La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2021 | FRANCE | N°20-10762

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 novembre 2021, 20-10762


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 novembre 2021

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 1235 F-D

Pourvoi n° M 20-10.762

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [G].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

____________________

_____

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 NOVEMBRE 2021

M. [D]...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 novembre 2021

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 1235 F-D

Pourvoi n° M 20-10.762

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [G].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 NOVEMBRE 2021

M. [D] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 20-10.762 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre), dans le litige l'opposant à la société Insight Sip, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. [G], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Insight Sip, après débats en l'audience publique du 21 septembre 2021 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président et rapporteur, Mme Le Lay, M. Barincou, conseillers, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 septembre 2018), M. [G] a été engagé par la société Insight Sip (la société) à compter du 20 février 2012 en qualité d'ingénieur commercial.

2. Licencié pour motif économique le 21 novembre 2012 il a saisi la juridiction prud'homale afin de contester son licenciement et obtenir paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement économique fondé et de le débouter de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ qu'une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques ; que, pour infirmer le jugement et retenir que le licenciement reposait sur une cause économique réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que "la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige évoque l'arrêt et le report de la production du produit bluetooth low energy, confirmé par un courriel du fabricant japonais daté du 31 mars 2014 dont le salarié s'occupait – que si son contrat de travail ne précise pas qu'il était en charge de la commercialisation de ce matériel, ses propres courriels adressés à divers interlocuteurs confirment sans ambiguïté que la commercialisation de ce produit était le principal de son activité ainsi que le mentionne également un curriculum vitae daté du 17 juin 2016 – qu'aucun document produit ne permet de s'assurer qu'un autre fabricant aurait été en mesure de fournir à l'entreprise le produit Bluetooth low energy dans des conditions et des délais qui auraient permis de préserver l'emploi du salarié pas plus le fait que l'employeur connaissait les menaces pesant sur la production du matériel Bluetooth lors du recrutement du salarié" ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs inopérants – tirés d'une cessation partielle d'activité – la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

2°/ que, pour être justifié, le licenciement économique résulte de la suppression de l'emploi du salarié consécutive à des difficultés économiques ; qu'une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques ; que le conseil de prud'hommes avait retenu que le salarié n'avait pas été embauché exclusivement pour la commercialisation de produits Bluetooth low energy, que les difficultés de fabrication de ces produits étaient connues de l'employeur avant l'embauche du salarié et que les difficultés économiques alléguées lors du licenciement n'étaient pas plus avérées que la suppression de l'emploi du salarié puisque l'employeur avait embauché deux autres ingénieurs juste après ; que, pour infirmer le jugement, la cour d'appel a estimé que "la société Insight Sip justifie? la réduction des commandes du matériel Bluetooth Low Energy ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012, évolution qui était de nature à justifier la suppression de l'emploi commercial du salarié, quand bien même l'entreprise aurait-elle touché ainsi que l'objecte l'intimé une subvention publique importante en 2011" ; qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne caractérisent pas l'existence de difficultés économiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

5. Selon ce texte, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou des mutations technologiques.

6. Pour débouter le salarié de sa demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse l'arrêt retient que la lettre de licenciement évoque l'arrêt et le report de la production du produit Bluetooth low energy, confirmé par un courriel du fabricant japonais du 31 mars 2014 dont le salarié s'occupait, que si son contrat de travail ne précise pas qu'il était en charge de la commercialisation de ce matériel, ses propres courriels adressés à divers interlocuteurs confirment sans ambiguïté que la commercialisation de ce produit était le principal de son activité. Il ajoute qu'aucun document produit ne permet de s'assurer qu'un autre fabricant aurait été en mesure de fournir à l'entreprise le produit Bluetooth low energy dans des conditions et des délais qui auraient permis de préserver l'emploi du salarié pas plus le fait que l'employeur connaissait les menaces pesant sur la production du matériel Bluetooth lors du recrutement du salarié. Il relève enfin que la société justifie par divers documents comptables, dont un dossier financier retraçant ses résultats et les comptes des exercices 2012 et 2013, la réduction des commandes du matériel Bluetooth low energy ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012, évolution qui était de nature à justifier la suppression de l'emploi commercial du salarié, quand bien même l'entreprise aurait-elle touché une subvention publique importante en 2011.

7. En statuant ainsi, alors que ni la réduction des seules commandes du matériel dont le salarié assurait la commercialisation, ni la dégradation de la situation financière de l'entreprise en 2012 ne suffisent à établir la réalité de difficultés économiques, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes indemnitaires pour défaut d'information sur la portabilité et la perte de chance subséquente, alors « que le salarié faisait valoir qu'à la suite d'une altercation avec son employeur, il avait tenté de mettre fin à ses jours sur son lieu de travail, qu'il avait été contraint de déclarer lui-même cet accident de travail, dont l'origine professionnelle a été reconnue et que l'employeur avait refusé de lui fournir une attestation de salaire nécessaire en cas d'arrêt de travail supérieur à six mois ; qu'il chiffrait précisément, par des calculs détaillés, le montant des revenus de remplacement qu'il aurait dû percevoir en application des articles 6 et 8 de l'ANI du 27 mars 1997 relatif à la prévoyance, le montant des indemnités journalières de la sécurité sociale qu'il avait perçu et, par différence entre ces deux montants, l'étendue du préjudice qu'il avait subi ; que les calculs du salarié n'étaient au demeurant pas contestés par l'employeur ; qu'en énonçant que le salarié "ne justifie concrètement d'aucune perte de droit à revenu de remplacement", la cour d'appel n'a pas répondu au moyen des écritures du salarié et violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

9. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

10. Pour débouter le salarié de ses demandes indemnitaires pour défaut d'information sur la portabilité des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans l'entreprise et perte de chance subséquente de bénéficier de ces garanties, l'arrêt retient qu'il ne justifie concrètement d'aucune perte de droit à revenu de remplacement ou d'une prise en charge de dépenses de santé au cours de la période de portabilité.

11. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'intéressé, qui soutenait que l'employeur ne lui avait pas remis la notice d'information mentionnant les conditions d'application de la portabilité et les documents nécessaires à son inscription ni n'avait procédé lui-même à cette inscription, le privant ainsi d'une chance de bénéficier des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans son ancienne entreprise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

12. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en nullité du licenciement pour harcèlement moral et de ses demandes indemnitaires relatives au harcèlement moral, alors :

« 1°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que, pour débouter le salarié de ses demandes au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a successivement énoncé que n'était versé aux débats aucun courriel, message ou correspondance de l'employeur pouvant établir que le salarié ait fait l'objet, avant son licenciement, de mesures ou de décisions pouvant avoir une connotation harcelante, que le différend opposant le salarié et l'employeur quant à certains éléments de rémunération et congés payés, n'avait donné lieu à aucune réclamation, demande ou discussion du salarié avant la rupture de son contrat de travail, que la société Insight Sip évoquait, en outre, de façon convaincante, quant à l'absence de détermination de la rémunération variable, la difficulté qui s'était présentée pour déterminer des objectifs commerciaux en raison de l'arrêt de la production du produit Bluetooth low energy dont le salarié était chargé ; qu'elle a ajouté "qu'en l'état de ces constatations, prises dans leur ensemble, il n'y a pas lieu de retenir l'existence d'une situation de harcèlement au sens de l'article 1152-1 du code du travail" ; qu'en procédant à une appréciation d'ensemble des éléments apportés par le salarié et par l'employeur, cependant qu'il lui appartenait d'examiner, d'abord, si le salarié parvenait à établir des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, le cas échéant, si l'employeur prouvait que les agissements invoqués n'étaient pas constitutifs de harcèlement et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel qui ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son office, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1152-1 et L. 1154- 1 du code du travail ;

2°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que dans un moyen entier de ses écritures, le salarié faisait expressément valoir "qu'il convient à toutes fins utiles de rappeler les pressions qu'il a subies notamment sur la période de la fin de son contrat, qui l'ont conduit à une tentative de suicide le 28 janvier 2013 sur son lieu de travail – pour rappel, à compter du mois d'octobre 2012 l'accès au répertoire et aux emails de son principal client a été supprimé par la direction sans qu'il n'en soit préalablement informé (?) or, la société Insight Sip ne produit aucune pièce justificative de ce que cette limitation d'accès résulterait d'une décision d'organisation relevant du pouvoir général du chef d'entreprise et ce, alors même que le salarié n'a jamais été informé préalablement de la limitation d'accès au répertoire et mails de son principal client – il est donc incontestable que les agissements répétés de la Société Insight Sip ont eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail, laquelle a également conduit à une altération de sa santé physique et mentale ; qu'en s'abstenant d'examiner les raisons pour lesquelles le salarié avait fait une tentative de suicide sur son lieu de travail et celles pour lesquelles l'employeur l'avait privé d'accès à sa messagerie, et si ces circonstances ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°/ que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que dans un moyen entier de ses écritures, le salarié faisait expressément valoir "qu'il convient à toutes fins utiles de rappeler les pressions qu'il a subies notamment sur la période de la fin de son contrat, qui l'ont conduit à une tentative de suicide le 28 janvier 2013 sur son lieu de travail – pour rappel, à compter du mois d'octobre 2012 l'accès au répertoire et aux emails de son principal client a été supprimé par la direction sans qu'il n'en soit préalablement informé (?) or, la société Insight Sip ne produit aucune pièce justificative de ce que cette limitation d'accès résulterait d'une décision d'organisation relevant du pouvoir général du chef d'entreprise et ce, alors même que le salarié n'a jamais été informé préalablement de la limitation d'accès au répertoire et mails de son principal client – il est donc incontestable que les agissements répétés de la Société Insight Sip ont eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail, laquelle a également conduit à une altération de sa santé physique et mentale ; qu'en s'abstenant d'examiner si les documents médicaux régulièrement produits permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, le second dans sa rédaction antérieure à la modification issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

13. Aux termes du premier de ces textes, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu du second, lorsque survient un litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

14. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

15. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

16. Pour débouter le salarié de ses demandes relatives au harcèlement moral et à la nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'il n'est versé aux débats aucun courriel, message ou correspondance de l'employeur pouvant établir que le salarié a fait l'objet, avant son licenciement, de mesures ou décisions pouvant avoir une connotation harcelante et que le licenciement économique, tenu pour justifié, ne saurait en toute hypothèse être considéré comme tel. Il relève ensuite que le différend opposant le salarié et l'employeur quant à certains éléments de rémunération et congés payés, n'a lui-même donné lieu à aucune réclamation, demande ou discussion du salarié avant la rupture de son contrat de travail de sorte qu'il ne saurait être tenu pour un fait de harcèlement. Il ajoute que la société évoque en outre de façon convaincante quant à l'absence de détermination de la rémunération variable, la difficulté qui s'est présentée pour déterminer des objectifs commerciaux en raison de l'arrêt de la production de produit Bluetooth low energy dont le salarié, ayant travaillé moins d'un an dans l'entreprise, était chargé et conclut qu'en l'état de ces constatations, prises dans leur ensemble, il n'y a pas lieu de retenir l'existence d'une situation de harcèlement.

17. En statuant ainsi, sans examiner la matérialité de l'ensemble des éléments invoqués au titre du harcèlement moral par le salarié qui faisait également valoir qu'il avait subi des pressions l'ayant conduit à une tentative de suicide le 28 janvier 2013 sur son lieu de travail et qu'à compter du mois d'octobre 2012 l'accès au répertoire et aux courriels de son principal client avait été supprimé par la direction sans qu'il en fût préalablement informé, ni prendre en compte les documents médicaux produits, et sans rechercher si les éléments, à les supposer matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement économique fondé et déboute M. [G] de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour défaut d'information sur la portabilité des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans l'entreprise et perte de chance subséquente de bénéficier de ces garanties et de ses demandes relatives au harcèlement moral et à la nullité du licenciement, l'arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Insight Sip aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Insight Sip à payer à la SCP Krivine et Viaud la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Krivine et Viaud, avocat aux Conseils, pour M. [G]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit le licenciement économique de M. [D] [G] fondé et D'AVOIR en conséquence débouté le salarié de ses demandes indemnitaires au titre de l'absence de cause économique réelle et sérieuse à son licenciement ;

AUX MOTIFS QUE sur la rupture du contrat de travail ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige évoque l'arrêt et le report de la production du produit bluetooth low energy, confirmé par un courriel du fabricant japonais daté du 31 mars 2014 (pièce 17) dont M. [D] [G] s'occupait ; que si son contrat de travail ne précise pas qu'il était en charge de la commercialisation de ce matériel, ses propres courriels adressés à divers interlocuteurs (pièces 59 et 60 de l'employeur) confirment sans ambiguïté que la commercialisation de ce produit était le principal de son activité ainsi que le mentionne également un curriculum vitae daté du 17 juin 2016 (pièce 50) ; qu'aucun document produit ne permet de s'assurer qu'un autre fabricant aurait été en mesure de fournir à l'entreprise le produit Bluetooth low energy dans des conditions et des délais qui auraient permis de préserver l'emploi de M. [D] [G] pas plus le fait que l'employeur connaissait les menaces pesant sur la production du matériel Bluetooth lors du recrutement du salarié ; qu'en outre, la société Insight sip justifie par divers documents comptables, dont un dossier financier retraçant ses résultats (pièce 64) et les comptes des exercices 2012 et 2013 (pièces 18 et 19), la réduction des commandes du matériel Bluetooth low energy (pièce 20) ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012, évolution qui était de nature à justifier la suppression de l'emploi commercial de [D] [G], quand bien même l'entreprise aurait-elle touché ainsi que l'objecte l'intimé une subvention publique importante en 2011 ; qu'en l'état de l'ensemble de ces constatations, il y a lieu de considérer que le motif économique de licenciement est avéré au sens de l'article L 1233-3 du code du travail dans sa version alors applicable ; que la décision déférée ayant dit le licenciement économique de M. [D] [G] injustifié sera infirmée ;

1. ALORS QUE une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques ; que, pour infirmer le jugement et retenir que le licenciement reposait sur une cause économique réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que « la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige évoque l'arrêt et le report de la production du produit bluetooth low energy, confirmé par un courriel du fabricant japonais daté du 31 mars 2014 (pièce 17) dont M. [D] [G] s'occupait – que si son contrat de travail ne précise pas qu'il était en charge de la commercialisation de ce matériel, ses propres courriels adressés à divers interlocuteurs (pièces 59 et 60 de l'employeur) confirment sans ambiguïté que la commercialisation de ce produit était le principal de son activité ainsi que le mentionne également un curriculum vitae daté du 17 juin 2016 (pièce 50) – qu'aucun document produit ne permet de s'assurer qu'un autre fabricant aurait été en mesure de fournir à l'entreprise le produit Bluetooth low energy dans des conditions et des délais qui auraient permis de préserver l'emploi de M. [D] [G] pas plus le fait que l'employeur connaissait les menaces pesant sur la production du matériel Bluetooth lors du recrutement du salarié » ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs inopérants – tirés d'une cessation partielle d'activité – la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

2. ALORS QUE, pour être justifié, le licenciement économique résulte de la suppression de l'emploi du salarié consécutive à des difficultés économiques ; qu'une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques ; que le conseil de prud'hommes avait retenu que le salarié n'avait pas été embauché exclusivement pour la commercialisation de produits Bluetooth low energy, que les difficultés de fabrication de ces produits étaient connues de l'employeur avant l'embauche du salarié et que les difficultés économiques alléguées lors du licenciement n'étaient pas plus avérées que la suppression de l'emploi du salarié puisque l'employeur avait embauché deux autres ingénieurs juste après ; que, pour infirmer le jugement, la cour d'appel a estimé que « la société Insight Sip justifie? la réduction des commandes du matériel Bluetooth Low Energy ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012, évolution qui était de nature à justifier la suppression de l'emploi commercial de [D] [G], quand bien même l'entreprise aurait-elle touché ainsi que l'objecte l'intimé une subvention publique importante en 2011 » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne caractérisent pas l'existence de difficultés économiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

3. ALORS en tout état de cause QUE n'est pas motivée la décision qui repose sur des affirmations générales et qui ne procède d'aucune analyse, même sommaire, des pièces produites ; que, pour retenir l'existence de difficultés économiques, la cour d'appel a relevé que « la société Insight Sip justifie par divers documents comptables, dont un dossier financier retraçant ses résultats (pièce 64) et les comptes des exercices 2012 et 2013 (pièces 18 et 19), la réduction des commandes du matériel Bluetooth low energy (pièce 20) ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012 » ; qu'en statuant ainsi par des affirmations générales – au seul visa de pièces qui ne font l'objet d'aucune analyse – la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4. ALORS QUE n'est pas motivée la décision qui repose sur des affirmations générales et qui ne procède d'aucune analyse, même sommaire, des pièces produites ; que la cour d'appel a relevé que les difficultés économiques étaient établies et que « la société Insight Sip [les] justifie par divers documents comptables, dont un dossier financier retraçant ses résultats (pièce 64) » ; que cette pièce n°64 énonce au contraire, que – de 2012 à 2013 – le chiffre d'affaires est passé de « 369 851 € à 573 501 € » (p. 18), que le total des produits d'exploitation est passé de « 892 812 € à 1 026 566 € » (p. 18) et que, si le « bénéfice comptable » est passé de « 48 421 € à 27 033 € », cette différence résulte d'une « dotation exceptionnelle aux amortissements ou provisions de 29 587 € » (p. 25-28), sachant que le résultat fiscal demeurait de « 57 247 € » (p. 34) ; qu'en affirmant de manière vague et non circonstanciée que les difficultés économiques de l'entreprise sont avérées, sans procéder à la moindre analyse de la pièce 64 pourtant visée – qui tend pourtant à démontrer le contraire – la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5. ALORS QUE n'est pas motivée la décision qui repose sur des affirmations générales et qui ne procède d'aucune analyse, même sommaire, des pièces produites ; que la cour d'appel a relevé que les difficultés économiques étaient établies notamment par « la réduction des commandes du matériel Bluetooth low energy (pièce 20) » ; qu'en statuant ainsi au seul visa de la pièce produite par l'employeur – laquelle, au surplus, est rédigée en langue étrangère – sans procéder à son analyse même sommaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6. ALORS QUE si le motif économique du licenciement doit s'apprécier à la date du licenciement, il peut être tenu compte d'éléments postérieurs pour cette appréciation ; que, dans ses écritures, le salarié faisait valoir que « les difficultés économiques alléguées par Insight Sip n'étaient ni réelles, ni sérieuses puisqu'il ressort de l'extrait Infogreffe de la société que celle-ci a procédé à une augmentation de capital dès 2013 et que son chiffre d'affaires est passé de 573 501 € en 2013 à 1 124 850 € en 2014 pour atteindre 1 989 126 € de chiffre d'affaires en 2016 – pièce 56 extrait Infogreffe d'Insight Sip » (conclusions p. 32) ; qu'en ne recherchant pas – comme elle y était pourtant invitée par les écritures du salarié et les éléments de preuve produits à leur appui – si les difficultés économiques alléguées par l'employeur avaient la moindre réalité ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

7. ALORS QU'est privé de cause réelle et sérieuse le licenciement économique qui résulte de la légèreté blâmable de l'employeur ; que, dans ses écritures, le salarié – embauché le 20 février et licencié le 21 novembre de la même année – faisait valoir que « l'employeur se prévaut des difficultés rencontrées par la société japonaise Taiyo Yuden – notamment du tsunami de Sendai, de l'accident nucléaire de Fukushima (mars 2011) et des inondations de Bangkok (octobre 2011) – pour justifier la suppression du poste de Monsieur [D] [G] – il convient de rappeler qu'au moment de l'embauche du salarié le 20 février 2012, la société Insight Sip avait connaissance de ces éléments et savait que la production des modules Bluetooth low energy n'avait pas été lancée – la Société Insight Sip a donc fait preuve de légèreté blâmable et ne saurait se prévaloir de ses propres manquements pour justifier le licenciement économique de Monsieur [D] [G] » le 21 novembre 2012 (conclusions p. 28) ; qu'en s'abstenant de rechercher – comme il lui était demandé – si l'employeur n'avait pas fait preuve de légèreté blâmable dans l'embauche du salarié le 20 février 2012, alors qu'il connaissait déjà la situation obérée de l'activité liée au Bluetooth low energy, et dans le licenciement subséquent du salarié le 21 novembre 2012, moins d'un an après, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

8. ALORS, subsidiairement, QUE, pour être justifié, le licenciement économique doit résulter de la suppression de l'emploi du salarié consécutive à des difficultés économiques, lesquelles doivent être établies par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ; que, pour infirmer le jugement ayant écarté l'existence d'une cause économique, la cour d'appel a estimé que « la société Insight Sip justifie par divers documents comptables, dont un dossier financier retraçant ses résultats (pièce 64) et les comptes des exercices 2012 et 2013 (pièces 18 et 19), la réduction des commandes du matériel Bluetooth low energy (pièce 20) ainsi que la dégradation préoccupante de sa situation financière en 2012, évolution qui était de nature à justifier la suppression de l'emploi commercial de [D] [G], quand bien même l'entreprise aurait-elle touché ainsi que l'objecte l'intimé une subvention publique importante en 2011 » ; qu'en statuant ainsi, sans mettre en évidence d'évolution significative d'au moins un indicateur économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le salarié de sa demande indemnitaire pour violation de la priorité de réembauche ;

AUX MOTIFS QUE M. [D] [G] reproche également à la société Insight sip un manquement à son obligation de reclassement, mais les documents produits ne permettent pas de constater que l'entreprise, employant moins de 11 salariés et dont M. [D] [G] était l'unique ingénieur commercial sous la responsabilité d'un directeur commercial (pièce 70), était en mesure de lui proposer en interne un poste de reclassement ; que si comme il est objecté deux ingénieurs ont été recrutés, l'un en septembre 2012 (M. [N]) et l'autre en septembre 2013 (M. [R]), l'appelante justifie qu'il s'agit de salariés affectés au département technique ayant une expérience et des compétences en matière de recherche et développement que M. [D] [G], ingénieur s'étant spécialisé dans le management et la fonction commerciale ainsi que le confirme son curriculum vitae (pièce 50), ne possédait manifestement pas ; qu'il sera également constaté qu'aucune pièce produite ne dément l'affirmation de l'employeur selon laquelle il n'appartient à aucun groupe ; qu'en l'état de ces constatations, il n'y pas lieu de considérer que la société Insight sip qui justifie, par ailleurs, avoir accompli des démarches et recherches de reclassement auprès de sociétés tierces qu'elle n'était pas légalement tenue d'effectuer (ses pièces 29 à 33), ait failli à son obligation de reclassement ; que la décision déférée ayant dit le licenciement économique de M. [D] [G] injustifié sera infirmée ;

1. ALORS QU' il incombe à l'employeur d'informer le salarié licencié pour motif économique qui a manifesté le désir d'user de la priorité de réembauche, de tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification ; qu'en cas de litige, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation en établissant soit qu'il a proposé les postes disponibles, soit en justifiant de l'absence de tels postes ; que, dans ses écritures, le salarié faisait valoir que « l'employeur prétend que les nouveaux postes à pourvoir n'étaient pas compatibles avec la qualification du salarié – pour ce faire, la Société Insight Sip indique que Monsieur [F] [R] a été engagé en qualité d'ingénieur conseil, et non en qualité d'ingénieur commercial, et que Monsieur [G] était un ingénieur généraliste, et qu'il ne disposait d'aucune compétence spécifique en matière d'électronique – or, le poste proposé à Monsieur [F] [R] pouvait parfaitement être pourvu par Monsieur [D] [G] dans la mesure où il est ingénieur spécialisé en électronique puisque titulaire d'un diplôme d'ingénieur décerné par l'école nationale supérieure d'électronique et de radioélectricité de [Localité 4] en 1996 (cf. pièce 38) » (conclusions p. 34) ; qu'en s'abstenant pourtant de d'examiner qu'elles étaient les compétences du salarié en matière de recherche et de développement compte tenu de sa formation et de son diplôme d'ingénieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-45 du code du travail ;

2. ALORS, subsidiairement, QUE la pièce n° 38 énonce que « l'école nationale supérieure d'électronique et de radioélectricité de [Localité 4] » a décerné le « diplôme d'ingénieur » au salarié ; qu'en affirmant que le salarié « ne disposait manifestement pas [?] d'une expérience et des compétences en matière de recherche et développement », la cour d'appel a violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3. ALORS, plus subsidiairement, QUE n'est pas motivée la décision qui ne procède d'aucune analyse, même sommaire, des pièces produites ; que, pour retenir que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de réembauche, en ne proposant pas deux postes pourvus par des ingénieurs après le licenciement du salarié, la cour d'appel a affirmé que celui-ci ne possédait manifestement pas les compétences en matière de recherche et développement ; qu'en statuant ainsi, sans procéder à la moindre analyse même sommaire du diplôme d'ingénieur du salarié pourtant régulièrement produit (pièce 38 – production), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le salarié de ses demandes indemnitaires pour défaut d'information sur la portabilité et perte de chance subséquente ;

AUX MOTIFS QUE l'intimé reproche à la société Insight Sip un défaut d'information sur la portabilité des droits à prévoyance lors du licenciement mais ne justifie concrètement d'aucune perte de droit à revenu de remplacement, ou d'une prise en charge de dépenses de santé au cours de la période de portabilité ; que la demande en dommages et intérêts ainsi non fondée sera rejetée ;

ALORS QUE le salarié faisait valoir qu'à la suite d'une altercation avec son employeur, il avait tenté de mettre fin à ses jours sur son lieu de travail, qu'il avait été contraint de déclarer lui-même cet accident de travail, dont l'origine professionnelle a été reconnue et que l'employeur avait refusé de lui fournir une attestation de salaire nécessaire en cas d'arrêt de travail supérieur à six mois (conclusions p. 2-4) ; qu'il chiffrait précisément, par des calculs détaillés, le montant des revenus de remplacement qu'il aurait dû percevoir en application des articles 6 et 8 de l'ANI du 27 mars 1997 relatif à la prévoyance, le montant des indemnités journalières de la sécurité sociale qu'il avait perçu et, par différence entre ces deux montants, l'étendue du préjudice qu'il avait subi (conclusions p. 24 §3 s.) ; que les calculs du salarié n'étaient au demeurant pas contestés par l'employeur ; qu'en énonçant que le salarié « ne justifie concrètement d'aucune perte de droit à revenu de remplacement », la cour d'appel n'a pas répondu au moyen des écritures du salarié et violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le salarié de sa demande en nullité du licenciement pour harcèlement moral et de ses demandes indemnitaires relatives au harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QU'il n'est versé aux débats aucun courriel, message ou correspondance de l'employeur pouvant établir que le salarié ait fait l'objet, avant son licenciement, de quelconques mesures ou décisions pouvant avoir une connotation harcelante? ; que le différend opposant le salarié et l'employeur quant à certains éléments de rémunération et congés payés, n'a lui-même donné lieu à aucune réclamation, demande ou discussion du salarié avant la rupture de son contrat de travail de sorte qu'il ne saurait être tenu pour un fait de harcèlement ; que la société Insight Sip évoque, en outre, de façon convaincante (ses conclusions page 7) quant à l'absence de détermination de la rémunération variable, de la difficulté qui s'est présentée pour déterminer des objectifs commerciaux en raison de l'arrêt de la production de produit Bluetooth low energy dont le salarié, ayant travaillé moins d'un an dans l'entreprise, était chargé ; qu'en l'état de ces constatations, prises dans leur ensemble, il n'y a pas lieu de retenir l'existence d'une situation de harcèlement au sens de l'article 1152-1 du code du travail » ;

1. ALORS QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que, pour débouter le salarié de ses demandes au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a successivement énoncé que n'était versé aux débats aucun courriel, message ou correspondance de l'employeur pouvant établir que le salarié ait fait l'objet, avant son licenciement, de mesures ou de décisions pouvant avoir une connotation harcelante, que le différend opposant le salarié et l'employeur quant à certains éléments de rémunération et congés payés, n'avait donné lieu à aucune réclamation, demande ou discussion du salarié avant la rupture de son contrat de travail, que la société Insight Sip évoquait, en outre, de façon convaincante, quant à l'absence de détermination de la rémunération variable, la difficulté qui s'était présentée pour déterminer des objectifs commerciaux en raison de l'arrêt de la production du produit Bluetooth low energy dont le salarié était chargé ; qu'elle a ajouté « qu'en l'état de ces constatations, prises dans leur ensemble, il n'y a pas lieu de retenir l'existence d'une situation de harcèlement au sens de l'article 1152-1 du code du travail » (arrêt, p. 7) ; qu'en procédant à une appréciation d'ensemble des éléments apportés par le salarié et par l'employeur, cependant qu'il lui appartenait d'examiner, d'abord, si le salarié parvenait à établir des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, le cas échéant, si l'employeur prouvait que les agissements invoqués n'étaient pas constitutifs de harcèlement et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel qui ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son office, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154- 1 du code du travail ;

2. ALORS QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que dans un moyen entier de ses écritures, le salarié faisait expressément valoir « qu'il convient à toutes fins utiles de rappeler les pressions que Monsieur [G] a subies notamment sur la période de la fin de son contrat, qui l'ont conduit à une tentative de suicide le 28 janvier 2013 sur son lieu de travail – pour rappel, à compter du mois d'octobre 2012 l'accès au répertoire et aux emails du principal client de Monsieur [G] a été supprimé par la direction sans que le salarié n'en soit préalablement informé (?) or, la Société Insight Sip ne produit aucune pièce justificative de ce que cette limitation d'accès résulterait d'une décision d'organisation relevant du pouvoir général du chef d'entreprise et ce, alors même que le salarié n'a jamais été informé préalablement de la limitation d'accès au répertoire et mails de son principal client – il est donc incontestable que les agissements répétés de la Société Insight Sip ont eu pour effet une dégradation de conditions de travail de Monsieur [G], laquelle a également conduit à une altération de sa santé physique et mentale (Pièce 47 : notification d'examen conjoint art. L324-1 CSS du 9/07/13 Pièce 48 : notification prise en charge 100 % affectation longue durée du 4/02/14 Pièce 49 : décision de la MDPH du 19/05/15 Pièce 50 : décision MDPH du 25/05/16 Pièce 51 : décision MDPH du 18/04/17 Pièce 52 : décision MDPH du 21/11/17 Pièce 53 : attestation Dr. [O] et Dr. [X], CHU [Localité 6] Pièce 54 : protocole de soin du Dr. [W] du 5/10/18 » (conclusions, p. 36 et 37) ; qu'en s'abstenant d'examiner les raisons pour lesquelles le salarié avait fait une tentative de suicide sur son lieu de travail et celles pour lesquelles l'employeur l'avait privé d'accès à sa messagerie, et si ces circonstances ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3. ALORS QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que dans un moyen entier de ses écritures, le salarié faisait expressément valoir « qu'il convient à toutes fins utiles de rappeler les pressions que Monsieur [G] a subies notamment sur la période de la fin de son contrat, qui l'ont conduit à une tentative de suicide le 28 janvier 2013 sur son lieu de travail – pour rappel, à compter du mois d'octobre 2012 l'accès au répertoire et aux emails du principal client de Monsieur [G] a été supprimé par la direction sans que le salarié n'en soit préalablement informé (?) or, la Société Insight Sip ne produit aucune pièce justificative de ce que cette limitation d'accès résulterait d'une décision d'organisation relevant du pouvoir général du chef d'entreprise et ce, alors même que le salarié n'a jamais été informé préalablement de la limitation d'accès au répertoire et mails de son principal client – il est donc incontestable que les agissements répétés de la Société Insight Sip ont eu pour effet une dégradation de conditions de travail de Monsieur [G], laquelle a également conduit à une altération de sa santé physique et mentale (Pièce 47 : notification d'examen conjoint art. L324-1 CSS du 9/07/13 Pièce 48 : notification prise en charge 100 % affectation longue durée du 4/02/14 Pièce 49 : décision de la MDPH du 19/05/15 Pièce 50 : décision MDPH du 25/05/16 Pièce 51 : décision MDPH du 18/04/17 Pièce 52 : décision MDPH du 21/11/17 Pièce 53 : attestation Dr. [O] et Dr. [X], CHU [Localité 6] Pièce 54 : protocole de soin du Dr. [W] du 5/10/18 » (conclusions, p. 36 et 37) ; qu'en s'abstenant d'examiner si les documents médicaux régulièrement produits permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-10762
Date de la décision : 10/11/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 nov. 2021, pourvoi n°20-10762


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Krivine et Viaud

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.10762
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award