LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 novembre 2021
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 840 F-D
Pourvoi n° W 20-19.327
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 NOVEMBRE 2021
M. [U] [P], domicilié [Adresse 6], a formé le pourvoi n° W 20-19.327 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2020 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à l'association Air soleil loisirs, dont le siège est [Adresse 7],
2°/ à la commune de [Localité 4], représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité, [Adresse 5],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de M. [P], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la commune de [Localité 4], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de l'association Air soleil loisirs, après débats en l'audience publique du 19 octobre 2021 où étaient présents Mme Teiller, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 24 juin 2020), par acte du 1er juillet 2015, l'association Air soleil loisirs (l'association) a consenti à M. [P] une promesse de vente de deux parcelles lui appartenant.
2. Par lettre du 2 juillet 2015, le notaire chargé d'instrumenter a adressé une déclaration d'intention d'aliéner à la commune de [Localité 4] (la commune).
3. Par délibération du 31 octobre 2015, la commune a décidé d'exercer son droit de préemption. M. [P] a sollicité devant la juridiction administrative l'annulation de cette délibération.
4. Par actes des 7 septembre et 2 novembre 2016, il a assigné l'association et la commune aux fins de se voir reconnaître propriétaire des parcelles.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
5. M. [P] fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable, alors
« qu'en affirmant, pour déclarer irrecevable la demande de M. [P], faute de publication de l'assignation du 2 novembre 2016 délivrée à la commune de [Localité 4], que « la seule pièce produite (?) est une copie de l'assignation adressée le 16 juillet 2018 au service de la publicité foncière à [Localité 3] », tandis que M. [P] avait produit, postérieurement à ses conclusions du 17 décembre 2018 mais antérieurement à l'ordonnance de clôture, une nouvelle pièce établissant que l'assignation avait été publiée, ainsi qu'un nouveau bordereau, la cour d'appel a violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, ensemble l'article 126 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 126 du code de procédure civile :
6. Selon ce texte, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.
7. Pour déduire que la demande de M. [P] est irrecevable, l'arrêt retient que la seule pièce produite par celui-ci est une copie de l'assignation adressée le 16 juillet 2018 au service chargé de la publicité foncière, et que ce document porte un cartouche vierge, dépourvu des mentions et du timbre de l'administration, de sorte qu'il constitue une demande de publication, mais ne réalise pas par lui-même la formalité obligatoire.
8. En statuant ainsi, alors que M. [P] justifiait avoir produit, avant l'ordonnance de clôture, une nouvelle pièce référencée et visée par le comptable des finances publiques et établissant que l'assignation avait été enregistrée le 16 juillet 2018 par le service chargé de la publicité foncière, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bastia autrement composée ;
Condamne la commune de [Localité 4] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par l'association Air soleil loisirs et la commune de [Localité 4] et condamne la commune de [Localité 4] à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour M. [P].
M. [P] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable sa demande tendant à lui voir reconnaître la qualité de propriétaire des parcelles cadastrées section D, n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2], dans la commune de [Localité 4] ;
1°) Alors que seules les demandes tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision de droits résultant d'actes soumis à publicité, à l'exclusion des demandes en revendication d'un bien, sont soumises, à peine d'irrecevabilité, à une publication préalable au service chargé de la publicité foncière du lieu de situation des immeubles ; qu'en jugeant cependant que la demande de M. [P], qui tendait seulement à la reconnaissance de sa qualité de propriétaire des parcelles cadastrées section D, n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2], dans la commune de [Localité 4], en exécution du compromis de vente du 1er juillet 2015, devait être publiée, la cour d'appel a violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;
2°) Alors, subsidiairement, qu' en affirmant, pour déclarer irrecevable la demande de M. [P], faute de publication de l'assignation du 2 novembre 2016 délivrée à la commune de [Localité 4], que « la seule pièce produite (?) est une copie de l'assignation adressée le 16 juillet 2018 au service de la publicité foncière à [Localité 3] (pièce n° 7) » (arrêt, p. 6 § 9), tandis que M. [P] avait produit, postérieurement à ses conclusions du 17 décembre 2018 mais antérieurement à l'ordonnance de clôture, une nouvelle pièce établissant que l'assignation avait été publiée, ainsi qu'un nouveau bordereau, la cour d'appel a violé les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, ensemble l'article 126 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.