LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
NL4
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 octobre 2021
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 642 F-D
Pourvoi n° U 20-12.816
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 OCTOBRE 2021
Mme [E] [O], épouse [K], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 20-12.816 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2019 par la cour d'appel de Nancy (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société CA Consumer Finance, anciennement dénommée Sofinco, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [O], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société CA Consumer Finance, après débats en l'audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 12 décembre 2019), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 6 février 2019, pourvoi n° 17-27.513), Mme [O] (l'emprunteur) a, le 19 janvier 2012, à la suite d'un démarchage à domicile, acquis une installation photovoltaïque et un chauffe-eau solaire auprès de la société Mydom (le vendeur). L'emprunteur a souscrit, le même jour, auprès de la société Sofinco, aux droits de laquelle se trouve la société CA Consumer finance (la banque) un prêt destiné à les financer.
2. Le 24 février 2014, l'emprunteur, soutenant que des irrégularités affectaient le bon de commande, que l'installation n'avait pas été raccordée au réseau ERDF et que le certificat de conformité Consuel n'avait pas été délivré, a assigné le vendeur et la banque en nullité des contrats principal et de crédit affecté et en privation de la créance de restitution du capital prêté. Le vendeur a été placé en liquidation judiciaire.
3. Le contrat de vente et le contrat de crédit ont été résolus.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque la somme de 27 000 euros au titre du capital emprunté avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 2019, alors « que commet une faute le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal ; qu'en se bornant à considérer, pour retenir que la banque n'avait commis aucune faute dans la délivrance des fonds à l'installateur de panneaux photovoltaïques de nature à la priver du remboursement du montant du prêt affecté, que Mme [O], avait signé deux fiches livraison/installation suivant lesquelles la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques lui avaient donné entière satisfaction, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le vendeur ne s'était pas engagé à effectuer le raccordement au réseau ERDF et les démarches nécessaires à l'obtention d'un certificat de conformité par Consuel ni si la société n'avait pas manqué à ces obligations, de sorte que la délivrance des fonds par la banque qui n'a pas vérifié l'accomplissement de ses obligations, était prématurée en dépit des fiches de livraison/installation signées par la cliente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 14 mars 2016, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel a constaté que la banque produisait aux débats deux fiches de livraison/installation signées le 29 février 2012 par l'emprunteur mentionnant qu'il reconnaissait avoir reçu la visite du responsable technique qui avait procédé à la livraison et l'installation du kit solaire photovoltaïque/ballon solaire thermique, conformément à la commande passée auprès du vendeur et que la livraison et l'installation lui avaient donné entière satisfaction.
6. Sans être tenue de procéder à la recherche prétendument omise, en l'absence de mention du bon de commande relative à l'engagement du vendeur d'effectuer le raccordement et les démarches évoquées, dont la banque aurait eu connaissance, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de condamner l'emprunteur à restituer à la banque le capital emprunté.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [O] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.
Le conseiller referendaire rapporteur le president
Le greffier de chambre
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour Mme [O]
Mme [K] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 27 000 € au titre du capital emprunté et des intérêts au taux légal y afférant à compter du 6 février 2019 ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 311-32 du code de la consommation (dans sa rédaction en vigueur au 19 janvier 2012) dispose que le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé ; qu'en l'espèce, le contrat de vente des installations solaires conclu le 19 janvier 2012 entre la société Mydom et Mme [K] a été résolu par arrêt de la cour d'appel de Colmar en date du 11 septembre 2017 ; que cette résolution est désormais définitive puisque cette disposition de l'arrêt de la cour d'appel de Colmar n'a pas été cassé par la Cour de cassation ; que dès lors, il convient de prononcer la résolution du contrat de crédit affecté conclu le 19 janvier 2012 entre la société Sofinco et Mme [K] ; que lorsque le contrat de prêt affecté est résolu, l'emprunteur est tenu de restituer le capital prêté, sauf si le prêteur a commis une faute ; qu'en l'occurrence, Mme [K] reproche au prêteur d'avoir eu des "liens extrêmement étroits" avec la société Mydom et d'avoir "fait preuve d'une légèreté coupable vis-à-vis d'un tel partenaire", alors même que le marché du photovoltaïque se développait de manière "quelque peu frauduleuse" (sic), notamment dans le Haut-Rhin ; que la faute susceptible de libérer Mme [K] de toute obligation de remboursement doit consister en un agissement ou en une omission précise, clairement établie, ce qui n'est pas le cas de ces appréciations vagues, générales et subjectives ; que Mme [K] reproche ensuite au prêteur de ne pas avoir effectué les vérifications nécessaires avant le déblocage des fonds, en invoquant l'absence de Consuel ; que le contrat de crédit signé par Mme [K] stipulait que le montant du crédit, soit 27 000 euros, "est versé au vendeur dès le 8èmejour à compter de l'acceptation de l'emprunteur, sous réserve de la livraison et/ou de l'installation éventuelle conforme à la commande ou de la fourniture de la prestation" ; qu'or, la société CA Consumer Finance produit aux débats deux fiches de livraison/installation signées le 29 février 2012 par Mme [K] (une pour l'installation photovoltaïque et l'autre pour le chauffe-eau solaire)
suivant lesquelles cette dernière "reconnaît avoir reçu ce jour la visite du responsable technique qui a procédé à la livraison/installation du kit solaire photovoltaïque/ballon solaire thermique conformément à la commande passée auprès de l'entreprise Mydom. La livraison et l'installation nous ont donné entière satisfaction" ; que Mme [K] ne conteste pas avoir signé ces deux bons d'installation (elle les produit d'ailleurs elle-même dans ses pièces) ; que compte-tenu du contenu de ces bons d'installation remis au prêteur, il ne peut être reproché à ce dernier d'avoir débloqué le capital prématurément ; qu'il ne peut non plus lui être reproché de ne pas avoir été assez exigeant sur le contrôle de la prestation réalisée, puisque Mme [K] attestait elle-même sur ces deux documents avoir reçu "entière satisfaction" ; que par conséquent, aucune faute n'est démontrée à l'encontre du prêteur et Mme [K] doit être condamnée à lui rembourser le capital emprunté, soit la somme de 27 000 euros (la circonstance que ces fonds aient été virés directement à la société Mydom étant sans effet, puisque ce virement a été fait par le prêteur au nom et pour le compte de l'emprunteur/acquéreur) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE s'agissant de la négligence reprochée à la SA CA CONSUMER FINANCE en ce qu'elle aurait débloqué les fonds entre les mains du vendeur sans s'enquérir de la livraison effective , il apparaît à la lecture des pièces du dossier, que Madame [K] a signé deux documents intitulés "fiche de livraison-fiche d'installation" datés du 29/02/2012 et concernant les panneaux solaires et le ballon solaire thermique ; que les documents précisent que la livraisoninstallation a donné entière satisfaction ; que c'est à leur lumière que la banque a payé sans qu'il puisse lui être reproché quelconques manquements ;
ALORS QUE commet une faute le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal ; qu'en se bornant à considérer, pour retenir que la banque n'avait commis aucune faute dans la délivrance des fonds à l'installateur de panneaux photovoltaïques de nature à la priver du remboursement du montant du prêt affecté, que Mme [K], avait signé deux fiches livraison/installation suivant lesquelles la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques lui avaient donné entière satisfaction (arrêt, p. 5, al. 1), sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Mydom ne s'était pas engagée à effectuer le raccordement au réseau ERDF et les démarches nécessaires à l'obtention d'un certificat de conformité par Consuel ni si la société n'avait pas manqué à ces obligations, de sorte que la délivrance des fonds par la banque qui n'a pas vérifié l'accomplissement de ses boligations, était prématurée en dépit des fiches de livraison/installation signées par la cliente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 14 mars 2016, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.