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09/02/2022 | FRANCE | N°20-19405

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 février 2022, 20-19405


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 février 2022

Cassation partielle

M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 111 F-D

Pourvoi n° F 20-19.405

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 FÉVRIER 2022<

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1°/ M. [T] [B], domicilié [Adresse 3],

2°/ la société FJ Arts, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

3°/ la soci...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 février 2022

Cassation partielle

M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 111 F-D

Pourvoi n° F 20-19.405

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 FÉVRIER 2022

1°/ M. [T] [B], domicilié [Adresse 3],

2°/ la société FJ Arts, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

3°/ la société Les Arts, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

4°/ M. [V] [P], domicilié [Adresse 1], agissant en qualité de mandataire judiciaire des sociétés FJ Arts et Les Arts,

5°/ la société de Saint-Rapt-Bertholet, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], agissant en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés FJ Arts et Les Arts,

ont formé le pourvoi n° F 20-19.405 contre l'arrêt rendu le 13 février 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-3), dans le litige les opposant à la société Caisse d'épargne Cépac, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boutié, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [B], des sociétés FJ Arts et Les Arts, de M. [P], ès qualités, et de la société de Saint-Rapt-Bertholet, ès qualités, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Caisse d'épargne Cépac, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Boutié, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 février 2020), la société Caisse d'épargne et de prévoyance Provence-Alpes-Corse (la banque) a, le 7 juillet 2010, consenti à la société FJ Arts un prêt destiné à l'acquisition d'un fonds de commerce. Le remboursement de ce prêt a été garanti par un nantissement sur ledit fonds, la caution solidaire de la société Les Arts et le cautionnement solidaire de M. [B].

2. Le 12 juin 2015, la banque a assigné les sociétés FJ Arts, Les Arts et M. [B] en paiement, notamment, des sommes dues au titre de ce prêt, dont elle avait préalablement prononcé la déchéance du terme. La société Les Arts lui a opposé la déchéance du droit aux intérêts pour manquement à son obligation d'information annuelle et au premier incident de paiement à l'égard de la caution.

3. Le 25 octobre 2018, la société Les Arts a été mise en redressement judiciaire. M. [P] et la société de Saint-Rapt-Bertholet ont été désignés respectivement mandataire et administrateur judiciaires.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. La société Les Arts fait grief à l'arrêt de fixer la créance de la banque à son passif, en sa qualité de caution, à titre chirographaire, à la somme de 152 761,52 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 25 octobre 2018, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour dire que la banque était déchue du droit à intérêts vis-à-vis des cautions, les sociétés FJ Arts et Les Arts soutenaient que "la banque ne justifie pas avoir respecté son obligation d'information annuelle ni son obligation d‘information dès le premier incident à l'égard de la caution en contravention avec les articles L. 313-22 du code monétaire et financier et L. 341-6 du code de la consommation" ; qu'en relevant, pour fixer la créance de la banque au passif de la société Les Arts à un certain montant comportant des intérêts, que les sociétés FJ Arts et Les Arts visaient le seul article L. 341-6 du code de la consommation qui ne s'applique pas à une caution personne morale, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

6. Pour rejeter la demande de la société Les Arts tendant au rejet des prétentions au titre des actes de cautionnement, l'arrêt, après avoir relevé que la banque n'alléguait pas avoir respecté cette obligation, retient que l'article L. 341-6 du code de la consommation, seul visé, ne s'applique qu'à la personne physique et non à la personne morale.

7. En statuant ainsi, alors que c'est sous le visa, non seulement de l'article L. 341-6 du code de la consommation mais aussi des articles L. 313-12 et suivants du code monétaire et financier qu'au dispositif de leurs conclusions, les sociétés FJ Arts et Les Arts demandaient aux juges du second degré de retenir que la banque n'avait pas respecté son obligation d'information annuelle de la caution, ni d'information dès le premier incident de paiement, et de la débouter de ses demandes au titre des actes de cautionnements, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe au passif de la société Les Arts, en sa qualité de caution, à titre chirographaire la somme de 152 761,52 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 25 octobre 2018, l'arrêt rendu le 13 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Caisse d'épargne Cépac aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du neuf février deux mille vingt-deux, et signé par M. Ponsot, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Guérin, empêché.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. [B], les sociétés FJ Arts et Les Arts, M. [P], ès qualités, et la société de Saint-Rapt-Bertholet, ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La Sarl FJ Arts, la Sarl Les Arts, M. [B], la Selarl de Saint-Rapt-Bertholet ès qualités et M. [V] [P] ès qualités reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Sarl FJ Arts, M. [T] [B], la Selarl de Saint Rapt Bertholet et Me [V] [P] de toutes leurs demandes au titre de la rupture d'un concours bancaire, d'avoir fixé la créance de la Cépac au passif de la Sarl FJ Arts à titre chirographaire à la somme de 32 008,81 euros outre intérêts au taux contractuel, d'avoir fixé la créance de la Cépac au passif de la Sarl FJ Arts, à titre privilégié au titre du prêt à la somme de 152 791,52 euros outre intérêts au taux contractuel à compter du 25 octobre 2018, d'avoir fixé la créance de la Cépac au passif de la Sarl Les Arts, en sa qualité de caution, à titre chirographaire à la somme de 152 761,52 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 25 octobre 2018, d'avoir condamné M. [T] [B], en sa qualité de caution solidaire, à payer à la Cépac la somme de 112 189,58 euros, outre intérêts au taux contractuel non majoré, à compter du 14 avril 2015 et d'avoir rejeté les demandes de dommages-intérêts de la Sarl FJ Arts de 16 428,40 euros au titre des frais bancaires ;

1°) ALORS QUE, tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit consent à une entreprise, ne peut être interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis qui, sous peine de nullité de la rupture du concours, ne peut être inférieur à soixante jours ; que l'avance de fonds qu'effectue régulièrement une banque lorsque, dès la réception d'un chèque, elle inscrit son montant au crédit du compte d'un client et lui permet ainsi d'utiliser immédiatement ces fonds, constitue un concours bancaire auquel il ne peut être mis fin sans respecter un délai de préavis ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'en conformité avec la convention de compte « libre convergence » conclue par la société FJ Arts, la Cépac, dès réception d'un chèque, a, pendant plusieurs mois, inscrit son montant au crédit du compte de sa cliente et lui a ainsi, par cette avance de fonds, permis de les utiliser immédiatement ; qu'en affirmant que cette avance ne caractérisait pas l'octroi d'un concours bancaire, pour en déduire que la Cépac avait pu y mettre fin sans préavis, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 313-12 du code monétaire et financier ;

2°) ALORS QUE, tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit consent à une entreprise, ne peut être interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis qui, sous peine de nullité de la rupture du concours, ne peut être inférieur à soixante jours ; qu'en se bornant à relever, pour réfuter l'existence d'un mécanisme de paiements croisés entre les sociétés du groupe orchestré par la Cépac, qu'il résultait des courriels qu'elle avait échangés avec M. [B] ès-qualités qu'elle l'avait seulement avisé de la présentation de chèques ou de prélèvements susceptibles d'entraîner un solde débiteur et invité à régulariser chaque opération, sans pour autant accepter que la couverture de ces comptes s'effectue au moyen de chèques eux-mêmes sans provision émis par les sociétés du groupe, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions récapitulatives des exposants, p. 16 et s.), si la Cépac, tout à la fois banquier tiré et banquier présentateur, qui était par conséquent la seule banque, par l'intermédiaire d'un chargé d'affaires commun à l'ensemble des sociétés du groupe, à pouvoir différer le paiement de chèques qu'elle avait elle-même encaissés sur un autre compte, et qui octroyait suivant « la liste des mouvements en suspens de régularisation (pièce 9) » un délai de régularisation de huit jours, n'avait pas ainsi fait fonctionner un système facilitant la trésorerie du groupe dont elle seule avait la maîtrise, en sorte qu'en y mettant un terme sans préavis, elle avait commis une faute, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

3°) ALORS QUE, les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, pour établir que la Cépac orchestrait le système de paiements croisés mis en place dans le groupe et s'était par conséquent immiscée fautivement dans la gestion des comptes, la société FJ Arts communiquait aux débats (pièce n° 22, conclusions p. 18) un courriel en date du 1er février 2019 de M. [U], Vice-Procureur de la république, précédant l'avis de classement sans suite de la plainte de la Cépac, informant les conseils des parties que « Les investigations ont établi que la CEPAC, depuis 2013, était informée du système de financement des trésoreries des sociétés par le jeu des dates d'encaissement/débit des chèques tirés/encaissés de l'une sur l'autre dans le cadre de conventions de trésorerie. Voire même qu'elle y avait participé activement, notamment par l'information (quasi) quotidienne du gérant des sociétés sur la situation des comptes à « régulariser » ; qu'en jugeant que la Cépac se contentait d'inviter la société FJ Arts à régulariser les mouvements en suspens sans s'expliquer sur la portée de cette pièce, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE, l'indication d'une date de valeur a pour seul objet de déterminer le montant des agios éventuellement dus par un client qui utilise le concours résultant de l'inscription immédiate du montant d'un chèque au crédit de son compte ; qu'en relevant, pour exclure tout forçage manuel ou application de conditions anormales dans le fonctionnement du compte, que le relevé de compte de la société FJ Arts pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2014 figurait des dates de valeur, la cour d'appel, qui a statué à la faveur d'une motivation impropre à écarter l'existence d'une gestion de fait par la Cépac des comptes des sociétés du groupe interrompue brutalement, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La Sarl Les Arts reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la créance de la Cépac à son passif, en sa qualité de caution, à titre chirographaire, à la somme de 152 761,52 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 25 octobre 2018 ;

ALORS QUE, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour dire que la banque était déchue du droit à intérêts vis à vis des cautions, les exposants soutenaient que « la Cépac ne justifie pas avoir respecté son obligation d'information annuelle ni son obligation d‘information dès le premier incident à l'égard de la caution en contravention avec les articles L. 313-22 du code monétaire et financier et L. 341-6 du code de la consommation » (p. 37) ; qu'en relevant, pour fixer la créance de la Cépac au passif de la Sarl Les Arts à un certain montant comportant des intérêts, que les exposants visaient le seul article L.341-6 du code de la consommation qui ne s'applique pas à une caution personne morale, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-19405
Date de la décision : 09/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 février 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 fév. 2022, pourvoi n°20-19405


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.19405
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