LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 21-80.723 F-D
N° 00034
RB5
11 JANVIER 2022
CASSATION PARTIELLE
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 JANVIER 2022
Mme [I] [G] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 7 janvier 2021, qui, pour escroquerie et infractions au code de la santé publique, l'a condamnée à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, 5 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction professionnelle, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Sottet, conseiller, les observations de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de Mme [I] [G], les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du Conseil nationale de l'ordre des pharmaciens, partie civile, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres, partie civile, et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Sottet, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Mme [G] a été poursuivie devant le tribunal correctionnel des chefs d'escroquerie, d'exploitation d'une officine de pharmacie sans que les médicaments soient préparés par un pharmacien ou sous sa surveillance, de distribution ou mise à disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et inutilisés, et de délivrance de manière irrégulière de médicaments relevant de réglementations particulières.
3. Les juges du premier degré l'ont déclarée coupable de ces quatre chefs de prévention, l'ont condamnée à deux ans d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende et huit ans d'interdiction de gérer, et ont statué sur les intérêts civils de la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres et du Conseil national de l'ordre des pharmaciens.
4. Mme [G], le ministère public et les deux parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier, troisième et quatrième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mme [G] coupable des faits de distribution ou mise disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et inutilisés, alors « que sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis et peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date ; que l'article L. 4212-7 du code de la santé publique, dans sa version applicable du 1er janvier 2002 au 1er janvier 2009 incrimine la collecte auprès du public des médicaments inutilisés sans respecter les dispositions du premier alinéa de l'article L. 4211-2 ; que l'article L. 4211-2, alinéa 1er, du code de la santé publique, dans sa version en vigueur depuis le 27 février 2007 au 17 avril 2008 et du 17 avril 2008 au 31 décembre 2008 prévoit que les officines de pharmacie et les pharmacies à usage intérieur sont tenues de collecter gratuitement les médicaments à usage humain non utilisés apportés par les particuliers qui les détiennent ; qu'il en résulte que pour la période allant du 1er mars 2008 au 31 décembre 2008, seul était incriminé le fait pour l'officine de ne pas collecter gratuitement les médicaments à usage humain non utilisés apportés par les particuliers qui les détiennent ; qu'en déclarant Mme [G] coupable des faits de distribution ou mise à disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et inutilisés pour la période allant du 1er mars 2008 au 31 décembre 2008, période pendant laquelle ces faits n'étaient pas incriminés, la cour d'appel a méconnu les articles 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 15.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, 111-3 et 112-1 du code pénal, ensemble les articles L. 4212-7 L. 4211-2 du code de la santé publique en leur version applicable en la cause. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 112-1 du code pénal :
7. Aux termes du premier alinéa de ce texte, sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis.
8. L'arrêt attaqué déclare la prévenue coupable de distribution ou mise à disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et inutilisés, délit prévu et puni par l'article L. 4212-7 du code de la santé publique, pour la période courant du 1er mars 2008 au 28 février 2011.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé.
10. En effet, l'incrimination visée par la prévention a été introduite dans le code pénal par l'ordonnance n° 2008-717 du 17 juillet 2008, entrée en vigueur le 1er janvier 2009.
11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation sera limitée à la déclaration de culpabilité du chef de distribution ou mise à disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et non utilisés, ainsi qu'aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité des trois autres chefs de prévention n'encourt pas la censure.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 7 janvier 2021, en ses seules dispositions ayant déclaré la prévenue coupable de distribution ou mise à disposition du public de médicaments à usage humain collectés auprès du public et inutilisés et relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-deux.