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12/01/2022 | FRANCE | N°20-21898

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 janvier 2022, 20-21898


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 janvier 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 54 F-D

Pourvoi n° R 20-21.898

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation en date du
15 septembre 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________

_________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JANVIER 2022

M. [N]...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 janvier 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 54 F-D

Pourvoi n° R 20-21.898

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation en date du
15 septembre 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 JANVIER 2022

M. [N] [S], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° R 20-21.898 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [X] [U], domiciliée [Adresse 1], prise en qualité de liquidateur de la société Baticom 61,

2°/ à l'AGS CGEA Ile-de-France Ouest, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [S], après débats en l'audience publique du 17 novembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Flores, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen , 25 avril 2019), M. [S] a été engagé par la société Baticom 61 à compter du 2 janvier 2012 en qualité de chef de chantier.

2. Le salarié a été placé en arrêt de travail à compter du 26 septembre 2012.

3. Le 21 juillet 2015, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Alençon afin d'obtenir notamment le paiement d'un rappel de salaire, d'une indemnité de congés payés et la production d'un justificatif d'adhésion à la médecine du travail.

4. Il a pris acte de la rupture du contrat de travail le 26 mai 2016.

5. Par jugement du 13 octobre 2016, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de l'employeur, la société MJA, prise en la personne de Mme [U], étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre de l'indemnité de congé payé, alors « qu'il incombe à l'employeur, débiteur de l'obligation du paiement de l'intégralité du paiement des jours de congés payés d'établir qu'il a exécuté son obligation ; que la cour d'appel qui a débouté le salarié au motif qu'il n'apportait aucune preuve de l'affiliation de la société Baticom 61 à la caisse de congés payés et de l'impossibilité pour cette dernière de les régler a inversé la charge de la preuve et violé les articles L. 3141-3, L. 3141-22 du code du travail et l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3141-12, L. 3141-14 et L. 3141-30 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et l'article 1315, devenu 1353, du code civil, interprétés à la lumière de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail :

7. Il résulte des textes susvisés qu'il appartient à l'employeur relevant d'une caisse de congés payés, en application des articles L. 3141-12, L. 3141-14 et L. 3141-30 du code du travail, interprétés à la lumière de l'article 7 de la directive 2003/88, de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité de bénéficier effectivement de son droit à congé auprès de la caisse de congés payés, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement. Seule l'exécution de cette obligation entraîne la substitution de l'employeur par la caisse pour le paiement de l'indemnité de congés payés.

8. Pour débouter le salarié de sa demande en fixation d'une créance à titre d'indemnité de congés payés l'arrêt retient que le salarié n'apporte aucun élément de preuve d'une absence d'affiliation de l'employeur à la caisse de congés payés et d'une impossibilité de se voir régler les congés payés par celle-ci.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce que la prise d'acte de son contrat de travail produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à ce que la société et le mandataire liquidateur soient condamnées solidairement au paiement de l'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, alors « que la cassation à intervenir du chef du premier moyen de cassation entraînera par voie de conséquence celle du chef du présent moyen par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

11. La cassation sur le premier moyen, du chef du débouté de la demande au titre de l'indemnité de congés payés, entraîne par voie de conséquence la cassation des chefs de dispositif critiqués par le second moyen qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il fixe la créance de M. [S] au passif de la liquidation de la société Baticom 61 à la somme de 412,20 euros à titre de rappel de salaire outre celle de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne Mme [U], en sa qualité de liquidateur de la société Baticom 61 et l'AGS CEGEA Île de France aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [S]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Monsieur [S] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir condamner Maître [U] es qualité de liquidateur de la société Baticom 61 et le CGEA au paiement de la somme de 1 854,82 euros au titre de l'indemnité pour congés payés ;

Aux motifs que M. [S] expose que sa demande correspond à 10 % des salaires perçus sur la période du 2 janvier au 26 septembre 2012 et que la société Baticom 61 n'avait pas adhéré à la caisse des congés payés ; cependant, le CGEA oppose exactement que M. [S] n'apporte aucun élément de preuve d'une absence d'affiliation de l'employeur à la caisse de congés payés et d'une impossibilité de se voir régler les congés payés par celle-ci ;

ALORS QU'il incombe à l'employeur, débiteur de l'obligation du paiement de l'intégralité du paiement des jours de congés payés d'établir qu'il a exécuté son obligation ; que la cour d'appel qui a débouté le salarié au motif qu'il n'apportait aucune preuve de l'affiliation de la société Baticom 61 à la caisse de congés payés et de l'impossibilité pour cette dernière de les régler a inversé la charge de la preuve et violé les articles L. 3141-3, L. 3141-22 du code du travail et l'article 1353 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Monsieur [S] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce que la prise d'acte de son contrat de travail en date du 26 mai 2016 produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à ce que la société Baticom 61 et Maître [X] [U] es qualité de mandataire liquidateur soient condamnées solidairement au paiement de l'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis ;

Aux motifs que M. [S] expose qu'il a pris acte de la rupture le 26 mai 2016 ayant constaté la défaillance de son employeur à exécuter la décision du bureau de conciliation, rappelant que consolidé en décembre 2015 il n'avait pu passer de visite médicale de reprise faute d'adhésion de l'employeur aux services de la médecine du travail et que la société Baticom ne pouvait s'évaporer dans la nature sans avoir procédé à son licenciement alors qu'il faisait toujours partie des effectifs ; le CGEA convient de la nécessité d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le contrat de travail avait été résolu le 23 juillet 2013 par la radiation du registre du commerce mais entend relever que M. [S] ne justifie pas avoir adressé ses arrêts de travail à l'employeur qui avait cessé toute activité (en décembre 2012 pour l'établissement d'Alençon et en juillet 2013 pour celui de Paris) et a curieusement attendu trois ans pour réagir « ce qui pose un réel problème à rapporter la preuve qu'il n'a pas été licencié » ; il convient de relever que le rappel de salaire était ancien au moment de la prise d'acte, même si [la] décision du bureau de conciliation était récente, qu'il est jugé que l'indemnité de congés payés n'est pas due, que M. [S] ne justifie pas avoir fait parvenir ses arrêts de travail ni avoir manifesté son intention de reprendre le travail, qu'il ne justifie pas davantage avoir cherché à faire exécuter la décision du bureau de conciliation dont la date de notification n'est pas connue et ne justifie pas qu'il s'est tenu à disposition ; il sera jugé en cet état que la prise d'acte produit les effets d'une démission, en l'absence de preuve de manquements de nature à rendre la rupture imputable à l'employeur ;

1. ALORS QUE la cassation à intervenir du chef du premier moyen de cassation entrainera par voie de conséquence celle du chef du présent moyen par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;

2. ALORS QUE le paiement intégral et ponctuel du salaire constitue une obligation essentielle de l'employeur et que le manquement à cette obligation justifie à lui seul la prise d'acte du salarié ; que la cour d'appel qui a constaté le non paiement intégral du salaire par l'employeur mais a estimé qu'il n'existait pas de preuve de manquements de nature à rendre la rupture imputable à l'employeur au prétexte que le salarié avait tardé à exécuter la décision du bureau de jugement alors que c'était à l'employeur de prendre l'initiative de régler la somme à laquelle il avait été condamné a statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1451-1 du code du travail ;

3. ALORS QUE le paiement intégral et ponctuel du salaire constitue une obligation essentielle de l'employeur ; que la cour d'appel qui a constaté que la décision du Bureau de conciliation condamnant la société Baticom 61 à payer un rappel de salaire était récente mais a estimé que l'employeur n'avait pas manqué à ses obligations parce que le salarié avait tardé à faire exécuter la décision condamnant l'employeur, tout en constatant que le jugement de condamnation était en date du 9 mai 2016, que Monsieur [S] avait pris acte de la rupture de son contrat de travail le 16 mai 2016 et qu'un jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Baticom 61 à son initiative datait du 13 octobre 2016, n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qu'elles induisaient et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1217, 1226 et 1229 du code civil ;

4. ALORS QUE la charge de la preuve du non respect des obligations inhérentes à un accident du travail pèse sur l'employeur et non sur le salarié ; que la cour d'appel qui a dit que Monsieur [S] ne justifiait pas avoir fait parvenir à la société Baticom 61 ses arrêts de travail alors qu'il produisait aux débats 18 certificats médicaux (pièce 19) comme le précisaient ses conclusions d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 du code civil ;

5. ALORS QUE l'employeur a l'obligation de fournir un travail au salarié et qu'il lui appartient de démontrer que le salarié a refusé d'exécuter son travail et de se tenir à sa disposition ; que la cour d'appel qui a estimé que Monsieur [S] ne pouvait reprocher à la société Baticom 61 de s'être « évaporée dans la nature » sans avoir procédé à son licenciement parce qu'il ne justifiait pas avoir manifesté son intention de reprendre le travail a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 du code civil et l'article L. 1221-1 du code du travail ;

6. ALORS QUE l'initiative de l'organisation de la visite de reprise incombe à l'employeur sans qu'il puisse être reproché au salarié de ne pas s'y soumettre spontanément ; que la cour d'appel qui a considéré que Monsieur [S] ne justifiait pas avoir manifesté son intention de reprendre le travail a violé les articles R. 4624-21 et R. 4624-22.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-21898
Date de la décision : 12/01/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 25 avril 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jan. 2022, pourvoi n°20-21898


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.21898
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