

7. Si aux termes de ce texte, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dès lors que le comportement du salarié s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai.

8. Pour dire prescrits certains faits reprochés à la salariée survenus entre le 16 octobre 2013 et le 31 juillet 2014, l'arrêt retient que l'employeur n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il n'a eu connaissance de ces faits qui ont fondé pour partie le licenciement que postérieurement au 3 octobre 2014, l'engagement de la procédure de licenciement ayant eu lieu le 3 décembre 2014, par la convocation de la salariée à l'entretien préalable.

9. En se déterminant ainsi, alors que la lettre de licenciement reprochait à la salariée plusieurs faits fautifs commis entre le 16 octobre 2013 et le 2 décembre 2014 caractérisant l'existence « de tensions sérieuses qui nuisent au climat de travail » et une opposition « récurrente avec la déléguée condamnant d'avance tout travail collaboratif », sans rechercher comme il lui était demandé, si les faits postérieurs au 3 octobre 2014 ne constituaient pas la réitération de faits de même nature, manifestant ainsi la persistance d'un comportement fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne Mme [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour l'association Léo Lagrange Centre-Est

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a jugé que le licenciement de Mme [U] était dépourvue de cause réelle et sérieuse, puis condamné l'Association LEO LAGRANGE à payer à Mme [U] la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE « La lettre du 20 janvier 2015, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée. Le 1er septembre 2012 notre établissements 'est vu confier la gestion des dispositifs 'petite enfance' de la ville d '[Localité 4]. Vous étiez alors salariée de l'association AGES et votre contrat de travail a été naturellement transféré à notre établissement. Vous occupez, depuis, la fonction de directrice de la Halte-Garderie en qualité de cadre de notre entreprise. La dimension de la structure à laquelle vous étiez attachée, permettant de dégager du temps, vous avez été identifiée pour assurer une fonction de coordination pédagogique sur l'ensemble des équipements petite enfance gérés par notre association, sur la commune. Pour ce faire, vous avez bénéficié d'une prime de mission de 50 points par avenant daté du 3 septembre 2012. Nous avons parfaitement conscience que le changement d'employeur et de méthode de travail que vous avez eu à connaître au moment du transfert a nécessité de votre part un temps d'adaptation. Et c'est ainsi que nous nous sommes laissé du temps pour évaluer notre collaboration. Mais vous avez rapidement adopté une attitude peu collaborative à l'égard de notre entreprise. En effet, à plusieurs reprises vous avez contesté la relation contractuelle établie pour votre mission de coordination au point d'en référer au président de notre association par courrier recommandé en date du 21 mai 2013 et ce malgré les différents échanges et multiples réponses que vous aviez déjà reçus de votre hiérarchie. Vous avez persisté à contester la situation, considérant que la mission de coordination qui vous était attribuée n'était pas valorisée, alors même que vous aviez, en date du 3 septembre 2012, signé un avenant stipulant l'attribution de 50 points de mission. C'est un véritable 'bras de fer' qu'il a fallu engager avec vous, pour vous faire entendre raison. Et vous n'avez cessé de polémiquer sur le contenu même de la coordination pédagogique, alors que le profil détaillant l'activité attendue vous avait été remis. L'ensemble de votre activité, ainsi que celle de vos collègues directrices de crèche, se réalise sous la responsabilité opérationnelle du délégué territorial àl'animation (DTA) en charge du secteur. Vous avez adopté une attitude extrêmement négative à l'égard de votre déléguée, Mme [S] [T], depuis sa nomination. En effet les difficultés vont croissant et vous développez un comportement de contestation et de défiance inacceptables. Cela se concrétise par une remise en cause permanente de ce qui vous est demandé et l'obligation de vous rappeler régulièrement ce qui est attendu de votre fonction, C'est dans un contexte d'accumulation de situations où votre attitude négative et critique crée la saturation, que nous avons décidé d'engager la procédure de licenciement dont vous faites l'objet. Nous avons, au cours de l'entretien préalable, évoqué les points suivants qui ne sont que quelques exemples des dysfonctionnements que nous relevons parmi de nombreux échanges, dans les relations professionnelles que vous avez établies au cours de ces derniers mois. Le 16 décembre 2013, après avoir remis votre élaboration budgétaire et alors que votre déléguée territoriale vous faisait remarquer les erreurs figurant à votre budget, vous avez, au cours de l'entretien, refusé de reconnaître vos approximations dans une attitude d'opposition et mis un terme à cet échange de façon unilatérale. Ce comportement vous a valu un rappel à l'ordre par courrier du 24 décembre 2013, dans lequel nous vous demandions déjà de changer de posture, les relations de tensions permanentes établies usant l'ensemble de vos interlocuteurs. Il s'en est suivi un nombre d'échanges, révélant les rapports de défiance et de contestation systématique de votre part à l'égard des attentes formées par votre DTA. Le 20 mai 2014, votre DTA après réception d'un tableau d'état des prestations CAF que vous aviez à lui transmettre vous fait remarquer qu'il n'est pas complet, qu'il lui manque des compléments nécessaires à la justification de l'activité et vous lui répondez que vous considérez avoir transmis toutes les données correspondant à sa demande. Par la suite, vous transmettez ce qui vous était demandé mais dans une forme qui n 'est pas conforme à la prescription initiale et qui va nécessiter de nos services de retraiter votre document. Le 18 juin 2014, Mme [T] est à nouveau conduite à constater des erreurs de calculs dans un cachier Excel pour lequel elle vous avait joint un tutoriel suffisamment explicite. Dans ce message, elle vous rappelle également que vous deviez, au 27 mai, rendre un tableau de synthèse des actions mises en oeuvre dans le cadre de votre mission de coordination. Puis, le 25 juin, elle vous indique qu'une fois de plus vous n'avez pas réalisé le travail demandé et que ce que vous avez produit ne correspond pas à la demande pourtant précise. Le 30 juillet 2014, à son retour de congés, Mme [T] répond à votre mail du 30 juin dans lequel vous trouvez à justifier de ne pas avoir fait le travail demandé. Elle vous annonce que votre manque d'implication dans vos missions et la résistance dont vous faites preuve pour chaque transmission d'information ne sont pas acceptables. Le 31 juillet, on vous demande les fiches horaires mensuelles, et par mail du er août, vous vous positionnez encore en contestataire considérant que ces fiches ne sont plus nécessaires et informez votre responsable que vous avez arrêté de les renseigner depuis janvier 2013. Mme [T] vous demande alors de reprendre ces fiches à votre retour de congés. Le 20 octobre, alors que vous demandez par mail à votre DTA la copie de votre exemplaire GREC (gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences), vous déclarez qu'elle aurait ajouté des éléments après que vous avez apposé votre signature. Le 27 novembre et le 2 décembre vous écrivez ne plus vouloir organiser le remplacement de salariés absents au sein de votre structure considérant que ceci ne relève pas de votre responsabilité mais de celle de votre DTA. Le 2 décembre, Mme [T] est contrainte de vous rappeler les procédures de départ en formation car vous avez inscrit une salariée et vous-même à des formations sans attendre l'accord préalable de votre hiérarchie. Sans motif et sans justification légitimes, malgré plusieurs demandes écrites de votre DTA, vous n'avez pas suivi la formation 'responsabilité civile et pénale' à destination des directrices de crèche. Et le 24 novembre, vous écrivez que les dates de fbrmation, vous arrivant trop tardivement, vous ne pourrez pas participer à la formation, alors que vous avez été convoquée un mois avant celle-ci, Face aux problèmes électriques rencontrés sur votre structure, vous avez considéré que ce n'était pas à vous de trouver une solution, puis par mail du 4 décembre, vous vous permettez d'interpeller votre DTA sur cette question en mettant la coordinatrice de la commune en copie. Isolés, ces faits pourraient paraître anodins, mais cumulés ils dénotent une posture inacceptable de la part d'un cadre de notre association qui se doit d'assumer ses responsabilités et d'établir une relation constructive avec ses interlocuteurs. C'est en effet dans le cumul de ces éléments factuels que vient se traduire la saturation et s'établir la réalité d'un profond désaccord à l'origine de tensions sérieuses qui nuisent au climat de travail et vous opposent de façon récurrente à votre déléguée en condamnant d'avance tout travail collaboratif Cet état d'esprit alourdit considérablement le travail et génère une perte de temps et d'énergie, pour votre responsable, qui n'est pas justifiée, Aussi, au terme de l'entretien que nous avons eu le 5 janvier 2015 et compte tenu de l'ensemble des faits que nous avons relevés dans la présente lettre, nous sommes au regret de vous informer que nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. Sur les faits antérieurs au 3 octobre 2014. L'article L. 1332-4 du code du travail dispose : "Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance,..". Les faits antérieurs de plus de deux mois du jour où l'employeur en a eu connaissance peuvent également être poursuivis disciplinairement s'ils se sont poursuivis, répétés ou renouvelés dans ce délai, à la condition qu'ils soient de même nature. Mme [U] soulève la prescription des faits antérieurs au 3 octobre 2014, et l'association Léo Lagrange Centre Est rétorque qu'elle "ne considère pas ces faits comme fautifs, mais comme une cause objective de rupture du contrat de travail", de sorte que la prescription ne peut pas être invoquée. Toutefois, et d'une part, il ressort de manière non équivoque que les faits relatés dans la lettre de licenciement sont de nature disciplinaire, étant, au surplus, observé que l'association Léo Lagrange Centre Est précise dans ses écritures qu'elle n'invoque pas l'insuffisance professionnelle. D'autre part, l'association Léo Lagrange Centre Est n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'elle n'a eu connaissance des premiers faits qui ont fondé le licenciement que dans le délai de deux mois ayant précédé le 3 décembre 2014, date de la convocation de la salariée à l'entretien préalable, soit le 3 octobre 2014 au plus tard. Il s'ensuit que les faits antérieurs à cette date du 3 octobre 2014 sont prescrits. Sur les faits postérieurs au 3 octobre 2014. Il convient d'examiner les cinq faits postérieurs au 3 octobre 2014 et qui sont contestés par la salariée. En premier lieu, il est reproché à Mme [U] d'avoir déclaré que Mme [T], déléguée territoriale à l'animation, aurait ajouté des éléments à son évaluation après qu'elle a apposé sa signature. En effet, par courriel du 20 octobre 2014, Mme [U] a demandé à [K] [T] de lui transmettre un exemplaire de son évaluation en précisant "... nous [les directrices] n 'avons pas eu l'occasion de le consulter ... De plus en ce qui me concerne, vous avez ajouté des éléments suite à ce que j'ai apposé ma signature". Ces allégations sont formulées de manière affirmative, et Mme [U], qui ne justifie pas de leur véracité, ne peut valablement soutenir qu'il s'agissait d'une simple opinion qui relèverait de la liberté d'expression du salarié, alors qu'il lui appartenait d'attendre la transmission de son évaluation pour formuler ses observations et de s'abstenir d'émettre des critiques blessantes, portant manifestement atteinte à l'honneur du responsable évaluateur de l'entretien. Le premier grief est donc caractérisé. En second lieu, il est reproché à Mme [U] d'avoir écrit dans dans ses courriels en date des 27 novembre 2016 et 2 décembre 2016 ne plus vouloir organiser le remplacement de salariés absents au sein de sa structure. Or, force est de constater que ces courriels concernaient les difficultés rencontrées pour remplacer un agent d'entretien en congés annuels, et que l'employeur ne justifie pas de ce que ce type de remplacement relevait de la mission de la salariée. D'ailleurs, le profil de poste versé aux débats, et qui n'est même pas signé par la salariée, limite la possibilité de recrutement par Mme [U] aux seuls animateurs occasionnels. Tel n'est pas le cas. Il s'ensuit que le deuxième grief n'est pas caractérisé. En troisième lieu, il est reproché à Mme [U] de n'avoir pas suivi la formation "responsabilité civile et pénale" à destination des directrices de crèche, et qui s'est déroulée à [Localité 5] le 27 novembre 2014. En effet, son employeur lui a rappelé, par courriel du 18 novembre 2014, que cette formation n'était pas optionnelle puisqu'il s'agissait de connaissances et outils qu'elle devait maîtriser en qualité de directrice. Bien qu'elle ait été invitée, par ce courriel et par un deuxième du 21 novembre 2014, soit avant la formation, à justifier des raisons de son absence, Mme [U] n'a donné aucune suite. Elle ne s'en est pas expliquée non plus dans la présente procédure, se contentant d'évoquer une absence du 4 décembre 2014 qui ne lui est pas reprochée. Le troisième grief est donc caractérisé. En quatrième lieu, il est reproché à Mme [U] d'avoir procédé à son inscription t à celle d'une autre salariée à des formations, sans attendre l'accord préalable de sa hiérarchie. [K] [U] ne justifie pas avoir sollicité cet accord pour s'inscrire à une formation qui était prévue le 28 novembre 2014, et pour inscrire [K] [P] [Z], salariée de l'association, à une formation qui a eu lieu du 2 au 4 décembre 2014. Il s'ensuit que le quatrième grief est caractérisé. En dernier lieu, il est reproché à Mme [U] de considérer que ce n'était pas à elle de trouver une solution aux problèmes électriques rencontrés sur sa structure, et de s'être permise d'interpeller à ce sujet sa supérieure hiérarchique, par courriel du 4 décembre 2014, en mettant la coordinatrice de la commune en copie. Toutefois, il ressort des courriels échangés que Mme [U] se préoccupait des problèmes de sécurité au sein de sa structure depuis un "départ de feu dans la buanderie", et que la coordinatrice de la commune était toujours associée à ces échanges. Si effectivement une maladresse au niveau de la forme peut être relevée par rapport au courriel incriminé, le but recherché par Mme [U] consistait davantage à connaître rapidement la conduite à tenir lors de la survenance des problèmes électriques récurrents, lesquels étaient susceptibles de mettre en danger la sécurité des usagers et du personnel. Il s'ensuit que le cinquième grief n'est pas caractérisé. Ainsi, trois griefs sont retenus à l'encontre de la salariée. Cependant, il s'agit de manquements mineurs qui ne rendaient pas impossible le maintien de Mme [U] dans l'association. Dans ces conditions, la sanction du licenciement pour ces griefs était disproportionnée, d 'autant que Mme [U] n'avait jamais fait l'objet d'une sanction disciplinaire et qu'elle recherchait surtout une clarification de ses tâches dans un cadre précis depuis le transfert de son contrat de travail à son nouvel employeur ».

ALORS QUE, premièrement, si aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, les faits antérieurs à deux mois peuvent être pris en compte s'ils sont de la même nature que les fautes commises postérieurement ; qu'en écartant, comme prescrits, l'ensemble des faits antérieurs au 3 octobre 2014, sans rechercher s'ils n'étaient pas de la même nature que les faits non prescrits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;

ALORS QUE, deuxièmement, lorsque le licenciement est prononcé pour cause réelle et sérieuse, les fautes reprochées au salarié n'ont pas à rendre le maintien du salarié au sein de l'entreprise impossible ; qu'en retenant que le licenciement de Mme [U] était dépourvue de cause réelle et sérieuse aux motifs que les fautes du salariés ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-1, et par fausse application l'article L. 1234-1 du code du travail ;

ALORS QUE, troisièmement, le fait que le salarié n'ait pas fait l'objet d'une sanction disciplinaire préalablement à son licenciement n'est pas de nature à priver le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en ajoutant, pour considérer que le licenciement était une sanction disproportionnée, que Mme [U] n'avait jamais fait l'objet d'une sanction disciplinaire, la cour d'appel qui s'est fondée sur une circonstance inopérante, a violé l'article L. 1232-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-15626
Date de la décision : 16/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 12 mars 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 fév. 2022, pourvoi n°20-15626


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.15626
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award