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17/11/2021 | FRANCE | N°19-22746;19-22747;19-22748;19-22749;19-22750;19-22751;19-22752;19-22753;19-22754;19-22755;19-22756;19-22757;19-22758;19-22759;19-22760;19-22761;19-22762;19-22763;19-22764;19-22765;19-22766;19-22767;19-22768;19-22769;19-22770;19-22771;19-22772

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 novembre 2021, 19-22746 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 novembre 2021

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1286 F-D

Pourvois n°
S 19-22.746
à V 19-22.772

JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 NOVEMBRE 2021
r>1°/ M. [T] [V], domicilié [Adresse 25],

2°/ M. [EM] [F], domicilié [Adresse 13],

3°/ M. [K] [M] [J], domicilié [Adresse 20],

4°/ M. [MJ] [G], domicilié...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 novembre 2021

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1286 F-D

Pourvois n°
S 19-22.746
à V 19-22.772

JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 NOVEMBRE 2021

1°/ M. [T] [V], domicilié [Adresse 25],

2°/ M. [EM] [F], domicilié [Adresse 13],

3°/ M. [K] [M] [J], domicilié [Adresse 20],

4°/ M. [MJ] [G], domicilié [Adresse 14],

5°/ M. [LW] [R], domicilié [Adresse 8],

6°/ M. [FA] [C] [O], domicilié [Adresse 6],

7°/ M. [U] [W], domicilié [Adresse 24],

8°/ M. [E] [L], domicilié [Adresse 9],

9°/ M. [X] [Y], domicilié [Adresse 18],

10°/ M. [S] [I], domicilié [Adresse 4],

11°/ M. [DZ] [P], domicilié [Adresse 21],

12°/ Mme [BO] [N], domicilié [Adresse 5],

13- M. [NY] [H], domicilié [Adresse 7],

14°/ M. [D] [SR], domicilié [Adresse 11],

15°/ M. [GB] [MX], domicilié [Adresse 17],

16°/ M. [GO] [LI], domicilié [Adresse 19],

17°/ M. [CY] [FN], domicilié [Adresse 26],

18°/ M. [X] [TS], domicilié [Adresse 12],

19°/ M. [KV] [AV], domicilié [Adresse 22],

20°/ M. [TE] [UT], domicilié [Adresse 3],

21°/ M. [YZ] [XY], domicilié [Adresse 27],

22°/ M. [D] [SD], domicilié [Adresse 16],

23°/ M. [JU] [ZM], domicilié [Adresse 2],

24°/ M. [B] [RP], domicilié [Adresse 15],

25°/ M. [A] [NK], domicilié [Adresse 10],

26°/ M. [RC] [HC], domicilié [Adresse 23],

27°/ M. [Z] [DY], domicilié [Adresse 1],

28°/ le syndicat Solidaire Unitaire Démocratique (SUD) industrie francilien, dont le siège est [Adresse 28],

ont formé respectivement les pourvois n° S 19-22.746, T 19-22.747, U 19-22.748, V 19-22.749, W 19-22.750, X 19-22.751, Y 19-22.752 , Z 19-22.753, A 19-22.754, B 19-22.755, C 19-22.756, D 19-22.757, E 19-22.758, F 19-22.759, H 19-22.760, G 19-22.761, J 19-22.762, K 19-22.763, M 19-22.764, N 19-22.765, P 19-22.766, Q 19-22.767, R 19-22.768, S 19-22.769, T 19-22.770, U 19-22.771 et V 19-22.772 contre vingt-sept arrêts rendus le 15 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans les litiges les opposant à la société Lear Corporation Seatin France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 32], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation identiques annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [V] et des vingt-six autres salariés et du syndicat SUD industrie francilien, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Lear Corporation Seatin France, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° S 19-22.746, T 19-22.747, U 19-22.748, V 19-22.749, W 19-22.750, X 19-22.751, Y 19-22.752 , Z 19-22.753, A 19-22.754, B 19-22.755, C 19-22.756, D 19-22.757, E 19-22.758, F 19-22.759, H 19-22.760, G 19-22.761, J 19-22.762, K 19-22.763, M 19-22.764, N 19-22.765, P 19-22.766, Q 19-22.767, R 19-22.768, S 19-22.769, T 19-22.770, U 19-22.771 et V 19-22.772 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués ([Localité 33], 15 mai 2019), les contrats de travail de M. [V] et de vingt-six autres salariés de la société Lear Corporation Seating France, qui travaillaient sur le site de [Localité 31], ont été transférés, dans le courant de l'année 2009, en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, sur un autre site de production exploité par une autre société, situé à [Localité 29].

3. A la suite d'un mouvement de grève, les partenaires sociaux ont, le 13 février 2009, conclu deux accords collectifs dont l'un portait sur les conditions permettant le transfert des salariés du site de [Localité 31] à celui de [Localité 29].

4. A la suite d'un nouveau mouvement social, un protocole de fin de conflit a été conclu le 29 mai 2009.

5. Les salariés ont bénéficié d'une prime différentielle au titre du maintien de leur salaire dans le cadre du transfert de leur contrat de travail.

6. Cette prime a été supprimée par accord collectif signé le 23 février 2015.

7. Les salariés ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de prime.

8. Le syndicat Unitaire démocratique industrie francilien (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance afin de réclamer des dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

10. Les salariés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes de rappel de salaire au titre de la prime différentielle, alors « qu'un accord collectif ne peut modifier, sans l'accord des salariés concernés, les droits qu'ils tiennent de leur contrat de travail ; que la prime différentielle", dont l'institution modifiait la structure de la rémunération du salarié concerné par le transfert de [Localité 30] à [Localité 29], avait acquis une nature contractuelle lors de l'acceptation de son intégration dans le salaire net garanti du salarié ayant donné son accord au transfert ; qu'en se retranchant derrière le maintien du niveau de la rémunération des salariés transférés pour dispenser l'employeur de soumettre au consentement des salariés concernés la suppression conventionnelle de la prime différentielle" qui était devenue une composante de leur contrat de travail, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants ; qu'elle a ainsi privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1003 et 1193 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

11. La rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord.

12. En outre, un accord collectif ne peut modifier, sans l'accord des salariés, les droits qu'ils tiennent de leur contrat de travail.

13. Pour débouter les salariés de leurs demandes de rappels de salaire au titre de la prime différentielle, les arrêts, après avoir constaté que les partenaires sociaux avaient convenu de l'octroi d'une prime différentielle au profit des salariés employés sur le site de [Localité 31] dont le contrat de travail avait été transféré sur le site de [Localité 29] afin de garantir le montant de leur rémunération et compenser la différence de rémunération existant entre la rémunération perçue sur le site de [Localité 30] et celle à laquelle ils auraient eu droit si les règles du site de [Localité 29] en termes de salaire et de primes leur étaient appliquées, retiennent que, contrairement à ce que soutiennent les salariés, la fiche de poste n'avait qu'une valeur informative puisqu'elle permettait de décider s'ils acceptaient ou non le transfert en sorte que leur signature valait accord du transfert dans ces conditions mais ne contractualisait pas le montant de la prime différentielle.

14. Les arrêts ajoutent que les courriers postérieurs confirment le transfert et annoncent l'envoi d'un avenant mais considèrent qu'il ne peut être déduit de ces courriers que l'intégralité de la fiche de poste devait donner lieu à un avenant et qu'en particulier le montant de la prime différentielle y figurerait et y serait figé.

15. Ils en déduisent que la prime différentielle attribuée pour garantir à un moment donné le maintien de salaire n'a pas été contractualisée et intégrée comme faisant partie de la structure de la rémunération des salariés et que dès lors, issue d'un accord collectif, elle pouvait valablement être supprimée par un autre accord collectif.

16. En statuant ainsi, alors que la garantie de salaire prévue au profit des salariés transférés conduisait, par l'octroi d'une prime différentielle, à la modification de la structure de leur rémunération contractuelle et que l'acceptation par les salariés du transfert de leur contrat de travail portait également sur cet élément, en sorte que la prime différentielle, qui avait été intégrée au contrat de travail, ne pouvait être supprimée par accord collectif, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

17. Le syndicat fait grief aux arrêts de le débouter de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, alors « que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen entraînera nécessairement, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a rejeté la demande tendant au versement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession par la pratique consistant à utiliser un accord collectif pour modifier, sans l'accord des salariés, les droits qu'ils tiennent de leur contrat de travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

18. La cassation du chef de dispositif critiqué par le premier moyen se rapportant au rejet des demandes de rappel de salaire, entraîne, la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif qui concerne le rejet de la demande de dommages-intérêts du syndicat, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 15 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société Corporation Seating France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Corporation Seating France et la condamne à payer à chacun des demandeurs aux pourvois la somme de 105 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens identiques produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [V] et vingt-six autres salariés et le syndicat SUD industrie francilien, demandeurs aux pourvois n° S 19-22.746 à V 19-22.772

Le moyen reproche aux arrêts attaqués d'avoir débouté les salariés d'avoir débouté les salariés de leurs demandes de rappel de salaire au titre de la prime différentielle ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'accord collectif du 13 février 2009 prévoit que chaque salarié se verra remettre en main propre contre décharge une lettre de transfert qui lui indiquera :
« - La date de transfert sur le site de [Localité 29],
- Le libellé emploi ;
- Le rappel du coefficient convention collective du poste,
- Le salaire de mensuel et l'horaire de travail,
- Le montant de la prime d'ancienneté s'il y a lieu,
- Les différentes primes et leurs conditions d'attribution avec leurs montants, - La convention collective,
- Si nécessaire le différentiel de salaire qui sera attribué. En effet la règle retenue en matière de rémunération globale est que le salarié doit conserver son salaire net, calculé selon la formule la plus avantageuse au salarié, dans le cadre du transfert même s'il est désormais soumis aux règles de [Localité 29] en matière de salaire et primes,
- Couverture sociale, le salarié transféré sera soumis aux régimes de retraite et de prévoyance souscrits par [Localité 29] (y compris la mutuelle),
- Période d'essai : s'agissant d'un transfert il n'y a pas de période d'essai, de la même manière la décision d'être transféré est irrévocable.
- Le salarié ayant reçu son courrier bénéficie d'un délai de quinze jours pour accepter ou refuser le transfert. Il devra communiquer par écrit sa réponse qu'elle soit positive ou négative.
L'absence de réponse du salarié dans ce délai de quinze jours de la réception de ce courrier équivaudra à un refus » ;

QUE le protocole de fin de conflit du 29 mai 2009 précise :
« Le salaire de base est maintenu tel qu'il existe aujourd'hui à [Localité 30]. Toutefois, s'il est inférieur au salaire de base appliqué à [Localité 29], c'est ce dernier qui sera appliqué. Dans tous les cas, le salaire mensuel net est garanti sans limitation de temps.
La direction propose de faire un courrier à chaque salarié transféré, dans lequel elle confirmera son engagement à garantir le salaire net (hors absence).
En outre, le comparatif entre les salaires de [Localité 30] et ceux de [Localité 29] comprend la prime d'intéressement. Concernant les indirects, l'intéressement a été réintégré au salaire de base net garanti.
Comme la prime de transport et le domicile et [Localité 30] est déjà intégrée dans le calcul du salaire net garanti, celle-ci est conservée par les salariés. Il faut donc seulement rediscuter éventuellement de la prime de transport entre [Localité 30] et [Localité 29] » :

QUE les accords collectifs prévoient donc la remise d'une lettre de transfert, document d'information sur la base duquel le salarié prend sa décision d'accepter ou non le transfert, et d'un courrier par lequel la société confirme son engagement à garantir le salaire net ;

QU'ils n'envisagent pas la signature d'un avenant au contrat de travail ;

QUE le document remis au salarié intitulé « Fiche de poste » [Localité 29], qui ne comporte pas de description des tâches précises qui incombent au salarié, ne constitue pas au sens strict une « fiche de poste » ;

QU'il récapitule les informations prévues par l'accord collectif du 13 février 2009, énonce le montant du salaire de base mensuel, des primes d'intéressement, aboutit au salaire brut théorique et, après avoir transformé le salaire net garanti en salaire brut, fixe le montant de la primé différentielle brute ;

QUE le courrier confirmant au salarié sa mutation définitive à la société Lear Corporation Seating France Usine de [Localité 29] précise que les conditions d'emploi communiquées par la fiche de poste seront reprécisées par un avenant à son contrat de travail qui lui sera donné par le service des ressources humaines ;

QU'aucun avenant n'a été soumis à la signature du salarié ;

QUE la question posée est de savoir si la prime différentielle a été contractualisée ou pas et donc si le salarié est fondé à s'opposer à sa suppression sans son accord ;

QUE destinée à garantir la rémunération du salarié transféré, la prime différentielle a pour objet de compenser la différence de rémunération existant entre la rémunération perçue sur le site de [Localité 30] et celle à laquelle il aurait droit si les règles du site de [Localité 29] en terme de salaire et primes lui étaient appliquées que son montant figurant sur la « fiche de poste » a été évalué au moment du transfert du salarié ;

QUE dans la pratique, elle a donné lieu au paiement d'une prime identique jusqu'à l'accord collectif du 23 février 2015 la supprimant ;

QUE sans être contredite, la société Lear Corporation Seating France affirme que la suppression de la prime différentielle n'a pas eu pour conséquence de faire passer la rémunération du salarié au-dessous du salaire garanti ;

QUE contrairement à ce que soutient le salarié, la « fiche de poste » n'a qu'une valeur informative puisqu'elle lui permet de décider s'il accepte ou non le transfert ; que sa signature vaut accord du transfert dans ces conditions mais ne contractualise pas le montant de la prime différentielle qui est explicitement fixée en fonction d'éléments susceptibles de variation ;

QUE le courrier postérieur confirma le transfert et annonce l'envoi d'un avenant ; que cependant, il ne peut être déduit de ce courrier qu'il était prévu que l'intégralité de la « fiche de poste » devait donner lieu à un avenant et qu'en particulier le montant de la prime différentielle y figurerait et serait ainsi figée ;

QUE de ces éléments, il résulte que la prime différentielle attribuée pour garantir, à un moment donné, un maintien de salaire, n'a pas été contractualisée et intégrée comme faisant partie de la structure de la rémunération du salarié ;

QUE dès lors, non contractualisée mais issue d'un accord collectif, elle pouvait valablement être supprimée par un autre accord collectif ;

QUE le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la prime différentielle a été instituée dans le cadre d'un accord collectif qui s'impose au salarié ;

QUE cette prime avait pour objet d'assurer aux salariés transférés à [Localité 29] le maintien du salaire net pur un mois complet hors absences ;

QUE le salarié avait un salaire qui a augmenté sans que la prime diminue ;

QUE cette prime différentielle a été supprimée par un accord collectif du 23 février 2015 ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le « protocole de fin de conflit » du 29 mai 2009, dont la signature a mis fin au mouvement de grève des salariés du site de [Localité 30] qui obtenaient un certain nombre de garanties minimales en cas de transfert à [Localité 29], précise que « le salaire de base sera maintenu tel qu'il existe aujourd'hui à [Localité 30] » ; que c'est seulement avec la « fiche de poste » jointe à la « lettre de transfert » envoyée par l'employeur postérieurement à la conclusion du « protocole de fin de conflit » qu'est apparue une « prime différentielle » destinée à garantir le maintien du salaire ayant accepté le transfert ; qu'en considérant que la « prime différentielle » instituée pour maintenir le salaire des salariés acceptant le transfert était issue d'un accord collectif, la Cour d'appel a violé, par fausse interprétation, le « protocole de fin de conflit » du 29 mai 2009 ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'il ressort de la lecture de la « fiche de poste » soumise à la signature des salariés que ce document est entièrement consacré à la détermination des différents éléments de la rémunération et s'attache particulièrement à préciser le montant de la « prime différentielle » ; que le courrier envoyé par l'employeur aux salariés ayant accepté le transfert indique que « les conditions d'emploi qui vous été communiquées par la fiche de poste que nous vous avons remise, vous seront reprécisées par un avenant à votre contrat de travail qui sous sera donné par le service des Ressources Humaines de la société Lear [Localité 29] » ; qu'en affirmant qu'il n'était pas prévu que le montant de la « prime différentielle », apparaissant comme élément essentiel de la « fiche de poste » soumise à la signature du salarié, devait donner lieu à un avenant, la Cour d'appel a dénaturé les termes de la « fiche de poste » et du courrier confirmant le transfert ; qu'elle ainsi violé les dispositions de l'article 1103 du Code civil, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

ALORS, ENFIN, QU'un accord collectif ne peut modifier, sans l'accord des salariés concernés, les droits qu'ils tiennent de leur contrat de travail ; que la « prime différentielle », dont l'institution modifiait la structure de la rémunération du salarié concerné par le transfert de [Localité 30] à [Localité 29], avait acquis une nature contractuelle lors de l'acceptation de son intégration dans le salaire net garanti du salarié ayant donné son accord au transfert ; qu'en se retranchant derrière le maintien du niveau de la rémunération des salariés transférés pour dispenser l'employeur de soumettre au consentement des salariés concernés la suppression conventionnelle de la « prime différentielle » qui était devenue une composante de leur contrat de travail, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants. ; qu'elle a ainsi privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1003 et 1193 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSSATION

Le moyen reproche aux arrêts attaqués d'avoir débouté le syndicat Solidaires Unitaire Démocratique Industrie Francilien de sa demande de versement de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession ;

AUX MOTIFS QUE dès lors que le salarié a été débouté de sa demande, le syndicat ne peut se prévaloir d'une atteinte à l'intérêt collectif de la profession ;

ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen entraînera nécessairement, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a rejeté la demande tendant au versement de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession par la pratique consistant à utiliser un accord collectif pour modifier, sans l'accord des salariés, les droits qu'ils tiennent de leur contrat de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-22746;19-22747;19-22748;19-22749;19-22750;19-22751;19-22752;19-22753;19-22754;19-22755;19-22756;19-22757;19-22758;19-22759;19-22760;19-22761;19-22762;19-22763;19-22764;19-22765;19-22766;19-22767;19-22768;19-22769;19-22770;19-22771;19-22772
Date de la décision : 17/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 nov. 2021, pourvoi n°19-22746;19-22747;19-22748;19-22749;19-22750;19-22751;19-22752;19-22753;19-22754;19-22755;19-22756;19-22757;19-22758;19-22759;19-22760;19-22761;19-22762;19-22763;19-22764;19-22765;19-22766;19-22767;19-22768;19-22769;19-22770;19-22771;19-22772


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.22746
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