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26/01/2022 | FRANCE | N°19-24258

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2022, 19-24258


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 janvier 2022

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 126 FS-D

Pourvoi n° K 19-24.258

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 JANVIER 2022

La société Adrexo, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2]

, a formé le pourvoi n° K 19-24.258 contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre section 1, chambre socia...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 janvier 2022

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 126 FS-D

Pourvoi n° K 19-24.258

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 JANVIER 2022

La société Adrexo, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 19-24.258 contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre section 1, chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [Y] [U], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Adrexo, de Me Le Prado, avocat de M. [U], et l'avis de Mme Wurtz, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 11 septembre 2019), M. [U], engagé le 25 octobre 2004 par contrat à temps partiel modulé en qualité de distributeur de journaux par la société Adrexo, a saisi la juridiction prud'homale, le 16 janvier 2014, de diverses demandes.

2. Le salarié a été licencié le 19 mars 2014.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première à cinquième branches

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la requalification du contrat de travail le liant au salarié en contrat de travail à temps plein, de le condamner à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la base du temps plein et au titre de la prime d'ancienneté, outre les congés payés afférents et les intérêts légaux, ainsi que de lui ordonner la délivrance de bulletins de paie rectifiés, alors :

« 1°/ que le dépassement de la limite du tiers de la durée du travail fixée par les stipulations de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 s'apprécie au regard de la durée de référence prévue au contrat, et non pas par rapport à une durée à temps complet ; que pour juger que le contrat de travail à temps partiel modulé devait être requalifié en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu que " le rapprochement avec le contrat de travail initial, les avenants, le tableau récapitulatif des horaires effectués mensuellement et les bulletins de paie fait apparaître que les horaires de modulation réalisés ont dépassé le tiers de l'horaire mensuel de référence : - à la baisse en février 2009 ; - à la hausse en avril et août 2009 ; - à la baisse en février et avril 2010 ; - à la hausse en juin, août, septembre, octobre et novembre 2010 ; à la hausse en mars, mai, juin, juillet, août et novembre 2011 ; à la hausse en février, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2012 ; à la hausse en janvier, février, mars, avril et mai 2013 ; sans que l'employeur ne justifie de travaux urgents ou d'un surcroît de travail pour les périodes de dépassement à la hausse " ; qu'en prenant ainsi en compte à tort la différence entre la durée de travail à temps plein et les heures payées au salarié, pour en déduire que la société Adrexo n'avait pas respecté la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des stipulations susvisées ;

2°/ que le non-respect de la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise ne justifie pas en soi la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, en retenant, pour requalifier le contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois et que " dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail ", a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des stipulations de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et de l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

3°/ que le juge ne saurait modifier l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties exposées dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu d'office que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois ; qu'en se déterminant ainsi, tandis que M. [U] n'avait pas allégué le dépassement du tiers de la durée de référence, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu d'office que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois ; qu'en statuant ainsi, sans avoir invité les parties à s'en expliquer en méconnaissance du principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

5°/ qu'en matière de contrat à temps partiel modulé, en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et/ou des délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, en affirmant que le renversement de la présomption de temps complet par l'employeur impliquait qu'il rapporte la preuve de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable à l'espèce. »

Réponse de la Cour

4. D'abord, la cour d'appel n'ayant pas requalifié le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps complet au motif que l'employeur n'avait pas respecté la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise, le moyen pris en ses deuxième à quatrième branches est inopérant.

5. Ensuite, la cour d'appel n'ayant pas retenu que l'employeur échouait à renverser la présomption simple de contrat de travail à temps complet au motif qu'il ne rapportait pas la preuve de la durée exacte convenue, le moyen en sa cinquième branche critique des motifs erronés mais surabondants.

6. Le moyen, qui en sa première branche manque en fait, n'est donc pas fondé.

Sur le moyen, pris en ses sixième et septième branches

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 6°/ que si dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé conclu dans le secteur de la distribution directe l'employeur doit respecter un délai de prévenance d'au moins sept jours, qui peut être réduit à trois jours en cas de circonstances exceptionnelles, lorsqu'il notifie au distributeur des horaires qu'il a unilatéralement fixés, sous peine de voir le contrat présumé à temps complet, un tel délai de prévenance ne s'impose pas en revanche lorsque les horaires sont fixés d'un commun accord par les parties ; que la cour d'appel, pour requalifier en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, a retenu, que "l'examen [des] feuilles de routes fait également apparaître très fréquemment une date d'édition du document 4 jours avant la date de la tournée de distribution" et que "dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail" ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations que M. [U] avait accepté les feuilles de route sur la base desquelles il a effectué des distributions, traduisant ainsi son accord sur la fixation de ses horaires et le délai de prévenance appliqué, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

7°/ qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en requalifiant en l'espèce le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, au motif que "l'examen [des] feuilles de routes fait également apparaître très fréquemment une date d'édition du document 4 jours avant la date de la tournée de distribution" et que "dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placé dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail", la cour d'appel a à tort déduit l'absence de renversement par l'employeur de la présomption de temps complet, d'éléments inférant seulement une présomption simple de temps complet, ce qui revenait à rendre irréfragable ladite présomption et à déduire automatiquement la requalification en temps complet d'éléments justifiant uniquement une présomption simple en ce sens ; qu'elle a, ce faisant, violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008. »

Réponse de la Cour

8. Selon l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, la convention ou l'accord collectif prévoit notamment : 7° les conditions et les délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié ; 8° les modalités et les délais selon lesquels ces horaires peuvent être modifiés, cette modification ne pouvant intervenir moins de sept jours après la date à laquelle le salarié en a été informé. Ce délai peut être ramené à trois jours par convention ou accord collectif de branche étendu ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement.

9. L'article 1.2 du chapitre IV « Statuts particuliers » de la Convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004 prévoit que, sous réserve d'un délai de prévenance de sept jours ouvrés, délai pouvant être exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés en cas d'accord d'entreprise prévoyant une contrepartie pour les salariés, les entreprises ou les établissements peuvent modifier la durée de l'horaire de travail ainsi que ses modalités de répartition initiales. Pour faire face à des situations imprévues ou des contraintes exceptionnelles, ce délai peut être réduit avec l'accord du salarié dans les cas suivants : surcroît temporaire d'activité ; travaux urgents à accomplir dans un délai limité ; absence d'un ou de plusieurs salariés.

10. Selon l'article 2.1 de l'accord d'entreprise de la société Adrexo du 11 mai 2005, le distributeur bénéficie d'une garantie de travail minimale par jour, semaine et mois travaillés, conforme à celles prévues par la convention collective de branche, soit au moins 2 heures par jour, 6 heures hebdomadaires et 26 heures par mois, qui seront respectées pour l'établissement du planning indicatif individuel. Ce planning individuel sera révisable à tout moment par l'employeur, moyennant une information donnée au salarié au moins sept jours à l'avance, ou au moins trois jours à l'avance en cas de travaux urgents ou surcroît d'activité, moyennant, en contrepartie, aménagement de l'horaire de prise des documents si le salarié le souhaite, ou avec un délai inférieur avec l'accord du salarié matérialisé par la signature de la feuille de route notamment en cas de nécessité impérative de service ou de surcroît exceptionnel d'activité ou de remplacement d'un salarié absent.

11. Il résulte de ces textes que la révision du planning individuel moyennant une information donnée au salarié dans un délai inférieur à sept jours nécessite que la modification intervienne dans les cas déterminés par les dispositions de l'accord collectif applicable.

12. Ayant constaté que l'employeur avait modifié le planning du salarié dans un délai inférieur à sept jours sans qu'il justifie de l'existence de travaux urgents ou d'un surcroît de travail, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il n'avait pas respecté les délais de prévenance.

13. Le moyen, qui, sous le couvert du grief de violation de la loi, ne tend en sa septième branche qu'à remettre en cause l'appréciation par les juges du fond de la valeur et de la portée des pièces produites dont ils ont déduit que l'employeur échouait à renverser la présomption de travail à temps complet en ne rapportant pas la preuve que le salarié, auquel les plannings n'avaient pas été communiqués dans les délais conventionnels, n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Adrexo et la condamne à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Adrexo

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la requalification du contrat de travail liant M. [U] à la société Adrexo en contrat de travail à temps plein, d'AVOIR condamné la société Adrexo à payer à M. [U] les sommes de 40.105 euros bruts pour la période de janvier 2009 à décembre 2013, outre la somme de 4.010 euros bruts au titre des congés payés afférents et de 2.601 euros bruts au titre de la prime d'ancienneté pour la même période, outre 260 euros au titre des congés payés afférents, d'AVOIR dit que les intérêts légaux sur les rappels de salaire et les congés payés seront calculés à compter du 21 janvier 2014 et d'AVOIR ordonné à la société Adrexo de délivrer à M. [U] des bulletins de paie rectifiés ou un bulletin de paie récapitulatif rectificatif ;

AUX MOTIFS QUE, sur l'absence de remise d'un planning de modulation à l'embauche, ainsi que chaque année 15 jours avant le début de la chaque période de modulation et l'absence d'indications horaires de travail pour la semaine suivante ; il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de ce qu'il a respecté les dispositions de l'accord de modulation du temps de travail relatives aux conditions et délais de notification au salarié des horaires de travail ; les productions font apparaître l'existence de plannings indicatifs individuels annuels lesquels détaillent le volume d'heures mensuelles, mais aucun justificatif n'est produit par l'employeur permettant d'établir le respect des délais d'envoi des plannings ; la requalification en contrat de travail à temps plein peut donc être encourue de ce chef, étant précisé qu'il s'agit seulement d'une présomption pouvant être combattue par l'employeur par la preuve contraire d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue et d'autre part de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler ; en l'espèce, l'employeur produit aux débats l'ensemble des feuilles de route signées par le salarié ainsi que les bulletins de paie et d'une partie des liste détaillées des salaires établies a posteriori ; chaque feuille de route précise le choix des jours de disponibilité du salarié pour la semaine suivante, en l'espèce, le lundi ou le lundi et le mardi, le lundi, mardi et mercredi ; l'examen de ces feuilles de route fait également apparaître très fréquemment une date d'édition du document 4 jours avant la date de la tournée de distribution ; de plus, le rapprochement avec le contrat de travail initial, les avenants, le tableau récapitulatif des horaires effectués mensuellement et les bulletins de paie fait apparaître que les horaires de modulation réalisés ont dépassé le tiers de l'horaire mensuel de référence : - à la baisse en février 2009 ; - à la hausse en avril et août 2009 ; - à la baisse en février et avril 2010 ; - à la hausse en juin, août, septembre, octobre et novembre 2010 ; à la hausse en mars, mai, juin, juillet, août et novembre 2011 ; à la hausse en février, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2012 ; à la hausse en janvier, février, mars, avril et mai 2013 ; sans que l'employeur ne justifie de travaux urgents ou d'un surcroît de travail pour les périodes de dépassement à la hausse ; dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation, était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail ; il sera donc fait droit à la demande de requalification du contrat de travail à temps plein ; sur les demandes de rappel de salaire ; par suite de la requalification du contrat de travail, M. [U] est bien fondé à obtenir le paiement d'un rappel de salaire correspondant à un temps plein ; il sera fait droit à sa demande de rappel de salaire, dont le calcul, vérifié par la cour, est explicité dans sa pièce n° 34, à hauteur de la somme de 40.105 euros bruts, outre les congés payés afférents ; par ailleurs, la convention collective de la distribution directe prévoit une prime d'ancienneté de 2,33 % pour 2 ans d'ancienneté, 3,33 % pour 3 ans d'ancienneté, 4,33 % pour 4 ans d'ancienneté, 5,33 % pour 5 ans d'ancienneté, 6,33 % pour 6 ans d'ancienneté, 7,33 % pour 7 ans d'ancienneté et 8,33 % pour 8 ans d'ancienneté et plus, dès lors, le salarié est fondé obtenir le paiement de cette prime sur la base de salaires faisant l'objet du rappel, soit la somme de 2.601 euros bruts, outre les congés payés afférents ; le jugement sera donc infirmé ;

1) ALORS QUE le dépassement de la limite du tiers de la durée du travail fixée par les stipulations de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 s'apprécie au regard de la durée de référence prévue au contrat, et non pas par rapport à une durée à temps complet ; que pour juger que le contrat de travail à temps partiel modulé devait être requalifié en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu que « le rapprochement avec le contrat de travail initial, les avenants, le tableau récapitulatif des horaires effectués mensuellement et les bulletins de paie fait apparaître que les horaires de modulation réalisés ont dépassé le tiers de l'horaire mensuel de référence : - à la baisse en février 2009 ; - à la hausse en avril et août 2009 ; - à la baisse en février et avril 2010 ; - à la hausse en juin, août, septembre, octobre et novembre 2010 ; à la hausse en mars, mai, juin, juillet, août et novembre 2011 ; à la hausse en février, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2012 ; à la hausse en janvier, février, mars, avril et mai 2013 ; sans que l'employeur ne justifie de travaux urgents ou d'un surcroît de travail pour les périodes de dépassement à la hausse » ; qu'en prenant ainsi en compte à tort la différence entre la durée de travail à temps plein et les heures payées au salarié, pour en déduire que la société Adrexo n'avait pas respecté la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des stipulations susvisées ;

2) ALORS en tout état de cause QUE le non-respect de la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise ne justifie pas en soi la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, mais seulement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, en retenant, pour requalifier le contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois et que « dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail », a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des stipulations de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et de l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

3) ALORS en tout état de cause QUE le juge ne saurait modifier l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties exposées dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois ; qu'en se déterminant ainsi, tandis que M. [U] n'avait pas allégué le dépassement du tiers de la durée de référence, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4) ALORS en tout état de cause QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a retenu d'office que la durée de travail effective du salarié avait varié au-delà du tiers de la durée du travail stipulée au contrat de travail certains mois ; qu'en statuant ainsi, sans avoir invité les parties à s'en expliquer en méconnaissance du principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

5) ALORS QU'en matière de contrat à temps partiel modulé, en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et/ou des délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, en affirmant que le renversement de la présomption de temps complet par l'employeur impliquait qu'il rapporte la preuve de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable à l'espèce ;

6) ALORS QUE si dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé conclu dans le secteur de la distribution directe l'employeur doit respecter un délai de prévenance d'au moins sept jours, qui peut être réduit à trois jours en cas de circonstances exceptionnelles, lorsqu'il notifie au distributeur des horaires qu'il a unilatéralement fixés, sous peine de voir le contrat présumé à temps complet, un tel délai de prévenance ne s'impose pas en revanche lorsque les horaires sont fixés d'un commun accord par les parties ; que la cour d'appel, pour requalifier en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, a retenu, que « l'examen [des] feuilles de routes fait également apparaître très fréquemment une date d'édition du document 4 jours avant la date de la tournée de distribution » et que « dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail » ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations que M. [U] avait accepté les feuilles de route sur la base desquelles il a effectué des distributions, traduisant ainsi son accord sur la fixation de ses horaires et le délai de prévenance appliqué, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

7) ET ALORS subsidiairement QU'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en requalifiant en l'espèce le contrat de travail à temps partiel modulé en contrat de travail à temps plein, au motif que « l'examen [des] feuilles de routes fait également apparaître très fréquemment une date d'édition du document 4 jours avant la date de la tournée de distribution » et que « dès lors, il y a lieu de retenir que le salarié, du fait du non-respect des délais de prévenance relatifs aux plannings individuels indicatifs annuels et du non-respect de l'horaire de modulation était placée dans une situation d'incertitude rendant impossible de prévoir son rythme de travail », la cour d'appel a à tort déduit l'absence de renversement par l'employeur de la présomption de temps complet, d'éléments inférant seulement une présomption simple de temps complet, ce qui revenait à rendre irréfragable ladite présomption et à déduire automatiquement la requalification en temps complet d'éléments justifiant uniquement une présomption simple en ce sens ; qu'elle a, ce faisant, violé l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-24258
Date de la décision : 26/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 11 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2022, pourvoi n°19-24258


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.24258
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