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08/02/2022 | FRANCE | N°21-82139

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 février 2022, 21-82139


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 21-82.139 F-D

N° 00154

RB5
8 FÉVRIER 2022

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 FÉVRIER 2022

La société [3] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, en date du 1er février 2021, qui, pour

blessures involontaires, l'a condamné à 75 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été pro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 21-82.139 F-D

N° 00154

RB5
8 FÉVRIER 2022

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 FÉVRIER 2022

La société [3] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, en date du 1er février 2021, qui, pour blessures involontaires, l'a condamné à 75 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [3], les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [H] [V], et les conclusions de M. Lesclous, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Joly, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 18 mars 2015, les gendarmes de [Localité 2] ont été requis pour se transporter sur le site de l'établissement de [Localité 1] de la société [3], établissement spécialisé dans l'activité de fabrication de poutrelles, concernant l'accident du travail d'un salarié, M. [H] [V].

3. Suite à cet accident, M. [V] a perdu l'usage d'un oeil. L'incapacité totale de travail a été fixée à quarante jours.

4. La société [3] a été poursuivie du chef précité et plus précisément, pour avoir, dans le cadre d'une relation de travail, par violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, involontairement causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois sur la personne de M. [V].

5. Le tribunal correctionnel a condamné la société à une peine de 75 000 euros d'amende.

6. Elle a relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société [3], prise en la personne de son représentant légal, au paiement d'une amende de 75 000 euros, alors « qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que ces exigences s'imposent aussi en ce qui concerne l'amende prononcée à l'encontre des personnes morales, qui prononçant en l'espèce une amende de 75 000 euros à l'encontre de la société [3] sans rechercher dans le dossier les éléments relatifs à la situation de la société [3], aux circonstances particulières de l'infraction, le cas échéant à ses ressources et à ses charges dont la cour aurait pu s'enquérir avant de fixer le montant de l'amende et de déclarer poursuivre un objectif de proportionnalité, dont les termes ne sont pas connus, ce qui ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, la cour d'appel a méconnu les articles 262-1, 132-20 du code pénal, ensemble 485 et 587 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 485-1 du code de procédure pénale :

9. Selon cet article, en matière correctionnelle, le choix de la peine doit être motivé au regard des dispositions des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, sauf s'il s'agit d'une peine obligatoire ou de la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction. Il en résulte que l'amende doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle, dont ses ressources et charges, en se référant aux éléments qui résultent du dossier et à ceux que le juge a sollicités et recueillis lors des débats.

10. Pour condamner la société [3] à 75 000 euros d'amende, l'arrêt énonce que le bulletin n° 1 du casier judiciaire de la société démontre que celle-ci est une habituée des tribunaux correctionnels, que les faits qui lui sont reprochés, loin d'être causés par des circonstances exceptionnelles ou conjoncturelles, sont le résultat de son manque constant de considération pour la loi et qu'eu égard à la gravité des infractions commises et à sa personnalité, une peine d'amende s'impose.

11. En se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le montant des ressources et des charges de la prévenue, qui était représentée à l'audience, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

13. La cassation sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure.

Examen de la demande fondée sur l'article 618-1 du code de procédure pénale

14. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de la société [3] étant devenue définitive par suite de la non admission du premier moyen, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de M. [V].
PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Montpellier, en date du 1er février 2021, mais en ses seules dispositions relatives à la peine, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

FIXE à 2 500 euros la somme que la société [3] devra payer à M. [H] [V] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit février deux mille vingt-deux.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 21-82139
Date de la décision : 08/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 01 février 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 fév. 2022, pourvoi n°21-82139


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.82139
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